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Les jours suivants se déroulèrent dans un entrelacs de tensions et de non-dits. Léa essayait de se convaincre qu'elle avait fait le bon choix en se rendant à Thomas, mais chaque fois qu'elle croisait Adrien, un frisson d'incertitude la traversait. Il était plus insistant que jamais, presque inévitable. La manière dont il la regardait, la façon dont il parlait de leur passé avec une telle sincérité... Il avait ce don de réveiller en elle des souvenirs enfouis, de raviver des sentiments qu'elle pensait avoir définitivement laissés derrière.
Thomas, lui, semblait changer. Il devenait plus distant, plus froid. Léa ne pouvait s'empêcher de remarquer les regards qu'il lançait en direction d'Adrien. Il savait. Thomas n'était pas du genre à se laisser duper. Il percevait la tension, et, malgré ses efforts pour rester calme et posé, il ne pouvait s'empêcher de ressentir un profond malaise chaque fois qu'Adrien se trouvait dans leur sphère. Les conversations à la maison étaient devenues plus rares, plus tendues. Léa sentait un abîme se creuser entre eux, un vide qu'elle n'arrivait pas à combler, un fossé qui se creusait sans qu'elle puisse en comprendre l'ampleur.
Ce matin-là, elle se leva tôt, espérant que l'air frais du matin l'aiderait à y voir plus clair. Elle s'habilla rapidement, enfila une paire de baskets, et sortit dans le jardin. Le soleil peinait à se lever au-delà de l'horizon, envoyant des rayons pâles et timides qui caressaient doucement la terre encore humide de rosée. Elle se promena sans but, laissant ses pensées dériver. Chaque souffle de vent semblait apporter avec lui un parfum de mémoire, des images d'un passé qu'elle ne parvenait pas à oublier.
Soudain, une voix familière la fit sursauter.
- Léa.
Elle s'arrêta net, se tournant lentement. Adrien se tenait là, à quelques mètres, les bras croisés, son regard fixé sur elle. Il avait l'air plus calme que d'habitude, mais cette sérénité n'était que de façade. Elle pouvait sentir la tension qui émanait de lui, le tourment caché derrière ses yeux.
- Tu es loin d'être stupide, Léa, dit-il doucement. Tu sais que ce que je ressens pour toi n'a jamais disparu. Tu sais que tout ce que j'ai fait... je le regrette. Si je pouvais revenir en arrière, j'aurais fait différemment. Mais je ne peux pas changer le passé. Tout ce que je peux te promettre, c'est que je suis prêt à tout pour réparer ce que j'ai brisé.
Léa sentit un nœud se former dans sa gorge. Elle était prête à répondre, mais les mots lui manquaient. Elle savait qu'Adrien était sincère, ou du moins, il semblait l'être. Mais elle avait aussi cette intuition sombre, ce pressentiment qu'il était toujours le même. Que, malgré toutes ses promesses, il finirait par la trahir à nouveau.
- Je ne suis pas sûre que tu puisses réparer quoi que ce soit, Adrien, murmura-t-elle, sa voix presque brisée. Pas après tout ce que tu m'as fait. Je ne peux pas oublier.
Il s'avança d'un pas, comme s'il cherchait à la convaincre par sa proximité.
- C'est exactement ce que je veux, Léa. Je ne veux pas que tu oublies, mais que tu me laisses l'opportunité de te prouver que j'ai changé. Tu es tout ce qui compte pour moi. Emma aussi.
Elle secoua la tête, le cœur battant à tout rompre.
- Tu me dis ça, mais je... je ne sais pas si je peux encore te faire confiance.
Adrien s'arrêta, le visage marqué par une tristesse qu'elle n'avait pas vue depuis longtemps. Il baissa les yeux, comme s'il cherchait les mots justes, mais rien ne semblait assez fort pour combler le vide qui s'était installé entre eux.
- Je comprends. Et je ne veux pas te forcer à quoi que ce soit. Mais sache que je serai là, Léa. Peu importe ce que tu décides. Je ne m'en vais pas.
