**** Miracle Ayodélé BOLADJI ****
Je me réveille et constate que je ne suis pas dans le magasin où je dors habituellement. Je referme les yeux et les ouvres puis balaie la chambre du regard. Je me rends compte que je suis dans la chambre d'Ivana. Je me demande ce que je fais dans sa chambre quand les événements d'hier nuit me revinrent peu à peu. Je me rappelle la phrase de ma grand-mère et mes larmes commencent à sortir toutes seules.
Ivana : tu es réveillée ?
Moi : tournant la tête vers elle en essuyant mes larmes. Oui. Bonjour. Je la salue en souriant faiblement.
Elle : me serrant dans ses bras. Tu nous as fait peur hier. Se détachant de moi. Le temps que tu te brosses, je vais aller appeler maman. Je t'ai laissé une brosse à dent neuve sur le lavabo.
Moi : merci.
Ivana : je t'en prie ma sœur. Dit-elle en m'aidant à me lever du lit.
Elle sort de la Chambre et moi je me dirige sous la douche. Après avoir brossée les dents, je profite pour prendre une douche même si mes plaies me font horriblement mal.
Depuis quatre ans, c'est la première fois que je me douche dans une vraie salle de bain digne de ce nom. C'est derrière la cuisine de ma grand-mère que je prends mon bain.
Quand je reviens dans la chambre, je trouve un haut et un short posé sur le lit avec une nouvelle serviette. Je m'essuie, m'habille puis sors de la chambre. Je trouve la maman d'Ivana au salon.
Moi : bonjour maman.
Elle : bonjour ma fille. Comment te sens-tu ce matin ?
Moi : je vais bien maman. Mais j'ai les maux de tête.
Elle : viens t'asseoir. Dit-elle en tapotant la place vide qui est à côté d'elle. Avec la blessure que tu as au front, c'est normal que tu aies les maux de tête. Tu vas prendre ton petit déjeuner avant que je te donne un produit pour calmer ton mal de tête.
Moi : merci pour tout maman.
Elle : tu n'as pas à me remercier ma fille. Va rejoindre ton amie dans la salle à manger. C'est toi qu'elle attend pour prendre son petit déjeuner.
Je ne me fais pas prier et vais la rejoindre.
Moi : coucou ! Je suis là.
Ivana : ok. Tout est prêt. Sers-toi à volonté. Tu es chez toi. Donc met-toi à l'aise.
Moi : merci.
Ivana : je t'en prie.
Moi : dis-moi, comment avez-vous su que quelque chose se passait chez nous hier nuit ?
Ivana : je n'en savais rien. C'est maman qui est venue me réveiller et m'a demandé de tendre l'oreille et de lui confirmer si c'est bien toi qui es entrain d'appeler à l'aide. Tu criais et frappais sur une porte à entendre le bruit et tu appelais ta grand-mère à l'aide. C'est quand on était sûr que c'est toi, qu'on a décidé de venir voir ce qui se passait. Tu sais que la voix porte la nuit non ?
Moi : oui.
Ivana : les voisins aussi t'ont entendu crier.
Moi : merci pour tout.
Façon elle m'a toisée, je n'ai pas pu retenir mon rire. Je ne sais pas ce que Ivana à contre le mot merci. Elle déteste qu'on la remercie après t'avoir rendu un service. Moi je suis incapable de ne pas remercier quelqu'un qui m'a prêté main forte dans une quelconque situation. C'est à propos de ça qu'on se chamaille souvent. Cette fille et sa famille sont mes anges gardiens.
Leur servante m'apporte deux comprimés de la part de ma seconde mère que je prends à la fin du repas. Après le petit déjeuner, on retourne au salon retrouver sa mère. Dès que nous nous asseyons, elle éteint la télé et porte son regard sur moi.
Maman Ivana : ma fille, j'aimerais que tu me racontes ce qui s'est passé hier nuit chez toi. Mais, de grâce, ne me cache rien. Ne me ment pas non plus. Sinon, je ne pourrai vraiment t'aider.
Je prends une grande inspiration et me lance dans le récit de ma vie merdique depuis la mort de mon père jusqu'à la scène d'hier nuit. Je lui raconte tout, et dans les moindres détails. Quand j'arrive à la partie où on m'a servi la réponse qui m'a fait perdre tout moyen, elle s'étonne et me repose la question.
