Chapitre 3 3

C'était comme si le temps s'était figé. La vie de Ursule n'était plus qu'une suite de moments fades, où elle avançait sans but, sans passion, sans désir. Jusqu'au jour où tout bascula, d'une manière qu'elle n'aurait jamais pu anticiper. Un jour où elle croisa un homme qui allait bouleverser sa vie de la manière la plus imprévisible possible.

Ursule s'était toujours accrochée à l'espoir que les choses finiraient par s'arranger entre elle et Martin. Après tout, chaque couple traversait des phases difficiles, n'est-ce pas ? Mais au fil des semaines, les tensions entre eux semblaient croître, s'infiltrant dans chaque recoin de leur quotidien. Ce n'était pas de grandes disputes ou des cris. Non, c'était plus subtil, presque imperceptible pour un observateur extérieur, mais pour Ursule , cette distance émotionnelle devenait insupportable.

Un matin, alors qu'elle préparait du café, Martin entra dans la cuisine sans dire un mot. Il prit son téléphone, vérifia quelques e-mails, puis s'assit à la table. Ursule l'observait du coin de l'œil, espérant qu'il lui adresserait un sourire, une parole douce, quelque chose qui prouverait qu'il la voyait encore. Mais il n'y avait que le silence. Elle avait l'impression d'être devenue transparente.

« Tu veux du café ? » demanda-t-elle finalement, brisant le silence qui pesait entre eux.

« Non, merci. Je dois partir plus tôt aujourd'hui, j'ai une réunion importante, » répondit Martin, les yeux toujours fixés sur son écran. Il se leva rapidement, attrapa sa mallette, et se dirigea vers la porte.

Ursule resta plantée là, la tasse de café à la main, le cœur serré. « On pourrait peut-être dîner ensemble ce soir ? Juste nous deux. Ça fait longtemps, » proposa-t-elle, sa voix pleine d'espoir.

Martin se retourna brièvement, l'air distrait. « Je vais essayer, mais je ne promets rien. On en reparle ce soir, d'accord ? »

Et juste comme ça, il était parti, laissant Ursule seule dans la cuisine. Elle se laissa tomber sur une chaise, le poids de la solitude pesant lourdement sur ses épaules. Comment en étaient-ils arrivés là ? Ils n'étaient plus que des étrangers vivant sous le même toit, leurs vies se déroulant en parallèle, sans jamais se croiser vraiment.

Les jours se transformaient en semaines, et le fossé entre eux ne faisait que grandir. Ursule tentait désespérément de maintenir l'apparence d'un couple fonctionnel, organisant des sorties, essayant de discuter de leurs projets d'avenir, mais chaque tentative était un échec cuisant. Martin semblait toujours ailleurs, trop préoccupé par son travail ou ses affaires pour lui prêter attention.

Un soir, après une nouvelle journée passée à jongler avec ses frustrations personnelles, Ursule décida qu'elle ne pouvait plus continuer ainsi. Elle devait faire quelque chose. Prendre les choses en main. Elle s'était donc plongée dans des recherches et avait fini par réserver un voyage en Sicile. L'idée d'une escapade romantique, loin de leur routine, lui semblait être la solution idéale pour raviver la flamme entre eux.

« J'ai une surprise pour toi, » annonça-t-elle à Martin en rentrant ce soir-là.

Il releva à peine les yeux de son ordinateur. « Ah oui ? Quoi donc ? » demanda-t-il distraitement.

« J'ai réservé un voyage en Sicile. Juste toi et moi. On partirait le mois prochain. Je pense que ça nous fera du bien, tu sais, de nous éloigner un peu du quotidien. »

Martin fronça les sourcils, l'air sceptique. « Un voyage ? En Milan? »

« Oui, j'ai pensé que ça pourrait être l'occasion de se reconnecter. Ça fait longtemps qu'on n'a pas vraiment pris le temps pour nous deux, » expliqua-t-elle, espérant qu'il saisirait la portée de ses paroles.

