C'est également dans notre intérêt que cette histoire ne s'ébruite pas !
Je fronce les sourcils. Je ne suis pas sûr de vouloir comprendre ce qu'il veut dire par là, pourtant je ne peux pas m'empêcher de demander:
_ Qu'est ce qui est censé se passer sans douleur, et ce serait pour quoi faire l'aide médicalisée ?
Il rougit un peu, visiblement très gêné.
_Notre alpha a besoin de ton corps pour ce soigner, balance Loyd à sa place. Après tout tu l'as utilisé, ça paraît normal que tu payes de ta personne pour le remercier ! Nous veillerons à ce qu'il ne s'énerve pas, donc tu ne risqueras rien.
Cela a le mérite d'être horriblement claire. Je ne comprends pas comment ils peuvent me faire une telle proposition. J'ai l'impression de ne même pas avoir la valeur un animal de compagnie. Encore plus mal à l'aise que tout à l'heure, Chris se racle la gorge avant de reprendre:
_ Ne vous inquiétez pas, vous n'avez pas à être consciente au cours du processus. Nous avons une branche pharmaceutique de qualité. Nous n'aurions pas de mal à trouver un produit qui vous fera dormir sans effet d'accoutumance évidemment... M'explique-t-il, en choisissant soigneusement ses mots, tout en étant un peu tremblant. Quand notre Alpha aura complètement repris le contrôle de lui même, vous repartirez chez vous, sans la moindre séquelle mais avec votre compte en banque plein... Vous pourrez alors reprendre vos activités là où vous les aviez laissées...
Je le regarde avec les yeux écarquillés. Il est en train de me proposer de me droguer durant plusieurs semaines pendant lesquels son patron jouera tranquillement avec mon corps ? Il est sérieux ?
J'explose d'un rire incontrôlable : c'est trop ! C'est complètement dingue ! Je vais craquer !
Mon loup est passé du grognements aux gémissements, devant mon hystérie que je ne parviens plus à juguler. Je continue de glousser un bon moment comme une folle, les larmes au yeux.
Je rigole tellement que même Chris et Loyd, qu'il a relâché, sont en train de sourire en se demandant ce qu'il se passe.
Au fin fond de ma folie, je prends une décision simple et rapide : je ne veux pas finir comme ça. Je ne serai pas un morceau de viande qu'un loup, un vampire où un humain pourra brutaliser quand il le souhaite ! Quelque soit le prix que ça me coûte, je vais sortir de là.
Avec détermination, j'agrippe la poignée attachée au ciel de toit de la voiture, me calmant instantanément, tout en me préparant mentalement à m'expulser de la voiture alors que l'on roule encore assez vite, d'une simple respiration profonde. Je regarde ensuite Chris, bien droit dans les yeux.
_ Allez vous faire foutre ! Lancais-je devant leur regard ébahi, puis je donne un grand coup de rein dans la portière qui s'ouvre à la volée.
Le véhicule qui passait à côté de nous l'arrache au passage en la percutant dans un bruit atroce. Il y a des crissement de pneu au moment où notre voiture fait une embardée sur la droite. J'en profite pour échapper à la poigne de fer de l'alpha, tétanisé par ce qui est en train de se produire. Avec la force de l'accident, je me retrouve propulsée sur le toit uniquement accrochée à la voiture par la poignée en haut de la portière.
En un instant, comme si tout ralentissait, je vois le carnage que j'ai provoqué. Le véhicule qui a emporté la porte c'est déporté sur la droite nous coupant la route en nous obligeant à quitter la chaussée traversant maintenant les autres voies. Pendant ce temps les automobilistes autour ce sont mis à freiner de manière brutale, provoquant des sur-accidents, le tout se transformant en carambolage géant. Les yeux écarquillés, je n'ai pas le temps de me protéger quand notre véhicule percute la glissière de sécurité, me projetant par dessus le capot avant que je n'atterrisse contre le bitume sur la voie d'en face.
Dans un réflexe de survie, alors que j'ai la chance de ne pas m'être assommé dans le choc, j'ai juste le temps de rouler sur moi-même en arrière avant qu'un camion ne m'écrase. Je me relève tant bien que mal, me mettant aussitôt à courir au milieu des véhicules qui freinent à leur tour en s'encastrant les uns dans les autres, bouchant définitivement toute la rue. Ça klaxonne, ça hurle, mais en cet instant je n'en ai rien a faire, je n'ai qu'une seule idée en tête fuir le plus loin possible.
Pour le moment je me fais l'effet d'un lapin tentant de semer son prédateur : chance de succès 0.
