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Le lendemain matin, le manoir semblait presque irréel après la nuit que nous avions passée. Elias était parti tôt, comme s'il voulait éviter une conversation qui pourrait briser l'équilibre fragile que nous avions atteint.
Je m'étais réfugiée dans la bibliothèque, cherchant à m'occuper l'esprit. C'est là que je fis la rencontre de Jordan Miller.
- « Vous devez être Alyssa, » dit-il en entrant, un dossier sous le bras.
Je levai les yeux de mon livre. Il était jeune, peut-être à peine la trentaine, avec des lunettes rectangulaires et une allure soignée.
- « Oui, c'est moi. Et vous êtes ? »
- « Jordan Miller, avocat. Je travaille pour Elias depuis quelques années. Il m'a demandé de vous remettre ceci. »
Il posa le dossier sur la table devant moi, mais son regard restait fixé sur moi, comme s'il évaluait chaque mouvement.
- « Vous avez l'air tendue, si je peux me permettre. »
- « C'est... une période compliquée, » répondis-je vaguement.
Jordan hocha la tête, comme s'il comprenait plus qu'il ne laissait entendre.
- « Si je peux me permettre un conseil, » dit-il en ajustant ses lunettes, « ne faites confiance à personne ici. Ni à Elias, ni à ses ennemis. Cette famille est un champ de mines, et le moindre faux pas peut être fatal. »
Ses mots, bien qu'inquiétants, ne semblaient pas prononcés avec malveillance. Il paraissait sincèrement préoccupé.
- « Pourquoi me dire ça ? » demandai-je, méfiante.
- « Parce que vous êtes différente. Et que, croyez-le ou non, il y a encore des gens ici qui préfèrent voir la vérité triompher. »
Il quitta la pièce avant que je ne puisse répondre, me laissant seule avec mes pensées et le dossier qu'il avait laissé.
Plus tard dans la journée, alors que je cherchais quelque chose dans le bureau d'Elias, je tombai sur une vieille boîte en métal. Par curiosité, je l'ouvris et y trouvai des photos de Sophia. L'une d'elles attira particulièrement mon attention.
Au dos de l'image, quelqu'un avait écrit en lettres capitales : CE N'EST PAS FINI.
Mon souffle se coupa. Qui avait laissé ce message ? Et qu'est-ce que cela signifiait vraiment ?
Alors que je restais figée, un bruit de pas résonna dans le couloir. Paniquée, je rangeai rapidement la boîte à sa place et quittai la pièce, le cœur battant à tout rompre. Mais cette photo, ce message, me hantaient déjà.
L'atmosphère dans le manoir était tendue depuis le matin. Clara avait remarqué, à travers des regards échangés ou des gestes maladroits, que quelque chose avait changé entre Elias et moi. Cela m'avait rendue nerveuse. Je savais que ce rapprochement n'allait pas être sans conséquences, mais je ne m'attendais pas à ce que tout éclate si tôt.
Clara était assise dans la cuisine, un mug de café à moitié vide devant elle, ses doigts tambourinant nerveusement sur le bord de la table. Dès que je passai la porte, elle leva les yeux vers moi, et je sentis immédiatement qu'elle n'était pas d'humeur à plaisanter.
- « Assieds-toi, » dit-elle d'un ton sec.
Je m'exécutai, bien que le nœud qui se formait dans mon estomac me donnait envie de fuir.
- « Est-ce que tu te rends compte de ce que tu fais ? » lança-t-elle sans détour.
Je fronçai les sourcils, feignant l'ignorance.
- « Je ne vois pas de quoi tu parles. »
Elle posa son mug brutalement sur la table, ce qui fit éclabousser un peu de café sur le bois verni.
- « Ne joue pas à ça avec moi, Alyssa. Tu crois que je suis aveugle ? Que je n'ai pas vu la façon dont Elias te regarde ces derniers temps ? Ou toi, avec ton air perdu dès qu'il entre dans une pièce ? »
Je baissai les yeux, prise en flagrant délit, mais refusant d'admettre quoi que ce soit.
- « Ce n'est pas ce que tu crois, » murmurai-je, ma voix tremblant malgré moi.
Clara poussa un soupir exaspéré.
- « Bien sûr que ça l'est. Et tu sais quoi ? C'est une très mauvaise idée. Tu n'as aucune idée de ce que ça implique. Elias n'est pas... comme les autres. »
- « Clara, je sais que tu t'inquiètes, mais je peux gérer. »
Elle éclata de rire, un rire amer qui me fit sursauter.
