~Froy~
Je suis allongé sur mon lit. Je ne pense à rien. Je profite juste du calme. En prison, il n'y avait aucun bruit, puisque j'étais en zone d'isolement. Mais ce n'était pas le même calme. Là-bas, il était oppressant, alors qu'ici, il est reposant. Je sens mon téléphone vibrer dans la poche arrière de mon pantalon. Je le sors et regarde ce qu'il y a d'affiché sur l'écran. Quelqu'un m'appelle. C'est un numéro inconnu. Je décide de décrocher.
- Allo ?!
- Qui êtes-vous ?
- J'ai vraiment besoin de votre aide ! C'est mon amie ! Elle est blessée !
- Et alors ? Appelez une ambulance !
- S'il vous plaît...
- Mais vous êtes qui ?! Pourquoi vous m'appelez ?
- Je m'appelle Kira ! Et vous vous êtes Froy c'est ça ?
Mais... Comment est-ce qu'elle connaît mon nom ?! Et qui est cette fille ? Comment a-t'elle eu mon numéro ?
- Comment vous connaissez mon nom ? Qui êtes vous au juste ?
- J'appelle avec le téléphone d'Hortense, elle ne va pas bien du tout. Je suis désolée, vous êtes le premier contact de son répertoire et c'est pour ça qu'il faut que vous m'aidiez ! Je vous en pris, je sais pas quoi faire, je suis perdu...
Hortense a mon numéro ?! Depuis quand ?! Enfin bref, là n'est pas la question.
- Ok, calme toi, je vais t'aider. Où est-ce que tu es ?
- Devant le lycée, sanglote-t'elle.
- Pleure pas, j'arrive tout de suite.
Je sors de la chambre le plus vite possible. Je descends les escaliers et sors dehors. Je monte sur ma moto, toujours au téléphone avec Kira.
- Dis-moi ce qu'elle a, qu'est-ce qui c'est passé ?
- On sortait du lycée et des gars sont venu nous parler. Et ça a dégénéré. Ils ont... I-Ils...
Elle se remet a pleurer. Qu'est-ce qui a bien pu se passer ? Rien de très grave j'espère. Mon Dieu Froy ! T'es un abruti ! Si elle t'appelle en pleurant c'est que ça doit être grave ! A peine cinq minutes plus tard, je me trouve devant leur lycée. Je me gare sur le trottoir et regarde autour de moi pour retrouver Kira. Elle est assise par terre, et tient la main d'une fille. Hortense. Je cours vers elles.
- Kira ! Ça va ?
Je baisse les yeux vers Hortense. Elle est méconnaissable. Elle est recouverte de bleus et de sang. Bon sang... Qu'est-ce qui lui ait arrivé ?! J'appelle une ambulance puis Holmes. Il est paniqué au téléphone, quand je lui explique la situation. En même temps, il y a de quoi. Quand on apprend que sa fille a été tabassé, du moins c'est ce que je pense, j'imagine difficilement Holmes rire aux éclats. Enfaite, une seule personne sur cette Terre est capable de faire ça. Mon « père ».
- Kira, il faut que tu me dise ce qu'il s'est passé... ? Demandais-je.
- Ils l'ont... C'est horrible, j'ai rien pu faire... sanglote-t'elle.
- C'est pas grave, ça va aller, tentais-je de la rassurer.
Quelques minutes plus tard, l'ambulance arrive et examine Hortense. Il l'installe sur un brancard et la transporte à l'intérieur du véhicule. Je demande à Kira d'attendre Holmes devant le lycée. Il ne devrait pas tarder à arriver. Je monte dans l'ambulance et m'installe à côté d'Hortense. Elle est inconsciente. L'infirmier lui met une perfusion et lui injecte un liquide que je ne parviens pas à identifier. Il prend sa tension et l'examine dans tous les sens. Il regarde ses yeux, ses mains, il évalue la gravité de ses blessures. Et moi, je suis assis. Je ne sais pas quoi faire. Je le regarde faire tous ces trucs de médecins. J'essaie de m'imaginer comment font les gens quand ils se retrouvent dans ce genre de situations. Sans comprendre mon geste, j'attrape la main d'Hortense, toujours inconsciente, dans la mienne. Elle est pleine de sang mais ça m'est égal. Le sang ne me dérange absolument pas. A vrai dire, je suis habitué à voir du sang. Le mien mais surtout celui des autres.
