Chapitre 6 CHAPITRE 6

Il était neuf heures et j'étais déjà assise à une table, un café à la main. J'avais tellement aimé ce restaurant hier que j'étais déjà assise au même endroit, mes écouteurs dans les oreilles. Je venais de finir mon premier café quand j'en avais déjà envie d'un autre. Le café me détendait tellement. Je retirais mes écouteurs pour appeler la serveuse, Alyssa, je crois.

– Vous pouvez me remettre le même s'il vous plaît ?

– Ça marche.

Elle prenait ma tasse vide et partait vers le comptoir. Je sortais mon portable pour arrêter la musique. J'avais un snap de Julia. Elle s'était prise en photo devant la glace, en justaucorps rose. C'était son préféré.

– Et voici.

– Merci.

Elle posait la tasse devant moi et s'arrêtait après avoir hésité pendant une demi-seconde :

– Tu étais là hier, non ? Avec Jack ?

– Oui, c'est mon demi-frère.

– Ah bon ? Je ne savais pas. Tu es nouvelle alors ?

– Oui, je pense que ça doit se voir. Dis-je en rigolant.

– Non, juste parce que je ne t'avais jamais vue. Moi, c'est Alyssa, je travaille ici pour les vacances, et, de temps en temps les week-ends.

– Enchanté alors, moi, c'est Mia. Mia Watson.

– Oh, donc tu es la fille de John Watson, je suppose ?

– Oui, comment tu le sais ?

– Tout le monde connaît ton père. Il est... assez imposant.

Je ne pouvais pas dire le contraire. Mon père était tout sauf avenant. Je savais que la plupart des gens avaient peur de lui.

– Oui, c'est le moins qu'on puisse dire.

– Je suppose que tu vas rentrer au lycée privé, alors ?

– Oui, c'est bien ça.

– D'accord, c'est cool on se verra là-bas alors.

– Oui. Dis-je en souriant.

Elle me souriait à son tour et partait rejoindre un de ses collègues derrière le comptoir. Elle resserrait son chignon brun et posait un plateau rouge devant elle.

Je remettais mes écouteurs pour boire mon café.

***

– Allô ?

– Mia ? C'est Aria au téléphone. Ça va ?

– Oui, et toi ?

– Oui.

– Qu'est-ce qu'il y a ?

– Je voulais savoir si tu voulais venir chez moi en fin d'après-midi, avec Jack, pour qu'on se prépare ensemble pour la fête ? On pourra faire un before avant d'y aller tous ensemble, comme ça.

Ah oui, la fameuse fête tant attendue. Je ne savais plus que c'était aujourd'hui. J'avais passé ces deux derniers jours à courir, m'arrêter boire des cafés, manger, me baigner et bronzer. Je n'étais même pas allé au restaurant avec mon père, car il était trop occupé par son travail.

– Oh, oui, merci, c'est gentil. Il faut que j'emmène quoi ?

– Rien de spécial. Jack m'a dit qu'il lui restait une bouteille de Jager. Tu peux peut-être emmener une robe ? On va toute mettre une robe.

Je ne savais pas ce que c'était du Jager, mais ce qui retenait mon attention, c'était qu'elle m'avait demandé de mettre une robe. Je n'avais aucune robe.

– Oh, une robe ?

– Oui. Tu n'en as pas ?

– Euh, elles ne me vont plus.

Bien sûr, je mentais.

– Je peux t'en prêter une si tu veux, tu fais la même corpulence que moi j'ai l'impression. Aller, je te prêterais tout, vient seulement et tout ira bien. A tout à l'heure.

Sur ce, elle raccrochait et je jetais mon téléphone à côté de moi. Je doutais que ces robes allaient m'aller. Elle était fine, certes, mais je l'étais encore plus. De plus, elle était légèrement plus grande que moi. Je regardais l'heure : quatorze heures trente. Je n'avais plus qu'à attendre cette fichue fête.