Maman Ivana : attend, elle dit que c'est parce que tu es née qu'elle te maltraite ?
Moi : oui.
Maman Ivana : c'est quoi cette histoire ? Ahi ! Elle se questionne en me regardant comme quelqu'un qui vient de dire la bêtise du siècle. Elle soupir et continue.
Maman Ivana : donc tu lui avais déjà parlé de tes cauchemars et elle ne t'a pas cru ?
Moi : oui.
Maman Ivana : c'est après le cauchemar d'hier nuit que tu as eu ces griffures au visage et aux bras dis-tu ?
Moi : oui.
Elle reste silencieuse quelques minutes.
Maman Ivana : ta mère est où ?
Moi : elle est au sud.
Maman Ivana : tu es en contact avec elle ?
Moi : oui.
Maman Ivana : tu lui as parlé des différents cauchemars que tu fais
?
Moi : non.
Maman Ivana : mais pourquoi ? On ne garde pas ces genres de chose pour soi. C'est toujours bien d'en parler à quelqu'un, surtout à sa mère. Pourquoi tu ne lui as rien dit ?
Moi : parce qu'elle à beaucoup de soucis là-bas. Si elle était au courant, elle serait déjà venue me récupérer. Alors qu'elle a déjà du mal à nourrir ma sœur et mon frère.
Maman Ivana : qu'est-ce que tu en sais ? Ce n'est pas à toi d'en décider, mais ta mère, oui. Tu as déjà entendu qu'un pauvre à nourrir ses enfants avec du sable ? Ou bien tu aimes ce que tu subis ?
Moi : non.
Maman Ivana : alors ? S'il y en a pour un il y aura toujours pour deux. Dieu n'oublie personne Mira.
Moi : mais, je n'ai pas le choix maman. Mes larmes recommencent à couler toutes seules. En étant ici j'ai la chance d'aller à l'école, d'obtenir mes diplômes, d'avoir un bon boulot plus tard pour prendre soin de ma mère, ma petite sœur et mon petit frère. Les entendre salir le nom de ma mère au quotidien et nous traiter de ratés me fait mal maman. Je ne vais pas les laisser avoir raison de nous. Je ne sais pas si je pourrai continuer les études une fois chez ma mère. C'est la raison pour laquelle je ne lui dis rien.
Maman Ivana : le fait d'aller à l'école, de faire des grandes études, ne garantit pas un avenir certain à qui que ce soit. Tout le monde n'est pas destiné à passer par le chemin des études pour être riche. Dieu voit tout ce que tu subis et sait comment te révéler au-delà de tes espérances. Si c'est que, une fois chez ta mère, tu ne pourras pas continuer tes études, crois-moi, Dieu t'ouvrira d'autres portes. Il sait ce qui est bon pour chacun et ne laisse ses enfants dans la souffrance éternelle. Fais confiance à Dieu et tu verras ses miracles s'opérer dans ta vie.
Moi : d'accord maman.
Maman Ivana : C'est quand la dernière fois que tu as vu ta mère ?
Moi : à l'enterrement de mon père.
Maman Ivana : Elle ne vient jamais te voir ?
Moi : elle n'est jamais venue. Faute de moyen et pour des raisons de santé. Mais, on s'appelle de temps en temps.
Maman Ivana : tu as quel âge ma fille ?
Moi : 15 ans.
Maman Ivana : tu n'es plus un enfant Mira. Il faut que tu saches que ces cauchemars que tu fais ne sont pas simples. Ce sont de mauvaises personnes qui veulent te faire du mal. Il va falloir que tu commences par prier tous les soirs avant de dormir. D'ailleurs est ce que tu vas à l'église ?
Moi : non. Je ne vais plus à l'église, mais je prie.
Maman Ivana : d'accord. Mais il va falloir prier plus souvent et avec foi. Un instant. Je te reviens.
Elle se lève et va dans sa chambre, d'où elle ramène trois livrets qu'elle me remet.
Maman Ivana : Ces trois livrets que tu tiens en mains, sont des livrets de prières de protection contre le mauvais œil et des prières de combats.
Moi : d'accord.
