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Chapitre 9
Jonas n'avait pas vu venir l'attaque. Il savait que le danger était omniprésent, que Gabriel ne tolérerait aucune menace, mais il avait cru avoir un peu de temps avant que les choses ne dégénèrent. Le bruit des pas lourds, les vibrations dans l'air étaient les premiers signes qu'il n'était plus seul. Il ne tourna pas la tête immédiatement, préférant feindre l'ignorance. Mais chaque mouvement de ses muscles était tendu, chaque fibre de son corps en alerte, prêt à réagir.
Ils étaient là.
Les loups de Gabriel, cachés dans l'ombre. D'abord, un bruit sec, celui d'un corps lourd frappant la terre. Puis un autre. Trois, quatre... Il n'avait pas le temps de compter. Il le sentit avant même de les voir. L'odeur de la sueur, du cuir, et une pointe de métal. Des guerriers entraînés, sentant la menace dans l'air. Ils étaient là pour lui.
Jonas esquiva le premier coup avec une facilité qui aurait pu paraître presque désinvolte, mais il n'avait jamais été quelqu'un de désinvolte. Il n'y avait pas de place pour ça dans ce monde. Le coup était rapide, mais pas assez. Son pied glissa sur le sol, et en une fraction de seconde, il pivota, son poing percutant le menton de l'assaillant. L'homme s'effondra avec un grognement étouffé, mais deux autres l'attaquèrent simultanément.
Un coup de pied dans ses côtes l'envoya valser en arrière, mais Jonas roula, se redressant aussitôt. Il n'avait plus le temps de réfléchir. Il fallait qu'il se batte, qu'il survive. Il se saisit d'une branche tombée au sol, son bras se tendant avec la précision d'un arc. Il frappa un des assaillants en plein visage, un bruit sourd résonna alors que l'homme chutait. Mais ils étaient trop nombreux.
Son dos contre un tronc d'arbre, Jonas savait que s'il ne les maîtrisait pas rapidement, il finirait par être acculé. Il avait l'avantage de la surprise, mais il était toujours seul, face à des guerriers expérimentés, venus pour le capturer ou le tuer. Un mouvement à sa droite. Un autre loup bondissait vers lui, un couteau à la main. Jonas n'eut pas le temps de réfléchir. Il se baissa juste à temps pour éviter la lame, saisissant le poignet de l'assaillant avec une telle force que l'homme lâcha son arme dans un cri de douleur.
Jonas se débarrassa du dernier d'un coup rapide, un coup de poing qui brisa le nez de son adversaire. Il avait le souffle court, mais il était toujours en vie. Un instant de répit, juste un, avant de se rendre compte que la bataille n'était pas terminée. Il avait peut-être éliminé trois guerriers, mais il en restait encore. La meute de Gabriel n'était jamais en reste.
Il se retourna, repérant la silhouette qui s'approchait dans l'ombre. Un mouvement furtif. Un détail dans l'ombre. Quelque chose qui le fit frissonner. Et puis une voix, douce mais tranchante. Lysandra.
- Jonas, bouge !
Elle apparut dans son champ de vision, et à la même seconde, il sentit le poids du monde se resserrer autour de lui. La pression de la situation. La pression de la présence de Lysandra. Elle se tenait là, immobile, son regard noir rivé sur lui. Mais ce n'était pas le moment pour les questions ou les regrets. Il n'y avait pas de place pour ça.
- Allez, vite ! Ne t'arrête pas !
Elle n'avait pas besoin de le dire deux fois. Ils se déplacèrent ensemble dans un mouvement fluide, comme un seul corps, esquivant les attaques et répondant avec la brutalité d'un loup. Ils n'étaient pas simplement des partenaires de combat, mais des âmes connectées, une compréhension silencieuse entre eux. Rien n'avait changé. Pas vraiment. Tout semblait différent, mais au fond, c'était toujours eux. Toujours cette rage commune.
Un coup de feu éclata derrière eux. Un autre loup de Gabriel. Mais Lysandra réagit en un éclair, sa main se saisissant de la carabine d'un assaillant avant qu'il ne puisse tirer une seconde balle. Elle pivota, utilisant l'élan pour désarmer et repousser l'homme d'un coup sec. Puis, avec un regard vers Jonas, elle l'entraîna plus loin, l'adrénaline de la fuite et de l'action bourdonnant dans leurs veines. Ils ne s'étaient jamais aussi bien compris que maintenant. Leurs corps se mouvaient en synchronie, le monde autour d'eux devenant un flou. La nature était leur complice.
Ils parvinrent finalement à se faufiler dans l'ombre des arbres, les bruits de la lutte s'estompant derrière eux. Ils s'arrêtèrent, haletants, les muscles tendus, mais intacts.
- Tu m'as sauvée. Encore. Murmura Jonas, son regard plongé dans celui de Lysandra, une lueur de gratitude mêlée à une colère sourde qui ne disparaissait jamais.
Elle haussait les épaules, un léger sourire en coin. Mais il pouvait lire la tension dans ses yeux, une tension qu'elle n'arrivait pas à dissimuler.
- Tu ne m'as pas dit que ça serait facile, Jonas. Mais tu es toujours là.
Un frisson lui parcourut l'échine. Il n'avait pas le temps de se perdre dans des considérations inutiles. La guerre était encore loin d'être finie.
- Ça n'a jamais été facile, Lysandra, murmura-t-il. Mais je ne fais que commencer. Gabriel va devoir faire face à plus que des murmures et des rumeurs. Je vais prendre ce qui nous revient. Tout ce que nous avons perdu. Mais il ne nous laissera pas tranquille avant d'être certain que nous sommes une menace.
Lysandra se tourna vers lui, son regard plus grave que jamais. Elle savait qu'il n'y avait pas de retour en arrière maintenant. Elle savait que la meute allait être dévastée, que leur combat allait tout changer, mais à quel prix ? Une question qu'elle n'osait poser.
- Et nous, Jonas ? demanda-t-elle, sa voix presque un souffle. Que deviendra-t-il de nous, une fois Gabriel tombé ?
Il n'eut pas la réponse qu'elle attendait. Il haussait les épaules, cherchant ses mots avec une sincérité brute qu'il ne se permettait qu'à elle.
- Nous vivrons. Ensemble. Et si ce n'est pas ce que tu veux, alors... tout cela n'aura servi à rien. Mais si tu veux qu'on y arrive, il va falloir plus que de la volonté. Il va falloir se battre.
Un silence lourd s'installa entre eux, un silence chargé de ce qu'ils n'osaient pas dire. Mais au fond, ils le savaient : rien ne serait jamais simple.