L'ambulance s'arrête et la porte s'ouvre. On sort du véhicule rapidement et ils transportent Hortense à l'intérieur de l'hôpital. Je ne lâche pas sa main et suis les infirmiers et brancardiers à travers les couloirs. On arrivent devant une salle qui semble être une salle d'opérations.
- Monsieur, vous ne pouvez pas venir à l'intérieur. Allez donc vous asseoir sur les canapés dans la salle d'attente qui se trouve juste à votre droite, me dit une infirmière en me désignant la salle du doigt. Un médecin viendra vous cherchez une fois que l'on aura terminé.
Je lâche la main d'Hortense et me dirige à l'intérieur de la salle d'attente. Il n'y a presque personne à l'intérieur. Une femme et sans doute sa fille sont assises sur un canapé au fond de la pièce. Et juste a côté de l'entrée, à ma droite, il y a un homme qui s'est endormit dans un fauteuil. Cela doit faire un moment qu'il est là. A ma gauche, il y a un distributeur de bar de céréales et de bonbons. Juste à côté, un autre distributeur mais cette fois-ci de café, et une poubelle.
Je décide de m'asseoir sur un canapé qui se trouve juste à côté des distributeurs. J'attends quelques minutes avant que déboule la famille d'Hortense, son père, sa mère, son frère et Kira. Kira pleure toujours. Elle est la seule à savoir ce qui s'est réellement passé. Même si je pense avoir ma petite idée. Holmes s'assoit à côté de moi et pose sa main sur mon épaule. Je m'écarte rapidement, je n'aime toujours pas quand il me touche. Pourtant, ça ne m'a pas déranger de tenir la main d'Hortense. Sans doute car c'est moi qui ai choisi de le faire. Lincoln, fait les cent pas dans la pièce. Et Célia, la mère d'Hortense ne dit rien. J'ai l'impression qu'elle contient toute sa colère et sa peur et qu'elle peut exploser à tout moment. Mais je préfère ne pas faire attention. Mes mains sont pleines de sang. C'est celui d'Hortense. Je n'ai pas eu le temps de me les laver. J'espère qu'elle va bien. Elle a perdu beaucoup de sang. Tellement de sang que je ne pouvais pas voir ses blessures. J'essaie de comprendre, comprendre ce qu'il s'est passé. Est-ce que ce sont les gars dont m'a parlé Kira qui l'ont frappé ? Si c'est le cas, pourquoi est-ce qu'il feraient ça ?
- Tout est de ta faute ! Hurle la mère d'Hortense.
Je lève la tête et la regarde perplexe. Elle me jette un regard noir. J'avoue que je m'y attendais un peu. Le fait qu'elle rejette la faute sur moi ne m'étonne pas. C'est vrai, je débarque comme si de rien n'était chez elle, je fais ma vie de mon côté, sa fille se retrouve à l'hôpital et vu mon casier cela pourrait être moi l'enfoiré qu'il lui ai fait ça. Mais ce n'est pas le cas, je n'étais pas là lorsque c'est arrivé. Mais sa mère ne peut pas le savoir. Peut-être que si j'avais été là, ça ne se serait pas passé comme ça, peut-être que je l'aurais défendu. Ou peut-être pas. Mais quoiqu'il en soit, je n'y suis pour rien dans cette histoire.
- C'est toi qui l'a frappé ! Tu es un monstre ! Continue-t'elle d'hurler.
Enfaite, quand j'y pense ce serait totalement débile de ma part de frapper une fille puis d'appeler une ambulance et l'accompagner à l'hôpital. Non mais c'est vrai, il faudrait être totalement abruti pour faire une chose pareille. Enfin, peut-être qu'il y a des gens qui font ça... Mais pour qu'elles raisons ? Ça je n'en sait vraiment rien. N'empêche que je trouve ça complètement débile. Et ça n'a aucun intérêt.
Je décide de ne pas répondre. Elle est en colère et inquiète. Elle a peur pour sa fille et c'est normal. Il faut juste qu'elle trouve un coupable, sauf que ce n'est pas moi le coupable. Ce sont ces gars dont m'a parlé Kira.