J'avais peur. Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre et je me disais que cette fête n'allait pas être différente de toutes les fêtes que je voyais dans les films : de l'alcool, de la drogue, des garçons et des filles à califourchon dans toutes les chambres de la maison Je ne voulais pas connaître ça. Enfin, pas maintenant. Je ne m'étais même pas encore habitué à habiter ici et je ne pouvais m'empêcher de me dire que ma mère désapprouverait que je sorte à une fête. En tout cas, Julia serait trop contente de savoir que je vais à une soirée, elle qui rêvait de faire tout comme une vraie ado.

***

J'entrais chez Aria et de la musique résonnait dans le salon. C'était de l'électro. J'avançais, des chips à la main, en suivant Jack jusqu'aux escaliers. Personne n'était en bas. Je me demandais ce qu'ils pouvaient faire en haut. Arrivant dans le couloir à l'étage, je percevais des voix à travers la musique. Elles devaient provenir d'une chambre.

– Salut, les gars !

– Toujours le dernier celui-là. J'espère que tu vas l'aider à corriger cette manie, Mia.

Je souriais à Aria qui me prenait les chips des mains pour les poser sur une petite table basse. On devait être dans sa chambre. Elle était immense, avec un grand lit et deux canapés où étaient assis Matt, Alec et les filles. Je m'avançais et faisais un signe à tout le monde pour dire bonjour.

– Maintenant que vous êtes là, on peut commencer à boire.

– Génial. Dit Alec en se frottant les mains.

Je remarquais une bouteille de Whisky sur la table, une bouteille de Jet, une douzaine de bières qui semblaient sortir du frigo, des jus, des boissons énergisante, du sel et des rondelles de citron. Jack ajoutait la bouteille de Jager au lot et je savais enfin de quoi Aria voulait parler tout à l'heure au téléphone.

– Qu'est ce que tu bois, Mia ? Me demandait Matt.

– Vous me conseillez quoi ?

J'avais prononcé ça d'un tel calme que j'étais moi-même surprise. J'avais peur de boire. J'avais peur de goûter à ça et de ne pas aimer. J'avais aussi peur de trop boire et de ne plus savoir réfléchir. Je ne voulais pas être ridicule, mais je voulais aussi essayer d'être dans la même ambiance qu'eux.

– Qu'est ce que tu aimes d'habitude ?

– Je n'ai jamais vraiment bu d'alcool fort.

J'avais dit ça si doucement que je me sentais honteuse. Qu'est-ce qu'ils devaient penser de moi ?

– J'en étais sûr ! Tu n'as jamais bu ? Me demandait Jenna en se rapprochant de moi.

Je m'asseyais en face d'Aria qui attendait ma réponse. Jack faisait une grimace pour montrer qu'il était désolé pour moi.

– De l'alcool fort, non, jamais.

Un silence de mort s'abattait dans la chambre et Matt le brisait pour ne pas casser l'ambiance :

– Eh bien, il y a un début à tout. Je vais te servir du Jager, je pense que tu vas bien aimer. C'est la boisson préférée des filles en général, car ce n'est pas trop fort.

Il prenait un verre, me mettait du Jager, puis le mélangeait à une boisson énergisante. Je le prenais en le remerciant et portais le gobelet à mes lèvres. L'alcool me brûlait légèrement la gorge, mais le goût ne me déplaisait pas. Je croyais même que j'aimais bien.

– C'est bon, merci.

Matt était content de lui et je l'étais d'autant plus de moi. J'aimais une boisson forte, je n'aurais jamais cru ça de moi. Tout le monde se servait et on pouvait enfin décréter que la soirée pouvait commencer. Je ne savais pas à quel moment on allait se préparer, mais ils avaient tous l'air décidé à boire.

– Bien, on peut faire un petit jeu d'alcool entre amis, pour bien commencer la soirée ? Nous demandait Alec en sortant un jeu de carte de sa poche.

