Je ne veux pas mentir, je me sens très flattée qu'un jeune homme comme lui ait des languis pour moi même si je ne compte pas agréer sa demande.
Il se lève et vient à notre rencontre avec un petit sourire en coin. Il est habillé dans un style simple mais chic qui décuple son charme
- Coucou Raph! Fait Rika pendant qu'il lui fait la bise.
- Ça va Rika?
- Ça va mon beau, au rythme du pays.
Elle n'arrête pas avec son affaire de beau. Raph s'approche de moi et dépose un rapide baiser sur ma joue avant de m'entrainer vers la table où il me tire la chaise près de la sienne; je m'y pose docilement, encore sonnée par le fait que ce soit lui le cousin de Hans.
- Merci d'être venu Niya, me dit-il doucement après s'être assis.
- De rien. Bonjour Hans.
- Bonjour belle-sœur! Répond Hans avec un grand sourire.
Celui-là il a la foi, dis donc.
- Mameeh, moi avec qui oh! Qui va me tirer la chaise? Se plaint comiquement ma copine en s'asseyant à son tour.
Je ne peux m'empêcher de sourire malgré moi.
- J'allais le faire Rika! Tu étais juste trop rapide, fait Hans
- Hans, pardon! On se connait. La chevalerie et toi êtes deux ennemis jurés, maugrée Rika en étudiant le menu
- Aïe! Tu viens de me blesser chère dulcinée, dit-il, l'air faussement outragé
- C'est qui ta dulcinée? Dans tes rêves! fait Rika en levant les yeux sur lui, hilare
Un serveur vient rapidement prendre nos commandes de boisson avant de s'éclipser. Pendant que Hans et Rika continuent leur échange comique, Raph se tourne vers moi
- Comment va Divin?
- Il va bien merci, réponds-je en gardant mes yeux rivés sur la carte que je n'arrive même pas à lire tellement mes pensées sont éparpillées. Mon cœur bat comme un tambour égyptien faisant presque trembler mes mains.
Je me sens très timide. Je ne veux surtout pas le regarder.
- Sacré petit bonhomme, dit-il avec un sourire.
- Oui, il l'est.
- La première fois qu'on s'est vu, je n'ai pas eu le temps de me présenter comme il se doit. Vous étiez d'humeur vraiment massacrante; j'ai dû faire recours à la ruse pour connaitre ne fût-ce que votre nom, dit-il doucement de sa voix grave et posée.
C'est un jeune homme très sûr de lui sans être arrogant. Il se dégage de lui un certain charisme, une aisance dans les gestes qui force l'admiration. Il est assis avec son avant-bras posé sur la table devant lui pendant que son autre bras repose nonchalamment sur le dossier velouté de sa chaise, son buste légèrement tourné vers moi. Il a ce regard franc des personnes qui n'ont rien à cacher mais on sait tous que les hommes, ces prédateurs-né, sont maîtres dans l'art du camouflage. Mais je dois admettre qu'il est très différent de ces hommes qui me poursuivent souvent de leurs assiduités: ils sont soit trop nerveux, maladroits, immatures, trop volubiles, ont le regard pervers et la main baladeuse, le sourire psychopathe, me placent trop sur un piédestal pour être honnêtes, scrutent sans vergogne mes courbes pendant qu'ils me parlent regardant à peine mon visage, choses qui me refroidissent direct et les rendent si faciles à rabrouer.
Oui, les avances, j'en reçois presque tous les jours, c'est parfois agaçant. Il faut dire que je ne fais pas vraiment mon âge; plusieurs personnes me croient déjà dans ma vingtaine. Sans être grosse, je suis assez grande de taille avec des formes prononcées devant et derrière, si vous voyez ce que je veux dire. Eléments dangereux hérités de maman colonel Lydie (Rires).
- Raphaël Kawaya, fait-il en me tendant sa main.
Les choses des films.
- Niya, enchantée, dis-je en serrant la main tendue.
Belle main douce mais virile. Longs doigts aux ongles manucurés.
Depuis ma puberté, (Cet âge où les hormones se déchaînent, âge pendant lequel on fait connaissance avec soi-même et l'on découvre qu'un certain type des garçons ne nous laissent plus indifférentes) je trouve très sexy un homme avec des belles mains, ça me fait quelque chose.
Je veux déjà retirer ma main, mais il la retient
- Ce n'est pas juste Niya. Je vous ai dit mon nom complet, dit-il doucement.
