Chapitre 2 1- En route pour le lycée

Lundi 18 septembre 2017

À quoi est-ce qu'il peut bien ressembler?

Est-ce qu'il a les cheveux roux comme moi?

Où les yeux gris verts?

Peut-être que les siens sont verts parce que ceux de maman sont gris?

Et mon nez, est-ce que je le tiens de lui?

Est-ce qu'il me connaît?

Est-ce qu'il sait qu'il a une fille de dix sept ans quelque part qui pense à lui?

Est-ce qu'il sait que j'existe?

Je voudrais tant le savoir...

Ma mère: Chelsea ?! CHELSEA!

Je manquai de tomber de ma chaise, surprise.

Moi: Hein quoi?

Ma mère : Ça fait une demie heure que je t'appelle. Ton café va refroidir.

Moi: Café...café...Ah oui, mon café. Je l'avais complétement oublié. Je vais le boire. Tu vois je le...Pouah!

Je recrache aussitôt dans ma couverture de table et je tousse à en pleurer. Tu parles d'un truc qui va refroidir. C'est carrément de la lave. Au secours! Ma gorge! Ma langue! À boire! J'étouffe ! Je meurs ! À moi!

Tu trouves pas que tu dramatises un peu là ?

Me demanda cette toute petite voix dans ma tête.

Je vous rassure immédiatement sur un fait très important : je-ne-suis-pas-folle. Ok?

Quant à toi c'est facile de parler quand on est bien au chaud dans la tête de quelqu'un à jouer les mademoiselles fais pas ci fais pas ça. Sors et on verra.

Roh là là...

Ma mère : Oh ma chérie, qu'est-ce que tu as fait? Il ne fallait pas boire tout d'un coup non plus. Tu vas bien? Prends un verre d'eau.

Proposa maman toute paniquée en me tendant un verre d'eau par dessus la table. Je ne me fis pas prier pour tout avaler sans pour autant être totalement soulagée. En fait, je souffre ENCORE plus.

Moi: Mais C'est ta faute aussi. Pourquoi tu m'as pas dit que Madame Parks l'avait fait bouillir à 100 ° Celsius?

Je réponds d'une voix cassée les larmes aux yeux en reposant le verre maintenant vide.

Ma mère : Elle ne l'a pas fait bouillir à cent degrés.

Moi: On dirait bien que oui. Et maintenant je souffre! J'ai mal à la gorge c'est atroce.

Ma mère : Mon pauvre bébé...Tu me donnes combien sur une échelle de 1 à 10?

Moi: VINGT!

Ma mère : Tu ne trouves pas que tu exagères un peu ? Un peu de sirop aidera à calmer la douleur. Martha!

?!: oui Madame Amélia ?

S'enquit Madame Parks notre gouvernante sitôt appelée.

Ma mère : Veuillez m'apporter un des flacons de sirop qui se trouvent dans l'armoire supérieure de la cuisine s'il vous plaît.

Madame Parks: Tout de suite madame.

Moi: Comment ça du sirop? Appelle le docteur. J'ai très mal ! J'agonise! Je me suis peut-être perforé une glande salivaire. Tu devrais quasiment appeller une ambulance maman.

Maman : Impossible. Ça te ferait manquer l'école. Et je te rassure, c'est quasiment impossible de se perforer les glandes salivaires en buvant du café alors pas de quoi appeler un docteur, l'ambulance ou même la police.

Acheva-t-elle d'une voix mi-amusée mi sarcastique.

En ce qui me concerne, tout ce que je retiens ce sont ces trois jolis mots : «manquer l'école ». Si ça m'arrivait ça serait un rêve qui se réalise. Aujourd'hui c'est malheureusement la rentrée dans cette autre future nouvelle prison qui s'appelle le lycée et....je ne VEUX pas y aller avec un grand V. Ne me demandez pas pourquoi. Mais...

Heyyyy... Il y aurait moyen que ça n'arrive pas ... Mouais ça pourrait marcher. Allez moteur, action!