– D'accord, mais pas les cartes. On pourrait jouer à vérité comme il y a la nouvelle ? Pas d'action ce soir. Ou peut-être plus tard. Nous disait Aria en me regardant, son petit doigt posé sur le bord de ses lèvres.

– Je vous suis. Dis-je après quelques secondes de silence.

– Parfait. Je reviens, je vais juste éteindre la musique en bas pour en mettre ici. Je ne voudrais pas alarmer les voisins.

Elle partait d'un pas assuré vers la sortie de sa chambre et je me tournais vers les deux filles qui rigolaient ensemble.

– On rentre comment de la soirée ?

– On prendra un Uber, t'en fais pas, on fait ça tout le temps. Me répondait Jack en levant son gobelet.

Et sa voiture ? Je n'osais pas poser la question. S'il avait l'habitude, je lui faisais confiance. Je buvais à nouveau quelques gorgées et me retournais vers Aria, qui revenait déjà. La musique d'en bas s'était effectivement arrêtée et elle sortait une petite enceinte de sa commode, mettant immédiatement de la musique.

– On peut commencer.

Aria me faisait un sourire malicieux en prenant son gobelet. Je savais qu'elle allait me poser une question, et que ce ne serait pas une question gentille.

– Si tu devais choisir un garçon à embrasser entre les deux, lequel ce serait ?

Je m'attendais à une question dans ce genre. Mais je ne pensais pas être aussi gênée quand je répondais :

– Je pense que je choisirais Matt.

Je l'entendais tousser et le voyais sourire à côté de moi.

– Je t'avais dis, mec.

Il tapait sur l'épaule de son ami qui soupirait. Vite qu'on passe à la question suivante pour que je passe enfin mon tour.

– Très bien. C'est à toi de poser une question, maintenant.

– D'accord. Alors, comme c'est toi qui m'as posé une question, Aria, si je te disais quel garçon tu aimerais embrasser ce soir, tu me répondrais quoi ?

– Liam, sans hésiter. Répondait Jenna à sa place.

– Exactement. Mais impossible, il y a sa bimbo à deux euros qui sera là, et en plus, on sera chez elle.

Je haussais les épaules et regardais vers les autres pour savoir qui allait poser une question. Ce fut Matt qui demandait à Jack s'il avait quelqu'un dans le viseur en ce moment, et il répondait que non. Ensuite, Jack demandait à Jessie si elle comptait coucher avec quelqu'un ce soir. Elle nous répondait qu'elle-même ne savait pas, mais qu'elle s'était rasée pour l'occasion. Ce fut au tour de Jessie qui demandait à Matt s'il aimerait bien m'embrasser.

– En toute franchise, j'aimerais faire beaucoup plus que l'embrasser.

Tout le monde avait rigolé comme si je n'étais pas là. Et moi, je ne pouvais m'empêcher de rougir. C'était hyper gênant.

– Merci, mais... je suis là.

– Oh, oui, je sais. Je voulais juste être franc.

Il me faisait un clin d'œil et se remettait contre son dossier. Quelque part au fond de moi, j'étais contente qu'il ait répondu ça. Matt était quelqu'un de très beau et il devait beaucoup plaire aux autres filles.

Quinze questions et deux verres plus tard, Aria avait décrété qu'il était temps de se préparer. Elle nous emmenait dans son dressing qui était aussi grande que ma chambre à la maison et nous demandait de choisir une de ses robes. Bien sûr, elle devait en avoir une centaine, alors je lui demandais conseil.

– C'est quoi, ta couleur préféré ?

– Le bleu. Mais en vêtements, je préfère le noir.

– D'accord. Je t'en sors plusieurs et tu en choisis une.

– Tu es sûr que ça ne te dérange pas de me prêter une robe ?

– Mais non. J'en prête souvent aux filles.

Je les regardais se balader entre les portants. Aria se mettait à la recherche d'une robe pour moi et je la regardais réfléchir. Elle cherchait en bousculant de temps en temps les deux autres filles, puis me sortait trois robes qu'elle me déposait dans les bras.

