Chapitre 3 CHAPITRE 3 : Ma première visite chez Fred

Très contente, je me suis rendue d'abord chez la bonne dame qui vendait du riz créole à la devanture de la maison. Je lui ai demandé de me servir du riz pour deux cents francs et un gros poisson de deux cents francs.

Paisiblement, j'ai mangé le repas servi. Ensuite, je me suis levée pour rentrer à la maison. Arrivée dans la chambre, j'ai vu Frédéric devant ses piles de documents. Pendant que moi j'avais faim, ce jeune homme, aussi courageux que soit-il, avait eu le courage de continuer à apprendre. Ok, ce n'est pas grave.

J'ai soulevé le rideau qu'il avait pris pour séparer la chambre en deux et je suis allée me coucher sur la maudite natte qui avait permis qu'on me mette enceinte.

Ah oui, il faut que j'accuse cette natte parce que si ce jour, après qu'on m'a déshabillée, la maudite natte s'était mise à me piquer le corps, j'allais vite comprendre le message et me rhabiller. Mais malheureusement, cette putain de natte a comploté avec ce vaurien et il m'a mise enceinte.

Après que je me suis allongée sur la natte, j'ai commencé par faire des calculs. Parce que ce n'était pas possible de vivre dans cette merde. Une merde où on se soucie moins de moi. Au lieu que monsieur aille aider les maçons à construire pour gagner une petite thune, monsieur a préféré de rester collé à ses documents.

Couchée sur la natte, je cogitais. Oui, il fallait que j'établisse un plan ; un plan qui allait me sauver ; un plan qui allait m'amoindrir mes douleurs.

« Voilà que ton téléphone n'est pas avec toi, comment vas-tu faire maintenant pour téléphoner à Fred ? ».

C'est la première question qui m'est passée à l'esprit.

Et c'est vrai, voilà que j'ai pris la carte de visite de Fred. Avec quoi allais-je effectivement le correspondre ? C'était une question très profonde.

J'ai regardé droit devant moi et mes yeux ont croisé le mur. Par imagination, je me suis vue m'approcher de Frédéric pour lui demander de me prêter son téléphone. Toujours par imagination, je l'ai vu me le tendre sans dire un mot.

J'ai alors pris une décision, celle de me lever et de m'approcher de lui pour lui prendre le téléphone.

– Bon travail, chéri, peux-tu me prêter ton téléphone s'il te plaît ?

– Qui veux-tu appeler avec ?

– Je veux appeler une copine du quartier et lui demander un service.

– Désolée, il n'y a pas d'unités dans le téléphone.

Cette phrase ne m'étonnait pas parce qu'il faut d'abord avoir le ventre rempli avant de penser à MTN et MOOV.

– Ne t'inquiète pas, je vais en acheter.

Frédéric laisse en suspens le document qu'il tenait en main et me fixe tout droit dans les yeux.

– N'avais-tu pas dit que tu n'as pas d'argent ?

– Absolument ! J'ai retrouvé une pièce de cent francs dans la poche de ma robe...

– Et tu ne peux pas acheter quelque chose avec et nous allons manger ?

– Qu'est-ce que cent francs peut nous faire, selon toi ? Alors que si j'appelle Yasmine, elle pourra me faire un transfert d'argent électronique.

Sans plus ajouter un mot, Frédéric prend le téléphone et me le tend.

Je me précipite vers la cour. Marchant dans la rue comme une diarrhéique, me voici devant une cabine. En moins de trois minutes, le jeune homme que j'ai vu dans la cabine m'a vendu mes unités. Lui aussi, comme tout le monde, me regardait comme une pomme mûre.

Quand on est trop mignonne, on provoque tous les regards.

Je me suis retournée en composant le premier numéro de Fred. J'avais fini de composer le numéro et me suis automatiquement rappelé d'une technique. Et là, j'ai effacé tous les chiffres composés et j'ai d'abord composé #31# et ensuite, j'ai composé le numéro de Fred.

Oui, il me fallait ce code ; il fallait que je masque le numéro de Frédéric pour ne pas me créer d'ennuis.

J'ai lancé l'appel et lorsque je l'ai fait, j'ai vu s'afficher sur l'écran : Fred.

J'ai souri. Le téléphone accroché à l'oreille droite, je m'impatientais jusqu'au moment où une voix m'a répondu : « Allô ? C'est Fred qui est à l'appareil ; à qui ai-je l'honneur s'il vous plaît ? ».

