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Chapitre 5
Louis entra dans l'appartement comme un homme qu'on aurait jeté dans une cage dorée. Les pièces immenses semblaient s'étirer à l'infini. Chaque meuble, chaque tableau, chaque objet, avait été choisi avec une précision clinique, mais rien ne semblait vraiment avoir été fait pour lui. Il se sentait comme un intrus dans ce monde trop poli, trop parfait, un monde qui ne le concernait pas, un monde qu'il n'avait jamais imaginé habiter.
Éléonore n'était pas là. Elle avait déjà pris l'habitude de disparaître dans son bureau, dans ses réunions, dans ses obligations. Louis n'était qu'une pièce de plus dans son jeu. C'était ce qu'il pensait. C'est ce qu'il voulait penser. Mais quelque chose en lui, une rage qu'il n'arrivait pas à calmer, bouillonnait sous la surface.
Les cartons étaient empilés dans le coin du salon. Il n'avait pas vraiment prévu d'aménager ici. Ce n'était pas dans ses plans. Mais voilà, la règle était simple : il avait signé un contrat, et désormais, il devait jouer le jeu. Emménager dans cet appartement, partager son espace avec elle, cette femme qu'il détestait et désirait à la fois. Une situation insupportable. Un paradoxe permanent.
Le téléphone vibra dans sa poche. Il le sortit et jeta un coup d'œil à l'écran : un message d'Éléonore. "Je pars en réunion, sois sage. Ne fais pas de bêtises." Un sourire amer se dessina sur ses lèvres. La phrase était pleine de sous-entendus. Elle le considérait comme un homme sous contrôle, une marionnette qu'elle pouvait manipuler à sa guise.
Il n'allait pas la laisser faire. Pas cette fois. Pas avec ce qu'il avait en tête.
Quand elle rentra, il était là, allongé sur le canapé, les bras derrière la tête, comme si tout cela ne le touchait pas. Elle le regarda un instant, une étincelle de mépris dans ses yeux. "Tu t'es fait à l'idée ?" demanda-t-elle froidement.
Louis se redressa lentement, les yeux plantés dans les siens. "Ça va, je me débrouille. Pas de souci."
Elle haussait les épaules, comme si elle était au-dessus de tout ça, comme si tout cela était secondaire, presque un détail. Mais Louis savait. Elle savait. Ils savaient tous les deux que ce qui se passait ici allait bien plus loin que les apparences. Il n'était pas juste un mari de façade. Il n'était pas un pion qu'elle pouvait déplacer comme bon lui semblait.
"Tu crois vraiment que tu peux m'ignorer comme ça, Louis ?" Éléonore s'approcha de lui, l'air bien plus menaçante qu'il ne l'aurait cru. "Tu n'es pas mon égal. Je te l'ai déjà dit, mais tu sembles avoir du mal à comprendre."
Louis la fixa un moment, puis éclata de rire, un rire sans joie, amer. "Tu sais, tu fais bien de me rappeler ça. C'est vrai, je ne suis pas ton égal. Mais je ne suis pas non plus ton chien, Éléonore."
Le regard d'Éléonore se durcit, mais elle ne réagit pas tout de suite. Elle se contenta de le fixer, comme si elle mesurait ses paroles. Puis, sans crier gare, elle se pencha vers lui. Elle n'avait pas l'air de vouloir l'embrasser, mais plutôt de lui imposer sa domination d'une manière plus subtile, plus directe. Ses lèvres effleurèrent les siennes dans un baiser presque brutal, comme un avertissement.
Louis n'eut pas le temps de réagir, et elle se redressa rapidement. "T'as bien compris ?" demanda-t-elle, les yeux brûlants.
Louis resta un instant figé, la sensation du baiser encore sur ses lèvres, une sensation froide, glaciale. "Oui," répondit-il finalement, sa voix rauque. "Je crois bien que j'ai compris."
Elle se tourna vers lui, un sourire en coin. "Alors, tu n'as plus qu'à respecter les règles. Ce n'est pas compliqué, tu sais."
Louis sentit une chaleur sourde monter en lui. "J'ai pas l'intention de jouer à ton jeu. Pas à ta façon." Il se leva brusquement, ignorant l'air surpris qu'elle affichait. Il se planta devant elle, ses yeux brûlants de défi. "T'as oublié une chose, Éléonore. Je suis pas là juste pour faire acte de présence. J'ai ma part à jouer. J'ai mes propres règles."
Elle ne répondit pas tout de suite. Elle le dévisagea, ses yeux évaluant le défi dans son regard. Puis elle éclata de rire, un rire sec, glacé. "Tu crois qu'on va faire ça à ta manière ? Tu penses vraiment que tu vas me manipuler ? Tu es tout aussi prisonnier de ce mariage que moi, Louis."
Louis la fixa intensément. "On verra bien."
Il n'était pas idiot. Il savait que tout cela était une mascarade. Mais il savait aussi que, dans ce jeu, la vérité n'était pas ce qui comptait. Ce qui comptait, c'était de savoir manipuler les règles. Il avait son plan, et il était prêt à jouer avec la même ferveur qu'elle. Si elle pensait le contrôler, alors elle allait devoir redoubler d'efforts.
Il passa le reste de la soirée à organiser ses affaires dans l'appartement. Il ne lui avait pas encore montré ce dont il était capable. Mais ce soir, il sentait l'odeur de la guerre. Cette guerre silencieuse qui venait juste de commencer.
Elle était peut-être la reine de ce monde d'apparence et de contrôle, mais il n'allait pas se laisser faire. Pas comme ça.
Les jours passèrent. L'appartement devenait un terrain de jeu. Éléonore continuait de vivre sa vie, son empire, ses engagements. Louis, quant à lui, se faufilait dans l'ombre, observant, analysant, attendant son moment.
Mais quelque chose commença à changer. Il n'était pas simplement un spectateur dans cette situation. Il avait un rôle à jouer, et il comptait bien le jouer à sa manière.
Elle n'avait pas encore compris à quel point il était rusé. Mais elle finirait par le comprendre. Les règles avaient changé. Et il comptait bien lui prouver que, sous ses airs de soumission, il y avait bien plus qu'un simple homme à ses ordres.