- Je te déteste ! Tu as son sang sur tes mains !
Enfaîte, si je devrai lui répondre et lui dire ce qu'il s'est réellement passé. Parce-qu'apparemment, personne ne l'a fait. Même si je sais qu'elle me détestera toujours, même si je n'ai rien fais à sa fille.
- Je ne l'ai pas frappé, répondis-je calmement.
Elle se jette sur moi et me frappe avec ses poings. Je la repousse facilement et me lève. Elle continue, mais cette fois je la pousse un peu plus fort et elle retombe sur le canapé qui se trouve en face de celui sur lequel j'étais assis. Elle continue de m'insulter et je décide de m'asseoir de l'autre côté de la pièce. Son mari tente de la calmer mais c'est peine perdu. Elle se déchaîne sur lui a présent. J'essaie de l'ignorer mais je n'y parviens pas. Ses cris résonnent dans la pièce et ont attiré l'attention des personnes présentes dans la salle d'attente et des médecins et infirmiers passant dans le couloir.
Je décide de sortir prendre l'air. Cela va bientôt faire une heure que je suis là et je commence à ne pas me sentir très bien. C'est sans doute le choc émotionnel dû au fait d'avoir vu Hortense recouverte de sang et inconsciente. Même si je suis habitué à voir des gens dans le même état qu'elle, voir pire. Je suis dans le hall principal et je cherche les toilettes. J'aimerai me laver les mains et enlever tout ce sang. Je trouve assez facilement. Une fois les mains complètement propre, j'ai dû me les laver plusieurs fois avant d'être sûr que je n'ai plus de sang, je sors dehors. Je m'assois sur un banc en face du parking. Je respire l'air frais et pollué qui m'entoure. Puis, je me décide à sortir mon téléphone de ma poche. Je clique sur le contacte d'Hollande et lui envoie un message.
« Salut,c'est Froy, le gars du parc. »
Elle ne me répond pas. Elle doit sûrement être occupé. Je l'aime bien cette fille. Elle est pleine de joie de vivre et elle ne me juge pas. Elle se moque de ce que je suis et de ce que j'ai pu faire. Je n'ai pas beaucoup d'amis. A vrai dire je n'en ai qu'un. Payne. Je le connais depuis toujours. C'était le fils du bras droit de mon « père ». Mais j'ai perdu contacte avec lui quand je suis entré en prison. Je n'avais le droit à aucune visite. Et après ma sortie, il n'a pas cherché à me recontacter.
Mon téléphone vibre et je regarde le message qui s'affiche sur l'écran.
« Salut, comment tu vas ? »
« Bien et toi ? »
Oui, je lui ai mentis. Et alors ? Je ne trouve pas ça très grave. Elle ne peut pas savoir ce que je ressens à travers un écran. La vérité est que c'est tout le contraire de ce que je lui ai dis. Je ne vais pas bien. Hortense est à l'hôpital et elle va mal. Kira est complètement choquée de se qu'il s'est passé et Célia est remontée contre moi. Leur humeur déteint sur moi. C'est pour cela que je suis sortis de cette salle d'attente. L'ambiance là-bas est oppressante. Mon téléphone vibre encore et je lis son message.
« Mal, mon amie est à l'hôpital. D'après Kira, une autre de mes amies, elle se serait fait frapper devant le lycée à la sortie des cours. Je suis désolée, il faut que j'aille à l'hôpital. On se reparle plus tard ? »
Je suis sûr à cent pourcents qu'elle parle d'Hortense. Je sais à présent qu'elles sont amies. J'aimerai ne pas la croiser. Ce serait bizarre. Je me lève et décide de retourner dans la salle d'attente. Quand j'entre dans la pièce, deux infirmières tentent de calme Célia. Holmes, quant à lui, attrape sa femme par le bras et la tire à l'extérieur de la pièce. Je m'avance vers Lincoln, qui fait toujours les cent pas à travers la salle.
- Est-ce que tu sais qui sont ce gars qui lui ont fait ça ? Je lui demande.
- Non, dit-il d'un ton sec.