Je regarde autour de moi en quête d'une solution, jusqu'à ce que mes yeux accrochent une voiture jaune. Le chauffeur me regardant à travers le par brise, avec de grands yeux choqué. J'ai peut-être encore une chance si je ne suis pas à pied face au canidé que je commence à entendre grogner derrière moi.
Je fonce sur le taxi. La femme qui vient de le prendre fini de payer sa course. Je la pousse sans délicatesse pour ouvrir la portière, m'engouffrant à l'intérieur, craignant de voir un loup pervers débarquer à tout moment.
Le conducteur se retourne vers moi avec des yeux ronds. Je suis pieds nus et mon Sweat est déchiré à cause de l'atterrissage violent sur l'asphalte, sans compter que je viens de créer un énorme accident.
_Désolé gamine, mais j'ai fini ma journée ! Me dit-il nerveusement.
_Je vous en prie ! le supplié-je misérablement. Je veux juste aller loin d'ici, je vous donnerai le double de la course ! Par pitié démarrez !
_ C'est à dire, que même ...
Des hurlements de loup retentissent maintenant clairement dans la rue. Ils ne me lâcheront pas comme ça, sans lui je suis foutu. Je couvre mes oreilles en me ratatinant sur la banquette, comme si ça pouvait me cacher face à une meute de loups garous.
_ Je vous en prie... Je ne veux pas qu'il m'attrape par pitié ! Lui lancé-je d'une voix désespérée.
L'homme me regarde un instant, comme s'il jaugeait la situation, puis un nouvel hurlement retenti le décidant à se retourner afin d'enfoncer l'accélérateur, me plaquant contre le dossier. Je m'accroche au cuir autour de moi, priant pour que la voiture aille plus vite que ceux qui me courent après.
Je suis roulée en boule sur la banquette arrière du taxi, les sens aux aguets m'attendant à ce qu'un monstre brise la vitre arrière pour me récupérer. Cependant, ça fait un moment que l'on n'entend plus les hurlements derrière nous.
Me sentant un peu ridicule, tandis que le chauffeur me lance des regards inquiet dans son rétroviseur intérieur, je me redresse tant bien que mal. À Peine assise, un mal de crâne monstrueux vient me saisir, me faisant grogner, toutefois quand je tente de lever mon bras pour me masser les tempes, je ressent une vive douleurs. Serrant les dents, je me sers de mon autre main pour relever la manche de mon pull, observant ma peau violacée peu ragoûtante, accompagnée d'un gonflement inquiétant. S'il n'est pas brisé, il n'en est tout de même pas loin. Je ne m'en suis pas rendu compte en fuyant car l'adrénaline bloquait la souffrance. Malheureusement je ne peux pas prendre le temps d'aller à l'hôpital, surtout que c'est l'un des premiers endroits où on ira me chercher. Dans une solution de fortune, afin de me ménager, je le garde plié contre moi avec l'espoir de le protéger.
_ Soirée compliquée ? Me demande le chauffeur au bout d'un moment alors que j'essaie de trouver une position pas trop douloureuse.
Je ricane, à bout de nerf.
_ On peut dire ça, en effet !
_Tu leur as fait quoi pour qu'ils te chassent comme ça ? Sans indiscrétion...
Bonne question. Je réponds en réfléchissant en même temps.
_ J'ai croisée la route de l'un d'eux et depuis c'est juste une catastrophe...
Il grogne, en me jetant un regard de sympathie.
_ Les non-humains, moins on les croisent mieux on se portent !
Je pose ma tête sur la vitre glacée. Ça fait du bien. Je finis par lui demander :
_ Vous croyez qu'ils peuvent me retrouver ?
_Les loups garous sont de sacrés chasseurs ! Tu ferais bien de changer de pays si tu veux mon avis !
Je réfléchis une minute avant de reprendre.
_Vous pouvez m'amener à une gare routière ?
_ Pas de problème, ma belle ! C'est la meilleure solution !
Je hoche la tête, tandis qu'il roule sereinement. Il a l'air d'être quelqu'un avec la tête sur les épaules. Une cinquantaine d'années, chauve, ayant la photo de ses enfants placardés partout à l'avant de son taxi.
Je prends une grande inspiration en commençant la conversation.
_Vous connaissez bien les loups garous ?
_ Pas plus que les autres non-humains, pourquoi ? Me répond-il en haussant les épaules.
_J'ai toujours habitée dans le district 5, au nord de Mapple road...
_Le quartier humain...
Je hoche la tête, devant son air entendu. Il sait que je n'ai jamais eut l'occasion de fréquenter des non-humains là où je vivait.
_Dès que je le regarde mon cerveau est comme engourdi... Repris-je mal à l'aise. Je... J'ai l'impression que je ne devrais pas bouger, que tout va bien et j'ai envie de me jeter dans ses bras...