Moi:Mais maman comment tu peux dire ça? Tu ne prends pas au sérieux ma souffrance? Ma douleur ? Ma vie est en jeu et toi tu t'inquiètes que je manque l'école ? Quel genre de mère es-tu (voix théâtralement triste)? Qu'importe si je meurs là maintenant sous tes yeux ?

Et maintenant je rajoute ma petite touche personnelle: les petites larmes. Maman garde le silence un instant, me fixe attentivement avant de soupirer.

Ma mère : Bien essayé ma chérie mais Tu iras dans ce lycée aujourd'hui pas la peine de ruser.

Moi: Mais je te promets que...

Ma mère : Chelsea....

M'avertit-elle avec le ton et le regard. Je soupire en affaisant mes épaules d'un air résigné.

Moi: D'accord... j'ai plus si mal que ça mais un peu quand même hein... Chaque mots que je prononce me tue. C'est à peine si je pourrai parler une fois là bas. Ils vont me prendre pour une muette. Allez laisse-moi rester s'il te plaît.....

Maman poussa un long soupir après m'avoir considérée longuement et reporta son attention sur madame Parks qui revenait dans la pièce avec le sirop en main et une cuillère à café.

Madame Parks: Madame?

Elle tendit le flacon à maman qui s'empressa de la remercier et la congédier après l'avoir pris.

Maman: Merci Martha. Vous pouvez disposer.

Madame Parks: Bien...

Je suivis maman des yeux jusqu'à ce qu'elle ait coutourné la table à manger pour me rejoindre son '' artillerie '' en main.

Moi: Maman....

Je geins en la regardant remplir la cuillère avec le sirop pour ensuite le tendre à mes lèvres sans un mot.

Pourquoi elle ne comprend pas que je ne veux pas y aller? Pourquoi elle ne comprend pas pourquoi je n'ai voulu aller nul part ailleurs ?

Conscience: En même temps tu ne lui as pas expliqué pourquoi tu ne veux aller dans aucun lycée.

Et je ne le ferai jamais. Elle serait capable de retourner au Michigan pour brûler le lycée et dans le pire des cas...de s'en vouloir de m'avoir m'imposé sa vie de femme d'affaires parce que oui...

C'est ce qu'elle était ma mère: Amélia Stone, PDG d'une grande chaîne de restauration dans plusieurs pays du monde et ce depuis l'âge de vingt ans. Pas mal pour une mère célibataire hein? Je l'en admirais beaucoup pour cela et bien plus encore en imaginant à chaque fois ce qu'elle avait dû souffrir pour pouvoir m'élever toute seule sans aide. Malheureusement cette volonté de vouloir m'offrir une vie meilleure nous a contraint à beaucoup voyager elle et moi. D'abord de l'Angleterre aux Etats Unis puis une fois là, de l'Ohio au Michigan pour enfin arriver ici à Bling City. Conclusion on était toujours entre deux avions. Impossible d'avoir une vie normale avec tout ce que cela impliquait. Maman en a toujours culpabilisé alors il était évident que je ne pouvais pas en rajouter avec mes problèmes.

Des problèmes qui n'ont fait qu'empirer avec le temps et qui risquent d'empirer encore plus cette année.

C'est pour ça que je dois la convaincre de ne pas m'obliger à y aller.

Moi: Maman s'il te plaît! Je ne veux pas y aller. Ne m'obliges pas je t'en prie.

Suppliai-je après avoir avaler le sirop.

Maman : Enfin pourquoi Chelsea? Je ne te comprends pas.Déjà que tu n'as pas voulu m'accompagner voir l'école ni acheter tes livres. Explique-moi.

Moi: Je...je peux pas. Juste je ne veux pas aller dans ce lycée maman ni dans aucun autre. Tu pourrais pas tout simplement me prendre un professeur particulier ou je sais pas moi? Suivre des cours en ligne ? Tout sauf le lycée.

