Chapitre 4 CHAPITRE 4

– Attends, c'est ici chez ton amie ?

C'était une maison immense, beaucoup plus grande que celle où j'habitais avec mon père. Construite en pierre blanche, elle avait des volets noirs et une grande entrée aux portes en bois foncé. Je savais qu'on allait aller chez une fille riche, mais je ne m'attendais quand même pas à ça. J'allais être une imposteur.

– Ils ont tous des grandes maisons. Mais je crois qu'Aria a la plus grande de notre groupe. Enfin, Alec est quand même plus riche, je crois.

Il entrait sans frapper et on entendait déjà des voix venir de l'intérieur. Des voix de filles et de garçons. Je marchais jusqu'au salon et percevais enfin des gens, dehors près de l'immense piscine, assis sur des canapés de jardins.

– Ah, Jack, enfin !

Une fille levait son verre, euphorique en le voyant arriver. Mais elle le baissait aussitôt en m'apercevant derrière lui.

– Bonjour, tu es ?

Je m'arrêtais sur la terrasse et levais les yeux vers elle. Une grande blonde aux yeux noisette s'était avancée sur son fauteuil, son coude posé sur son genou, pour tenir sa petite tête. Elle était très jolie, mais aussi très superficielle. Ce n'était pas du tout le genre de fille que j'aimais côtoyer. Mais bon, je ne devais pas m'arrêter sur le physique, elle était peut être très gentille.

– C'est la fille de mon beau-père, Mia. Elle vient d'emménager chez nous.

– Oh, oui. Tu nous en avais vaguement parlé.

Elle m'inspectait de la tête aux pieds tandis que je décidais d'être la plus aimable.

– Bonjour, tu dois être Aria ?

Elle regardait ma main en réfléchissant avant de me sourire.

– C'est bien moi.

Elle me prenait la main, la serrait vaguement et se tournait vers ses amis qui n'avaient pas parlé depuis notre arrivée.

– Mia, voici mes amis : Matt, Alec, Jessie et Jenna.

Je les regardais tour à tour avec un petit sourire. Inutile de réfléchir trop longtemps pour en tirer mes propres conclusions. Je savais déjà quel genre de personne ils étaient tous : des petits gosses de riches qui martyrisaient les gens qui ne rentraient pas dans leur case. Ils étaient tous d'une élégance forte malgré leur tenue décontractée. Matt et Alec se ressemblaient beaucoup. Ils étaient tous les deux bruns, très beau, des yeux marron et les mêmes couleurs de vêtements. Ils devaient être meilleurs amis. L'une des filles était blonde platine avec de grands yeux verts et l'autre était brune avec de petit yeux marron.

– Tu ne m'avais pas dit que tu avais une demi-sœur aussi belle.

Matt avait prononcé ses paroles avec une telle intonation que j'en perdais l'équilibre. Je ne m'étais pas habitué à des personnes aussi directes.

– Ne commence pas déjà, Matt. Elle est arrivée hier.

– Asseyez-vous.

Aria me désignait le canapé à côté d'elle et je m'assayais à côté de Jack. J'étais contente d'être enfin assise, mais malgré cela, j'étais quand même toujours le centre de l'attention. Tous ne parlaient plus et m'inspectaient comme si j'étais une extra-terrestre.

– Alors, tu viens d'où ? Me demandait Alec.

Je regardais Aria s'éloigner vers le garage.

– Je viens de Houston.

– Ah oui ? Et pourquoi venir ici ?

Parce que ma mère est morte et que j'étais contrainte de venir habiter ici avec mon père.

– Parce que mon père habite ici.

Aria revenait déjà, deux bières à la main et nous les tendirent aussitôt. Je lui faisais un sourire en guise de remerciement et regardais Jack en essayant de rester le plus naturel possible. Je ne savais pas ouvrir une bière et je savais encore moins quel goût ça avait.

– Donne, je vais te l'ouvrir.

Alec prenait ma bière et sortait son troussons de clé de sa poche. Il prenait son porte-clés décapsuleur pour l'ouvrir et me la tendait, non sans me laisser un petit sourire charmeur.

– Merci.

– Maintenant que tu es là, Jack, on peut enfin te dire de quoi on parlait.

Je me penchais légèrement pour apercevoir Aria. A chaque fois que je la regardais, je la trouvais de plus en plus belle. Elle était sûre d'elle, contrairement à moi. Je devais faire tâche à côté d'elle.

– Oh, oui, c'est très important. Lui confirmait Jenna en se mordant la lèvre.

– Oula, on va encore revenir là-dessus ?

