Chapitre 5 Chapitre 5

La maison était située dans un quartier huppé, un mélange parfait de modernité et de sophistication. Clara arriva en avance, comme toujours, et fit le tour des lieux pour s'assurer que tout était en ordre. L'intérieur était somptueux : des plafonds hauts, des baies vitrées offrant une vue imprenable sur la ville, et des finitions luxueuses qui respiraient le bon goût.

Lorsque Malcolm arriva, il portait un costume gris qui semblait taillé pour lui. Il entra dans la maison avec cette assurance naturelle qui faisait que chaque pièce semblait s'incliner devant lui.

« Impressionnant », dit-il en balayant la pièce du regard. « C'est toi qui as choisi cette maison ? »

« C'est mon travail, après tout », répondit-elle, gardant son ton neutre.

Ils commencèrent la visite, Clara guidant Malcolm à travers chaque pièce, décrivant les détails et les avantages de la propriété. Mais dès qu'ils arrivèrent à l'étage, la tension entre eux sembla monter d'un cran.

« La chambre principale est ici », dit-elle en ouvrant une porte.

Malcolm entra, examinant l'espace avec un air pensif. Mais au lieu de poser des questions sur la pièce, il se tourna vers elle. « Pourquoi me fuis-tu, Clara ? »

Elle sentit son estomac se nouer. « Je ne vous fuis pas », répondit-elle, évitant son regard.

« Vraiment ? » Il s'approcha d'elle, réduisant la distance entre eux. « Parce que j'ai l'impression que tu fais tout pour me tenir à distance. »

Elle recula instinctivement, se heurtant à la commode derrière elle. « Vous vous imaginez des choses. Je suis ici pour travailler, pas pour discuter de... ça. »

Il posa une main sur la commode, juste à côté d'elle, la coinçant sans pour autant la toucher. Son regard était brûlant, pénétrant. « Pourquoi as-tu peur de ce qui se passe entre nous ? »

Elle sentit la colère monter en elle, une colère alimentée autant par sa propre confusion que par son arrogance. « Il n'y a rien entre nous, Malcolm. Rien. »

« Tu mens », dit-il doucement, son ton défiant.

Elle le poussa légèrement pour se dégager, son cœur battant à tout rompre. « Assez ! Je ne vais pas me laisser entraîner dans vos petits jeux. Je suis ici pour vous montrer cette maison, pas pour... »

« Pas pour quoi ? » l'interrompit-il.

« Pas pour jouer à ce jeu ridicule où vous pensez que tout le monde tombe à vos pieds », lança-t-elle, sa voix plus forte qu'elle ne l'aurait voulu.

Un silence tendu s'installa. Malcolm recula légèrement, levant les mains en signe de reddition. Mais son sourire n'avait pas disparu.

« Très bien », dit-il doucement. « Si tu veux qu'on reste strictement professionnels, alors soit. Mais n'oublie pas que tu es la seule à prétendre qu'il n'y a rien ici. »

Elle détourna les yeux, refusant de répondre. Elle reprit la visite, son ton plus froid, plus distant. Mais même alors qu'elle expliquait les caractéristiques de la maison, elle sentait son regard sur elle, un regard qui semblait la suivre, la juger.

Lorsque la visite fut enfin terminée, Clara était épuisée, autant émotionnellement que physiquement.

« Merci pour la visite », dit Malcolm alors qu'ils se tenaient près de la porte d'entrée.

Elle hocha la tête, évitant son regard. « Si vous avez des questions, vous savez où me trouver. »

Il hésita un instant, puis ajouta : « Clara, un jour, tu devras arrêter de fuir ce que tu ressens. »

Sans attendre de réponse, il quitta la maison, la laissant seule dans le silence.

