Ex-femme de milliardaire , devenue Luna
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Chapitre 3 Chapitre 3

Ses pieds s'enfonçaient dans l'humus, mouillé et glissant, mais elle ne s'arrêtait pas. La nuit avalait les formes, effaçait les chemins. Aucun panneau, aucun repère, juste les battements sourds de son cœur, et l'impression de pénétrer dans un monde qui ne voulait pas d'elle.

Chaque pas faisait craquer les branches sous ses semelles. Chaque son semblait amplifié, comme si les arbres eux-mêmes retenaient leur souffle pour mieux écouter. Elle avançait à l'aveugle, le sac sur l'épaule, les jambes lourdes d'épuisement, sans savoir si elle tournait en rond.

Puis, soudain, elle s'arrêta. Pas à cause de la fatigue. Pas à cause de la peur. Mais à cause de cette sensation.

Quelque chose l'observait.

Ce n'était pas rationnel. Pas visible. C'était un frisson qui ne venait pas du froid. Une tension dans la nuque. Un sixième sens, brutal et primitif, comme une alarme dans sa colonne vertébrale.

Elle tourna sur elle-même. L'obscurité était totale. Le vent faisait bouger les feuillages. Mais rien. Aucun bruit distinct. Aucun pas. Et pourtant...

- Y a quelqu'un ?

Sa voix résonna, un peu plus forte qu'elle ne l'aurait voulu. Elle regrettait aussitôt de l'avoir laissée sortir.

Silence.

Elle reprit sa marche, plus vite. Son souffle devenait court. L'air sentait la mousse et quelque chose d'autre, plus âcre. Elle n'avait jamais cru aux contes, aux esprits, aux légendes de la forêt. Elle était née dans une ville de béton et de comptes en banque. Mais ici, tout semblait différent.

Plus ancien. Plus... animal.

Un craquement à sa droite. Elle s'immobilisa net.

- Si c'est une blague, c'est pas drôle.

Aucune réponse. Juste une ombre qui semblait se déplacer entre les arbres, trop fluide pour un cerf, trop basse pour un homme.

Elle fit un pas en arrière. Et un autre. Puis elle se mit à courir. Pas comme on court pour attraper un bus, mais comme on fuit quelque chose qui n'a pas besoin de lumière pour vous suivre.

Son souffle s'accéléra. Une racine la fit trébucher, elle se rattrapa de justesse, repartit. Les arbres s'épaississaient. Elle ne savait plus d'où elle venait. Elle ne savait plus où elle allait.

Elle déboucha dans une clairière sans l'avoir vu venir. Un espace ouvert, circulaire, où les étoiles perçaient enfin à travers la cime. Au centre, une pierre plate, moussue, comme un autel oublié. Elle s'arrêta, haletante. Aucun bruit. Aucun mouvement.

Mais la présence... toujours là.

Pas menaçante.

Juste... insistante.

Elle s'avança lentement vers la pierre. Sa main effleura la surface. Elle y sentit des rainures, comme des gravures anciennes. Incompréhensibles. Mais curieusement familières.

Un murmure, très bas. Elle se retourna brusquement.

Rien.

- Si tu veux me faire peur, c'est réussi. Bravo.

Elle parlait dans le vide, mais sa voix tremblait. Et pas de fatigue cette fois.

Elle ferma les yeux. Se força à respirer. Une, deux, trois fois.

Puis elle le sentit.

Juste derrière elle.

Une chaleur, presque animale. Une odeur de terre, de fourrure, de bois brûlé. Elle se retourna lentement. L'espace était vide. Et pourtant, elle savait. Quelque chose était là. Invisible. Immobile.

- Je... je sais pas ce que tu es, murmura-t-elle. Mais je ne suis pas ton ennemie.

Un silence.

Puis un frôlement d'air, à sa gauche. Elle se retourna trop tard.

Une silhouette. Rapide. Floue. Entre les troncs. Grande. Agile. Une forme noire, massive, presque humaine... ou pas tout à fait. Elle recula d'instinct, les jambes fléchies.

- Attends ! Qui... qui es-tu ?

Un grognement. Pas animal. Pas humain non plus. Un son guttural, chargé de quelque chose d'étrange... une colère retenue. Ou un avertissement ?

Elle recula encore.

- Je suis pas venue pour voler quoi que ce soit. Je suis juste...

Une pause.

- Perdue.

Un autre silence. Puis un murmure. Cette fois, elle l'entendit vraiment. Pas dans l'air. Pas autour.

Dans sa tête.

*Naël...*

Elle resta figée. Le prénom résonna en elle comme une note familière jouée sur un instrument qu'elle n'avait jamais vu.

Elle chancela.

- Qu'est-ce que tu veux ? Pourquoi tu connais mon nom ?

Un souffle. Comme une brise. Puis plus rien.

Elle resta là, les bras ballants, le cœur battant dans ses tempes. Elle aurait pu croire à un rêve. À une hallucination. Mais ce n'était pas un délire. C'était trop précis. Trop réel.

Elle retourna sur la pierre, s'assit. Ses jambes ne la portaient plus.

Quelque chose veillait ici.

Quelque chose qu'elle ne comprenait pas. Mais qui, étrangement, ne la faisait pas fuir.

Au contraire.

Elle ferma les yeux. Et pour la première fois depuis des jours, elle sentit son corps céder. Pas par peur. Pas par faiblesse.

Mais parce qu'elle n'était plus seule. Pas tout à fait.

Des yeux brillaient entre les arbres. Un, deux, trois. Puis une dizaine. D'abord tapis, puis debout, les loups sortirent un à un de l'ombre comme si une main invisible les avait appelés. Leurs pas étaient silencieux, fluides, presque irréels. Leurs regards fixés sur elle, impassibles. Aucun grondement. Aucun grognement. Juste cette tension suspendue entre elle et eux.

Naël se leva d'un bond, chancelante. Son dos heurta la pierre derrière elle. Elle n'avait nulle part où fuir. Son souffle s'accéléra, mais son instinct lui cria de ne pas bouger. Ses mains tremblaient. Pourtant, aucune bête ne s'approcha.

Ils s'écartèrent.

Lentement. Comme un rideau qui s'ouvre. Elle ne comprit pas immédiatement ce qui se jouait. Aucun d'eux ne la fixait avec faim. Aucun ne montrait les crocs. Ils la contournaient. Comme si elle n'était pas proie. Comme si elle était... attendue.

Son regard se brouilla.

Le monde tourna, d'un coup.

Elle porta une main à sa tempe, mais la nausée arriva plus vite. Le sol tangua sous elle. Sa vision se rétrécit en un tunnel mouvant. Les battements de son cœur résonnaient dans ses oreilles, plus forts, plus désordonnés. Ses genoux fléchirent.

Elle tenta de murmurer un mot, un appel peut-être, mais seul un souffle sortit de sa bouche.

Et l'obscurité l'engloutit.

Elle ne heurta jamais le sol.

Deux bras la saisirent au vol, puissants et chauds. Un torse contre le sien, un souffle rauque au-dessus de sa tête. L'odeur qui l'enveloppa n'était pas étrangère. Terre, bois, cendre. Il n'y avait plus de peur, juste cette étrange paix qui envahit son corps alors qu'elle perdait conscience.

Elle sentit une main lui effleurer le front. Puis un murmure, grave, presque un grondement, pourtant doux comme un serment.

- Tu es rentrée, Luna.

Et tout sombra.

            
            

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