Ma vie sans toi
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Chapitre 3 No.3

Quelques heures plus tard, chez son oncle, au beau milieu de la grillade familiale, le smartphone de Marion vibre sur la table. Il s'y affiche un numéro inconnu, non enregistré dans son répertoire. Marion se lève précipitamment, s'écarte, expire, inspire et décroche.

- Allo ?

- Salut, c'est Colin.

- Oui ?

- J'ai trouvé un numéro sur mon pare-brise... c'est Marion c'est ça ?

- Heuuuu... oui. J'ai reconnu ta voiture et alors je... mais on se connaît ? D'où tu connais mon prénom ?

- Oui, enfin non, mais en réalité, je connais Lucas qui sort avec un pote à toi, celui qui bosse aux festivités.

- Ouais Théo.

- Et bref, je ne bosse pas ce soir, ça te dit un verre ou une crêpe... ou... peu importe, sur le port ?

- Ok... Au Bilbo ?

- Parfait pour moi. Dix heures ?

- Dac, à tout'.

Parcourue par un frémissement partant du bas de la colonne vertébrale jusqu'au sommet du crâne, Marion ressent un mélange de joie, d'excitation et de satisfaction. Elle pose son smartphone sur la table et croque goulûment dans une rouste de porc grillée à souhait et trempée dans l'aïoli. L'heure de son portable affiche déjà 21 h 35. Elle bondit et introduit le reste de viande dans sa bouche. Elle court se laver les mains tout en mastiquant activement. Après un petit coup de doigts passés dans sa chevelure ondulée blonde et un léger coup de mascara sur les cils, il lui reste trois minutes pour insister en profondeur sur le brossage de dents. Cinq minutes ne seraient pas de trop pour réussir à se débarrasser de tout passage huileux de diverses viandes marinées ou de présence, même imperceptible, d'aïoli. Il est 21 h 50, devant le miroir, Marion vêtue d'un léger débardeur semi-large noué au nombril et d'une longue jupe fleurie, fait un tour sur elle-même. « Ok, pas de tache d'huile, impec' », l'inspection rapide semble réussie. De toute façon, elle n'a pas le temps de se changer en essayant d'autres tenues. Elle est très bien ainsi et se satisfait parfaitement de son style bohème chic qu'elle complète en enfilant une paire de bracelets et une paire de sandales plates trouvées sous le lit.

Marion arrive au Bilbo. Au bar, côté platines, elle y voit Lucas qui discute avec Colin. Elle essaie de faire taire le tambourin qui s'agite entre son ventre et sa poitrine. L'air le plus détendu possible, elle commence par s'approcher de Lucas qu'elle côtoie depuis qu'il est en couple avec Théo.

- Salut, Lucas.

- Salut, ma belle.

- Et... salut, Colin...

- Enchanté de te rencontrer... Marion ! lui répond Colin en lui faisant la bise avec une légère hésitation.

Le premier contact physique avec ce mystérieux jeune homme, pour lequel elle éprouve une telle attraction physique, presque chimique, est établi. « Sa joue est une caresse ! Mais ce jeune homme est imberbe ! Il a la peau d'un bébé phoque, qui sent le propre, c'est un régal, on a envie de le croquer tout cru. À consommer sur place, c'est possible ? Bon, Marion tranquille, no stress, détends-toi. Trouve un truc bateau à dire ».

- Vous vous connaissez d'où tous les deux ?

- Du lycée, c'est lui le dénominateur commun entre nous. Le pote de ton pote.

- Dénominateur, mais en rien entremetteur. Attention, je ne suis dans aucune magouille, moi, pas comme Théo ! Installez-vous, j'vous donne les cartes et je reviens prendre vos commandes plus tard, dit Lucas en s'éloignant des deux jeunes qui prennent place à une table en terrasse.

- Alors ? Alors ? disent-ils simultanément avant de rire bêtement.

- Ben, c'est toi qui m'as appelée.

- C'est toi qui m'as laissé ton numéro sur le pare-brise !

- Pas faux ! Il peut m'arriver d'agir sans réfléchir, comme une enfant sur un coup de tête.

- Tant mieux, car il m'arrive souvent d'y répondre aussi sec, surtout quand ça me paraît naturel.

Un silence très agréable de quelques secondes s'installe, accompagné de regards profonds et à la fois très légers. Le dialogue reprend avec aisance.

