L'encre du pacte était à peine sèche que Julien a montré son vrai visage. Nous étions de retour à Paris, dans mon immense appartement du seizième arrondissement avec vue sur la Tour Eiffel.
Il s'est servi un verre de whisky, se pavanant dans le salon comme s'il était déjà le propriétaire.
« Mon amour, a-t-il commencé avec un ton faussement désinvolte, maintenant que nous sommes liés, nous devrions simplifier les choses. Pour notre avenir. »
« Que veux-tu dire, Julien ? »
« Toute cette paperasse... c'est tellement peu romantique. Tes propriétés, tes actions... tout devrait être à mon nom. Ce sera plus simple à gérer. Je suis doué pour ça, tu le sais. Je ferai fructifier notre patrimoine. »
Il a dit « notre patrimoine », mais ses yeux disaient « mon patrimoine ».
C'était le premier sacrifice qu'il exigeait. La richesse.
Dans notre vie passée, j'avais mis des années à lui céder le contrôle. Cette fois, il était pressé. Sa renaissance l'avait rendu arrogant, certain de son plan.
J'ai gardé mon calme. J'ai hoché la tête lentement.
« Si tu penses que c'est mieux pour nous, alors faisons-le. »
Son sourire s'est élargi. Il n'arrivait pas à croire à sa chance. Il pensait que mon amour pour lui m'aveuglait complètement.
Les jours suivants ont été un tourbillon de rendez-vous chez les avocats et les notaires. J'ai signé document après document, sans poser de questions. L'appartement de Paris. La villa sur la Côte d'Azur. Le portefeuille d'actions de la société familiale. Tout.
Mon avocat de famille me regardait avec des yeux ronds, mais un simple regard de mon grand-père, présent à chaque signature, suffisait à le faire taire.
Le jour où le dernier transfert a été validé, nous étions dans le bureau de l'avocat. Julien a signé le document final avec un geste théâtral.
À cet instant précis, il a grimaqué et a porté la main à son avant-bras droit, sous la manche de sa chemise coûteuse.
« Qu'est-ce qu'il y a ? » ai-je demandé, innocemment.
« Rien, une sorte de crampe... une brûlure. »
Il est allé aux toilettes. Quand il est revenu, son visage était pâle, mais ses yeux brillaient d'une étrange excitation.
Plus tard dans la soirée, alors qu'il se douchait, je l'ai vu. Sur son avant-bras, une fine ligne noire était apparue, sinueuse comme un serpent.
Le premier sceau.
Il l'a regardé dans le miroir, fasciné. Il pensait que c'était la preuve de notre lien magique, une marque de notre union.
Pauvre imbécile. C'était la marque de son esclavage à venir.