/0/25066/coverbig.jpg?v=46aac1fff49a2a247f33bf0a234b0cd9)
Le murmure d'un vent nouveau
Le soleil brillait.
Mais je ne le voyais plus.
Il pouvait brûler le ciel... j'aurais eu froid pareil.
Les jours s'effacent
Je vivais dans un brouillard.
Un marécage de fatigue, de peine et d'indifférence.
Je ne comptais plus les jours.
Ils passaient comme les grains de sable entre les doigts d'un mort.
Je traînais. Je flottais.
Je n'étais plus Makial, j'étais l'absence de Makial.
La maison ?
Un sanctuaire brisé. Un musée funèbre.
Je parlais...
à des gens qui n'étaient plus là.
- « Papa... tu me dirais quoi, là ? Je dois faire quoi avec tout ça ? »
- « Maman... je fais semblant, mais j'suis en train de couler. »
Mais les murs, eux, ne répondent que par des soupirs.
La lettre
Un matin, une enveloppe a glissé sous la porte.
Juste un petit flap. Sec. Insignifiant.
Mais j'ai su.
« Étude notariale Dambé & Associés »
Je l'ai ouverte du bout des doigts.
- « Monsieur Makial Altos,
Suite au décès tragique de vos parents, nous vous prions de prendre rendez-vous pour finaliser la succession... »
J'ai lâché la feuille.
Elle est tombée à mes pieds comme une pierre tombale.
Ranger leur vie.
Classer leurs souvenirs dans des chemises cartonnées.
Apposer une signature sur ce qu'ils étaient.
Non.
Je n'étais pas prêt.
Mais j'ai gardé la lettre dans ma poche.
Parce que fuir, c'est plus facile que d'oublier
Ils reviennent
Le soir, on a frappé. Encore.
J'ai laissé passer quelques secondes. Puis je suis allé ouvrir.
Donald et Hilaire.
Donald, avec son sweat trop large et son éternelle odeur de chewing-gum.
- « Mon gars, on va pas te laisser moisir ici. J'sais que t'es pas mort, hein ? »
- « Bouge un peu, sors, hurle, pleure, casse un mur si tu veux. Mais fais quelque chose. »
Je l'ai fixé. Sans répondre.
Puis Hilaire s'est avancé. Silencieux. Serein. Sa voix, toujours posée.
- « On ne vient pas pour parler si tu veux pas. On vient pour être là. C'est tout. »
Je me suis écarté.
Je les ai laissés entrer.
Le dîner du silence
On s'est installés dans la cuisine.
Donald a fouillé les placards. Hilaire a allumé la lumière.
Moi, j'étais juste... là.
Donald : « T'as rien d'autre que des pâtes et du thon ? Mec, on va crever ici. »
Hilaire (en souriant) : « Il a ce qu'il faut. On improvise. »
Ils ont cuisiné pendant que je les regardais.
Donald : « T'sais, j'suis pas doué pour parler de trucs sérieux. Mais t'es mon frère, mec. Et j'suis pas prêt à te regarder t'éteindre. »
Hilaire : « Tu portes un poids immense, Makial. Mais on est là. On le portera avec toi, même un peu. »
Je n'ai pas répondu.
Mais j'ai hoché la tête.
On a mangé. Lentement.
Les premières bouchées étaient mécaniques.
Puis, sans prévenir, Donald a lâché :
- « Tu te souviens de la fois où t'as failli rater ton oral parce que t'avais confondu l'amphithéâtre avec la salle d'examen ? »
J'ai esquissé un sourire.
Hilaire : « Et quand ta mère a débarqué à la fac avec un cake au citron et que tout le monde croyait que t'avais gagné un prix ? »
J'ai ri. Faiblement. Mais j'ai ri.
Moi : « Elle voulait juste me faire plaisir... Elle disait que rien ne comptait plus que de célébrer les petites victoires. »
Donald :On souris
Moi: D'un simple doigt d'honneur, je les ai enculés. »
Le silence est revenu, mais il était plus doux, moins lourd.
Presque... humain.
Une nuit étrange
Ils sont partis tard.
J'ai fermé la porte derrière eux et je me suis écroulé sur le canapé.
Et là, dans le demi-sommeil, je l'ai entendue.
Une voix.
Ni dure, ni douce.
Équilibrée. Vibrante. Vivante.
- « Tu n'es pas seul. Même si tu penses l'être. Regarde autour de toi. Écoute ton cœur. »
Mes yeux se sont ouverts d'un coup.
Ma respiration s'accélérait.
Et soudain... une odeur.
Un parfum chaud, boisé, presque intime.
Quelque chose d'animal, de sauvage, mais maîtrisé.
Quelque chose d'humain.
Je me suis redressé, les sens en alerte.
Mais j'étais seul.
Seul... et pourtant pas tout à fait.
Le rêve
Cette nuit-là, j'ai rêvé.
Mais ce rêve n'était pas comme les autres.
Pas flou. Pas déformé.
Clair. Précis. Incroyablement réel.
Un homme se tenait devant moi.
Élégant. Charismatique.
Une présence magnétique.
Le genre de regard qui perce l'âme sans dire un mot.
Ses yeux... brûlaient.
De feu.
De compassion.
De quelque chose de bien plus fort que les mots.
Il s'est approché.
- « Tu vas te relever, Makial. Tu crois que t'es seul, mais je suis là. Et je ne partirai pas. »
Il m'a tendu la main.
Et dans son regard... il n'y avait ni pitié, ni peur.
Juste une vérité nue. Une certitude.
Puis tout s'est dissous.
Je me suis réveillé, haletant, tremblant.
Et pour la première fois depuis longtemps...
Je n'avais pas peur de ressentir.
Quelque chose - ou quelqu'un - venait d'entrer dans ma vie.
Et ce n'était que le début.