Matt semblait ne pas apprécier leur sujet de discussion.

– Devine qui fait une fête vendredi soir ?

– Je ne sais pas, toi ?

– Non, putain, c'est Liam et Josh Johnson ! Ils sont rentrés de France hier et j'ai entendu dire qu'ils reprenaient les cours en terminal, comme nous.

Aria avait dit ça comme si le prince Charles arrivait chez elle. En tout cas, les deux filles à côté de moi étaient littéralement en extase et j'avais l'impression qu'elles allaient faire un arrêt. Hors de question de leur faire du bouche-à-bouche.

– T'es sérieuse ? Putain ça va faire énormément bouger les choses au lycée. Pourquoi ils ne reprennent pas à la fac ?

– Parce qu'ils ont loupé deux ans de cours. Ils veulent reprendre là où ils se sont arrêtés.

– Et c'est eux qui font une fête, vendredi ?

– Non, c'est la meuf de Liam, enfin, je ne sais pas vraiment ce qu'elle est, mais, elle a posté un message sur Tweeter hier. Elle organise une grande fête pour leur retour.

– Waouh, après deux ans, elle espère quoi ? Qu'elle va ressortir avec lui comme si de rien ne s'était passé ?

– Apparemment.

J'avais envie de demander de quelle fille elle parlait, mais je me rappelais que je ne savais pas non plus qui était ces deux garçons qu'elle avait mentionné.

– Mia, est-ce que tu as un petit ami ?

– Euh, non. Dis-je en regardant Aria.

– Alors, il faut que tu saches que notre lycée est rempli de célibataire. Tu vas bien rentrer dans notre lycée ?

– Oui.

– Très bien. Je pense qu'on va bien s'entendre.

Elle me souriait, reculait sur son siège et prenait la paille de son verre pour aspirer son cocktail.

– Au fait, disait Jenna, tu as notre âge ?

– J'ai bientôt 18 ans.

– Ah, comme nous.

Je regardais ma bière et me décidais enfin à en boire une gorgée. Ce n'était pas si mauvais, mais je préférais les sodas.

– Du coup, on va se pointer chez cette Tess Jackson alors qu'elle nous déteste ?

– Elle déteste toutes les filles. La corrigea Aria. De toute façon, elle a dit qu'elle organisait une fête donc tout le monde est invité. J'ai bien l'intention de lui piquer Liam. Je le suis sur les réseaux, il est encore plus beau qu'il y a deux ans.

– Je croyais que tu préférais Josh ?

– Non, Josh est aussi parfait que Liam. Enfin, Liam est quand même légèrement plus parfait que lui, mais, contrairement à Josh, Liam est quelqu'un de sérieux, en couple.

– Oui, mais il a dû bien s'amuser en France. J'ai vu les stories qu'il mettait et il était sans arrêt en soirée. L'informait Jenna en levant sa bière pour en boire une gorgée.

Aria faisait une grimace et je regardais les deux garçons en face de moi qui étaient plongés sur leur téléphone. Je comprenais que cette discussion ne les intéressait pas. J'étais de leur avis.

– J'y crois pas, Mia, tu étais championne de gymnastique avant ?

Mon cœur se mettait à accélérer. Jessie était sur son portable et semblait chercher des informations sur moi. J'étais déjà mise à découvert.

– Quoi, c'est vrai ? Lui demandait Aria.

Alec et Matt levaient les yeux de leur téléphone pour me regarder. J'étais encore plus mal à laise, moi qui avais réussi à me fondre dans leur petit groupe.

– Oui, ma demi-sœur, assise à côté de moi, a gagné les championnats du monde à deux reprises.

Personne ne parlait, mais tout le monde semblait impressionné. J'étais mal à l'aise.

– C'est du passé tout ça. J'ai arrêté la gymnastique.

– Ah oui, mais pourquoi ? Tu étais championne du monde quand même.

Parce que ma mère est morte.

– Parce que je voulais me concentrer sur mes études.

Je sentais le regard de Jack sur moi. Il savait la vérité et j'espérais qu'il comprenne que je ne la révèle pas.

– Et tu as un frère jumeau, Jason Watson ? Waouh, c'est un champion de boxe, il est canon !

Je me mordais la lèvre, par peur qu'elle n'en dise trop. Je n'aimais pas ce genre de questions sur ma vie. Elle connaissait déjà trop de choses sur moi et je n'aimais pas ça du tout. Je voulais vraiment tourner la page et je n'avais pas besoin qu'on m'envoie des grosses piqûres de rappel. Tout ce qui me rappelait ma mère était trop douloureux.

– Fait voir.

