Chapitre 4 04

Léa le fixa, les yeux pleins d'incompréhension. Elle ne savait plus quoi penser. Adrien, avec son sourire en coin, son assurance toujours intacte, se tenait là, comme si rien n'avait changé. Mais tout avait changé. Elle avait changé. Elle n'était plus la jeune femme naïve qui se laissait charmer par ses promesses envoûtantes.

- Tu penses vraiment que tu peux réparer ça, Adrien ? souffla-t-elle, sa voix brisée par l'émotion.

Il se rapprocha lentement, d'un pas mesuré, comme s'il voulait s'assurer qu'il n'y avait aucune échappatoire à la situation.

- Peut-être pas réparer, mais... Je peux essayer.

Léa se mordit la lèvre, cherchant à contrôler les vagues de colère qui montaient en elle.

- Tu as déjà essayé, Adrien. Tu as essayé des dizaines de fois, et à chaque fois, tu m'as laissée dans l'ombre de tes infidélités. Et tu crois que tu peux revenir, comme ça, après tout ce que tu m'as fait ?

Elle le regarda droit dans les yeux, la douleur dans le regard, mais aussi une détermination qu'il ne lui connaissait pas.

- Je ne veux plus de ça. Je veux plus de toi dans ma vie.

Un silence lourd s'installa, et Adrien sembla enfin percevoir la gravité de ses paroles. Il s'arrêta, son regard s'adoucissant légèrement, mais pas assez pour lui faire oublier ce qu'il représentait dans son passé.

- Léa, tu ne peux pas juste me jeter comme ça. Pas après tout ce qu'on a vécu.

Elle le fixa intensément, ne flanchant pas.

- Tu ne comprends pas, Adrien. Ce n'est pas une question de revivre le passé. Ce n'est pas une question de ce qu'on a vécu, mais de ce que tu m'as pris. De ce que tu m'as laissé.

Il resta silencieux, les mots se bloquant dans sa gorge. Léa prit une profonde inspiration, se forçant à rester calme.

- Tu veux t'excuser ? C'est bien. Mais ça ne changera rien.

Adrien fit un pas vers elle, ses yeux se remplissant de cette intensité qu'elle connaissait trop bien.

- Je ne veux pas juste des excuses. Je veux te prouver que j'ai changé.

Léa secoua la tête, un sourire amer étirant ses lèvres.

- Tu ne peux pas changer le passé, Adrien. Peu importe combien tu essaies. Et même si tu réussissais à changer, ça ne suffira jamais. Parce que tout ce que tu as brisé, ça ne se répare pas avec des mots.

Elle s'éloigna de quelques pas, le cœur lourd, mais la tête claire. Il y avait des décisions qu'elle ne pouvait plus ignorer. Il y avait des blessures qu'elle ne pouvait plus effacer, et elle savait maintenant que c'était à elle de choisir de tourner la page.

Adrien la regarda s'éloigner, et pour la première fois, un vrai regret traversa ses yeux. Mais il ne bougea pas. Pas cette fois. Parce que Léa était partie, et il savait qu'il n'y avait pas de retour en arrière.

Quand elle arriva à la porte de la maison, son cœur battait la chamade. Elle n'avait pas pu retenir les larmes, mais elles étaient silencieuses, comme une vieille douleur qu'elle avait enfin exorcisée.

Elle entra dans la maison, mais ses yeux se posèrent immédiatement sur Thomas, qui était assis sur le canapé, les bras croisés, son regard fermé, mais aussi désespéré.

- Thomas...

Il ne répondit pas tout de suite, se contentant de la regarder, un mélange de douleur et de frustration dans les yeux.

- Je t'ai vue, Léa, dit-il enfin, sa voix rauque. Je t'ai vue avec lui.

Elle baissa les yeux, incapable de soutenir son regard.

- Je ne voulais pas que ça arrive comme ça, murmura-t-elle.

Thomas se leva brusquement, s'approchant d'elle, son visage marqué par la déception.

- Tu me dis que tu veux une vie avec moi, mais tu laisses cet homme entrer et briser ce qu'on a construit. Tu me dis que tu m'aimes, mais je vois que tu n'as pas oublié Adrien. Et je... je ne peux pas vivre dans l'ombre de cet homme.

Les mots frappèrent Léa comme un coup de poing. Elle recula légèrement, son cœur se serrant dans sa poitrine.

- Thomas, ce n'est pas ce que tu crois...

Mais il secoua la tête, un sourire triste flottant sur ses lèvres.

- Non, Léa. C'est exactement ce que je crois. Tu veux tout, et tu ne peux pas avoir tout.

Il tourna les talons, et en une fraction de seconde, il était parti, laissant Léa seule dans la pièce, entourée de ses propres mensonges et de ses regrets.

Le bruit de la porte qui se refermait résonna dans ses oreilles. Elle n'avait jamais imaginé que tout pourrait s'effondrer aussi vite.

Léa resta là, immobile, ses yeux fixés sur la porte fermée derrière Thomas. Le silence qui s'installa dans la maison sembla presque assourdissant. Chaque souffle qu'elle prenait semblait plus lourd, plus difficile, comme si l'air lui-même pesait sur ses épaules. Elle se laissa glisser lentement contre le mur, ses mains tremblantes se posant sur ses genoux. Ses pensées tourbillonnaient dans sa tête comme une tempête enragée. Elle n'avait jamais cru que le poids de ses décisions la rattraperait de cette manière.

