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La nuit était tombée, l'ombre s'étendait lentement sur la vaste étendue de la forêt, enveloppant tout d'une obscurité implacable. Adrian, l'Alpha des Ombres, se tenait sur la terrasse de son château, les mains appuyées sur la balustrade de pierre froide, son regard perdu dans l'infini de la nuit. Une brise glacée soufflait, transportant avec elle des murmures indiscernables. Mais ce n'était pas le vent qu'il entendait. Non. Dans son esprit, une voix plus profonde, plus ancienne, semblait s'élever à chaque souffle, un appel.
C'était un appel qu'il avait ressenti de plus en plus fort depuis quelques semaines, chaque nuit, chaque jour. Ce cri mystérieux, ces visions, ces fragments d'images qu'il ne pouvait comprendre.
Il était las de lutter contre cette force invisible. L'ombre qui l'habillait depuis si longtemps, cette malédiction qui dévorait son âme, l'affaiblissait à chaque pleine lune, se faisait plus insistante. Son loup, une bête puissante, pourtant en proie à des tourments incessants, se tordait sous le poids d'une souffrance que seul Adrian semblait pouvoir ressentir. Il n'avait jamais été aussi près de perdre le contrôle, aussi près de succomber à la folie que la malédiction faisait naître en lui.
Le temps semblait suspendu, comme si l'univers lui-même retenait son souffle. Puis, tout à coup, une vision jaillit de l'obscurité. Elle était là, cette silhouette. D'abord floue, elle s'affirma lentement dans son esprit, se dessinant dans des contours plus nets, plus précis. Une jeune femme, seule, perdue dans la forêt. Ses yeux brillaient d'une lumière étrange, et une sensation de calme inouï émanait d'elle. C'était elle. Sienna. Il savait. Il le sentait au plus profond de son être.
Il n'avait pas de nom, ni de visage, ni de contexte précis pour identifier cette jeune femme, mais la certitude qu'elle était liée à lui était indéniable. Cette rencontre, cette vision, n'était pas un simple rêve ou une illusion passagère. C'était un appel. Un appel qu'il ne pouvait ignorer. Une force plus grande que tout ce qu'il avait connu jusqu'alors semblait le guider vers elle. Il n'était plus seulement un Alpha rongé par une malédiction. Il était désormais l'homme qui devait sauver son âme, et celle de Sienna.
Il tourna brusquement sur ses talons et entra dans la grande salle du château. La lumière des torches dansait sur les murs de pierre, projetant des ombres sinistres. Dans un coin, une silhouette haute et imposante se tenait, une présence à la fois rassurante et menaçante. Roderick, son fidèle bras droit, leva les yeux vers lui. Adrian le fixa un instant, sa décision désormais prise. Il savait que son Alpha le suivrait sans questionner. L'ordre qu'il allait donner serait celui qui marquerait la première étape de la rédemption, mais aussi celui qui pourrait sceller son destin et celui de Sienna à tout jamais.
- « Préparez une expédition. »
La voix d'Adrian, grave et autoritaire, résonna dans la salle silencieuse. Roderick hocha la tête sans un mot, comprenant immédiatement l'ampleur de la requête. Il savait que ce voyage n'était pas seulement un simple déplacement. Il s'agissait de l'avenir de leur meute, de l'avenir d'Adrian. La malédiction le rongeait chaque jour davantage, et la seule possibilité d'échapper à sa spirale infernale résidait désormais en cette jeune femme qu'il avait vue en rêve, en Sienna.
Adrian ne se permit aucun doute. Les visions n'étaient pas un simple caprice de son esprit tourmenté. Elles étaient un message, un signe de la destinée, un avertissement. Sienna détenait la clé de sa liberté. Une liberté qu'il n'osait même plus espérer.