- Douniya...Douniya Munguryeke.
Il me sourit de son beau sourire en me regardant dans les yeux, un sourire si craquant. Sa belle bouche bien dessinée s'étire légèrement, laissant voir ses belles dents blanches. Et il a des fossettes! Yooooh! Dangereuse combinaison.
Vous savez, après les belles mains, il y a aussi le sourire qui me tue hein. Ce Raphaël a une façon de sourire qui...eish!
- Douniya. Très joli nom.
- Merci.
Le serveur arrive à ce moment avec nos boissons. Un verre de jus pour moi et un de rosé pour Rika. Il prend nos commandes de nourriture avant de s'éclipser à nouveau.
Pendant tout le temps que nous passons ensemble, il me parle succinctement de lui. J'apprends qu'il a 25 ans, cadet d'une fratrie de trois fils et fait sa dernière année en génie électrique dans une université capetonienne. Il me pose des questions sur moi, ma famille, ce que j'aime et n'aime pas, mes hobbies. Questions auxquelles je réponds sans faire ma "chichi". Il m'écoute avec un intérêt non-feint pendant que je parle, ce qui me plaît beaucoup. Il est un peu surpris lorsque je lui dis que je n'ai que 17 ans, j'ai un peu peur que le fait que je sois si jeune le refroidisse mais à mon grand soulagement, cela ne semble pas être le cas.
Raph, je le découvre est un jeune homme dont la compagnie est très agréable et nous avons beaucoup des choses en commun. Il a pu créer entre nous une atmosphère dans laquelle je me sens très à l'aise. À un moment, il arrive même à me faire rire (Ce qui n'est pas chose aisée hein! Je ne dénude pas mes dents devant n'importe quel homme.)
Pendant que le serveur débarrasse notre table, je jette un œil à ma montre. J'ouvre grand les yeux quand je découvre qu'il est déjà 15 h moins. Je n'ai pas vu le temps passer ! Mungu wangu! (Mon Dieu!) Maman doit déjà se demander où je suis.
- Raph, je dois déjà partir, fais-je en me levant comme un ressort.
Rika qui rit aux éclats avec Hans s'interrompt et me regarde. Elle regarde l'heure à son tour et comprend ma panique.
Raph se lève à son tour, fait un signe de la main à notre serveur qui vient rapidement avec l'addition et des bonbons à la menthe. Il demande au jeune serveur s'il peut nous appeler un taxi, chose qu'il accepte volontiers. Comment peut-il refuser après le gros pourboire?
Nous nous rasseyons pour attendre l'arrivée du taxi.
- Ça va Niya? me demande-t-il de sa voix grave.
- Oui, je suis juste un peu inquiète. A cette heure, je devais déjà être chez moi.
- Je vois que maman Lydie ne fait pas dans la plaisanterie. C'est bien.
Mon cher, tu as compris.
- Je veux vraiment apprendre à mieux te connaître Niya, me dit-il en prenant ma main
On a déjà tué le vouvoiement. Trop lourd.
- Bibliquement? Lui demandé-je, le prenant au dépourvu
Il rit, surpris.
- Ça dépendra de toi. Je ne te forcerai jamais à faire quoi que ce soit qui te rendrait mal à l'aise. Je veux passer plus de temps avec toi, tu me plais énormément.
- Tu veux passer du temps avec moi juste le temps que dureront tes vacances après basta! Je ne suis pas ce genre de fille.
- Je ne recherche pas une aventure ou une amourette sans lendemain. Si j'en voulais une je ne serais pas là avec toi. Je veux quelque chose de sérieux et de durable entre nous. Tu as bougé quelque chose en moi, me murmure-t-il en me regardant droit dans les yeux.
Ah bon? J'aime ce qu'il vient de dire. Je sens un agréable tremblement me traverser.
- ...
- Donne-moi une chance. Je ne te décevrai pas.
C'est la partie où je dois dire: "Non, je ne suis pas du tout intéressée".
Mais je n'ai plus envie de le dire. Je mentirais si disais qu'il me laisse de marbre.
Et si je lui accordais une chance?
Mais je ne peux quand-même pas dire oui le même jour sans qu'il transpire un peu. Il doit mariner.
- Je vais réfléchir, lui dis-je en baissant les yeux sur ma main qui est encore dans la sienne
- Pendant combien de temps dois-je attendre Niya?
Je ne sais pas.
- Une semaine.
- D'accord, j'attendrai, fait-il en effleurant ma main qu'il tient de ses lèvres sans me quitter des yeux.