- Alors ? reprend-elle.

- Alors, enchanté, Colin, vingt et un ans, quasi vingt-deux, j'habite à Alenya, encore chez mes parents. Jeune bachelier, je vais intégrer une école d'ostéopathie et le reste du temps, je suis batteur. Je fais quelques dates sur la côte cet été, je joue dans les bars et dans d'autres lieux. Le 15 août, je joue place Maillol après le feu d'artifice

Marion boit ses paroles, pourtant basiques, voire insignifiantes, et en un quart de seconde, elle se demande s'il y a une école d'ostéopathes à Montpellier pour qu'ils puissent vivre la plus grande histoire d'amour de tous les temps. « Mais allo », se reprend-elle, « n'imp' franchement ! Dans le style fleur bleue, ce n'est carrément pas moi ». Colin la sort de sa discussion interne entre elle et elle, et l'interroge à son tour par un hochement de tête.

- Alors, Marion, vingt-quatre ans, enfin je les aurai à la fin du mois. Je viens de Saint-Cyp mais je vis à côté de Montpellier avec mon père, enfin pas cet été, mais le reste de l'année. Je fais des études de communication mais je ne sais pas encore dans quoi je vais me spécialiser, j'verrai. Je suis passionnée par beaucoup de choses, tout ce qui tourne autour du visuel, montage vidéo, photo... Ça fait cinq ans que l'été je fais la surveillance des plages.

- C'est la première année que je te vois pourtant !

- Ouais, normal, les trois premières années que j'ai faites à Saint-Cyp, j'étais plus au sud, OKLM, vers la lagune et puis j'ai fait deux ans à la Grande Motte. Je devais d'ailleurs rebosser là-bas cet été mais la mort de Béatrice, la mère de ma copine Laura, m'a ramenée au bercail et finalement j'ai pris sa place. J'ai fait le choix de revenir un peu auprès des copains.

- Très bon choix... acquiesce-t-il avec un sourire à tomber.

Des mots, des phrases, divers sujets de discussion s'enchaînent avec une fluidité naturelle. Ils semblent être totalement à l'aise l'un avec l'autre. Ils se connaissent, c'est sûr... pourtant. Vont-ils se mettre à croire aux vies antérieures ? Une mélodie s'insère doucement dans la tête de Marion. Une chanson de Pinkentraînante commence déjà à résonner. Elle accompagnerait parfaitement les images de cette première rencontre idyllique, si cette scène était tournée pour le cinéma, à la fois tellement girly, mais si typique dans le cœur de tous les romantiques. Sur le son de Fucking Perfect, à la sortie du port, ils s'offrent une gaufre au Nutella et une glace à l'italienne parfum vanille-mangue. Ils passent devant la fête foraine et continuent leurs longues discussions, ils rient, et marchent le long de la promenade en front de mer. Marion monte sur le muret, Colin la rejoint. Ils sautent tous deux sur le sable. Punaise, Colin fait la roue ! On ne fait pas ce genre de chose quand on est adulte ! Marion a trop honte, mais c'est trop bon, elle rit aux éclats du ridicule que ce garçon n'a pas peur d'avoir. De façon spontanée, et sans jamais regarder leurs montres, ils longent la mer en direction des plages au nord de la station balnéaire. Marion goûte l'eau du bout des pieds. Elle est très froide. Elle relève sa longue jupe bohème à volants balai paysan et donne un grand coup de pied, projetant un petit paquet de sable mouillé sur le jean de Colin. Ils se chamaillent gaiement, à travers des jeux de mains puis se calment. Assis sur le sable, ils terminent une cigarette. Un silence s'installe pour la seconde fois de la soirée. Un petit air marin se lève. Un frisson parcourt le corps de Marion légèrement moite. Elle regarde Colin, se lève et prend hâtivement son sac.

- J'ai soif. Suis-moi !

