/0/23332/coverbig.jpg?v=65d19d6cc8fd19ff0990ac7a6a74b941)
Adrian se tenait dans la clairière, seul, le regard fixé sur la forêt qui l'entourait. L'air était froid, humide, comme une brume pesante qui refusait de se lever. La malédiction qui le rongeait depuis des années n'était pas seulement une souffrance physique, mais aussi une torture psychologique. Il avait l'impression que ses veines ne contenaient plus de sang, mais une essence noire, brûlante, comme si la magie qui le dévorait vivait en lui, pulsatillante, prête à le faire exploser de l'intérieur. La douleur était constante, inévitable, mais au-delà de cela, c'était la honte qui l'accablait.
Il n'était plus l'Alpha qu'il avait été, celui qui menait sa meute avec honneur et puissance. Désormais, il n'était qu'un homme brisé, piégé par un destin cruel.
Il inspira profondément, fermant les yeux quelques instants. Ses griffes se contractèrent involontairement, griffant le sol sous ses pieds. Il sentait la bête en lui se réveiller à chaque seconde de douleur, prête à rugir, prête à tout détruire. Mais il n'était plus maître de ses propres pulsions. Il savait que la malédiction l'avait changé, qu'elle l'avait rendu moins humain, moins loup, tout à la fois. Cette malédiction, d'un pouvoir ancien et mystérieux, l'avait fait sombrer dans la solitude. Il ne pouvait plus se regarder dans un miroir sans voir un monstre, un homme qui n'était plus qu'une ombre de lui-même.
Depuis sa chute, depuis cette nuit fatidique où il avait été frappé par ce sort mystérieux, Adrian avait erré. Sa meute l'avait rejeté. Peu à peu, tous ceux qu'il avait connus s'étaient éloignés de lui, les murmures grandissant dans l'ombre. « Il n'est plus digne. » « Il a failli. » « Ce n'est plus notre Alpha. » Chaque mot, chaque regard, chaque geste de rejet avait été une lame plantée dans son cœur. Il n'était plus qu'un homme maudit, solitaire, enfermé dans sa propre souffrance.
Et pourtant, malgré tout, il y avait des moments où il se battait encore contre cette malédiction. Des moments où il sentait qu'il pouvait encore la contrôler, où l'Alpha en lui se levait et chassait l'ombre. Mais ces moments étaient de plus en plus rares. De plus en plus faibles. Il sentait la bête en lui se faire plus forte, plus sauvage, plus incontrôlable.
Une fois de plus, il leva les yeux vers les cieux, cherchant des réponses. Mais il n'y avait que des nuages sombres et lourds. Pas d'étoiles, pas de lumière. Juste la présence de l'invisible, le poids de la magie qui l'alourdissait. Il n'était pas prêt à affronter ce qu'il savait. Il n'était pas prêt à accepter ce qu'il devenait. Mais il n'avait plus le choix. Il devait trouver un moyen de se libérer.
Son esprit vagabonda alors vers elle. Sienna. Il avait entendu des rumeurs, des murmures, comme une voix lointaine qui l'appelait. Il savait que cette fille, cette enfant qu'il n'avait jamais rencontrée, possédait la clé pour briser la malédiction. Mais chaque fibre de son être se rebellait à l'idée de la retrouver. Cette idée qu'elle pourrait être son salut était à la fois un soulagement et une malédiction en soi. Comment pourrait-il se permettre de la chercher alors qu'il avait échoué à protéger sa propre meute ? Comment pourrait-il la confronter, cette enfant, alors que sa propre existence était une blessure ouverte, une honte qu'il portait chaque jour ?
Adrian secoua la tête, chassant ces pensées. Il devait la retrouver. La réponse était là, dans les bois, dans cette fille qui avait été abandonnée. Mais avant tout, il devait se préparer à ce qu'il allait découvrir. Il savait qu'il n'était pas prêt à la rencontrer. Pas encore. Pas dans l'état où il se trouvait.
Un rugissement, lointain mais distinct, le fit sursauter. Il ferma les yeux un instant, reconnaissant la voix des loups qui parcouraient son territoire. Ils venaient de la meute, de l'ancien territoire qu'il avait gouverné. Leur présence raviva un autre souvenir, un souvenir douloureux, mais nécessaire. La meute qu'il avait autrefois dirigée, les regards d'admiration, la puissance qu'il incarnait. Il avait tout perdu. Tout. Il n'était plus leur Alpha, et ils ne seraient plus jamais les siens.
Il serra les poings, sentant une nouvelle vague de douleur se propager dans son corps. La malédiction frappait de nouveau, plus forte, plus bruyante, comme un tambour de guerre résonnant dans ses entrailles. Il n'avait plus le temps de réfléchir. Il devait agir. Il devait partir à la recherche de la seule personne qui pouvait peut-être le sauver.
Sans un mot, il tourna les talons, abandonnant la clairière. Le vent soufflait de nouveau, et cette fois, c'était un vent d'espoir. Il était seul dans la nuit, mais il sentait la présence de quelque chose, de quelqu'un, quelque part dans les ténèbres. La malédiction, cette nuit-là, n'était pas un fardeau qu'il devrait porter éternellement. Un jour, il trouverait la clé. Et ce jour-là, tout changerait.
Mais pour l'instant, il n'était qu'un Alpha brisé, marchant dans les ombres, à la recherche de la seule personne capable de lui offrir une chance de rédemption.