Maman : Je pourrais mais je ne vais pas le faire pour ton bien. Enfin ma chérie tu auras bientôt dix sept ans et tu ne t'es toujours pas fait une seule amie je m'inquiète et c'est pourquoi je veux que tu ailles dans ce lycée. Là-bas tu pourras évoluer avec des adolescents de ton âge et enfin avoir des amis sur qui compter tout en étudiant. C'est important dans la vie. Et puis pourquoi ce lycée t'effraie autant? Il n'est pas si différent de l'ancien.

C'est justement ça le problème. L'ancien était un enfer...

Moi: J'ai pas besoin d'amie tant que je t'ai toi. Et puis des amies je pourrais facilement en trouver sur les réseaux sociaux. J'ai pas besoin d'aller dans un lycée pour m'en faire.

Maman: On ne devient pas ami avec quelqu'un après quelques heures passées devant un ordinateur ou un téléphone à tchater ma chérie. On le devient en ayant l'occasion d'apprendre à connaître cette personne à chaque jour qui passe. À la voir , à rire avec elle, à pleurer, à compter sur elle quoiqu'il arrive et à être une aide aussi pour cette personne et c'est ce que je veux pour toi tu comprends?

Elle ne comprend pas...

Conscience: Explique lui...

Je peux pas...

Je détourne le regard, contrariée ce qui la fait soupirer avant de finalement prendre place sur la chaise à ma droite. Je sentis sa main se poser délicatement sur ma joue.

Maman: Ma princesse regarde-moi.

J'arrimai mon regard au sien et l'amour que j'y vis me bouleversa comme toujours.

Maman : Je t'aime et je veux le meilleur pour toi. Et c'est pourquoi je souffre tant à chaque fois que ton équilibre se retrouve chamboulé par mes... responsabilités. Tu commençais à peine à t'intégrer à Westford que nous avons dû déménager ici et je sais que cela t'a complètement bouleversée. J'en suis désolée.

Moi: Nooon! Pourquoi tu t'excuses? C'est pas ta faute. Je-...

Maman : Bien sûr que c'est ma faute. Je suis ta mère. C'est à moi de veiller à ce que tu sois heureuse mais même une vie normale d'adolescente je n'ai pas pu te la donner. Je...je ne peux pas m'empêcher de me dire que...le moins que je puisse faire c'est m'assurer que tu puisses t'épanouir dans une bonne école et pouvoir être heureuse au milieu de gens de ton âge. Est-ce que j'ai tort?

Moi: Non! Evidemment que non!

Maman : Pourquoi tu ne veux pas y aller alors ? Donne-moi une seule bonne raison de ne pas t'amener dans cette école et tu n'iras pas.

Conscience: Vas-y c'est le moment de le faire. Dis-lui comme ça tu n'auras plus à souffrir. Allez Chelsea c'est maintenant ou jamais.

Moi: Je...je...

Je ne peux pas...

Moi: Y en a aucune.

Soufflai-je en baissant la tête.

Moi: Je vais me changer...mon pull est tout tâché.

Maman: Chelsea...Tu me le dirais si quelque chose te tracassait n'est-ce pas ?

Piètre menteuse que j'étais...je préférai monter dans ma chambre en silence soupirant une fois à l'intérieur en me laissant retomber sur mon lit.

Conscience : Tu viens de signer ton arrêt de mort. Tu le sais au moins?

Un peu que je le sais mais qu'est-ce que je pouvais faire d'autre ? Elle était tellement triste que je refuse d'y aller.

Conscience :Elle le sera encore plus en découvrant la mascarade.

Pas moyen. Pour ça faudrait que Westford se déplace miraculeusement ici.

Conscience :Ou que ce qui s'est passé là-bas se reproduise ici aussi.

Impossible...On est au milieu de nulle part dans cette ville. Comment les choses pourraient-elles être pareilles? Clairement non! Westford et ses démons sont derrière moi. Rost High School est un nouveau départ...

***

Maman: Prête ?

Moi: Hm hmm.

Maman: Ne sois pas si morne ma princesse. On dirait que tu vas à ton enterrement.