Clara s'appuya contre la porte, fermant les yeux. Elle détestait qu'il ait ce pouvoir sur elle, qu'il puisse éveiller en elle des émotions qu'elle s'efforçait d'ignorer. Mais malgré tout, elle ne pouvait nier l'évidence : Malcolm Gram était un problème qu'elle ne savait pas comment résoudre. La journée avait commencé de façon banale pour Clara. Elle s'était rendue à l'agence tôt, avait passé en revue ses dossiers, trié ses rendez-vous et répondu à une avalanche de courriels. Mais ce fut un échange anodin avec une collègue qui fit basculer le reste de sa matinée.

« Tu travailles toujours avec Malcolm Gram, non ? » demanda Sophie, une jeune agente de l'agence, en entrant dans son bureau.

Clara releva la tête, méfiante. « Pourquoi ? »

Sophie haussa les épaules, un sourire curieux aux lèvres. « Je lisais un article sur lui ce matin. C'est fascinant. Cet homme traîne tellement de rumeurs. »

Clara fronça les sourcils. « Des rumeurs ? »

Sophie s'approcha, posant son téléphone sur le bureau de Clara pour lui montrer un article en ligne. Le titre accrocheur proclamait : *Malcolm Gram, magnat du chaos : un homme hanté par son passé ?*

Clara hésita, mais la curiosité l'emporta. Elle parcourut rapidement l'article, découvrant des détails sur Malcolm qu'il n'avait jamais mentionnés. Des affaires controversées, des acquisitions brutales qui avaient coûté leur emploi à des centaines de personnes... et une relation particulièrement médiatisée avec une femme nommée Isabelle Montclair.

Isabelle, apparemment une entrepreneuse ambitieuse, avait été impliquée dans un scandale retentissant avec Malcolm. Leur séparation avait fait les gros titres il y a quelques années, décrite comme tumultueuse et pleine de drames publics. Selon l'article, cette relation avait laissé des marques profondes sur Malcolm, le rendant encore plus distant et méfiant.

Clara referma l'article, troublée. Elle n'était pas sûre de ce qu'elle ressentait. Une part d'elle se disait que cela ne la regardait pas. Mais une autre, plus instinctive, ne pouvait s'empêcher de vouloir comprendre cet homme qui la perturbait tant.

Un peu plus tard, alors qu'elle s'efforçait de se concentrer sur son travail, son téléphone sonna.

« Clara Vega », répondit-elle.

« Clara, c'est Malcolm. »

Elle aurait pu reconnaître sa voix entre mille, grave et magnétique, avec cette nuance de douceur qui la déconcertait toujours.

« Bonjour, Malcolm », dit-elle avec son ton le plus professionnel.

« J'ai trouvé une maison qui m'intrigue », annonça-t-il sans préambule.

Elle saisit un stylo, prête à noter. « Très bien. Quelle maison ? »

Il lui donna l'adresse et, lorsqu'elle chercha dans sa base de données, une note attira immédiatement son attention. La maison avait une réputation... particulière.

« Cette maison a une histoire », dit-elle prudemment.

« Je sais. C'est pour ça qu'elle m'intéresse », répondit-il, sa voix teintée d'un étrange amusement.

Clara hésita. « Vous êtes sûr ? La plupart des gens évitent ce genre de propriétés. »

« Je ne suis pas comme la plupart des gens. »

Elle soupira, sachant qu'il n'abandonnerait pas. « Très bien. Je peux organiser une visite pour cet après-midi. »

***

La maison se trouvait à la périphérie de la ville, nichée dans une vaste propriété entourée d'arbres. Elle était imposante, presque intimidante, avec son architecture gothique et ses grandes fenêtres sombres.

Clara arriva un peu en avance, comme toujours. Elle ne pouvait s'empêcher de ressentir une certaine appréhension en marchant dans la maison. L'atmosphère était lourde, presque oppressante.

Malcolm arriva peu après. En descendant de sa voiture, il jeta un coup d'œil à la demeure avant de sourire.

« Impressionnant, non ? »

« Effrayant serait plus exact », répliqua-t-elle en croisant les bras.

