Chapitre 2 Chapitre 2

Le lendemain matin, à peine entrée dans l'hôtel, Luna sentit la pression monter. La journée avait à peine commencé que l'atmosphère semblait déjà chargée d'énergie. Le personnel s'activait dans une organisation impeccable, les ordres fusaient à travers les radios, et chaque employé semblait évoluer avec une précision calculée. Tout allait vite, presque trop vite pour elle.

À l'accueil, Claire, une collègue qu'elle avait rencontrée la veille, lui remit un carnet de notes et une oreillette. « Bienvenue dans la vraie course. Aujourd'hui, tu vas accompagner les concierges. Ton rôle sera de prendre les demandes et de t'assurer que tout est parfait avant l'arrivée des invités. »

La remarque aurait pu sembler anodine, mais Claire n'avait pas besoin de préciser à quel point l'excellence était attendue ici. Le moindre faux pas serait immédiatement remarqué.

« Il y a des invités particuliers aujourd'hui ? », demanda Luna en enfilant son uniforme.

« Tous les invités sont particuliers ici, mais certains plus que d'autres, » répondit Claire en haussant les épaules. « Tu verras. Garde juste ton calme, et si quelque chose te dépasse, viens me voir. »

Luna hocha la tête, mais à l'intérieur, elle sentait déjà l'anxiété la gagner. Son premier jour officiel et on la plaçait au cœur de l'action. Pourtant, elle savait qu'elle n'avait pas le choix.

À peine quelques heures plus tard, elle comprit ce que Claire voulait dire. La cadence était infernale. Les clients riches et influents exigeaient non seulement la perfection, mais un traitement qui frôlait parfois l'absurde. Un homme, un magnat des affaires, voulait des roses blanches livrées à sa chambre en moins de quinze minutes. Une autre femme s'indigna que sa suite ne soit pas orientée exactement selon ses souhaits pour « maximiser l'énergie Feng Shui ». Chaque demande devait être traitée avec sérieux, peu importe son absurdité.

Entre deux courses, Luna se retrouva dans l'arrière-bureau avec une employée plus âgée, une femme nommée Gloria, qui l'observait avec une lueur amusée dans les yeux. « Alors, comment tu trouves le palais des caprices ? »

« Épuisant, » admit Luna en essuyant son front avec un mouchoir.

« Tu t'y habitueras, ou pas. Beaucoup ne restent pas longtemps ici. »

« Pourquoi ? Le travail est dur, mais ça semble gérable. »

Gloria la regarda longuement avant de répondre. « Ce n'est pas seulement le travail, ma chère. C'est lui. »

Luna fronça les sourcils. « Lui ? Vous voulez dire Monsieur Voss ? »

« Exactement. Aurelius n'est pas un simple propriétaire d'hôtel. Il contrôle tout ici, chaque détail, chaque personne. Si tu fais bien ton travail, il t'ignorera, et crois-moi, c'est mieux ainsi. Mais si tu attires son attention, ça peut devenir... compliqué. »

« Compliqué comment ? »

« Disons simplement qu'il n'aime pas les surprises. Et encore moins les échecs. Si tu fais un faux pas, il le saura avant même que tu t'en rendes compte. Ce n'est pas un homme à pardonner facilement. »

Luna ne répondit pas, mais une inquiétude sourde s'installa en elle. Elle avait déjà croisé Aurelius plusieurs fois depuis son arrivée, et bien qu'il ne lui ait rien dit directement, son regard avait suffi à lui faire comprendre qu'il n'était pas du genre à tolérer la médiocrité.

Plus tard dans la journée, alors qu'elle déposait des documents dans une suite vide, Luna entendit un bruit derrière elle. En se retournant, elle se retrouva face à face avec Aurelius lui-même. Sa silhouette imposante remplissait l'espace, et son expression froide ne laissait place à aucune émotion.

« Vous êtes nouvelle ici, n'est-ce pas ? » demanda-t-il d'un ton neutre.

Elle acquiesça, tentant de masquer son appréhension. « Oui, Monsieur Voss. Je suis en formation. »

« En formation ou non, vous êtes déjà impliquée dans des situations qui suscitent des questions. »

Luna cligna des yeux, confuse. « Pardon ? Je ne comprends pas. »

Il s'avança d'un pas, réduisant la distance entre eux, et son regard perça le sien avec une intensité presque insoutenable. « J'aime savoir qui travaille dans mon hôtel, et surtout, pourquoi. Vous avez un CV impeccable, mais votre arrivée coïncide avec des incidents que je ne peux ignorer. »

« Des incidents ? »

« Des informations confidentielles ont été compromises récemment. Rien de majeur, pour l'instant, mais suffisamment pour que je m'intéresse à tout nouveau visage. »

Elle sentit une boule se former dans son estomac. « Je ne suis pas responsable de quoi que ce soit. Je viens juste... Je veux dire, je suis ici pour travailler honnêtement. »

« Tout le monde dit cela, » répondit-il calmement, mais son ton laissait entendre qu'il ne croyait pas un mot de ce qu'il venait d'entendre. « Sachez que je garde un œil sur vous, Mademoiselle... »

« Winter. Luna Winter. »

Aurelius pencha légèrement la tête, comme s'il analysait chaque syllabe de son nom. « Mademoiselle Winter. Assurez-vous que votre présence ici ne cause aucun problème. Sinon, vous découvrirez que mes attentes vont bien au-delà de ce que vous avez pu expérimenter ailleurs. »

Elle aurait voulu répondre, se défendre, mais aucun mot ne sortit. Après ce qui sembla une éternité, il tourna les talons et quitta la pièce, la laissant seule avec ses pensées tourbillonnantes.

Ce n'est qu'une fois certaine qu'il était parti qu'elle réalisa qu'elle tremblait légèrement. Pourquoi l'accusait-il d'être mêlée à des incidents qu'elle ignorait totalement ? Et pourquoi avait-elle l'impression que, malgré sa froideur apparente, il cherchait à la tester, comme si elle devait prouver qu'elle méritait sa place ici ?

En fin de journée, alors qu'elle partageait un café avec Claire dans la salle de repos, elle décida de lui parler de l'échange.

« Il m'a interrogée, comme si j'étais une criminelle, » confia-t-elle, encore troublée.

« Ah, ça. C'est classique Aurelius. Il teste tout le monde, surtout les nouveaux. Ne prends pas ça personnellement. Mais fais attention, Luna. Il n'est pas du genre à oublier ou à pardonner. Si tu veux durer ici, garde toujours ton professionnalisme et évite de trop attirer son attention. »

Luna acquiesça, mais une part d'elle savait que c'était déjà trop tard. Aurelius Voss avait posé son regard sur elle, et elle ignorait si c'était une bonne chose ou non. Une chose était sûre : sa vie ici allait être bien plus compliquée qu'elle ne l'avait imaginé.

            
            

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