Jessie donnait son portable à Aria qui examinait mon frère sur l'écran avec attention. Un sourire se dessinait sur son visage.

– Il n'est pas venu à Los Angeles, ton frère ?

– Non, il est parti en voyage, je ne sais pas quand il revient.

Je n'aimais pas mentir, mais ce n'était pas loin de la vérité. Il était parti, c'est tout ce que je savais.

– Dommage, j'espère qu'il reviendra bientôt.

Je faisais comme je faisais à chaque fois que je ne savais pas quoi répondre aux gens : je souriais.

Jenna se mettait à parler d'un autre garçon qui s'appelait Tom, et je me dépêchais de finir ma bière, comme si cela me permettrait de partir plus vite d'ici. Je n'étais pas comme ces gens et je n'avais qu'une envie : retrouver Julia pour me sentir à ma place, parce qu'elle, c'était ma meilleure amie.

***

Je me levais, trois heures après avoir écouté des banalités sur les gens de leur lycée. Mon père m'avait envoyé un message pour savoir où j'étais et je lui avais répondu qu'on était chez une amie à Jack qui s'appelait Aria. Personne ne s'était baigné, comme je l'avais espéré, et Jack avait finit sa troisième bière. Je ne savais pas si c'était bien sage de reprendre la voiture après ça, mais quelque chose me disait que ce n'était pas la première fois que Jack buvait avant de conduire.

– Mia, attend, j'aimerais te parler en privé.

Je m'arrêtais sur ses paroles et faisais un signe de tête à Jack qui rentrait dans la maison. Les autres nous regardaient avant de partir à l'intérieur avec Jack. J'étais maintenant seule avec Aria.

– On ne t'a pas mise très à l'aise, pas vrai ?

– Non, ça va. Je n'ai juste pas l'habitude de me faire des amis.

– Oui, mais là c'est différent. Tu es la demi-sœur de Jack par alliance, alors cela veut dire que tu deviens automatiquement notre amie.

– Ah oui ? Je ne pensais pas que ça fonctionnait comme ça.

– Oui, tu n'es pas habitué à faire tout ce que l'on fait. On n'est pas des sportifs de haut niveau, nous. Mais on peut devenir amis. Tu sais, tu ressembles beaucoup à mon ancienne meilleure amie, Vanessa.

– Ancienne ?

– Oui, elle a déménagé à Manhattan le mois dernier. Je suis maintenant privé de mon binôme. Elle ne m'a donné aucune nouvelle depuis qu'elle est partie. Ce n'était peut-être pas une vraie amie après tout.

J'avais presque un peu de pitié pour elle.

– Oh, je suis désolé pour toi.

– Ça va, ne t'inquiète pas. Et toi, tu as une meilleure amie ?

– Oui, Julia. Elle habite à Houston.

– D'accord, comment elle est ?

C'était la première fois qu'on me posait une telle question, mais je savais quoi répondre. Julia avait toujours été ma meilleure amie, elle était comme une sœur pour moi et elle le sera toujours.

– Elle est géniale, drôle, gentille, intelligente aussi.

– Quelqu'un de bien alors. En tout cas, je te souhaites la bienvenue dans cette ville et j'espère vraiment qu'on va devenir de bonnes amies.

Elle me frottait l'épaule et je restais immobile, comme tétanisée. Je ne pensais pas du tout qu'elle souhaitait me parler pour être aussi gentille avec moi, mais j'étais contente qu'elle me souhaite la bienvenue. Je devrais peut-être ne pas me fier à ma première impression.

– Merci beaucoup, je l'espère aussi.

– Génial, alors j'espère que tu viendras avec nous à la fête, vendredi, et qu'on se reverra dans la semaine. Je t'ajoute sur les réseaux dès que tu rentres chez toi et tu pourras venir te préparer chez moi avant la fête, si tu veux.

– Oh, oui, merci beaucoup.

– Aller, tu peux rejoindre ton impatient de demi-frère et on se revoit bientôt.

– Oui, merci de m'avoir accueilli et à bientôt.

Je lui faisais un sourire et partais dans le salon rejoindre Jack. Il parlait avec Matt, les clés dans sa main droite.

– C'est bon, on peut rentrer.

– C'est parti, à plus les gars.

Il levait deux doigts en signe de salut et je me tournais également pour dire au revoir :

– Salut tout le monde.

Ils m'avaient tous salué en même temps et les deux garçons m'avaient regardé de la tête aux pieds quand je me retournais pour fermer la porte derrière moi.

Je pouvais maintenant dire : j'avais mal jugé Aria. Elle pouvait peut-être devenir une vraie amie.