Chapitre 4 L'OMBRE DU LABYRINTHE AUX YEUX VIDES

La nuit était plus lourde que jamais. Un silence pesant s'était abattu sur le quartier, un silence qui ne présageait rien de bon. Ryann, allongé sur son lit, sentait une oppression indescriptible lui écraser la poitrine. Depuis son pacte, il ne dormait plus comme avant. Quelque chose le guettait...

Quelque chose qui ne dormait jamais.

Les ombres dans sa chambre semblaient s'étirer de manière anormale, comme si elles voulaient l'engloutir. Puis, un frisson glacial parcourut sa colonne vertébrale. Il le sentait. Il était là.

Un murmure s'éleva du coin obscur de la pièce. Un murmure qui n'avait rien d'humain. Un murmure sifflant, semblable au froissement d'une lame contre de la chair.

- Ryann... Tu es à moi.

Son souffle se coupa. Ses muscles se paralysèrent. Il voulut crier, mais aucun son ne sortit de sa bouche.

Puis, il le vit.

Dans l'ombre, une silhouette se tenait debout. Grande. Osseuse. Son visage... Non. Il n'avait pas de visage. Juste une bouche tordue en un sourire atroce, et deux yeux creux, vides, noirs comme l'abîme.

Puis, il avança.

Les lumières grésillèrent, projetant des éclairs aveuglants dans la pièce. Chaque pas de la créature résonnait comme un écho funèbre. L'air s'alourdit, sentant la chair brûlée et le soufre.

Ryann voulut fuir, mais il était cloué sur place.

- Le pacte est irréversible, Ryann. Tu ne peux pas échapper à ton destin.

Puis, sans prévenir, l'ombre bondit sur lui.

Ryann hurla.

Mais aucun son ne sortit de sa bouche.

La chose s'était jetée sur lui avec une rapidité inhumaine. Ses doigts longs et décharnés s'enfoncèrent dans sa poitrine comme des serres de rapace. Un froid indescriptible le transperça. Son corps entier était gelé, comme si son âme elle-même se faisait arracher.

- Tu es à moi...

Le murmure résonna dans sa tête comme une lame sur du verre. Les murs de sa chambre se tordaient. La réalité se fissurait. Des silhouettes noires rampaient hors des coins sombres, des bras allongés griffant les murs, laissant derrière eux des traces de cendres et de sang séché.

Puis tout s'arrêta.

Le silence.

Un silence brisé par un son.

Un rire.

Un rire glacial, sinistre, inhumain.

Ryann ouvrit les yeux.

Il était debout, dans une rue qu'il ne reconnaissait pas. Des lampadaires clignotaient faiblement, projetant une lueur malade sur le goudron craquelé. Des ombres bougeaient dans les ruelles. Le vent soufflait, mais aucun son n'en sortait.

Puis, il regarda sa main.

Son sang se glaça.

Une marque y était gravée.

Un symbole ancien, brûlé dans sa peau. Une spirale entourée d'inscriptions qu'il ne comprenait pas, mais qu'il sentait. C'était un sceau.

- Ryann...

Il se retourna violemment.

Mélissa était là.

Mais ce n'était pas elle.

Ses yeux... Ses yeux étaient noirs.

Deux trous d'ombre sans fond.

- Tu ne peux plus fuir.

***

Ryann ouvrit les yeux, mais l'obscurité était si épaisse qu'il se demanda s'il était encore endormi. Son souffle était court, saccadé, et une sueur glaciale perlait sur son front. Il tenta de bouger, mais son corps était engourdi, comme si quelque chose de lourd était posé sur sa poitrine.

Soudain, un bruit de griffes raclant le bois résonna dans la pièce. Il voulait crier, mais aucun son ne sortit de sa gorge. Une silhouette se dessina dans le coin de la chambre, une ombre mouvante aux yeux luminescents. Ryann sentit son cœur battre à toute vitesse alors qu'une main froide effleura son bras.

