« Maya ? » La voix douce de sa mère derrière la porte lui fit tourner la tête.
« Oui, maman ? » Elle lutta pour garder une voix calme, mais son cœur battait si fort qu'elle avait du mal à respirer.
La porte s'ouvrit lentement, laissant apparaître sa mère, les yeux humides. « Tu es magnifique, ma chérie. »
Maya tenta un sourire, faible, presque un mensonge. « Merci, maman. »
Sa mère s'approcha d'elle, les yeux plongés dans les siens, cherchant à déceler une quelconque lueur de joie. Mais Maya savait qu'il n'y en avait aucune à trouver. Ce n'était pas un mariage de rêve, et elles le savaient toutes les deux. « Tu n'es pas obligée de faire ça, tu sais... »
Maya baissa la tête, ses mains crispées sur le bouquet. « Si je ne le fais pas, on perdra tout. Je ne peux pas laisser Laura sans avenir. »
Sa mère passa doucement une main sur sa joue. « Je suis désolée de t'infliger ça. Si seulement ton père... »
« Ne parle pas de papa, s'il te plaît. » La voix de Maya trembla légèrement. Elle ne voulait pas raviver les rancœurs. Pas maintenant.
Un klaxon se fit entendre depuis l'extérieur, et le visage de sa mère se tordit de chagrin. « Ils t'attendent. »
Maya hocha la tête et se dirigea vers la porte. Le moment était venu. Sans un mot de plus, elle sortit de la maison, se sentant comme un automate, ses pas lourds et mécaniques. Le chauffeur en costume noir lui ouvrit la portière avec un signe de tête respectueux. Elle jeta un dernier regard à la petite maison qui avait été son refuge, avant de monter dans la voiture qui l'emmènerait vers une toute autre réalité.
Le trajet se déroula dans un silence oppressant. Le paysage urbain défilait rapidement, comme un flou indistinct. Maya avait l'impression que le monde autour d'elle continuait de tourner, indifférent à son sort. Les mains tremblantes, elle serrait son bouquet, cherchant un réconfort dans ce simple geste, mais la peur grandissait en elle.
Bientôt, la voiture s'arrêta devant un grand manoir en pierre, imposant et mystérieux, à l'image de l'homme qu'elle allait épouser. La demeure d'Adrian Castellano se dressait telle une forteresse, entourée d'un jardin parfaitement entretenu mais étrangement dépourvu de vie. Le portail de fer forgé s'ouvrit lentement, et Maya sentit son cœur s'alourdir. Il n'y avait ni invités, ni fleurs, ni musique. Seulement le silence.
Le chauffeur lui ouvrit à nouveau la portière, et Maya descendit, presque étourdie par l'immensité de l'endroit. Elle se tenait là, seule, devant cette bâtisse qui ressemblait davantage à une prison qu'à une maison.
« Par ici, mademoiselle. » Le chauffeur la guida vers l'entrée principale, où une grande porte en bois massif s'ouvrit devant elle.
En entrant, elle fut accueillie par un froid glacial. L'intérieur du manoir était à l'image de ce qu'elle avait imaginé : luxueux mais sombre, décoré avec un goût impeccable mais sans aucune chaleur. Les murs étaient ornés de tableaux anciens, et des lustres en cristal suspendus au plafond illuminaient faiblement les lieux.
Un homme attendait déjà dans le hall. Adrian Castellano.
Maya le reconnut immédiatement. Grand, les épaules larges, il portait un costume noir parfaitement taillé, qui renforçait l'aura de puissance qu'il dégageait. Ses cheveux noirs étaient peignés en arrière, et son visage, bien que d'une beauté glaciale, restait fermé, impassible. Mais c'était ses yeux qui la frappèrent le plus : froids, presque inhumains, comme deux pierres de glace fixées sur elle. Aucune émotion ne transparaissait. Il la scrutait simplement, comme un prédateur observant sa proie.
« Vous êtes prête ? » demanda-t-il d'une voix grave, rauque, qui résonna dans le hall silencieux.
Maya déglutit, tentant de maîtriser son tremblement intérieur. « Oui. »
Adrian s'approcha d'elle, lentement, chacun de ses pas semblant peser une tonne. Il tendit la main vers elle, mais il n'y avait rien de tendre dans ce geste. C'était un geste de contrôle, une manière de lui signifier que désormais, elle lui appartenait.
« Bien. Suivez-moi. »
Sans attendre de réponse, il tourna les talons et la mena dans une salle attenante, où un homme en robe de cérémonie les attendait. Pas de prêtre, pas de décorations florales. Simplement un homme chargé de les unir légalement.
Le cérémonial fut expéditif. Adrian répondit d'un ton ferme et détaché à chacune des questions posées, sans même jeter un regard à Maya. Quand vint son tour, elle murmura à peine son « oui », trop paralysée par la situation pour parler plus fort.
Le moment fatidique arriva.
« Vous pouvez embrasser la mariée », annonça l'officiant, comme une formalité.
Adrian ne bougea pas. Il la fixa un instant avant de lui prendre la main, non pas avec tendresse, mais avec une fermeté calculée. Il se pencha, effleurant à peine ses lèvres contre les siennes. Ce n'était pas un baiser d'amour. Ce n'était pas non plus un baiser de désir. C'était un pacte. Un accord scellé par un simple contact.
Lorsque ce fut terminé, Adrian la lâcha immédiatement et s'adressa à l'officiant. « C'est fait. Vous pouvez partir. »
L'homme hocha la tête, rassembla ses affaires, et quitta la pièce sans un mot de plus.
Maya resta là, figée, ne sachant que faire. Le poids de l'anneau en argent autour de son doigt semblait soudain si lourd. Elle venait de sceller son sort, mais elle n'avait aucune idée de ce qui l'attendait. Elle releva les yeux vers Adrian, espérant trouver un signe de réconfort ou même une explication, mais son regard restait aussi froid et imperturbable que lorsqu'elle était arrivée.
« À partir de maintenant, vous vivrez ici », déclara-t-il d'un ton neutre, presque professionnel. « Vous aurez vos propres quartiers, et je m'attends à ce que vous respectiez les règles de cette maison. »
Maya hocha la tête, incapable de trouver ses mots. Tout était si irréel, si mécanique.
Adrian s'approcha d'elle une dernière fois, baissant légèrement la tête pour murmurer à son oreille : « Vous avez fait un choix. N'oubliez jamais que maintenant, vous êtes à moi. »
Ces mots la glaçèrent. Il s'éloigna sans attendre de réponse, laissant Maya seule dans la grande salle vide. Le silence retomba, pesant, et elle sentit une larme couler le long de sa joue. Elle l'essuya rapidement. Ce n'était pas le moment de pleurer. Pas maintenant.
Elle se tenait là, d'ns sa robe, avec son bouquet fané entre les mains. Le manoir Castellano, sombre et silencieux, l'avait engloutie. Elle était maintenant l'épouse d'Adrian Castellano, l'homme surnommé le Démon.
Et elle savait qu'elle ne pourrait plus jamais revenir en arrière.