Ils commencèrent la visite, et Malcolm écouta attentivement alors qu'elle expliquait l'histoire de la maison. Ancienne demeure d'un riche industriel, la propriété avait été le théâtre de tragédies familiales. On racontait même que certains des anciens propriétaires croyaient que la maison était maudite.

« Et ça ne vous dissuade pas ? » demanda Clara, l'observant avec curiosité.

Il secoua la tête, un sourire énigmatique aux lèvres. « J'aime les endroits qui ont une histoire. »

Elle haussa un sourcil. « Même si cette histoire est sombre ? »

« Surtout si elle est sombre », répondit-il, son ton sérieux cette fois.

Ils continuèrent à explorer, mais l'atmosphère changea lorsqu'ils arrivèrent dans une des chambres à l'étage. Malcolm s'arrêta près de la fenêtre, regardant le paysage à l'extérieur.

« Cette maison... Elle me rappelle certaines choses », dit-il doucement.

Clara s'approcha, intriguée. « Quelles choses ? »

Il hésita, comme s'il pesait ses mots. « Des erreurs du passé. Des gens que j'ai laissés entrer dans ma vie, qui ont pris plus qu'ils n'auraient dû. »

Elle sentit un frisson la parcourir. « Vous parlez de... cette Isabelle Montclair ? »

Il tourna la tête vers elle, surpris. « Tu as fait des recherches sur moi ? »

Elle rougit légèrement. « Ce n'était pas intentionnel. Une collègue a mentionné un article. »

Il hocha lentement la tête, un sourire sans joie sur les lèvres. « Isabelle... Oui, elle faisait partie de ma vie. Mais notre relation était comme cette maison. Belle de l'extérieur, mais remplie d'ombres à l'intérieur. »

Clara resta silencieuse, ne sachant que répondre. Mais à sa grande surprise, il continua.

« Elle et moi, on était pareils, tu vois. Deux personnes ambitieuses, obstinées. Mais ensemble... c'était destructeur. On se nourrissait de nos faiblesses au lieu de se renforcer. »

Elle l'écoutait attentivement, touchée par sa sincérité. Ce n'était pas souvent qu'il baissait sa garde ainsi.

« Et vous ? » demanda-t-il soudain, la prenant au dépourvu.

« Moi ? »

« Tu n'as jamais eu quelqu'un qui t'a marqué de cette façon ? »

Elle détourna les yeux, une vieille douleur refaisant surface. « Si. Mais je préfère ne pas en parler. »

« Pourquoi ? »

Elle soupira. « Parce que c'est encore trop... compliqué. Et parce que je n'ai pas envie de ressasser le passé. »

Il fit un pas vers elle, son regard intense. « Le passé a une manière de nous suivre, Clara. Qu'on le veuille ou non. »

Elle croisa les bras, comme pour se protéger. « Peut-être. Mais je préfère avancer. Pas m'attarder sur ce qui aurait pu être. »

Un silence s'installa entre eux, chargé de non-dits et de blessures partagées.

« Tu es plus forte que tu ne le penses », murmura-t-il finalement.

Elle releva la tête, croisant son regard. « Et vous, Malcolm ? Vous êtes aussi fort que vous le prétendez ? »

Il ne répondit pas, se contentant de sourire légèrement avant de tourner les talons. « Viens. On a encore quelques pièces à voir. »

Clara le suivit, mais elle savait qu'après cette conversation, quelque chose avait changé entre eux. Ils avaient entrevu un fragment des blessures de l'autre, et bien qu'elle se méfie toujours de lui, une étrange complicité semblait s'être installée. Une complicité qui, elle le savait, ne ferait que compliquer davantage les choses. Clara avait décidé de mettre de la distance entre elle et Malcolm. Elle ne pouvait plus ignorer l'effet qu'il avait sur elle, ni les pensées troublantes qui revenaient sans cesse la hanter. Son passé compliqué, son charme insistant, son regard perçant... Tout chez lui représentait un danger pour l'équilibre qu'elle avait si méticuleusement construit.