Elle tourna la tête, son regard fuyant le sien, les émotions se heurtant dans son esprit. Elle ne voulait pas céder à la tentation de lui accorder une nouvelle chance, mais chaque fibre de son être la poussait à faire le contraire. Elle savait qu'elle ne pourrait pas échapper à cette lutte intérieure éternellement.
- Je... je dois y aller. Emma m'attend, dit-elle précipitamment, se détournant de lui pour s'éloigner.
Elle sentit Adrien la suivre un instant du regard, mais il ne la retint pas. Il resta là, dans le jardin, seul avec ses regrets. Léa se hâta de rentrer, ses pas lourds d'incertitude.
Le lendemain, à la fin de la journée, lorsque Thomas rentra à la maison, il la trouva assise seule dans le salon, la tête entre les mains. Il s'approcha lentement, son regard observant sa silhouette tendue.
- Léa... Qu'est-ce qui ne va pas ?
Elle leva les yeux vers lui, et il lut immédiatement l'épuisement et la douleur dans ses traits. Il savait qu'elle se battait contre quelque chose qu'il ne pouvait pas comprendre entièrement, et il se sentait impuissant.
- Je... Je ne sais pas comment gérer tout ça, Thomas. Adrien... il ne partira pas. Il me le répète sans cesse. Et moi... je ne sais plus quoi penser.
Thomas s'assit près d'elle, sans dire un mot. Il ne cherchait pas à la réconforter par des paroles vaines. Au contraire, il attendait qu'elle parle, qu'elle lui dise ce qu'elle ressentait, ce qu'elle voulait réellement. Il la laissa prendre une profonde inspiration avant de poursuivre.
- Je ne veux pas te perdre, Léa, mais je ne peux pas rester ici si tu n'es pas sûre de ce que tu ressens. Je t'aime, mais je n'ai pas besoin de vivre dans l'ombre d'un homme qui a déjà pris sa place dans ton cœur.
Les mots frappèrent Léa comme un coup de poing. Elle avait l'impression qu'un autre abîme se creusait sous elle. Elle voulait lui dire qu'il était celui qu'elle choisissait, qu'elle n'avait jamais voulu que ce soit compliqué, mais elle savait que ce n'était pas si simple. Elle n'était pas prête à renoncer à son passé. Pas encore.
Les jours qui suivirent étaient empreints de cette même lourdeur silencieuse, comme si le temps s'était suspendu, hésitant entre le passé et le présent. Léa se sentait écartelée, tiraillée entre les souvenirs d'un amour ancien et la réalité de sa vie avec Thomas. Chaque moment passé avec lui, chaque sourire d'Emma, chaque geste de tendresse de Thomas, lui apportait une forme de réconfort, mais aussi un sentiment de culpabilité. Elle savait qu'elle se perdait un peu plus chaque jour, dans cette indécision qui la rongeait.
Elle n'avait pas vu Adrien depuis leur rencontre dans le jardin, mais il n'était pas du genre à se laisser oublier. Elle savait qu'il reviendrait, comme une ombre, toujours plus proche, toujours plus insistant. Mais ce qui la perturbait le plus, c'était la facilité avec laquelle il ravivait des désirs enfouis, des souvenirs qu'elle avait juré d'oublier. Chaque fois qu'il apparaissait, elle se sentait à la croisée des chemins, perdue, comme une âme en quête de rédemption.
Le soir venu, après avoir couché Emma, Léa s'installa sur le canapé, les mains tremblantes. Elle savait que Thomas l'observait, mais elle n'osait pas le regarder dans les yeux. Le malaise entre eux devenait insupportable. Il ne lui avait rien dit depuis plusieurs jours, mais l'absence de ses gestes et de ses mots lui criait à quel point il souffrait. Elle savait qu'il était patient, qu'il l'aimait sincèrement, mais la distance qui s'était installée entre eux devenait irréparable.
- Léa, murmura-t-il finalement, sa voix faible, brisée par la tension. Je... Je veux te demander quelque chose.
Elle tourna lentement la tête vers lui, ses yeux cherchant à capter son regard, mais elle se sentit immédiatement envahie par la crainte qu'il lui propose une solution, une sortie qu'elle n'était pas prête à envisager.