Est-ce qu'il pense lui aussi que c'est de ma faute ou est-ce qu'il est juste tendu dû à ma présence? Ou peut-être tout simplement qu'il est inquiet pour sa sœur, ce qui est compréhensible.
- J'y suis pour rien dans cette histoire, lui expliquais-je.
- Je sais, dit-il en tournant la tête pour ne pas me faire face.
Je laisse tomber. Impossible de parler avec lui. Il est comme un mur, d'une humeur massacrante et sans intérêt. Déprimant quoi. Je décide de prendre un café. Je regarde le verre en plastique se remplir d'un liquide marron foncé, presque noir. J'attrape le verre fumant et retourne m'asseoir de l'autre côté de la salle. Je bois une gorgé de mon café et regarde Lincoln tourner en rond dans la pièce. Kira a arrêté de pleurer. Elle est maintenant immobile, assise sur un canapé.
Deux heures et trois cafés plus tard, j'en suis toujours au même point. Je n'en peux plus d'attendre. Je devrai peut-être rentrer. C'est vrai, c'est bizarre d'être là alors que je ne suis même pas amis avec Hortense. Holmes m'a envoyé un message il y a presque qu'une heure comme quoi il était rentré avec sa femme. Hollande est passé chercher Kira pour la ramener chez elle. Elle ne m'a pas vue et tant mieux. Quant à Lincoln, il a été obliger de retourner en cours. Il ne pouvait pas s'absenter plus car il a des examens à la fin de l'année. Je suis donc seul à attendre. Sincèrement je ne sais pas ce que je fais encore là. Mais je ne peux pas laisser Hortense seule.
Alors que je me levais pour aller prendre un quatrième café, oui ça fait beaucoup mais je n'ai pas d'autre occupation, un médecin entra dans la salle d'attente. Comme il ne restait plus que moi, il n'était pas bien compliqué de deviner que j'étais là pour Hortense. Je m'avance vers lui et lui demande si elle va bien.
- Rassurez-vous, elle va bien. L'opération c'est très bien passée. Elle a trois côtes fêlées et a reçu un gros choc à la tête. Elle a fait une hémorragie interne mais rassurez-vous, elle est hors de danger. On l'a transféré au niveau 2 à l'USC (Unité de Surveillance Continue), dans la chambre 306, me dit le médecin.
- Est-ce que je peux aller la voir ? Je demande.
Il hoche la tête et me préviens qu'elle n'est pas encore réveillée. Je me dirige vers l'ascenseur quand je vois les parents d'Hortense arriver. Holmes se dirige vers moi et me demande :
- Tu as des nouvelles d'Hortense ?
- Oui, elle a été transféré au niveau 2 dans la chambre 306. Le médecin m'a dit qu'elle ne s'était pas encore réveillée. Elle a trois côtes fêlées, elle a reçu un choque important à la tête et elle a fait une hémorragie interne mais elle va bien, répondis-je.
- Merci, tu peux rentrer à la maison.
Sa femme et lui entrent dans l'ascenseur et me laissent planté là. Apparemment, je n'ai pas le droit d'aller la voir... Qu'elle perte de temps franchement. Attendre deux heures pour ne pas aller la voir, c'est inutile.
Je sors de l'hôpital et retourne au lycée. J'y avais laissé ma moto. Je regarde le sol, à l'endroit où j'ai trouvé Hortense. Il y a une tâche de sang. Je monte sur ma moto et démarre.
Il fait complètement nuit quand j'arrive devant la maison. J'entre à l'intérieur et y trouve Lincoln. Il me demande des nouvelles de sa sœur et je lui réponds mot pour mot ce que j'ai répondu à ses parents plus tôt dans la soirée. Je monte à l'étage et vais dans ma chambre. Je me déshabille et enfile un jogging en guise de pyjama. Je me couche dans le lit et remonte la couverture jusqu'à mes épaules.
En une journée, il s'est passé tellement de choses. Ma sortie de prison, ma rencontre avec Hortense et sa famille, ma rencontre avec Hollande dans le parc et l'hôpital. Moi qui voulais retrouver une vie normal comme une personne ordinaire, je crois que cela va être beaucoup plus compliqué que prévu.
Je ferme les yeux et m'endors rapidement. Tous ces évènements m'ont épuisés.