_C'est des monstres, ma belle ! Ils font tout pour nous pousser à aller vers eux, ils chassent, et nous on n'est les proies! Si tu le recroises, fait tout pour ne pas le regarder en face !
Il prend le temps de réajuster une photo avant de m'expliquer.
_Les vampires balancent aussi leur phéromones partout comme ça ! Ma femme c'est fait avoir par un de ses suceurs de sang ! Vingt ans de mariage, deux enfants et elle c'est barré avec un de ses dents pointus, du jour au lendemain ! Après autant de temps, personne ne me fera croire qu'elle est partie de son plein gré ! On ne peut rien faire, la nature ne nous a pas doté des bonnes armes
Il se passe quelques minutes avant que je n'ose reprendre la parole.
_Votre femme... vous avez des nouvelles d'elle ?
_ Elle est morte... Ce fichu suceur de sang à été trop loin avec elle. Je l'ai appris quand la brigade de conciliation est venue à la maison pour le dédommagement. Comme si de l'argent pouvait remplacer ma petite Laure...
Je cligne des yeux, en essayant d'absorber tout ça.
_Pardon... Je... Hum... Toutes mes condoléances... Souffla-je penaude.
Il hausse les épaules, en caressant d'une main la photo de ses enfants. J'ai l'impression d'abuser mais je sens qu'il pourrait me fournir des informations dont je pourrais avoir besoin plus tard.
_Excusez moi.... Vous avez dit la brigade de conciliation ? Demandé-je en me creusant la cervelle en essayant de me rappeler ce que c'est.
Je connais beaucoup de brigade de police, à cause de mon beau père, mais celle là ne me dit vraiment rien.
_ C'est la brigade de médiateurs pour faciliter notre entente entre race. Ils sont censé être neutre, sauf qu'en vrai ces bâtards sont à la soldes des vampires et des loups garous ! On ne peut pas leur faire confiance !
Je hoche la tête tout en serrant mon sac contre moi, comme si la fameuse brigade pouvait débarquer d'un moment à l'autre.
La voiture fini par s'arrêter devant une gare routière à la périphérie de New-York. Je lui tends ma carte bleu, toutefois il la refuse, à la place il me donne une bouteille de parfum ainsi qu'un taser en me disant :
_ La course est pour moi ma belle ! J'espère que tu arrivera à t'en sortir ! Le parfum c'est pour camoufler ton odeur, et le taser. Enfin tu sais pourquoi... Si ça tourne mal...
Je hoche la tête une nouvelle fois en le remerciant, tout en prenant les deux objets. Je ferme ensuite la portière derrière moi, enfile mon sac à dos puis j'essaye de marcher aussi calmement que possible vers la gare routière. La bonne nouvelle c'est que les bus partent et arrivent normalement: je ne vois aucun mouvement suspect. Pas de loups en chassent où d'unités de police véreuses prêtent à m'attraper. Néanmoins, je garde ma capuche baissée en espérant passer inaperçu.
Je rentre rapidement, allant vers les toilettes de l'entrée. Une fois arrivée, dès que j'ai fini de vérifier que j'étais seule, je vide la bouteille de parfum sur moi. Debout devant les lavabos, dégoulinant de l'eau de toilette bon marché, je prend un instant pour me regarder dans la glace : on dirait un zombie, surtout avec mes affaires déchirées ainsi que mes grosses cernes et ma peau d'une pâleur cadavérique.
Je m'asperge d'un peu d'eau sur le visage, sans grand espoir de me donner un visage vraiment humain, avant d'enfiler une veste pour cacher mon pull abîmé. Prenant une grande inspiration, je rentre ma tête dans mes épaules puis je sort enfin de ma zone de replis. Hésitante, dans l'encadrement de la porte, je regarde dans le hall de gare, il n'y a cependant que quelques voyageurs qui dorment à moitié sur leurs sièges en attendant leur ligne. Aucune agitation suspecte ne vient troubler le calme de l'endroit.
Je tire un peu sur mon pull pour l'ajuster, puis je décide enfin de m'avancer vers le guichet en baissant la tête. Je tente de ne pas paraître trop suspecte, mais c'est compliqué, surtout sans chaussures. Heureusement, les voyageurs sont trop occupés par leur propre vie pour s'inquiéter de la mienne. A l'aide de quelques mots laconiques je prend un aller simple pour la frontière canadienne tandis que la caissière n'a pas lever une seule fois la tête de son ordinateur. Je me détends à mesure que le temps passe, voyant que personne n'essaie de m'attraper ou de me ralentir.
Au final, j'ai pris un bus qui fera quelques arrêts car je n'ai trouvée aucune ligne direct. Le plus important, c'est que je serai parti dans trente minutes. Mon cauchemar va donc bientôt prendre fin.