J'ai gardé mon silence un moment avant de répondre : « C'est mademoiselle Aïcha ».

– Oh, mademoiselle Aïcha ! Comment allez-vous ?

– Je vais très bien, merci, et vous ?

– Je vais aussi très bien ! Êtes-vous déjà rentrée ?

– Oh, oui ! Mais je suis encore revenue. Je tenais à vous remercier sincèrement pour votre geste de tout à l'heure...

– Oh, aucun mérite ! Vous méritez ça ! Alors, pourquoi n'avez-vous pas laissé votre numéro s'afficher ?

– Je suis désolée, c'est parce que le téléphone avec lequel je vous appelle ne m'appartient pas. Mon propre téléphone est tombé en panne. Lorsque je téléphone, le micro crache et on n'arrive pas à m'entendre.

– Putain ! Comment le micro du téléphone d'une très belle femme peut cracher !

– Papa a promis de m'en acheter mais il n'est pas encore prêt.

– Je vois ! Dès qu'on se verra un jour, je ferai le programme de vous en acheter un autre...

– Je vous serai très reconnaissante !

– Aucun mérite ! Sinon, quand aurez-vous le temps pour me rendre visite ?

– Euh...demain vous arrange ?

Et tout à coup, les deux cents francs d'unités que j'ai achetées se sont épuisées.

Malheur à moi.

Très rapidement, je me suis retournée voir le jeune homme de la cabine pour m'en procurer encore.

– Mademoiselle, résidez-vous dans le quartier ? m'a demandé celui-ci.

– Oui, y a-t-il un problème ? ai-je répondu.

– Aucun, mademoiselle ! Laissez-moi vous dire simplement que vous êtes très belle.

– Merci pour le compliment. Vous aussi, vous n'êtes pas mal.

– Merci !

Et puisque je gérais une affaire en direct, j'ai repris rapidement mon chemin tout en lançant de nouveau l'appel.

– Allô ?

– Oui, tonton Fred !

– Je suis désolé de ne vous avoir pas rappelé.

– Vous n'avez pas à vous plaindre. C'est parce que le numéro est nul. Et vous savez, je voudrais que désormais, vous me tutoyiez.

– J'aime aussi qu'on me tutoie.

– Il n'y a pas de problème ! Alors, c'est possible qu'on se voie demain n'est-ce pas ?

– Absolument, sinon je suis tout le temps joignable. C'est depuis la maison que je travaille.

– Wouah ! C'est bien ! On se verra demain.

– Il n'y a pas de souci !

– Demain quand tu seras arrivée, je vais te payer l'argent d'unités de notre communication.

– Wouah, tu es un homme très gentil alors !

– Gentil est mon pseudo.

– Ha ha ha ! Dans ce cas, je t'appellerai désormais "tonton gentil".

– Et moi, je t'appellerai LaBlonde !

– LaBlonde ?

– Oui, parce que tu es trop belle !

– Merci ! Allez, porte-toi bien !

– Merci, à tout à l'heure.

J'ai raccroché l'appel et très contente, je me suis dirigée vers la maison où avait loué Frédéric.

Qui allait se négliger ?

Très rapidement, j'ai supprimé le numéro de Fred que j'ai composé et de retour dans la chambre, j'ai déposé le téléphone sur la table sans dire un mot.

Je me suis dirigée vers la natte et me suis allongée là-dessus. Frédéric y était aussi. Visiblement, j'ai remarqué que la faim avait commencé par serrer son estomac. Mais je ne lui ai rien dit parce que c'est lui-même qui a choisi. Quand je venais lui rendre visite, je lui apportais du manger. Je lui faisais manger correctement avant de lui écarter enfin mes jambes pour le laisser me baiser. À chaque fois que je lui disais de ne pas éjaculer dans mon vagin, il me disait qu'il n'arrivait pas à ressortir son pénis et que c'est rien, que je ne vais pas tomber enceinte parce qu'il boit suffisamment d'eau salée avant mon arrivée.

N'étant pas convaincue, je me suis rendue à la pharmacie pour acheter pour lui, des préservatifs. Mais malheureusement, monsieur a trouvé que c'est du caoutchouc et que ce caoutchouc est destiné aux petits enfants.

Voilà là où l'histoire nous a emmenés.

En effet, je me suis allongée sur la natte. Je me suis couchée sur le ventre, tournant ma tête ailleurs. C'est alors que j'ai senti le bras de Frédéric me toucher le cou.