- Tu as accepté, Ryann... tu ne peux plus faire marche arrière.

La voix était grave, distordue, et semblait résonner directement dans son crâne. Il voulut se débattre, mais son corps était comme cloué au lit. La pression sur sa poitrine s'accentua et il sentit une douleur lancinante, comme si des griffes invisibles s'enfonçaient dans sa chair.

Brusquement, la lumière de son téléphone s'alluma, projetant une lueur blafarde sur la pièce. Il n'y avait personne. Juste son propre reflet dans le miroir face à son lit... sauf que son reflet souriait alors que lui ne bougeait pas.

Un frisson d'effroi le parcourut. Il se leva d'un bond, fuyant son propre reflet, mais lorsqu'il tenta de sortir de sa chambre, la poignée de la porte était glaciale. Une odeur de chair brûlée emplit la pièce et un murmure répétait sans cesse : « Tu es à moi maintenant... »

Ryann se retourna brusquement et vit une ombre immense se déployer sur le mur, prenant la forme d'un homme aux cornes recourbées. Les murs semblèrent se refermer sur lui, la pièce devint oppressante, irrespirable. Son téléphone vibra une fois. Un message apparut sur l'écran :

**"L'heure approche. Prépare-toi."**

Son sang se glaça. Il ne savait pas qui avait envoyé ce message, mais une chose était certaine : le pacte qu'il avait signé n'était que le début de son cauchemar.

. *. *

*

Le vent soufflait d'une manière anormale cette nuit-là, sifflant entre les ruelles sombres de Cotonou comme un avertissement silencieux. Ryann sentait une pression sur sa poitrine, une sensation étrange qui lui disait que quelque chose d'horrible allait arriver. Depuis qu'il avait accepté le pacte, il était devenu un pantin entre les mains d'une force qu'il ne comprenait pas entièrement. Mais ce soir, les choses allaient prendre une tournure bien plus terrifiante.

Il était dans sa chambre, fixant l'écran de son téléphone, incapable de détacher son regard d'un message anonyme qui venait d'apparaître sur son écran :

"Tu croyais pouvoir jouer avec les ombres sans conséquences ? Il est temps de payer le prix."

Ses mains tremblaient. Il jeta un coup d'œil vers la fenêtre, s'attendant à voir une silhouette tapie dans l'obscurité. Mais il n'y avait que le vide. Pourtant, il se sentait observé. Il recula lentement, son souffle devenant saccadé.

Soudain, la lumière de sa chambre s'éteignit. Un froid glacial envahit la pièce. Puis, un bruit grinçant résonna – comme si quelqu'un traînait quelque chose de lourd sur le sol. Ryann déglutit difficilement. Il voulait crier, mais aucun son ne sortit de sa bouche.

Une voix s'éleva dans l'obscurité, rauque et inhumaine :

"Tu as eu ta chance, maintenant, c'est mon tour..."

Brusquement, une main glacée saisit son bras. Il sursauta et se débattit, mais il n'y avait rien. Juste cette présence invisible qui le serrait avec une force terrifiante. Il tenta d'allumer son téléphone, mais l'écran était fissuré, déformé, affichant des visages hurlants figés dans une expression d'agonie.

Puis, tout s'arrêta.

Le silence.

La lumière revint. Mais sur le mur, il vit quelque chose d'horrible : une phrase écrite en lettres de sang : "Ton temps est compté."

Ryann s'écroula au sol, en sueur. Il était maintenant certain d'une chose : le pacte était bien réel. Et ce qui l'attendait était pire que la mort.

La nuit était tombée, enveloppant Cotonou dans une obscurité profonde. Mais cette nuit-là, pour Ryann, l'obscurité avait une signification bien plus effrayante. C'était une nuit sans lune, où les rues étaient silencieuses, seules les lumières vacillantes des lampadaires éclairaient l'environnement de façon inquiétante.

