Il m'a ramenée chez lui uniquement pour me forcer à servir la femme qui m'avait volé ma vie. Quand elle m'a délibérément ébouillantée le bras avec du porridge chaud, il m'a hurlé dessus.
« Tu es une bête sauvage ! »
Il était en train de me détruire pour une femme et un enfant qu'il croyait être son avenir. La trahison suprême.
Mais ensuite, j'ai trouvé son dossier médical. Adrien était stérile. Le bébé n'était pas le sien.
Chapitre 1
Point de vue d'Alix Chevalier :
Les portes de la prison ont claqué derrière moi, un écho métallique final dans le silence. Cinq ans. Cinq ans que j'avais échangés contre la liberté d'Adrien de la Roche. Et maintenant, j'étais dehors, un fantôme dans ma propre vie. Ma première pensée, la seule, était pour Adrien. Je suis allée chez Aetheris, l'entreprise que j'avais aidé à construire. La réceptionniste, une jeune femme aux yeux vifs et ignorants, a jeté un regard à mes vêtements usés avec un sourire poli mais méprisant.
« Adrien de la Roche, s'il vous plaît », ai-je dit, ma voix rauque à force de ne pas l'utiliser.
Elle a penché la tête. « Vous avez un rendez-vous ? »
« Non », ai-je dit. « Dites-lui simplement qu'Alix Chevalier est là. »
Son sourire s'est effacé. Elle a tapé quelque chose sur son clavier. Ses yeux se sont écarquillés, passant de l'écran à moi. « Je... je suis désolée, Mademoiselle Chevalier. Monsieur de la Roche n'est pas disponible. »
« Il le sera », ai-je insisté. « Dites-le-lui, c'est tout. »
Avant que je puisse m'expliquer, deux gardes de sécurité costauds se sont avancés, leurs ombres s'abattant sur moi. « Madame, vous devez partir. »
L'humiliation m'a submergée, brûlante et cinglante. « Je suis Alix Chevalier. C'est mon entreprise. »
L'un des gardes a ricané, un son dur et incrédule. « Adrien de la Roche se marie aujourd'hui. Avec Eva Lemoine. Vous croyez qu'il a envie de vous voir ici ? »
Le monde a basculé. Marié ? À une autre ? Les mots m'ont frappée comme un coup de poing, me coupant le souffle. Mon sacrifice, mes cinq années, tout ça pour rien. J'ai reculé en chancelant, secouant la tête. Non. Ça ne pouvait pas être vrai. Je devais le voir. Le savoir.
J'ai trouvé le yacht, un monstre blanc étincelant au large de la Promenade des Anglais. Je me suis cachée dans l'ombre du quai, à l'écoute. La voix d'Adrien, riche et familière, portait clairement sur l'eau.
« Ce n'est pas Alix », a dit un ami, la voix basse. « Mais elle lui ressemble comme deux gouttes d'eau. »
Adrien a soupiré. « Je sais, Marc. Mais Eva... elle porte mon enfant. Je ne peux pas la laisser tomber. »
Mes genoux ont fléchi. Je me suis effondrée sur le sol, le béton froid sous mes mains. Un enfant. Son enfant. La trahison ultime. Il me dédommagerait, avait-il dit à Marc, mais Eva était indispensable. C'était ça. La vérité finale, brutale. Mon passé, mon avenir, tout ce en quoi j'avais cru, volait en éclats.
Le téléphone a vibré dans ma poche. Mon père. Je ne lui avais pas parlé depuis des années. « Alix ? Est-ce que ça va ? »
Sa voix était empreinte d'inquiétude, une préoccupation que je n'avais entendue de personne depuis si longtemps. Un rire amer m'a échappé. L'homme que j'avais détesté si longtemps était le seul qui se souciait vraiment de moi. « Papa », ai-je murmuré, le mot semblant étranger sur ma langue. « Je rentre à la maison. »
« Vraiment ? » Sa voix s'est brisée de surprise, puis de joie. « Je viens te chercher tout de suite. »
J'ai retiré de mon doigt la simple bague en argent, celle qu'Adrien m'avait donnée avant que j'entre en prison. Sa promesse. Notre avenir. Ça semblait être il y a une éternité. Un mensonge. Tout était un mensonge. J'ai marché jusqu'au bord du quai, l'eau scintillante se moquant du vide en moi. Avec une prière silencieuse pour la fille que j'étais, j'ai jeté la bague dans les profondeurs sombres. Elle a frappé la surface avec un minuscule plouf, puis a disparu.
Comme nous. Comme tout.
J'ai tourné le dos au yacht, au mariage, à Adrien et à la vie que j'avais connue. Il ne restait plus rien pour moi ici. L'indifférence glaciale qui s'était installée dans ma poitrine s'est durcie. C'était un imbécile. Un imbécile cruel et égoïste. Et j'en avais fini.
Ma nouvelle vie commençait maintenant.