Elle accélère le pas, attrape la main de Colin et se met à courir. Quelques foulées et quelque cent mètres encore plus au nord et les voilà sur la plage Rodin, devant le poste de secours numéro 2. Les dernières enjambées sportives alliées à l'excitation de l'instant présent, le cœur de Marion bat la chamade. Elle fouille à l'aveugle dans son grand sac à main. Ses doigts parcourent des dizaines d'objets et bric-à-brac avant d'attraper enfin le trousseau de clés du poste de secours. Elle insère la clé dans la serrure qu'elle déverrouille, relève la tête et regarde Colin qui ne dit rien. Il lui sourit. C'est bon, elle ouvre, et l'attire au chaud, à l'abri de l'air marin, dans ce lieu clos et intime. Elle sort, du mini frigo, une bouteille d'eau qu'elle lui tend. Il l'empoigne et la repose sur la table pliante sans en boire une goutte. Son regard est fixe. Il saisit Marion d'une main par la taille, passe la seconde derrière sa nuque et vient aimanter ses lèvres charnues sur la bouche de sa dulcinée déjà entrouverte. Avec autant de délicatesse que de ferveur, ils s'effleurent l'un et l'autre dans la pénombre de l'Algeco, en soulevant une jupe, déboutonnant un jean, dégrafant un soutien-gorge... Seule la lumière de la lune éclaire faiblement une partie de la pièce. La fraîcheur du petit air marin à l'extérieur est à présent évincée par la chaleur que dégagent leurs corps approximativement dénudés. Les pupilles noires de Colin s'agrandissent lorsqu'il se laisse, une seconde, subjuguer par la vue de ces formes si parfaites : des seins fièrement redressés, de petits tétons durs, un ventre plat, des cuisses fines. Il lève la tête et plonge alors son regard dans celui de Marion. Ses yeux sont d'un bleu si aérien qu'ils paraissent presque divins. À cet instant, esquissant un sourire en coin, elle cligne des yeux comme pour lui donner la permission. Colin parcourt alors sa peau par des baisers en direction de son sexe encore couvert par un tanga blanc Calvin Klein. Il le fait choir délicatement en bas de ses pieds élégamment vernis puis fait glisser un petit bout de langue du bas de sa cuisse jusqu'à l'entrée de ses lèvres roses frémissantes. Elle se laisse faire entrelaçant ses doigts dans ses courts cheveux bruns. Puis en douceur, elle se laisse aller sur le vieux lit de camp inconfortable et grinçant, qui devient à leurs yeux, une loveuse composée de tendre mie de pain. Ils s'y abandonnent et y font l'amour de façon charnelle, passionnelle et naturelle. « OMG », dans un moment comme celui-ci, cela pourrait aussi vouloir dire « Osmose, Magnifiquement, Gravissime » ! Blottis l'un contre l'autre, sur leur cocon de fortune, la musique se termine dans la tête de Marion, laissant place à la résonnance des battements de son cœur.

- C'est ouf, mais d'où on se connaît ?

- Effectivement, c'est « comme si ». Mais on ne s'est jamais vus. Pas avant ce jour devant l'église, où depuis ma voiture, je n'ai pas pu décrocher mon regard du tien.

- Pareil pour moi, j'étais comme aspirée par ta présence alors que j'aurais dû être, genre morte de chagrin pour Laura, pour Béa.

- T'es proche de Laura ?

- Grave, c'est ma bestah. J'étais avec elle à la crèche, puis à l'école, on s'est suivies jusqu'à ce que ma mère meure, il y a trois ans et que je parte vivre avec mon père dans son vignoble.

- Merde, désolé.

- Et ouais, une mort de plus dans ma vie. Et pas n'importe laquelle, celle de Béa quoi ! J'dirais pas que c'était comme ma deuxième mère, mais bon, presque. Enfin, j'arrête, je n'ai pas vraiment envie de chialer, là, maintenant... Et toi, tu la connaissais ?

- Non, je ne l'ai pratiquement jamais vue. Je savais que ma mère avait une copine qui s'appelait Béatrice, avec qui elle avait travaillé quand elle était jeune mais pas plus. Mais elle a été très affectée par sa disparition même si elles ne se voyaient plus trop.

- OK, je comprends pourquoi elle était discrète à la cérémonie et que toi t'attendais dans la voiture. D'ailleurs, elle s'est fait quoi au bras, ta mère ?

- Humérus cassé, donc, je lui servais de chauffeur. Et t'as raison, soyons positifs, et au final, ça nous a mené l'un à l'autre ! place gentiment Colin en remettant une mèche blonde frisottante de Marion derrière sa minuscule oreille avant de faire remonter sur eux, avec bien-être, la vieille couverture rêche du poste de secours.

            
            

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