Ce que tu peux avoir raison maman... ce que tu peux avoir raison...

Moi: T'inquiètes pas. Tout va bien.

Maman : Tu en es sûre ? Tu es aussi sûre que tu veux garder ce pull? Il fait au moins vingt degrés.

Moi: Sûre sûre maman. On peut y aller s'il te plaît ? Tu risques de rater ta réunion.

Maman : Cela m'importe peu. Je veux savoir si tu vas bien. Je sais que c'est nouveau pour toi tout ça; cette ville, cette maison, ce lycée mais je suis convaincue que tu vas réussir à prendre tes marques et te faire tout plein d'amis. Tu sais pourquoi j'en suis convaincu ?

Moi: Parce que t'es ma mère ?

Maman : Parce que tu es la fille la plus géniale du monde. Une princesse avec un cœur capable d'engloutir le monde entier et qui plus est la mienne. Alors fais-moi ton plus beau sourire et répète avec moi: Je vais cartonner grave!

Moi: Mamaaan...

Maman : Je vais cartonner grave. Je vais cartonner grave. Je...

Moi: Je vais cartonner grave.

Maman : J'ai rien entendu.

Moi: Je vais cartonner grave !

Maman : Plus fort. Je veux refaire les vitres de cette maison.

Moi: JE VAIS CARTONNER GRAVE ET CASSER LA BARAQUE !

Maman : Tout compte fait on va laisser les vitres intactes. Pour le bien de mon portefeuille.

Moi: Radine va.

Je ris.

Maman : Bah voilà. Enfin je te retrouve et maintenant allons-y sinon on va vraiment être en retard.

Moi: Je te l'avais dit.

Maman : Bon dernière chance. Tu es sûre que tu ne veux pas enlever ce pull?

Moi: Mamaaaan...

Maman : Ok d'accord je n'insiste plus. Oh mon Dieu cette fille et ces pulls...

Jura-t-elle en levant les yeux au ciel.

*

Maman : Tu m'appelles s'il y a un problème ok?

Moi: Oui oui.

Maman : Tu as tout ce qu'il te faut tu es sûre ?

Moi: Hein hein.

Maman : Tu as de quoi prendre un taxi au cas où ?

Moi: Oui maman.

Maman : Tu es sûre que tu ne veux pas que je t'accompagne à l'intérieur ?

Moi: Non maman ça ira.

Maman : Hum et...

Moi: Maman tout va bien se passer.

Enfin j'espère....

Maman: D'accord.

Murmura-t-elle pas du tout rassurée. À croire qu'on avait échangé nos rôles dans la voiture. C'est moi qui étais censée m'inquiéter et maintenant c'est moi qui la rassure.

Moi: je vais y aller alors.

Maman : D'accord. Tout va bien se passer ma chérie d'accord ?

Moi: Je vais cartonner.

Maman : Tu vas cartonner.

Moi: Bonne journée alors...

Maman : Bonne journée ma puce. Je t'aime...

Dit-elle la voix tremblotante. Émue, je répliquai que moi aussi puis regardai la voiture s'en aller. J'inspirai ensuite un bon coup en pivotant pour observer la façade du lycée.

Wow! Maman n'avait pas menti. La devanture du lycée était tout en vitre et marbre , abordée par de larges marches d'escaliers en béton, en un mot : élégant...

Comme Westford Highschool...

Pas rassurant du tout...

Mais non...je ne dois pas être négative. C'est pas un crime d'être présentable. C'est un lycée normal avec des élèves normaux. Tout va bien se passer et je vais cartonner grave.

Oui! Au nom de ma collection de nounours au chocolat tout ira bien!

Boostée, je gravis les marches en rajustant nerveusement les sangles de mon sac à dos non sans me faire bousculer par quelques élèves au passage et je profitai que l'un d'eux ait ouvert la porte pour m'y engouffrer le plus vite possible seulement, aussitôt que ce fût fait je regrettai mon geste.

            
            

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