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Chapitre 5
Les frontières de son ancienne meute n'avaient pas changé. Le territoire portait toujours son odeur, un mélange de souvenirs et de trahison. Pourtant, Jonas savait qu'il ne pouvait pas se laisser aller à la nostalgie. Il n'était plus chez lui. Plus maintenant.
Il se déplaça dans l'ombre, rapide et silencieux, longeant les sentiers qu'il connaissait par cœur. Rien ne lui échappait. Pas les patrouilles trop bien organisées, ni les marques de griffes sur certains arbres, signes de tensions internes. Il ne fallait pas être un génie pour comprendre que Gabriel régnait sur une meute fracturée.
Une odeur étrangère lui parvint. Une peur latente. Une soumission contrainte. Il laissa ses instincts le guider jusqu'à une clairière où plusieurs loups étaient rassemblés. Des entraînements. Non, des démonstrations de force. Gabriel, droit et imposant, surveillait le combat entre deux jeunes. L'un d'eux, plus faible, peinait à suivre. Gabriel laissa le duel durer, son expression neutre, jusqu'à ce que le plus fort envoie son adversaire au sol d'un coup de crocs brutal. Un filet de sang coula sur la terre battue.
- Relève-toi, ordonna Gabriel d'une voix tranchante.
Le jeune ne bougea pas. Trop sonné. Trop blessé.
- Relève-toi, j'ai dit.
Il y avait dans son ton une menace implicite. Jonas reconnut immédiatement la tactique. Briser les faibles, cultiver la peur. Ce n'était pas ainsi qu'il dirigeait la meute. Un Alpha protégeait les siens. Gabriel, lui, les écrasait sous son autorité.
Le loup blessé tenta de bouger, mais un coup de patte rageur de Gabriel l'envoya rouler plus loin. Les autres loups baissèrent la tête, certains avec résignation, d'autres avec une colère silencieuse. Jonas retint un grondement. Il ne pouvait rien faire maintenant. Pas encore.
Un mouvement attira son attention. Une silhouette apparut à la lisière du camp, et son cœur rata un battement.
Lysandra.
Elle se tenait droite, mais quelque chose en elle avait changé. Ce n'était pas son apparence – toujours aussi fière, toujours aussi belle. C'était son regard. Une ombre voilait ses prunelles. Une tristesse sourde, pesante. Elle observait la scène sans intervenir, les doigts crispés sur le tissu de sa tunique.
Puis Gabriel s'approcha d'elle, posa une main possessive sur son bras. Jonas sentit son loup hurler en lui, mais il se força à ne pas bouger. Pas maintenant. Il se contenta d'observer. Lysandra ne recula pas, ne protesta pas, mais son corps entier se raidit sous le contact.
Elle n'était pas là de son plein gré.
Jonas serra les poings. L'envie de sortir de l'ombre, de défier Gabriel, était une brûlure insoutenable. Mais ce n'était pas le moment. Il devait être intelligent, calculer ses coups, frapper au bon endroit.
Il recula lentement, s'éloigna avant que son odeur ne trahisse sa présence. Ce qu'il venait de voir confirmait ce qu'il soupçonnait. Gabriel n'avait pas conquis la meute par le respect, mais par la peur. Et Lysandra... Elle n'avait jamais choisi cette union.
Jonas n'avait plus qu'un seul objectif en tête : renverser Gabriel.
Et récupérer ce qui lui appartenait.