Ryann, tout juste sorti de son appartement, marcha dans les rues désertes, son cœur battant à une vitesse folle. Il venait de vivre une confrontation plus violente que tout ce qu'il avait connu auparavant. La dernière fois qu'il avait vu l'homme mystérieux, il avait vu son reflet dans les yeux de la créature qu'il était devenu. Un monstre en quête de pouvoir, pris dans un cercle vicieux d'ambitions dévorantes et de regrets accablants.

Alors qu'il marchait, une silhouette se dessina devant lui. Il s'arrêta net, son esprit se figeant. Le cœur battant, il sentit une sueur froide sur son front.

- Tu m'as cherché, Ryann, dit une voix basse, presque inaudible, qui semblait provenir des ombres elles-mêmes.

C'était lui, l'homme qu'il avait rencontré dans le cybercafé. L'homme aux yeux glissants, qui semblait plus être une créature de la nuit qu'un être humain.

- Tu m'as eu, dit Ryann d'une voix tremblante. Qu'est-ce que tu veux de plus ?

L'homme esquissa un sourire qui fit frissonner Ryann jusque dans ses os. Il savait que cet instant marquerait une autre étape dans son voyage torturé. Le pacte qu'il avait signé n'était qu'un début, et il commençait à comprendre que l'enfer n'était pas simplement une promesse, mais une réalité.

- Tu veux tout, Ryann. L'homme s'approcha lentement, chaque pas résonnant dans le silence de la nuit. Tu as choisi. Maintenant, tu vas découvrir ce que cela signifie.

Ryann sentit ses jambes trembler sous le poids de la situation. Il voulait fuir, mais quelque chose l'en empêchait. Ce pacte, cet enchaînement de choix, le liait de manière inexplicable à cet homme et à tout ce qu'il représentait. Il se sentait enchaîné dans un labyrinthe sans issue.

- Je veux pouvoir... souffla Ryann, ses mains se crispant sur son t-shirt, comme si un fil invisible le tirait vers cette créature. Je veux être plus fort... réussir...

L'homme éclata de rire, un rire froid et sinistre, qui résonna dans l'air, faisant écho dans l'obscurité.

- Tu veux réussir ? répéta l'homme, sa voix devenant plus menaçante. Tout le monde veut réussir, mais peu comprennent à quel prix. La puissance ne se donne pas sans sacrifice, Ryann. Et toi, tu as sacrifié ton âme.

Le sourire de l'homme s'élargit encore, ses yeux brillants d'une lueur surnaturelle. Ryann sentit un frisson glacé parcourir son échine. Il voulait s'échapper, mais une force invisible le retenait en place. Ses jambes ne répondaient plus, ses muscles se bloquaient sous l'effet de la peur et de la terreur. C'était comme si l'air autour de lui devenait de plus en plus dense, lourd, une pression écrasante qui lui coupait presque la respiration.

- Tu es dans le labyrinthe maintenant, Ryann, dit l'homme d'une voix sourde, presque chuchotée. Il n'y a pas de retour en arrière.

Les mots résonnèrent dans la tête de Ryann comme un gong. Le labyrinthe. Ces mots lui rappelaient un rêve qu'il avait fait des années auparavant, un rêve où il se retrouvait perdu, enfermé dans un dédale de couloirs sans fin, chaque porte menant à une impasse, chaque direction le guidant toujours plus loin dans l'obscurité. Ce rêve l'avait hanté pendant des années, mais jamais il n'aurait cru qu'il deviendrait réalité.

L'homme avança lentement, son ombre s'étendant comme un voile sur le sol. Les traits de son visage semblaient se dissoudre dans les ténèbres, mais ses yeux brillaient d'une lumière étrange, presque surnaturelle.

- C'est ainsi que ça commence, Ryann. Il leva la main, et tout autour d'eux, les ombres se mirent à bouger. Elles dansaient comme des serpents sinueux, s'entrelassaient et se formaient en une forme gigantesque, menaçant de les engloutir.

