Il a utilisé la bague de sa mère, un bijou de famille. Celle qu'il m'avait montrée un jour, en me disant qu'elle était pour la femme avec qui il passerait sa vie.
Puis il m'a présentée, moi, sa petite amie depuis quatre ans, comme « une très bonne amie ». Sa nouvelle fiancée m'a souri doucement et m'a dit que leur mariage serait libre, me donnant la permission de rester sa maîtresse.
Je l'ai entendu confier son vrai plan à un ami : « Carine, c'est ma femme pour la galerie, mais Ambre, c'est mon jouet pour le plaisir. »
Il pensait que j'accepterais d'être sa marionnette. Il avait tort.
J'ai sorti mon téléphone et j'ai envoyé un message à un numéro que je n'avais jamais osé appeler. Celui de l'exécuteur testamentaire de mon père, avec qui j'étais en froid.
« Je dois réclamer mon héritage. »
Sa réponse a été instantanée. « Bien sûr, Mademoiselle Lefèvre. La condition est un mariage avec moi. Êtes-vous prête à procéder ? »
« Oui », ai-je tapé. Ma vie avec Charles-Antoine était terminée.
Chapitre 1
Aujourd'hui, c'était mon quatrième anniversaire avec Charles-Antoine de Villiers. C'était aussi le jour de son retour après trois mois de voyage d'affaires. La double signification de cette date faisait battre mon cœur à tout rompre.
Il m'avait envoyé un texto ce matin, des mots simples mais pleins de promesses : « Ambre, porte la robe blanche. J'ai une surprise pour toi. »
Je savais ce que ça voulait dire. Nous avions parlé de mariage, d'avenir, de passer le reste de nos vies ensemble. La surprise ne pouvait être qu'une demande en mariage.
J'ai passé tout l'après-midi à me préparer. J'ai coiffé mes cheveux, me suis maquillée avec un soin particulier, et j'ai finalement enfilé la robe blanche qu'il avait mentionnée. C'était une pièce de créateur qu'il m'avait achetée l'année dernière, élégante et simple. Je me suis regardée dans le miroir, m'entraînant à sourire, à prononcer le mot « Oui ».
Mon esprit s'emballait, imaginant tous les scénarios. Allait-il s'agenouiller ? Que dirait-il ? Pleurerait-il ? Je sentais une vague d'excitation, une énergie nerveuse qui faisait légèrement trembler mes mains.
Enfin, l'heure est arrivée. J'ai conduit jusqu'à l'Hôtel Impérial, l'endroit qu'il m'avait indiqué. Toute la salle de bal du dernier étage était réservée. Mon cœur a gonflé de joie. Il avait vu les choses en grand. Ce serait la nuit la plus romantique de ma vie.
Je suis sortie de l'ascenseur, mon sourire prêt, mon « Oui » sur le bout de la langue.
Mais la scène qui m'a accueillie a figé mon sourire sur mon visage.
La salle de bal était en effet magnifique, remplie de roses blanches et de lumières douces et scintillantes. Une bannière était suspendue au fond, mais les mots qui y étaient inscrits n'étaient pas ceux que j'attendais. « Félicitations, Charles-Antoine & Carine ».
Charles-Antoine se tenait au centre de la pièce, mais il ne me cherchait pas. Il tenait les mains d'une autre femme, Carine Moreau, son amie d'enfance et une mondaine bien connue à Paris.
Il a posé un genou à terre.
La foule d'amis et de membres de leurs familles a poussé un cri de délice.
« Carine », la voix de Charles-Antoine était chargée d'émotion, la même voix qu'il utilisait pour me murmurer des mots doux. « Nous nous connaissons depuis toujours. Tu as toujours été la seule pour moi. »
Les yeux de Carine se sont remplis de larmes. Elle était belle et triomphante.
Charles-Antoine a ouvert une petite boîte en velours. À l'intérieur se trouvait une bague, mais pas n'importe laquelle. C'était celle de sa mère, un bijou de famille qu'il m'avait montré un jour, en me disant à quel point elle comptait pour lui.
« Cette bague appartenait à ma mère », a-t-il dit, sa voix résonnant dans la pièce silencieuse. « Elle a toujours voulu que je la donne à la femme avec qui je passerais ma vie. Cette femme, c'est toi, Carine. Ça a toujours été toi. »
Carine a laissé échapper un sanglot de bonheur.
« Veux-tu m'épouser ? » a-t-il demandé.
« Oui ! Mille fois oui ! » a-t-elle crié.
La foule a éclaté en applaudissements.
Je me souvenais du jour où il m'avait montré cette bague. Il l'avait tenue si précieusement, presque avec révérence. Il m'avait dit qu'elle était pour sa future femme. J'avais cru qu'il parlait de moi. Maintenant, je réalisais la vérité. J'avais été une idiote.
Quelqu'un dans la foule a murmuré : « J'ai toujours su qu'il finirait avec Carine. Il est obsédé par elle depuis qu'ils sont gamins. »
Ces mots ont confirmé la terreur glaciale qui emplissait ma poitrine. Mes quatre années avec lui, toute notre relation, n'avaient été qu'un mensonge.
Ce n'est qu'après avoir passé la bague au doigt de Carine et l'avoir embrassée passionnément que Charles-Antoine m'a enfin vue, debout près de l'entrée. Ses yeux se sont écarquillés une seconde, une lueur de surprise avant que son expression ne redevienne lisse.