Maman Ivana : Toutes les nuits, après avoir faits tes prières habituelles, tu vas lire dans le premier livret de la page 3, à la page 5. Le deuxième livret, les 5 premiers pages. Le troisième, la dernière page.
Moi : d'accord. Merci maman.
Maman Ivana. Je t'en prie. N'oublie jamais de prier quoi qu'en soit la fatigue. Ne dis pas que les prières sont trop longues ou quoi que ce soit et raté de prier ne serait-ce qu'une seule fois à partir d'aujourd'hui. Prie avec ferveur et foi.
Moi : d'accord maman.
Maman Ivana : Ma fille, il faut que tu saches qu'il n'y a aucune force plus puissante que celle de Dieu. Je te conseille de commencer à aller à l'église tous les dimanches. Il faut commencer la prière dès ce soir et demain matin tu viendras me dire si tu as encore fait de cauchemars.
Moi : d'accord.
Maman Ivana : Et un conseil, cache ces livrets pour que personne dans ta maison ne les voit. D'accord ?
Moi : c'est compris. Merci beaucoup maman.
Maman Ivana : je t'en prie ma fille. Une dernière chose, il faut appeler ta mère et tout lui raconter. Elle doit savoir tout ce que tu m'as raconté tout à l'heure. Ne lui cache plus rien à partir d'aujourd'hui. Tu ne peux pas garder tout ça pour toi. Ce n'est pas bien. C'est dangereux pour toi. D'accord ?
Moi : oui maman.
Maman Ivana : si tu as besoin de quoi que ce soit, vient m'en parler. Ou parle à ton amie.
Moi : d'accord maman.
Maman Ivana : Le soir, je vais envoyer Ivana t'apporter certains produits qui vont atténuer tes douleurs et vite cicatriser tes plaies.
Moi : d'accord.
Maman Ivana : Maintenant lève-toi. Je vais te raccompagner à la maison.
Nous sortons tous les deux de la chambre et nous nous rendons chez ma grand-mère. Nous la retrouvons assise sur sa terrasse entrain de trier du maïs.
Maman Ivana : bonsoir mémé.
Mémé : avec son faux sourire. Bonsoir maman pharmacie. C'est comme ça elle appelle maman Ivana parce qu'elle a des pharmacies dans la ville. Tu l'as enfin ramené. C'est une grosse paresseuse hein cette fille. Depuis hier, c'est à l'heure-là elle se réveille à cause d'une petite blessure qu'elle s'est faite toute seule.
Maman Ivana : au fait, elle s'est réveillée à pareille heure parce que le médicament que je lui ai donné hier contient du somnifère. Elle va beaucoup mieux maintenant. On peut s'entretenir en privé ?
Mémé : bien sûr. Allons au salon. Dit-elle en se levant.
Elles rentrent dans le salon et moi je prends la direction du magasin où je cache les livrets que ma seconde mère m'a remis. Assise, la tête rejetée en arrière, je pousse un long soupir et ferme les yeux pour vider mon esprit. Il faut que je m'aère l'esprit pour la suite des événements parce que ma vie n'est qu'une suite d'événements malheureux. Les uns catastrophiques, que les autres. Je suis restée ainsi pendant je ne sais combien de minutes avant que la porte ne s'ouvre avec fracas.
Mémé : j'espère pour toi que tu n'as pas ouverte ta salle bouche de bâtarde hein ? Tu ne leur as pas dit que c'est moi qui t'ai causé cette blessure au front j'espère ?
Moi : non mémé.
Mémé : et par rapport à tes cauchemars ?
Moi : je n'ai rien dit non plus.
Mémé : c'est mieux pour toi. D'ailleurs je ne veux plus te voir avec cette fille de maman pharmacie. Est-ce que c'est clair ?
Moi : oui mémé.
Mémé : tes tantes et ton Oncle sont en routes. Tu sais donc quoi faire.
Moi : oui mémé.
Mémé : alors lève-toi et mets-toi au boulot.
Ce week-end s'annonce très mal avec l'arrivée de mes tantes. Elles sont pires que leur mère et les deux coépouses de ma mère réunie. Je vais devoir vous fausser compagnie pour préparer l'arrivée de mes paternels. Sinon, c'est sûrement à l'hôpital que vous allez me retrouver la prochaine fois.