- Monsieur, votre taxi est là, nous annonce le serveur.
- Aksanti (Merci), répond Raph
- De rien Boss.
Hans et lui nous accompagnent à l'extérieur où nous attend notre taxi. Raph règle rapidement la course, vient poser un baiser sur ma joue et me chuchote un " Je suis en apnée" avant que je ne borde le véhicule avec un petit sourire flottant sur mes lèvres.
- Alors? C'est comment ma co? J'ai vu comment le courant est bien passé entre vous! Dit Rika toute excitée pendant le trajet vers Salongo. Tu as dit oui?
- Non. Je lui ai dit que je réfléchirai. Il aura la réponse dans une semaine.
- Hum, toi hein! Pardon, il faut dire oui, vous êtes trop bien ensemble. Ce mec est pour toi.
- Masirika, tu chantes ses louanges comme ça pourquoi? C'est ton frère?
- Hein mamaaaan! C'est toi qui ira encaisser le mapumbu (le p*nis) du gars à sa place? Hein? Intervient le chauffeur, nous surprenant toutes les deux
Kaaa! Celui-là, par où est-il entré? Qui l'a invité?
Rika et moi le regardons, perplexes. Je n'ai pas vraiment fait attention à lui quand j'ai bordé le taxi. C'est un jeune homme clair de peau avec une barbe rasé style zéro faute et des longs rastas comme ceux de Bob Marley tirés en chignon au sommet de son crâne. Il a aux poignets des bracelets avec des dessins de la feuille de cannabis sur fond jaune, rouge et vert.
- Je dis hein tonton! Par où es-tu entré? Qui t'a sonné? Attaque Rika
- Je suis entré par la porte! Et qui va me sonner? Quand tu me regardes, je ressemble à une cloche peut-être? réplique le chauffeur en regardant bien Rika dans son rétroviseur
Eeeeeh! Il a la bouche!
Je ne peux m'empêcher d'éclater de rire. C'est plus fort que moi.
- Ce n'est pas de ta faute. La fumée de la feuille que tu fumes circule encore dans ta tête, espèce de lunatique chanvré! Crache ma copine
- Lunatique chanvrée toi-même, tu m'entends? Au fait, lunatiques chanvrés tes ancêtres, lunatiques chanvrés tes parents et pour finir, lunatiques chanvrés toute ta descendance!
- Hein? Impoli! Je vais te déraciner tes rastas de pédé un à un, tu me cherches? Tu as de la chance que tu sois entrain de conduire.
- C'est qui ton pédé? Moi Jahman je peux être pédé? Viens faire un tour chez moi, je te ferai comprendre combien je ne suis pas pédé.
- Rika, pardon, ne t'occupe pas de lui, interviens-je, hilare
- Ah non hein! Qui ira faire un tour chez toi? Pouaaah! Je préfère mourir...
Ils sont encore en train de se chamailler lorsque le fameux Jahman nous dépose enfin devant chez Rika.
- Toi la fille qu'on appelle Rika, nous deux-là, ça ne finit pas ici, crie-t-il à travers la vitre baissée de sa portière avant de s'en aller en klaxonnant.
- Mais où ce serveur a-t-il trouvé ce taximan? Fait Rika en regardant le taxi s'éloigner avec les poings sur les hanches.
- Hahahahahaha! Pardon, viens que j'aille me changer.
Mes côtes me font mal, j'ai trop ri. Ce chauffeur est un vrai phénomène. Nous allons dans sa chambre où je remets rapidement mes fringues, récupère mon sac et dis au revoir à Rika avant de filer vers chez moi.
Je réfléchis déjà sur quelle raison j'avancerai pour mon retard pendant que je pousse notre petit portillon. Je trouve maman assise dans la véranda de la cour arrière avec Mamie qui lui enlève son tissage.
- Jambo yenu, habari? (Salutation) lancé-je, un peu nerveuse
- Muzuri. (réponse à la salutation) répondent-elles
- Niya, d'où viens-tu? Demande ma mère
- De l'école maman.
- Vraiment? Jusqu'à cette heure?
- Oui, il y avait beaucoup à faire. On a défriché le champ de l'école et tu sais combien il est grand.
- Oh! Vous avez défriché hein?
- Oui maman.
- Et le défrichage était tellement intense que toi Niya tu t'es retrouvé au quartier Lumumba, n'est-ce pas?
Eeeeeeeh! Les satellites!
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