« Ambre », a-t-il dit en s'approchant, entraînant une Carine toujours radieuse avec lui. « Te voilà. Je veux te présenter quelqu'un. »
Il a fait un geste entre nous. « Carine, voici Ambre Lefèvre, une... une très bonne amie à moi. »
« Et Ambre », a-t-il continué, sa voix désinvolte, comme s'il présentait une étrangère, « voici Carine Moreau, ma fiancée. »
Le mot « fiancée » a été un coup physique. J'avais du mal à respirer.
Carine m'a souri, un sourire doux et poli qui n'atteignait pas ses yeux. « C'est un plaisir de te rencontrer enfin, Ambre. Charles-Antoine m'a tant parlé de toi. »
Ses mots étaient comme du miel empoisonné.
Je suis restée là, incapable de prononcer un seul mot, mon visage un masque de calme forcé.
Puis j'ai remarqué le bracelet au poignet de Carine. C'était une délicate chaîne de diamants, identique à celle que Charles-Antoine m'avait offerte pour notre deuxième anniversaire. Il m'avait dit qu'elle était unique.
Un autre mensonge.
Charles-Antoine a semblé remarquer mon silence. Il a posé une main sur mon épaule, son contact me paraissant maintenant étranger et importun. « La famille de Carine revient s'installer à Paris. Elle va rester avec nous pendant un certain temps, jusqu'au mariage. »
Il a dit « nous » comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. Comme s'il s'attendait à ce que je partage notre appartement avec sa nouvelle fiancée.
J'étais si anesthésiée, si complètement anéantie, que j'ai juste hoché la tête. Je ne pouvais pas assimiler l'audace pure de sa demande.
« J'ai besoin de prendre l'air », ai-je réussi à articuler, me détournant avant qu'ils ne puissent voir les larmes monter à mes yeux.
J'ai titubé vers les toilettes, mes jambes instables.
Sous la lumière froide et stérile de la salle de bain, j'ai fixé mon reflet. La femme pleine d'espoir et de joie qui était arrivée une heure plus tôt avait disparu. À sa place se trouvait une étrangère pâle, aux yeux creux, dans une robe blanche qui ressemblait maintenant au costume d'une mauvaise blague.
Alors que je m'aspergeais le visage d'eau froide, j'ai entendu des voix dans le couloir. C'était Charles-Antoine, qui parlait à son meilleur ami.
« Mec, t'es fou ? Demander Carine en mariage juste devant Ambre ? C'était glacial. »
Je me suis figée, l'oreille collée contre la porte.
Charles-Antoine a ri. C'était un son cruel, méprisant. « Et alors ? Les Moreau et les de Villiers fusionnent. Ce mariage est un accord commercial. Il assure ma position de PDG. »
« Et Ambre ? » a demandé son ami.
« Ambre ? Elle n'ira nulle part », a dit Charles-Antoine avec une confiance écœurante. « Elle m'aime. Elle s'en remettra. Carine est ma femme, mais Ambre... Ambre peut être ma maîtresse. Celle qui me satisfait vraiment. Carine est au courant. Une jolie femme de la haute société pour la galerie, et une femme passionnée à côté pour le plaisir. C'est parfait. »
Il m'appelait sa femme, un outil pour son plaisir.
Les mots m'ont percutée, chacun un coup de marteau sur mon cœur déjà brisé. Des larmes coulaient sur mon visage, chaudes et silencieuses.
Je me suis souvenue de ses promesses. « Ambre, je t'aimerai pour toujours. » « Tu es la seule pour moi. » « Je ne te laisserai jamais partir. »
Pour lui, « pour toujours » avait une durée de vie de quatre ans.
Son amour était un mensonge. Ses promesses ne valaient rien.
L'homme que j'aimais, l'homme à qui j'avais consacré quatre ans de ma vie, ne me voyait que comme un jouet jetable.
Une rage froide a commencé à brûler à travers la douleur. Il pensait que j'allais accepter ça ? Que j'allais rester et être sa maîtresse pendant qu'il paradait avec sa femme « respectable » ?
Non.
J'ai sorti mon téléphone, mes doigts tremblants. J'ai fait défiler mes contacts jusqu'à trouver un numéro que je n'avais jamais osé appeler. Un numéro que l'avocat de mon père m'avait donné juste avant sa mort. « Appelez cet homme si vous êtes un jour dans une situation inextricable », avait dit l'avocat. « C'est l'exécuteur testamentaire. »
Mon père et moi étions en froid depuis des années, une conséquence douloureuse de mensonges qui avaient détruit ma mère. Je n'ai jamais rien voulu de lui. Mais maintenant, j'étais dans une situation inextricable.
J'ai tapé un message simple : « Monsieur Chevalier, c'est Ambre Lefèvre. Je dois réclamer mon héritage. »
J'ai appuyé sur envoyer.
Un instant plus tard, une réponse est arrivée. Elle était formelle, directe, et promettait une issue.
« Bien sûr, Mademoiselle Lefèvre. La condition stipulée dans le testament de votre père est un mariage avec moi. Êtes-vous prête à procéder ? »
J'ai fixé le message, les mots se brouillant à travers mes larmes. Épouser un inconnu ? C'était de la folie. Mais rester avec Charles-Antoine, être son secret, son jouet, était un sort pire que la mort.
C'était ma seule échappatoire.
J'ai tapé ma réponse.
« Oui. »