Systématiquement, j'ai compris ce qu'il voulait faire mais je n'ai rien dit.

Pas plus que quelques secondes, je l'ai senti se rapprocher de plus près de moi. Attentive, je l'ai entendu murmurer quelque chose que je n'ai pas entendu. J'ai gardé mon silence sans broncher un mot.

« Je t'aime, Aïcha », ai-je entendu.

C'est ce qu'on appelle culot de garçon. Lui qui ne me donne pas à manger, ose me dire qu'il m'aime. En tout cas, le mieux, c'est de me taire.

Tout doucement, il a commencé par passer la paume de sa main dans mon dos. Jusque-là, je n'ai encore rien dit. C'est lorsque sa main, après ses balades dans mes cheveux, mon cou et dans mon dos et a franchi enfin mes deux montagnes de derrière que j'ai sursauté.

– Il y a quoi ? ai-je dit, énervée.

– Tu as quoi, Aïcha ?

– Qu'est-ce que je n'ai pas ? Depuis le matin, tu ne m'as pas demandé ce que je vais manger et tu me dis que tu m'aimes. C'est ton amour qui va me rassasier ?

– Aïcha, je suis désolé ! Mes conditions actuelles ne me permettent pas encore de bien prendre soin de toi.

– Ah bon ? Donc c'est ce que tu oses me dire ?

– Écoute, Aïcha, le mieux, c'est d'être honnête avec toi ! Et une chose : si tu réalises que tu ne peux pas continuer avec moi, je peux t'accorder le privilège d'aller te mettre ensemble avec un autre homme de ton choix.

– Wouah ! C'est ce qu'on appelle garçon courageux ça ! Que j'aille me mettre ensemble avec un autre homme de mon choix ?

– Oui, Aïcha ! Parce que je ne veux pas que tu souffres. C'est difficilement que j'arrive à manger deux fois par jour. Je viens d'une famille pauvre et je sais ce qui m'attend. Je dois travailler dur pour rehausser le statut de ma famille. Mon père et ma mère font de leur mieux mais ça ne suffit pas. Je ne peux pas vendre mon âme au diable pour plaire au monde.

Frédéric, d'après ce qu'il me racontait, je voyais en lui, la puissance du mot "courage". Oui, il faut être vraiment courageux pour prononcer ces phrases décevantes à une belle femme que je suis.

– D'accord, Frédéric, j'ai écouté tout ce que tu as dit ! De tes propos, je réalise que je suis venue dans ta vie avec tous mes problèmes mais ne t'inquiète pas...

– Je n'ai pas dit ça...

– Écoute, tu n'as pas besoin de le préciser ! Mais je te le promets, je vais me débarrasser de cette putain de grossesse et ensuite, continuer ma vie avec l'homme qui mérite vraiment mon cœur.

Ceci dit, je me suis dirigée vers la cour et suis allée m'asseoir sur la même brique au portail.

Assise, je réfléchissais sur ma vie. C'est comme on dit que les belles femmes tombent aveuglément amoureuses des hommes idiots qui ne méritent pas leur cœur. C'était exactement mon cas. Avec ma splendide beauté, je suis aveuglément tombée amoureuse d'un Imbécile qui est incapable de prendre bien soin de moi.

« Il faut que tu reprennes ta vie au sérieux », m'a chuchoté une voix intérieure.

– En quoi faisant ? me suis-je demandé.

« Il faut que tu avortes ce démon que tu as dans ton ventre », m'a répondu la même voix.

C'est comme on dit souvent que lorsqu'on traverse une situation, il faut prêter d'attention à la voix de son intuition qui ne trompe jamais. Sinon là, mon intuition avait raison. La meilleure des choses à faire effectivement, c'est de me débarrasser de cette putain de grossesse.

– Mais où trouver de l'argent pour opérer cela ? me suis-je demandé de nouveau.

« Tu l'auras dès que tu seras arrivée chez Fred ».

C'est alors que j'ai compris que même mon intuition était contre la venue au monde de ce bébé bâtard que je conservais dans mon petit ventre.

Je me suis levée pour me diriger dans la chambre.

***

Le lendemain matin.

Il sonnait dix heures quand je suis revenue de la douche. M'étant bien pommadée, j'ai enfilé la même robe que je porte tous les jours. La nuit passée, je l'ai bien lavée et l'ai séchée dans la chambre. Ce matin, elle était encore plus belle on dirait que je l'ai fraîchement enlevée de son sachet.