– Tiens, tu peux choisir.

Je levais les trois robes par leur cintre et m'approchai du miroir. Je prenais la première en déposant les autres sur le bureau blanc au fond du dressing et me regardais devant la glace en ajustant la robe à mon corps. Elle était courte, très courte, mais, très belle. Je la déposais sur le bureau en tirant la conclusion suivante : elle serait trop courte pour que je sois à l'aise. Je prenais la deuxième, qui, elle, était un peu plus longue, les bretelles étaient ornées de perles blanches et il y avait un peu de dentelle. C'était ma préférée, pour l'instant. Je regardais la dernière, qui elle, était légèrement moins jolie que les autres. C'était décidé : j'allais prendre la deuxième.

– Je peux te prendre celle-là ?

Aria se retournait dans un geste théâtrale, faisant voler ses cheveux blonds sur ses fines épaules.

– Bien sûr, je pense qu'elle t'ira parfaitement.

– Merci.

Je regardais Jenna qui avait une robe jaune brillante dans les mains. Elle semblait l'adorer. Jessie avait une robe bleue turquoise dans les mains, trop voyante à mon goût.

– Tu vas mettre quoi, toi ? Dis-je en regardant Aria qui était en train de chercher des chaussures.

J'avais oublié ce petit détail...

– Une robe violette. Je l'ai acheté la semaine dernière sur Internet. Elle est magnifique, je vais te la montrer.

Elle me prenait le bras et m'emmenait jusqu'à sa chambre, là, les garçons se retournaient pour voir si on était habillé.

– Regarde.

Elle prenait la robe qui était posée sur sa chaise et me la tendait pour que je puisse la regarder. Elle était très jolie, et avec grande surprise, pas trop courte.

– Superbe.

– Je sais, merci. Viens, on va prendre ma salle de bain pour se changer et je vais te maquiller.

Me maquiller ? Les seules fois où je me maquillais avant étaient pour mes compétitions. Je n'aimais pas ça. J'avais toujours le réflexe de me gratter les yeux et parfois, j'oubliais que j'étais maquillée.

Elle ouvrait la porte du fond de sa chambre et refermait la porte derrière elle. La salle de bain était grande, assez grande pour ne pas se marcher dessus en se changeant.

Je commençais à enlever mon top quand je la voyais se déshabiller. Je ne pouvais m'empêcher de me tourner, par peur qu'elle n'inspecte mon corps. Je n'aimais pas me mettre à moitié nue devant des inconnus. Je n'avais pas confiance en mon corps, et même si c'était une fille, je ne voulais pas le montrer.

– Putain, tu as un dos super musclé, dis-moi !

– Oh, oui. C'est à cause du sport. Dis-je sans me retourner.

Une fois la robe enfilée, je me retournais vers elle pour voir la sienne.

– Elle te va super bien ! Je ne l'ai jamais mise, mais je pense que jaurais du mal à rentrer dedans. Elle te va déjà très près du corps et tu es plus fine que moi.

– Merci, la tienne est très belle aussi.

Elle me souriait avant de se regarder dans la glace. Elle était vraiment très jolie. Je ne savais pas si elle allait se remaquiller, mais elle l'était déjà bien assez.

– Tu ne te maquille pas souvent, pas vrai ?

– Non. Je me maquille rarement.

– D'accord, eh bien, il y a un début à tout, comme disait Matt tout à l'heure.

– C'est vrai.

Elle me faisait un sourire diabolique avant de me demander de masseoir sur la petite panière en bois.

– Je vais te le faire.

– Merci, mais pas trop s'il te plaît.

– Mais oui.

Elle agitait ses doigts dans tous les sens et prenait son immense trousse de toilette posée sur le bord du lavabo. Je recommençais à avoir peur. Je ne savais pas du tout à quoi j'allais ressembler après cette séance de relooking. Mais je savais une chose : j'en avais bien besoin.