- Si tu as des doutes, si tu n'es plus sûre de vouloir rester ici, je comprendrai. Mais... il faut que tu me le dises, Léa. Je ne peux pas continuer à vivre dans ce flou. Ni pour toi, ni pour moi.
Elle se leva brusquement, incapable de rester immobile face à cette vérité qu'elle savait déjà. Elle se dirigea vers la fenêtre, regardant les rues sombres à l'extérieur, comme si la nuit pouvait l'absorber et l'empêcher de faire face à cette réalité. Ses pensées s'agitaient, un tourbillon chaotique d'émotions contradictoires. D'un côté, il y avait Thomas, qui l'aimait sincèrement, qui voulait faire d'elle son avenir. De l'autre, il y avait Adrien, cet homme complexe et séduisant, un homme qu'elle connaissait si bien et qui, malgré ses défauts, semblait être l'alpha de son cœur, celui qu'elle n'avait jamais pu vraiment oublier.
Elle se tourna enfin vers Thomas, le cœur lourd.
- Je... je ne sais pas quoi te dire, Thomas. J'ai trop de choses dans la tête. Trop de... d'émotions qui se mélangent. Et Adrien... il est de retour. Il veut tout recommencer, et moi, je suis perdue. Je sais que je te fais souffrir, et je m'en veux. Mais je ne peux pas te donner ce que tu veux, pas en ce moment. Pas tant que je n'ai pas résolu ce qui se passe dans ma tête et dans mon cœur.
Thomas la regarda, le regard empli de douleur, mais aussi de compréhension. Il savait, au fond de lui, que cette histoire n'était pas terminée. Et qu'il ne pourrait pas attendre éternellement qu'elle prenne une décision.
- Je te donne du temps, Léa, dit-il d'une voix calme, mais ferme. Je n'ai jamais voulu te presser. Mais je n'ai pas non plus envie de rester dans cette situation, à attendre que tu finisses de régler tes comptes avec ton passé. Parce que je t'aime, et ça me tue de te voir déchirée entre Adrien et moi. Mais il faudra que tu prennes une décision, un jour.
Il se leva alors, s'éloigna sans un mot de plus, laissant Léa seule avec ses tourments. Ses yeux se fermèrent sous la pression de l'émotion. Elle se sentit presque vide, comme si le sol sous elle se dérobait. Elle ne savait plus où elle en était. Elle se sentait perdue, coincée entre les attentes d'un homme qu'elle appréciait et les démons d'un amour passé qu'elle ne pouvait totalement oublier.
Les jours suivants furent marqués par un silence lourd, une distance qu'aucun d'eux n'osait franchir. Thomas restait en retrait, respectant ses besoins, tandis qu'Adrien, tel un fantôme, se manifestait de plus en plus souvent. Ses visites étaient furtives, ses mots chargés de promesses et de désirs inavoués.
Un soir, alors qu'elle rentrait d'une course rapide, Léa aperçut Adrien au bout de la rue. Il l'attendait, comme s'il savait exactement quand elle passerait. Il avait l'air fatigué, usé par le temps, mais son regard, intense et envahissant, ne la quittait pas. Léa sentit une boule se former dans son estomac.
- Léa, murmura-t-il doucement en s'approchant d'elle. Il faut qu'on parle. Je... je sais que tu as des doutes, mais je suis prêt à tout pour te prouver que je peux être celui que tu as toujours voulu que je sois.
Elle se figea, ses pensées partagées entre son amour pour Thomas et la tentation irrésistible qu'elle ressentait face à Adrien.
- Je ne veux pas de ça, Adrien. Je ne veux pas revenir en arrière. Pas après tout ce que j'ai enduré, dit-elle avec une détermination fragile, mais ferme.
Il s'arrêta, la regardant d'un air triste.
- Je comprends. Mais ne me dis pas que tu ne ressens rien. Ne me dis pas que je n'ai aucune chance. Parce que je me battrai pour toi. Pour nous.
Léa se tourna alors, le cœur battant, se dirigeant vers sa maison. Mais une part d'elle savait, au fond, que cette bataille n'était pas terminée. Que tout n'était qu'un commencement.