Sans phares, j'étais déjà belle. Sans rouges aux lèvres, j'étais toujours belle.

Suivant toujours la voix de mon intuition, me voilà chez la coiffeuse du quartier. Je l'ai saluée et lui ai demandé de me prêter son téléphone. J'ai lancé un numéro et lorsque ça a sonné le premier coup et ensuite le deuxième, j'ai raccroché. En moins de quelques secondes, Fred m'a rappelée.

– Bonjour tonton Fred ! Je viens déjà !

– D'accord, suis juste l'indication et tu ne te perdras pas.

– D'accord, à tout à l'heure !

J'ai raccroché l'appel et ai retourné le téléphone à la jeune femme tout en lui disant merci.

Je voyais la jeune femme me regarder avec admiration. Si c'est en matière de beauté, je sais que le Seigneur a pris tout son temps pour me créer. Il a mis chaque chose à sa place. Il n'a pas mis les choses en désordre comme il a mis pour certains. Moi, il m'a créée différemment de tout le monde. À un concours de Miss de beauté, je remporterais la victoire, point.

J'ai arrêté un conducteur de taxi-moto et lui ai donné l'indication.

– Je connais, montez s'il vous plaît !

– Vous allez me prendre à combien ?

– Trois cents francs.

– Désolée, monsieur, j'ai cent francs.

– Belle comme ça et vous avez seulement cent francs ?

– C'est ce que j'ai, conducteur !

– Ok, montez !

Ah oui ! Quel conducteur allait refuser de prendre sur sa moto une très belle femme que je suis ?

Doucement, j'ai posé mes grosses fesses sur le siège arrière de la moto.

***

Quelques minutes plus tard et me voici sur un portail. Sur ce portail, était debout un jeune homme ; c'était Fred.

– Bonne arrivée, mademoiselle Aïcha !

– Merci ! C'est chez toi ici ?

– Oui, mais je suis en location !

– C'est très bien !

– Allons à l'intérieur !

Mon compagnon et moi nous sommes dirigés dans la cour de la maison. Nous avons marché jusqu'à arriver devant une porte où un rideau cachait tous les meubles de la chambre. Fred est entré en premier et je suis entrée en deuxième.

Non, la chambre était clean ! De grosses armoires par-ci ; de très jolies tables et chaises par-là. Au mur, était suspendu un géant écran plasma. En haut, tournaient deux ventilateurs.

Observant tout ceci, j'avais la bouche largement ouverte sans savoir.

– Où est votre épouse ?

– Épouse ? Je n'en ai pas encore !

– Quoi ? Avec tout ceci ?

– Oh, je ne suis pas encore prêt ! Viens t'asseoir !

Doucement, je suis allée m'asseoir. Même si Fred et Frédéric étaient des frères jumeaux, Frédéric est le malchanceux et Fred est le chanceux.

– Que vas-tu boire ?

– Je ne suis pas habituée aux boissons. Sers-moi juste un jus !

– Juste un jus ? Donc tu n'aimes pas les plaisirs ?

– Oh, non ! Je suis spécial en mon genre.

– Ça se voit !

Fred se lève et va me chercher au frigo, du jus d'ananas. Il se dirige vers l'armoire pour m'apporter un verre.

– Sers-toi, ma chérie !

– Merci !

Il se retourne vers l'armoire et reviens quelques secondes plus tard avec un sachet.

– Tiens, voici ta surprise !

– Ma surprise ? ai-je dit en lui prenant le sachet.

Plongeant la main à l'intérieur, j'ai sorti un gros carton ; un carton sur lequel était écrit : Tesla Pi.

Non, c'était un téléphone portable non encore populaire.

Je me suis agenouillée pour dire merci à Fred.

– Oh, non, non, non, lève-toi ma belle ! Tu mérites plus que ça !

– Merci !

Fred, comme s'il était déterminé à me faire indirectement la cour, m'a tendu un billet de dix mille francs et m'a dit : « C'est l'argent de tes unités et de ton transport ».

– Quoi ? Oh, merci pour ta générosité ! Je suis très contente de t'avoir dans ma vie.

– C'est le plan de Dieu.

– Merci !

Fred contourne la table et viens s'asseoir à côté de moi.

– Mademoiselle Aïcha, me permets-tu une nuit de noce ?

Qui suis-je pour refuser cela en guise de reconnaissance ? Pas moi en tout cas !

            
            

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