Chaque nuit, Adrian se réveillait en hurlant, la douleur le transperçant comme des crocs invisibles, se faufilant à travers chaque fibre de son être. Les souffrances physiques étaient devenues sa réalité, et avec elles, l'instabilité de son loup, cette bête déchaînée qui réclamait sa part de liberté. La malédiction qui le marquait ne cessait d'agir, exacerbée par les phases de pleine lune, mais aussi par l'angoisse constante qui le rongeait. Il pouvait sentir son loup battre la poitrine de son corps humain, les griffes de la créature s'agrippant à sa conscience, prête à exploser.
Les nuits étaient les pires. L'obscurité devenait son ennemi, une entité vivante qui l'engloutissait. Ses muscles se contractaient, ses dents se serraient si fort qu'il en craquait l'os. Ses jambes tremblaient, son cœur battait trop vite. Parfois, il sentait qu'il allait perdre tout contrôle, que le loup prendrait entièrement le dessus, que sa forme humaine disparaîtrait pour ne laisser que la bête sanguinaire. Il avait l'impression d'être pris au piège dans sa propre peau, une victime de son propre pouvoir.
Les hurlements du loup fendaient la nuit, mais ce n'était pas celui d'un Alpha en quête de pouvoir ou de gloire. C'était un cri de souffrance, de rage, de frustration. Un cri de perdition. Adrian se battait pour ne pas céder, pour ne pas se laisser engloutir par l'animal qui hurlait à l'intérieur de lui. Il voulait garder une partie de son humanité, mais chaque nuit, cela devenait de plus en plus difficile. Il était devenu une créature instable, incontrôlable, comme une arme à feu prête à exploser sous la pression.
C'était dans cet état, presque au bord du gouffre, qu'il entendit parler de l'oracle.
Les mots qui lui parvinrent étaient vagues, enveloppés de mystère, comme une légende ancienne surgissant des ombres. On disait que l'oracle vivait dans une vallée reculée, un endroit à peine connu des loups. Il s'agissait d'une femme, dotée de pouvoirs immenses, capable de voir à travers les voiles du temps et de l'espace. Ceux qui l'avaient rencontrée parlaient d'une sagesse infinie, mais aussi d'un côté impitoyable, cruel. L'oracle ne donnait jamais de réponses claires, seulement des énigmes, des visions.
Adrian, malgré son scepticisme, n'avait plus le choix. Si cette femme pouvait l'aider, il devait la trouver. Il avait tout perdu de sa dignité, mais la possibilité d'une guérison, d'un soulagement, l'appelait avec insistance. Il avait besoin d'une solution, d'un espoir, aussi infime fût-il. Et il savait qu'il devait affronter cet oracle, peu importe les risques.
Le voyage vers la vallée fut long et difficile, mais Adrian n'eut aucun mal à braver les dangers du terrain. Sa douleur, sa souffrance, l'avait rendu plus endurant. La fatigue ne semblait plus le toucher. Lorsque, enfin, il arriva à la clairière où l'oracle résidait, l'air était d'un calme étrange, un silence dense, presque oppressant. C'était comme si l'endroit était suspendu hors du temps, comme une dimension à part. Au centre de la clairière, une silhouette solitaire se tenait, immobile.
L'oracle était une femme d'une beauté intemporelle, mais son regard, perçant et froid, faisait oublier tout ce qui l'entourait. Ses yeux n'étaient pas humains. Ils semblaient voir au-delà de la réalité, au-delà de tout ce qui était visible. Il n'y avait pas de chaleur en elle, seulement la vérité nue, douloureuse.
Elle fixa Adrian sans dire un mot, comme si elle l'attendait depuis toujours.
« Tu viens chercher la délivrance, Alpha, » dit-elle finalement, sa voix calme, mais remplie de poids.
Adrian se redressa, son regard dur et défiant. « Je suis venu pour une réponse. Une solution à cette malédiction qui me dévore. »
L'oracle l'observa un instant avant de répondre, ses lèvres se soulevant légèrement. « La clé de ta délivrance réside en elle. Une femme bannie. C'est elle qui détient ce que tu cherches. Mais sois averti, Alpha. Ce n'est pas une route facile. La souffrance sera ton compagnon tout au long de ce voyage. Et même si tu la trouves, rien n'est garanti."
Adrian se figea, le souffle court. Une femme bannie. Il savait à quoi cela faisait référence. Il savait qu'elle parlait de Sienna, cette enfant qu'il n'avait jamais vue mais qu'il sentait liée à lui d'une manière qu'il ne comprenait pas encore. Elle était la clé de sa libération. Et pourtant, cela ne faisait que rendre la quête encore plus difficile. Il n'était pas simplement en quête de la guérison de son corps. Il était désormais en quête de son âme, et la vérité de ce qu'il devait affronter était bien plus complexe que ce qu'il avait imaginé.
« Que dois-je faire ? » demanda-t-il, sa voix tremblant à peine sous le poids des révélations.
L'oracle lui sourit, mais il n'y avait aucune chaleur dans ce sourire, seulement une ombre, une menace. « Va à elle. Mais ne pense pas que ce sera facile. La malédiction que tu portes n'est pas la seule épreuve. Sienna n'est pas celle que tu crois. Et elle n'est pas venue pour sauver un homme brisé. Elle viendra peut-être pour le détruire. »
Adrian sentit un frisson glacé le traverser. « Je ferai tout ce qu'il faut, » répondit-il d'une voix grave, déterminée.
« Alors sois prêt à tout perdre, Alpha. La délivrance n'est jamais sans sacrifice. »
Les mots de l'oracle résonnèrent dans sa tête alors qu'il s'éloignait, son cœur battant dans sa poitrine comme un tambour de guerre. La route serait longue et semée d'embûches, mais il n'avait plus le choix. La malédiction continuait de le dévorer, et seul le lien avec cette femme bannie, Sienna, pourrait peut-être l'en libérer.