Il se frotta la nuque, visiblement mal à l'aise. « Écoute, Ursule ... Je ne sais pas. Je suis vraiment sous pression au travail en ce moment. Je ne suis pas sûr que ce soit le bon moment pour partir en vacances. »

Elle sentit la frustration monter en elle, mais elle prit une profonde inspiration pour ne pas exploser. « Martin, c'est toujours la même chose. Il y a toujours une excuse. Le travail, les projets, les réunions... Mais nous, dans tout ça ? On a besoin de ça, tu ne le vois pas ? »

Il soupira, posant enfin son ordinateur sur la table pour la regarder. « Je comprends ce que tu dis, mais on doit être réalistes. J'ai des responsabilités, Ursule . Je ne peux pas tout laisser tomber comme ça. »

« Et nous, on n'a aucune importance, c'est ça ? » demanda-t-elle, la voix tremblante.

Martin secoua la tête, exaspéré. « Tu dramatises, comme toujours. Ce n'est pas une question de choix entre toi et le travail. C'est juste la réalité. »

Ursule sentit une vague d'émotions la submerger. Elle se leva brusquement, ne voulant pas pleurer devant lui, mais incapable de retenir les larmes. « Je ne sais plus quoi faire pour que tu comprennes. Je ne te reconnais plus, Martin. C'est comme si on était deux personnes totalement différentes. »

Il resta silencieux, incapable de répondre, et dans ce silence, Ursule se rendit compte de l'ampleur du problème. Ils étaient à deux doigts de tout perdre, et pourtant, il ne semblait pas le réaliser. Elle se mordit la lèvre pour retenir les sanglots, avant de quitter la pièce, son cœur brisé.

Les jours qui suivirent furent lourds de tension. Ils évitaient les sujets sérieux, parlaient peu, comme si chaque mot pouvait déclencher une explosion. Pourtant, malgré leurs différends, Martin finit par accepter de partir en Sicile, peut-être par culpabilité, ou peut-être par peur de perdre Ursule pour de bon. Le voyage était désormais leur dernier espoir, et Ursule s'y accrochait comme à une bouée de sauvetage.

Le jour du départ, elle observait Martin faire ses valises avec une certaine appréhension. Leurs regards se croisaient à peine, et elle ne pouvait s'empêcher de se demander si ce voyage serait vraiment la solution à tous leurs problèmes ou s'il ne ferait qu'accentuer leur désillusion.

À l'aéroport, le silence entre eux était palpable. Ils s'installèrent dans l'avion, chacun plongé dans ses pensées. Ursule regardait par le hublot, son cœur battant fort dans sa poitrine. Ce voyage devait tout changer. Elle l'espérait de tout son être. Pourtant, une part d'elle-même était terrifiée à l'idée que même la beauté de la Milanne suffirait pas à sauver leur relation.

Une fois arrivés à destination, l'air chaud de la Méditerranée les accueillit, accompagné du bruit des vagues et du parfum enivrant des fleurs d'oranger. Ursule inspira profondément, se sentant revigorée par cette nouvelle atmosphère. Peut-être que ce changement de décor allait réellement les aider à se retrouver.

« Cet endroit est magnifique, » murmura-t-elle en observant les collines verdoyantes et les maisons blanches de leur hôtel, espérant que cela déclencherait une réponse chez Martin.

Il hocha la tête, un sourire forcé aux lèvres. « Oui, c'est... beau. »

Mais elle pouvait sentir que son esprit était ailleurs, toujours préoccupé par son travail et ses responsabilités. Chaque moment qu'ils passaient ensemble était teinté d'une étrange distance. Ils visitaient des sites historiques, dînaient dans des restaurants pittoresques, mais quelque chose clochait. La flamme qu'elle espérait raviver ne semblait plus que des cendres.

Un soir, alors qu'ils dînaient dans un petit restaurant en bord de mer, Ursule décida qu'elle ne pouvait plus supporter cette mascarade. Elle posa son verre de vin sur la table et fixa Martin dans les yeux.

« Je veux qu'on soit honnêtes l'un avec l'autre, Martin. Ce voyage n'a rien changé, n'est-ce pas ? »

Il cligna des yeux, surpris par sa franchise. « Ursule , je ne sais pas ce que tu attends de moi. Je fais de mon mieux. »

« Ton mieux n'est plus suffisant, » dit-elle, la voix pleine d'émotion. « On fait semblant, Martin. On fait semblant d'être ce couple heureux alors qu'on sait tous les deux que ce n'est pas vrai. »

            
            

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