- « Vous partirez à l'aube. Emmenez les meilleurs traqueurs, et ne rentrez pas sans elle. » Adrian parla d'une voix tranchante, une voix qui ne souffrait d'aucune contestation. Roderick ne répondit pas immédiatement, mais son regard en disait long. Il savait que cet ordre n'était pas sans risque. Retrouver une femme dans une forêt aussi vaste était un défi en soi. Mais ce qu'il comprenait encore mieux, c'était que la quête d'Adrian était bien plus que de trouver Sienna. Elle était liée à l'Alpha. Liée à la malédiction qui le dévorait. Cette mission pouvait signifier la fin de cette souffrance. Ou son aggravation.
Adrian se dirigea vers une grande carte de la région qu'il étudiait depuis plusieurs jours. Les lignes tracées à la main, les dessins détaillant les contours des forêts et des montagnes, étaient désormais ses alliés. Son esprit calculait chaque trajectoire, chaque déplacement possible. Mais plus que tout, il pensait à la présence de Sienna. Elle était là, quelque part dans cette immensité sauvage, et il ne pouvait s'empêcher de ressentir que son destin et le sien étaient inextricablement liés.
Dans les jours à venir, il saurait si cette connexion était un don ou une malédiction de plus. Mais une chose était certaine : la trouver était devenu sa priorité absolue.
Lorsque l'aube se leva, la meute se mit en marche. Les loups, vêtus de leurs peaux et armés de leurs plus précieux outils, se lancèrent dans une quête silencieuse et dangereuse. Mais leur Alpha ne les suivit pas immédiatement. Il resta un moment là, seul dans la salle, observant les torches vaciller. Le poids de son rôle, de ses choix, l'écrasait. Il se tourna une dernière fois vers la fenêtre, cherchant, comme toujours, à comprendre les visages flous des visions qui le hantaient. Chaque ombre, chaque lumière semblait le guider vers Sienna. Mais l'ombre de la malédiction continuait de le suivre, le tirant vers un destin qu'il n'avait jamais imaginé.
Il savait que cette quête ne serait pas seulement un chemin à parcourir dans les bois. C'était un chemin intérieur, un chemin qui allait le confronter à sa propre monstruosité. Ce qu'il découvrirait à la fin de cette quête, il ne le savait pas encore. Mais une chose était sûre : tout changerait.
Le matin se leva lentement sur la forêt, un voile de brume flottant entre les arbres, faisant frémir les feuilles encore mouillées de la nuit. Sienna se réveilla, un malaise étrange l'envahissant dès les premières lueurs du jour. Elle s'assit sur le sol froid, son regard perdu dans l'horizon brouillé, cherchant à comprendre cette sensation inexplicable. Ce n'était pas de la peur, pas exactement. C'était plutôt comme une pression invisible, une sensation de vide qui semblait l'enserrer, comme si quelque chose l'appelait. Non, pas quelque chose. Quelqu'un.
Elle se leva d'un coup, les jambes encore tremblantes de l'anxiété grandissante. Elle tenta de chasser cette sensation, se concentrant sur les bruits familiers de la forêt. Les oiseaux chantaient, les feuilles bruissaient sous la brise légère. Mais dans son esprit, une voix, douce mais insistante, continuait de l'appeler. C'était une présence qu'elle ne pouvait expliquer, mais qui se faisait de plus en plus pressante. L'écho d'un souvenir qu'elle n'avait pas encore conscientisé. Elle ferma les yeux un instant, et l'image d'un homme puissant, d'un Alpha, se dessina furtivement dans son esprit. Mais avant qu'elle n'ait pu saisir cette vision, une onde de douleur traversa sa poitrine, comme un choc électrique. Elle laissa échapper un cri étouffé.
