Elle avait mal. Partout. C'était une douleur diffuse, chaque muscle tendu, chaque os profondément épuisé. Elle ouvrit les yeux, un frisson lui parcourant la peau, mais le décor n'était pas celui de la forêt où elle avait été capturée. C'était... différent. Pas de sol rugueux, pas de branches qui griffaient sa peau. Au lieu de cela, elle était allongée sur une surface dure, mais lisse, comme du métal. Un silence lourd et oppressant l'entourait, comme si l'air lui-même était en train de l'étouffer. Elle tenta de se redresser, mais un vertige saisit immédiatement son esprit, et elle s'affaissa contre la surface.
Des bruits se firent entendre à proximité. Des murmures. Des pas. Puis, une silhouette apparut dans son champ de vision. Un homme, grand, imposant. Sa silhouette noire contrastait avec la pâleur de la lumière qui venait d'une source qu'elle n'arrivait pas à identifier. Son regard était perçant, mais calme. Il n'y avait aucune inquiétude dans ses yeux. Seulement une sorte de froide indifférence.
« Tu es réveillée, » dit-il d'une voix grave, dénuée de chaleur.
Chloé se redressa lentement, sa gorge nouée, mais son esprit restait embrouillé. Où était-elle ? Qui était cet homme ?
« Qui êtes-vous ? » réussit-elle à demander, mais sa voix était cassée, faible.
Il observa un instant, puis se pencha légèrement, comme si son regard perçait son âme. « Lucian, » répondit-il, et il y avait un poids particulier dans ce simple mot, comme s'il portait toute une histoire qu'elle ne pourrait jamais comprendre. « Je suis le chef de ce clan. Ce n'est pas un endroit pour les faibles. »
Elle se redressa un peu plus, bien que la douleur ne la quitte pas. Chaque mouvement semblait une épreuve. Mais elle n'était pas une faible. Pas maintenant. Pas après tout ce qu'elle avait traversé.
« Je ne veux pas être un fardeau, » murmura-t-elle, chaque mot pesant lourdement sur ses lèvres. Elle savait ce qu'ils cherchaient. Ce qu'ils attendaient d'elle. Une dette. Un prix à payer.
Lucian la regarda pendant un long moment, ses yeux scrutant son visage comme s'il cherchait quelque chose. Un tic nerveux s'installa dans sa mâchoire. « Tu ne seras pas un fardeau, » dit-il, presque comme une promesse. « Tu vas être forte, ou tu vas mourir. » Son ton était sec, tranchant. Pas de pitié. Pas d'illusions. « J'ai un marché à te proposer. La force en échange de ta loyauté. Donne-moi ton allégeance, et je ferai de toi une arme. »
Elle ne répondit pas tout de suite, ne sachant pas si c'était une promesse ou une malédiction. Ses mains se resserrèrent sur la couverture, cherchant un peu de réconfort, mais il n'y en avait pas. Il n'y avait plus de réconfort, plus de sécurité. Plus de protection. Gabriel avait disparu de sa vie, comme une ombre balayée par un vent violent, et tout ce qu'elle avait appris s'était effondré sous la trahison. Elle n'avait plus que sa propre force pour la guider. Et maintenant, Lucian semblait lui offrir cette force. À quel prix ?
« Je veux la vérité, » finit-elle par dire, sa voix faible mais déterminée. « Je veux savoir ce qui s'est passé. Pourquoi il m'a rejetée. Pourquoi je suis là. »
Lucian se pencha plus près, un éclat dangereux dans son regard. « Tu veux la vérité ? » Il siffla, comme si ce simple désir était une folie. « La vérité n'a pas d'importance ici. Ce que tu as perdu, ce que tu veux comprendre, ce ne sont que des chaines. Un poids que tu dois jeter si tu veux être libre. » Il se redressa, regardant au loin, comme s'il pensait à autre chose, à un autre moment. « Si tu veux savoir pourquoi Gabriel t'a laissée, tu n'auras que ta propre réponse. Peut-être qu'il a vu une faiblesse. Peut-être qu'il a choisi un autre chemin. Peu importe. Ce qui compte, c'est ce que tu fais maintenant. »
Elle hocha la tête, la gorge ser é ». « Et si je refuse ? » demanda-t-elle, presque par défi.
Lucian haussait les épaules avec une nonchalance glaciale. « Alors tu peux partir, » dit-il simplement. « Mais ne crois pas que le monde extérieur te pardonnera. Tu mourras, et ce sera tout. »
Elle fixa son regard, mais au fond d'elle, elle savait qu'elle n'avait pas de choix. Pas vraiment. Gabriel l'avait brisée, mais elle ne pouvait pas se laisser couler dans le désespoir. Pas après tout ce qu'elle avait traversé. Elle devait redevenir forte. Si ce clan pouvait lui donner la force nécessaire pour retrouver sa place dans ce monde, alors elle accepterait.
« Je vais le faire, » dit-elle enfin, les mots sortant d'une bouche qui se resserrait sous l'effort. « Je vais suivre ton marché. Mais je le fais à ma façon. Et si tu me mens... » Elle s'arrêta un instant, ses poings serrés, « ...alors tu regretteras d'avoir cru que tu pouvais m'utiliser. »
Lucian la regarda un instant, presque amusé. « Tu as du caractère. Je vais t'en faire une arme, Chloé. » Il se tourna vers un autre membre du clan, un homme qui s'était caché dans l'ombre pendant toute la conversation, et lui fit un signe. « Prépare-la. »
L'entraînement commença presque immédiatement. Il n'y avait pas de douceur, pas de pitié. Lucian n'avait pas de temps à perdre, et encore moins pour des émotions inutiles. Il lui apprit à se battre, à se défendre, à devenir plus que ce qu'elle avait été. Il ne la coucha pas dans un lit et ne la soigna pas comme un enfant fragile. Il l'a poussé, l'a défiée, l'a brisée encore et encore, jusqu'à ce que son corps crie de douleur et de fatigue.
Elle tomba souvent. Chaque chute, chaque erreur, était accueillie par une moquerie ou un silence glacial. Mais elle se releva. Chaque fois, elle se releva. Elle n'avait pas d'autre choix. Elle devait redevenir plus que l'ombre de ce qu'elle avait été.
L'acier de ses muscles se forma au fur et à mesure, les coups qui la frappaient devenant moins douloureux. Elle apprenait vite, plus vite que Lucian ne l'avait anticipé, comme si quelque chose en elle se réveillait, une partie d'elle qu'elle avait enfouie sous des couches de douleur et de trahison. Mais ce n'était pas encore suffisant. Pas assez pour l'aider à se venger. Pas assez pour trouver la vérité qu'elle cherchait.
Elle dut tout sacrifier. Ses émotions. Sa vulnérabilité. Ses rêves. Chaque mouvement, chaque instant était une épreuve. Mais elle savait que c'était nécessaire. Elle savait que c'était la seule voie qui s'offrait à elle.
Lucian la regarda s'entraîner, ses yeux perçant la moindre de ses faiblesses, la moindre hésitation. « Tu n'es pas là pour te défendre, » lui dit-il un jour, sa voix dure. « Tu es là pour tuer. Et tu ne peux pas hésiter. Pas une seule fois. »
Elle le fixa, son souffle court, son corps tremblant sous l'effort, mais la flamme dans son regard était plus vive que jamais. « Je ne vais pas hésiter, » répondit-elle, chaque mot renforçant sa détermination. « Je vais être la meilleure arme que vous ayez jamais vue. »
Lucian sourit, mais ce sourire ne portait aucune chaleur. « C'est exactement ce que je veux entendre. »