Mon Chemin Loin d'Eux
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Chapitre 3

Le lendemain matin, la lettre d'admission posée sur mon bureau était comme un phare dans la brume de mes émotions. C'était la preuve tangible que j'avais une issue, un nouveau départ. Alors que je la relisais pour la dixième fois, j'ai entendu frapper à ma porte. "Camille ? Ouvre, c'est nous." La voix de Marc. J'ai rapidement glissé la lettre sous une pile de livres. J'ai hésité, puis j'ai ouvert. Ils étaient là tous les deux, souriants, comme si de rien n'était.

"Alors, tu l'as reçue ?" a demandé Léo, tout excité. "La lettre d'admission de l'université d'ici ! On vient d'avoir les nôtres. On est tous pris ! On va pouvoir enfin commencer à chercher un appartement !" Il tenait sa propre lettre en main, l'agitant comme un trophée. La dissonance entre leur joie et mon secret était presque insupportable.

J'ai esquivé la question. "Ah, super pour vous," ai-je dit d'un ton plat. "Je n'ai pas encore regardé ma boîte aux lettres." Je me suis détournée, commençant à ranger mon bureau, un prétexte pour ne pas avoir à les regarder dans les yeux. "Il faut vraiment que je finisse de trier mes affaires."

Marc a attrapé mon bras, me forçant à lui faire face. "Arrête avec ça, Camille. Qu'est-ce qui est plus important que de fêter ça ? On sort ce soir. Il y a une fête chez un gars du lycée. Tout le monde y sera. Chloé nous rejoint là-bas." Ce n'était pas une question, c'était un ordre. Leur capacité à ignorer mon état d'esprit, à imposer leurs désirs, me sidérait. J'ai essayé de refuser, mais Léo a insisté. "Allez, Camille. Pour nous. Pour fêter notre avenir." Le mot "notre" m'a écorchée. J'ai fini par céder, trop lasse pour me battre, sachant que ce serait l'une des dernières fois.

La fête était exactement comme je l'avais redoutée. La musique était assourdissante, l'air était chargé de fumée et d'alcool, un environnement qui m'avait toujours mise mal à l'aise, mais que j'avais supporté pour eux. Je me suis sentie immédiatement déplacée, une étrangère dans un monde qui n'était pas le mien.

Chloé était déjà là, bien sûr. Elle était le centre d'un petit groupe, riant bruyamment, un verre à la main. Elle portait une robe courte et moulante, un style qu'elle n'aurait jamais osé porter avant de les connaître. Dès qu'elle nous a vus, elle a couru vers Marc et Léo, les ignorant royalement pour les serrer dans ses bras. "Vous voilà enfin ! Je commençais à m'ennuyer !"

Ils l'ont accueillie avec des sourires radieux. "On a dû traîner Camille hors de sa grotte," a plaisanté Léo. Chloé m'a jeté un regard rapide, un sourire narquois à peine déguisé. "Oh, Camille est là aussi. Super." Puis, elle s'est à nouveau tournée vers les garçons. "J'ai commandé des pizzas, pepperoni et extra fromage, vos préférées !" Elle savait pertinemment que je détestais le pepperoni. C'était une petite pique, un rappel subtil de ma place désormais marginale. Marc et Léo n'ont rien remarqué, trop occupés à la remercier pour sa prévenance.

Je me suis retirée dans un coin, les observant de loin. Je les ai vus rire, boire, danser avec Chloé. Ils ne m'ont pas jeté un seul regard. J'étais invisible. La douleur était là, mais elle était différente maintenant. Elle était mêlée à une sorte de détachement, comme si je regardais une scène de film, une histoire qui ne me concernait plus vraiment.

Plus tard dans la soirée, alors que je faisais semblant de regarder mon téléphone, j'ai entendu Marc parler à Léo. "J'ai vu Camille acheter un billet de train pour le sud l'autre jour sur son ordinateur." Mon cœur a raté un battement. "Elle va peut-être rendre visite à sa tante avant la rentrée," a répondu Léo, haussant les épaules. "Elle nous en aurait parlé sinon." Ils n'avaient aucune idée. Leur confiance aveugle en notre avenir commun était presque pathétique.

Soudain, Chloé a attiré l'attention de tout le monde en montant sur une table. "Écoutez tous !" a-t-elle crié. "Je veux vous raconter quelque chose." Elle a commencé à raconter une histoire larmoyante sur son passé difficile, une histoire pleine d'exagérations et de mensonges que je savais faux. Elle parlait de sa "famille abusive" et de sa "solitude", des choses qu'elle m'avait racontées différemment, dans des moments de prétendue confidence.

Marc et Léo la regardaient avec une admiration et une pitié non dissimulées. À la fin de son récit, Marc a pris la parole. "C'est pourquoi nous devons tous prendre soin de Chloé. Elle a tellement enduré. Elle va venir vivre avec nous à la rentrée, nous la protégerons." Il a posé un bras protecteur autour de ses épaules, et Léo a hoché la tête avec ferveur. "On ne te laissera jamais tomber, Chloé."

Leur annonce a été comme un coup de poing dans l'estomac, mais je n'ai rien laissé paraître. Ils l'avaient choisie. Ils avaient choisi de croire ses mensonges, de lui offrir la place qui aurait dû être la mienne dans leur avenir. C'était la confirmation finale, la dernière pièce du puzzle de leur trahison. Je me suis levée et je suis partie sans un mot. Personne n'a remarqué mon départ.

            
            

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