Luna se tenait au milieu de la salle, une coupe de champagne à la main, tentant de se fondre dans la foule élégante qui l'entourait. C'était une soirée organisée pour célébrer le partenariat entre l'hôtel et plusieurs grandes entreprises locales. Un événement dont elle n'avait pas vu la nécessité, mais qui était devenu une opportunité pour elle de s'intégrer dans ce monde si éloigné de tout ce qu'elle avait connu. Les conversations allaient bon train, et elle se sentait, comme souvent, un peu à l'écart.
Les invités étaient absorbés par des discussions d'affaires, et bien qu'elle fût là pour l'hôtel, elle n'en avait guère les moyens d'intervenir.
Elle se sentait bien, pourtant, en dépit de son malaise habituel. La musique douce, le scintillement des lumières, l'odeur de l'air parfumé aux fleurs fraîches et aux boissons coûteuses, tout cela lui donnait l'impression d'être une autre personne, plus confiante, plus capable. Pourtant, au fond d'elle-même, un pressentiment tenace la rongeait.
Lorsque ses yeux croisèrent une silhouette familière dans l'ombre du hall, son cœur se serra instantanément. C'était lui. L'homme qu'elle avait toujours cherché à éviter, et qui, contre toute attente, semblait se rapprocher d'elle ce soir-là. Mark. Ou plutôt, son ancien petit ami. L'un de ceux qui avaient fait partie de son passé et qui, à un moment donné, avait semé les graines du malheur dans sa vie. Il l'avait trahie, d'une manière qui l'avait marquée bien plus profondément qu'elle ne l'avait jamais admis. Et pourtant, en dépit de tout, elle se sentait prise dans un piège qu'elle ne savait pas comment dénouer.
Il s'approcha d'elle avec un sourire effrayant, un sourire qu'elle aurait préféré ne jamais revoir. « Alors, Luna, » dit-il d'un ton mielleux, « toujours à courir après une vie qui te dépasse ? »
Son souffle se coucha dans sa gorge, la peur la saisissant comme un étau. Elle tenta de sourire pour masquer son malaise, mais il n'y avait aucune chaleur dans ses yeux. Il n'avait rien de l'homme qu'elle avait un jour aimé, rien de ce garçon tendre et attentionné qu'elle avait connu. Tout ce qu'elle voyait maintenant, c'était un étranger. Quelqu'un qu'elle détestait, mais qu'elle n'arrivait pas à fuir.
« Je ne suis pas là pour discuter de mon passé, Mark, » répondit-elle d'une voix plus ferme qu'elle ne se sentait, mais une tension palpable se fit ressentir dans l'air autour d'eux.
Mais il n'en avait cure. Sans aucune censure, sans aucune considération pour la situation ou les gens autour d'eux, il se permit de la saisir par le poignet, sa prise trop forte, la douleur sourde. Luna sentit un frisson glacé lui parcourir le corps. Elle tenta de se dégager, mais il ne la lâcha pas. Il s'approcha encore, son souffle chaud sur son visage, tandis qu'un rictus de mépris marquait ses lèvres. « Tu n'as pas changé, hein ? Toujours aussi naïve. »
Les battements de son cœur résonnaient dans sa poitrine, mais elle se tint ferme. « Lâche-moi, » dit-elle, sa voix tremblante de colère, mais aussi de peur.
C'est alors que tout se passa si vite, si brutalement, qu'elle n'eut pas le temps de réagir. Un cri perça la nuit, un rugissement puissant, suivi du bruit sec d'un corps heurtant le sol. Luna cligna des yeux, éberluée. En l'espace de quelques secondes, Mark se retrouva projeté à plusieurs mètres de là, le visage en sang. Et dans l'instant qui suivit, un homme se tenait devant elle, un homme dont la silhouette imposante et l'aura menaçante l'avaient déjà perturbée à maintes reprises.
Aurelius.
Luna resta figée, incapable de bouger ou même de comprendre ce qui venait de se passer. La rage dans les yeux d'Aurelius était palpable, une rage qu'elle n'avait jamais vue chez lui. C'était une violence contrôlée, comme une bête prête à dévorer, mais chaque geste était d'une précision glaciale. Il ne semblait pas avoir eu besoin de réfléchir, il avait agi avec une telle rapidité qu'elle en était encore abasourdie.
« Tu n'as rien compris, Mark, » dit Aurelius d'une voix basse, menaçante, avant de jeter un regard à Luna, comme si elle n'était rien d'autre qu'un spectateur dans cette scène. Mais l'intensité de son regard, de ses yeux sombres, la fit frémir. « Je ne laisserai personne, absolument personne, te traiter ainsi. »
Luna se sentit prise au piège. Le regard d'Aurelius glissait sur elle avec une attention qui la perturba. Elle savait qu'elle était en sécurité, que l'incident était déjà terminé, mais une part d'elle voulait fuir, ne pas être là, ne pas être une victime d'une situation qu'elle ne contrôlait pas. Et pourtant, en dépit de tout, il y avait cette gratitude profonde qu'elle ne pouvait nier, ce soulagement de savoir qu'il était là.
Mais la scène n'était pas terminée. Mark, encore groggy, se releva avec une fureur visible, mais avant qu'il ne puisse faire un geste, Aurelius lui adressa un regard de glace. « Tu ferais bien de t'éloigner, Mark, avant que la situation ne devienne plus compliquée. » Son ton était une promesse de destruction. Mark sembla hésiter un instant, mais il comprit rapidement qu'il était en infériorité numérique et qu'Aurelius n'était pas un homme à prendre à la légère. Il se tourna et disparut dans la foule, jetant un dernier regard haineux à Luna avant de s'éclipser.
Luna se retrouva seule avec Aurelius, et l'air entre eux devint lourd, presque suffocant. Elle se sentait partagée, perturbée par ce qu'elle venait de vivre et par l'intensité de la situation. Aurelius n'avait fait que la protéger, mais la manière dont il l'avait fait... Ce n'était pas simplement de la protection. C'était une déclaration. Une déclaration qu'il ne permettait à personne de la toucher. Pas même son passé.
Il s'avança vers elle, et son regard perça la moindre de ses défenses. « C'est fini, » dit-il simplement. « Tu es en sécurité maintenant. Mais tu n'as pas idée à quel point ta vie pourrait être en danger si tu ne fais pas attention. »
Luna sentit ses jambes faiblir sous elle, son cœur battant la chamade. Elle avait eu peur, vraiment peur, mais il n'y avait pas que la peur. Il y avait aussi cette sensation étrange qui montait en elle, un sentiment d'avoir été protégée, mais à quel prix ?
Aurelius la fixa de ses yeux impitoyables, presque comme un fauve. « Tu restes sous ma protection désormais, Luna. Je ne prendrai aucun risque. Tu comprends ça ?" Sa voix était ferme, déterminée.
Elle hocha la tête, mais une part d'elle savait que ce qu'il lui proposait n'était pas simplement une protection. C'était un contrôle. Il la tenait sous sa coupe, et même si elle n'était pas prête à l'admettre, elle savait que quelque part, elle en avait besoin.
« Rien ne t'arrivera tant que je serai là, » dit-il d'une manière qui la fit frissonner.
Luna n'eut pas la force de lui répondre. Elle était perdue dans ses propres pensées, incapable de comprendre si elle était sauve ou si elle venait de tomber plus profondément dans un piège dont elle ne pourrait pas s'échapper. Mais une chose était certaine : Aurelius Voss venait de marquer sa vie d'une manière irréversible.