Ryann cligna des yeux, tentant de se dégager de cette vision cauchemardesque. Mais la pression était trop forte, et il ne pouvait s'empêcher de regarder, hypnotisé. Il sentit son cœur s'accélérer alors que les ombres se resserraient autour de lui.

- Tu pensais avoir le contrôle, hein ? ricana l'homme. Mais regarde autour de toi, Ryann. Tu n'es rien d'autre qu'une marionnette dans un jeu dont tu n'as même pas conscience.

L'air autour de Ryann devint glacé, comme si des milliers de mains invisibles tentaient de l'étouffer, de l'attirer dans un abîme sans fin. Il ferma les yeux, essayant de se concentrer, de comprendre ce qui lui arrivait. Il savait qu'il n'avait plus le choix, qu'il était piégé dans un jeu bien plus vaste que tout ce qu'il avait imaginé.

Les ombres continuèrent de se tordre et de grandir, jusqu'à former un cercle qui emprisonnait Ryann. Il entendait des murmures, des voix basses et indistinctes, des sons qui semblaient provenir de l'au-delà. Il n'arrivait pas à les comprendre, mais ils étaient là, tout autour de lui, comme une chape de plomb menaçant de l'engloutir.

- Ils viennent pour toi. La voix de l'homme devint plus grave, presque menaçante. Tu t'es attiré la colère de puissances plus grandes que toi. Ces ombres que tu vois... ce ne sont pas juste des hallucinations. Ce sont des entités, des esprits perdus, des âmes qui errent, tout comme toi. Et elles veulent te voir succomber.

Ryann se sentit submergé par une sensation d'étouffement, comme si l'air était devenu plus lourd, plus dense, et qu'il n'arrivait plus à respirer. Il tenta de faire un pas en arrière, mais ses pieds restaient collés au sol, comme si des racines invisibles l'avaient piégé. Les ombres se rapprochaient, leur forme devenant de plus en plus distincte, leurs visages difformes, leurs yeux vides et sans pitié.

- Ne lutte pas, murmura l'homme. Il n'y a plus de salut. Accepte ce qui est en train de se produire. Tu t'es ouvert à une porte que tu ne peux plus refermer.

Les ombres se tendirent vers Ryann, leurs mains spectrales cherchant à l'attraper. Dans un dernier sursaut de volonté, il ferma les yeux et tenta de rassembler toute l'énergie qu'il avait. Il savait que s'il restait là à attendre, il succomberait. Il n'était plus question de fuir, mais de lutter, de combattre pour sa survie.

Il inspira profondément et, dans un cri de rage et de terreur, se lança dans le vide, défiant les ombres qui cherchaient à l'engloutir.

À cet instant précis, le monde autour de lui sembla se figer. Le temps sembla s'arrêter, et la réalité elle-même se déchira en morceaux.

Puis, soudainement, tout devint silencieux. La pression sur sa poitrine se dissipa, les ombres disparurent, et Ryann tomba au sol, haletant, couvert de sueur froide. Il ouvrit les yeux lentement, et tout ce qu'il vit autour de lui n'était qu'un vaste néant. Un endroit où même la lumière semblait fuir.

- Tu vois ? dit la voix de l'homme, mais cette fois, il n'était plus à ses côtés. Il n'y a pas d'échappatoire, Ryann. Tu as franchi le seuil de l'horreur. Le jeu ne fait que commencer.

Ryann se redressa lentement, son corps tremblant de fatigue. Il n'était plus sûr de ce qui était réel, ni de ce qui l'attendait. Mais une chose était sûre : il était désormais pris dans un cercle vicieux, un tourbillon d'horreurs sans fin, et il ne pouvait plus revenir en arrière.

Les ombres, elles, n'étaient qu'un avertissement. Elles ne le laisseraient jamais tranquille.

            
            

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