Ses doigts se crispèrent sur ses genoux, et elle ferma les yeux, tentant de faire le point sur tout ce qui venait de se passer. Adrien... et Thomas. Deux hommes aux antipodes l'un de l'autre. L'un qui représentait son passé, son désir de liberté et de passion dévorante, et l'autre, Thomas, l'homme qui lui avait offert une stabilité qu'elle n'avait jamais crue possible, mais qui, aujourd'hui, se sentait comme une cage.

Elle savait qu'elle avait fait une erreur en autorisant Adrien à revenir dans sa vie. Mais ce n'était pas seulement la présence d'Adrien qui avait causé la fracture avec Thomas. Non. C'était ce qu'il avait réveillé en elle. Le désir, la tentation, l'incertitude. Thomas était le choix rationnel, l'homme qui, bien qu'il ne fasse pas battre son cœur aussi fort qu'Adrien, lui offrait la sécurité qu'elle pensait mériter. Mais qu'en était-il de son propre désir ? De ses sentiments ? Les avoir réprimés aussi longtemps l'avait rendue folle.

Elle se leva finalement, vacillante sous le poids de ses pensées. Emma, sa petite fille, jouait innocemment dans le salon, inconsciente du chaos qui venait de se dérouler. Léa s'approcha d'elle, se laissant absorber par la chaleur de son petit corps qui se pressait contre elle dès qu'elle la prit dans ses bras. C'était là que tout prenait sens. Emma, sa fille, la personne qui comptait le plus dans sa vie. Mais même cet amour pur ne suffisait pas à effacer la douleur qui déchirait son cœur.

Elle s'assit avec Emma sur le canapé, la câlant contre elle. Les minutes passaient, mais les pensées de Léa restaient figées dans cette scène, où rien ne semblait plus avoir de sens. Thomas l'avait quittée. Adrien, bien qu'il lui ait promis de changer, restait un homme dont les intentions étaient floues, comme toujours. Elle avait l'impression de se retrouver à un carrefour, un endroit où les routes qu'elle croyait connaître étaient désormais couvertes de brume.

Le bruit de la porte d'entrée se fit soudainement entendre. Léa se figea. La silhouette familière de Thomas se dessina dans l'encadrement de la porte. Ses yeux sombres, pleins de douleur et de colère, croisèrent les siens. Il s'était arrêté juste à l'entrée, comme s'il hésitait à franchir le seuil. Il avait l'air épuisé, comme si cette confrontation l'avait vidé de toute énergie.

- Thomas... commença Léa, d'une voix faible, presque brisée.

Il resta silencieux un moment, puis s'avança lentement. Ses pas lourds résonnaient dans la pièce. Lorsqu'il arriva près d'elle, il ne dit rien tout de suite, se contentant de la regarder avec des yeux pleins de sentiments qu'il ne pouvait plus cacher.

- Tu m'as laissé sans rien, Léa, murmura-t-il finalement, sa voix rauque. Tu m'as laissé partir, sans me donner une chance de te prouver que j'étais l'homme qu'il te fallait.

Léa sentit une chaleur intense dans sa poitrine, une douleur qu'elle ne parvenait pas à maîtriser. Elle regarda Emma, endormie dans ses bras, et se leva doucement pour poser la petite sur le canapé, ne pouvant supporter le regard de Thomas trop longtemps.

- Je ne savais pas quoi faire, Thomas. J'avais peur. Peur de tout... Peur de te perdre, et peur d'être à nouveau blessée.

Il la suivit du regard, l'air confus, presque perdu dans ses propres sentiments.

- Alors, pourquoi revenir ? Pourquoi rouvrir cette porte maintenant ? Si c'est pour tout foutre en l'air encore une fois... je préfère que tu ne reviennes pas.

Léa sentit les larmes lui monter aux yeux, mais elle les retenait. Elle ne pouvait pas le laisser voir cette faiblesse. Pas maintenant. Pas après tout ce qui venait de se passer.

- Parce que... parce que je n'arrive pas à t'oublier, Thomas. Même si je le veux, je ne peux pas. Tu as raison, je t'ai laissé partir, mais ce n'est pas que toi que j'ai laissé partir. C'est moi-même. Je ne savais plus qui j'étais.

Un long silence s'installa entre eux, lourd de non-dits et de regrets. Finalement, Thomas se rapprocha d'elle et posa une main douce mais ferme sur son épaule.

- Et maintenant, Léa ? Que veux-tu faire maintenant ?

Elle ferma les yeux, et un frisson parcourut son dos. C'était la question qu'elle se posait depuis qu'Adrien était revenu dans sa vie. Que faire maintenant ? Reprendre là où tout s'était arrêté, choisir une vie stable et prévisible, ou se laisser aller à la passion dangereuse, même si elle savait qu'elle risquait de tout perdre une nouvelle fois ?

- Je ne sais pas... je ne sais plus, répondit-elle, sa voix tremblante. Mais je sais que je ne peux pas te perdre, Thomas. Pas toi.

Il la regarda longtemps, une intensité nouvelle dans son regard. Puis il se pencha doucement vers elle, effleurant ses lèvres d'un baiser presque furtif, un baiser empli de promesses et de doutes.

- Alors, nous allons avancer ensemble, Léa, murmura-t-il. Pas de promesses, pas de garanties. Mais ensemble.

Et, pour la première fois depuis longtemps, Léa se laissa aller, se blottissant contre lui, dans l'espoir que cette fois-ci, elle avait fait le bon choix. Mais au fond d'elle, une petite voix persistait, murmurant que l'histoire n'était peut-être pas encore terminée, que le retour d'Adrien n'avait pas dit son dernier mot.

            
            

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