- « Gérer ? Tu crois que tu peux gérer Elias Darrow ? Alyssa, tu es peut-être intelligente, mais tu es naïve si tu penses que cette famille te laissera tranquille. Et ce n'est pas seulement Victoria ou Richard. Elias lui-même... il traîne un passé que tu ne comprendrais pas. »
Je relevai les yeux, piquée au vif.
- « Peut-être que tu devrais me laisser en juger par moi-même. »
Elle secoua la tête, visiblement frustrée, mais elle ne répondit pas. Au lieu de ça, elle se leva brusquement et quitta la pièce, me laissant seule avec un mélange de colère et de confusion.
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L'après-midi fut étrangement calme, mais une tension sous-jacente semblait flotter dans l'air. Clara et moi nous évitions, et Elias n'était nulle part en vue. Je m'occupais de Liam, qui s'amusait à construire une forteresse en LEGO dans le salon.
- « Alyssa, tu peux m'aider à trouver la pièce rouge ? » demanda-t-il en fouillant parmi les briques éparpillées sur le tapis.
- « Bien sûr, mon grand, » répondis-je en m'agenouillant à ses côtés.
Son sourire innocent me fit oublier un instant les préoccupations qui m'assaillaient. Je passai un moment à jouer avec lui, appréciant la légèreté de ces instants simples.
Mais cette tranquillité fut brusquement interrompue par un bruit sourd venant de l'extérieur. Liam sursauta, ses yeux s'agrandissant de peur.
- « Qu'est-ce que c'était ? » murmura-t-il.
Je tendis l'oreille, mon cœur battant la chamade. Un autre bruit, cette fois plus proche, retentit. On aurait dit quelqu'un qui essayait de forcer une porte ou une fenêtre.
- « Reste ici, Liam, et ne bouge pas, » lui dis-je en me levant précipitamment.
Je me dirigeai vers le hall d'entrée, où je croisai Clara. Elle tenait un objet lourd – une batte de baseball – et son expression était à la fois inquiète et déterminée.
- « Tu as entendu ça ? » demandai-je.
- « Oui. Quelqu'un essaie d'entrer, » répondit-elle.
Nous nous approchâmes prudemment de la porte principale, mais avant que nous n'ayons le temps de réagir, une fenêtre se brisa dans une pièce adjacente. Mon souffle se bloqua dans ma gorge.
Clara et moi échangions un regard paniqué, mais elle prit les devants.
- « Reste ici, je vais voir. »
- « Non, attends, on devrait appeler la police ! » protestai-je.
Elle secoua la tête.
- « Pas encore. Ça pourrait empirer les choses si c'est un simple voleur. »
Je n'étais pas convaincue, mais je la suivis malgré tout. Dans le bureau où la vitre avait éclaté, nous trouvâmes un homme, vêtu de noir, fouillant les tiroirs d'Elias avec une précision qui ne ressemblait pas à celle d'un voleur ordinaire.
Clara réagit sans réfléchir, brandissant sa batte.
- « Hé ! Toi là ! » cria-t-elle.
L'homme se tourna vers nous, mais au lieu de s'enfuir, il fit un pas dans notre direction.
- « Vous devriez rester à l'écart, » dit-il d'une voix rauque.
Je sentis mon sang se glacer. Cet homme n'était pas ici pour voler de l'argent ou des objets précieux. Il cherchait autre chose.
Clara, cependant, ne se laissa pas intimider.
- « Sors d'ici tout de suite, ou je te jure que tu le regretteras, » menaça-t-elle.
L'homme hésita, mais il sembla évaluer que rester plus longtemps serait risqué. Il se précipita alors vers la fenêtre et disparut dans la nuit, nous laissant tremblantes mais soulagées.
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Elias rentra peu après, furieux d'apprendre ce qui s'était passé.
- « Comment est-ce possible que la sécurité ait laissé passer ça ? » cria-t-il à un de ses gardes du corps.
L'homme baissa les yeux, incapable de répondre.
Je m'approchai d'Elias, tentant de calmer sa colère.
- « L'essentiel, c'est que personne n'a été blessé. Liam est sain et sauf, et l'intrus n'a rien emporté. »
Elias se tourna vers moi, son expression adoucie mais toujours tendue.
- « Merci, Alyssa. Je ne sais pas ce que j'aurais fait si quelque chose était arrivé à Liam. »
Il passa une main sur son visage, visiblement épuisé.
Mais alors que nous pensions que la nuit était derrière nous, le téléphone d'Elias sonna. Il décrocha, et je vis son visage se durcir à mesure que la conversation avançait.
Quand il raccrocha, il semblait livide.
- « Qui c'était ? » demandai-je, inquiète.
Il leva les yeux vers moi, et la gravité dans son regard me fit frissonner.
- « C'était une menace. Ils ont dit que les Darrow allaient payer pour leurs péchés. »