Le sentiment ne fit que croître, l'appel devenant plus fort, plus proche. Elle sentit l'air autour d'elle se faire plus lourd, presque tangible, comme si la forêt elle-même était en train de la surveiller. Elle se secoua, tentant de chasser cette sensation, mais il était trop tard. La pression invisible devint insupportable, la forçant à avancer malgré elle, comme une marionnette manipulée par des fils invisibles. Elle marcha sans but, sa conscience envahie par cette force étrange. Chaque pas la rapprochait de quelque chose qu'elle ne comprenait pas encore, mais qu'elle ressentait de plus en plus vivement. Il n'y avait pas de retour possible.
Soudain, un bruit sec brisa le silence. Un craquement métallique suivi d'un rugissement sourd. Avant qu'elle n'ait eu le temps de réagir, une force brutale l'attrapa par la taille, la projetant en avant. Elle roula sur le sol, son corps heurtant les pierres et les racines, avant de se retrouver au centre d'un piège bien plus complexe qu'elle ne l'aurait imaginé. Des chaînes, fines mais solides, se refermèrent sur ses poignets et ses chevilles, l'empêchant de se libérer. Elle se redressa dans un élan de panique, mais la douleur de ses blessures la fit chanceler.
Elle était tombée dans un piège. Mais pas n'importe lequel. Ses yeux se portèrent sur les ombres qui se faufilaient entre les arbres. Des silhouettes féroces, des loups, mais non, pas des créatures sauvages comme les autres. Ces loups avaient quelque chose d'inhumain dans leurs yeux. Leurs pupilles étaient trop sombres, trop profondes. Ils étaient différents. Hostiles. Ils se tenaient en cercle autour d'elle, leurs crocs brillant dans la lumière brumeuse du matin. Ils n'étaient pas là par hasard.
Sienna tenta de se libérer, ses muscles tendus, mais chaque mouvement n'entraînait qu'une douleur accrue. La vision de ces loups hostiles s'était soudainement intensifiée dans son esprit. Elle comprit alors que ce n'était pas un simple piège. C'était une chasse. Elle n'était pas la proie d'un chasseur humain. Non. Elle était l'objet d'une traque bien plus ancienne. Ces loups savaient qui elle était, savaient ce qu'elle représentait. Et elle n'était pas la bienvenue ici.
Elle tenta une dernière fois de se dégager, sa respiration haletante, mais le poids de l'acier des chaînes la clouait au sol. La frustration et la peur se mêlaient, envahissant son esprit. Ce qui la tourmentait le plus, c'était cette sensation que quelque chose d'encore plus grand, plus dangereux, se cachait derrière tout cela. Les loups étaient juste des instruments, des soldats d'une force invisible, peut-être celle qu'elle avait ressentie la veille, dans ses visions. Un pouvoir supérieur qui l'appelait, mais qui, en même temps, semblait vouloir la faire souffrir.
Les créatures, cependant, ne semblaient pas pressées. Elles l'observaient avec une curiosité glacée. Leurs yeux ne brillaient pas de faim, mais de calcul. Elles attendaient. Sienna, avec la gorge serrée, comprit que sa situation était bien plus complexe qu'elle ne l'avait imaginé. Elle n'était plus seule dans cette forêt. Les loups hostiles ne représentaient qu'une partie de la menace, mais une menace qui risquait de l'engloutir toute entière.
Une ombre se déplaça parmi les arbres. Elle sentit alors une présence différente, une force qui s'éloignait à peine. Son cœur se serra. Était-ce lui ? L'homme des visions ? L'appel de sa propre destinée ? Ou bien était-ce encore une illusion qui venait l'enfermer davantage dans la toile de ce piège mortel ?
Le silence se fit. Les loups restèrent immobiles, leurs yeux fixés sur elle, tandis que la brume autour d'eux se densifiait, créant une atmosphère plus lourde, plus oppressante. La forêt elle-même semblait retenir son souffle. Dans l'ombre, un autre cri résonna, effrayant et puissant, comme une annonce de ce qui allait suivre. Mais ce cri ne venait pas d'un loup. Il venait d'un être plus grand, plus ancien. Un Alpha. Et son arrivée était inévitable.