Elle sait cuisiner. Et alors ! Si elle cuisine, c'est pour que nous autres nous venions manger dans son restaurant, non ! Alors, qu'a-t-elle de plus que moi ?
A mon arrivée à la maison, à Brazza, je vais sur Instagram pour regarder le profil de cette Béa de malheur. Et comme toujours, elle ne poste que des plats qu'elle a confectionnés. Il faut que j'aille sur le profil de sa petite sœur Sarah, pour voir une magnifique photo de famille, sur laquelle, mademoiselle Béa de mes fesses, pose aux côtés d'Emery, qui porte un bébé de quelques jours, avec mon fils Mathis sur les jambes de la fameuse Béa.
Zut ! cette fille m'ulcère ! J'ai besoin de boire un verre sinon je vais la maudire ! Je lui ai mis mon fils dans les pattes, histoire qu'elle fuit en courant en se voyant confier cette charge. Voilà que j'apprends grâce à cette photo, qu'Emery et elle vienne d'avoir un enfant !
Il faut que je boive un bon whisky. Cette fille me donne des maux de tête !
Trois verres de whisky plus tard, je me retrouve à pleurer en remontant le fil des photos postées par cette petite. On y voit des moments de vie heureuse. Je m'attarde sur le visage de cette Béa à qui j'ai envie de crever les deux yeux. Il faut que j'aille à ce mariage. Il faut que je le vois de mes propres yeux.
C'est décidé, je vais prendre l'avion pour Cape Town.
Je me lève du sol pour me rendre dans la chambre. J'ai la tête qui tourne. Je trébuche et atterris par terre, sur les fesses. Ça fait tellement mal que je décide de rester là, sans bouger.
A Cape Town en cette fin février, le soleil est au rendez-vous. Grâce à la générosité de mon cher Peter Makaya Mabik, je peux me payer un séjour ici dans un bel hôtel. Il m'a dit qu'il me rejoint dès ce soir. Ça me laisse le temps d'arriver sur les lieux de la cérémonie du mariage de Béa et Emery. Je vais tout péter là-bas et rappeler à Emery que la femme de sa vie, c'est moi.
Quand j'arrive sur place, je suis vêtue d'un tailleur Channel que je me suis acheté à Bruxelles grâce à l'argent de Peter. Je suis obligée d'enlever mes chaussures, car la connasse qui s'apprête à dire oui à l'homme de ma vie, a choisi de se marier les pieds dans le sable, en bordure de mer.
Malheureusement pour moi, quand j'arrive et me glisse furtivement dans l'assemblée des invités, les deux tourtereaux se sont déjà dit OUI. Alors, je crie comme une folle. J'interpelle Emery et lui rappelle que c'est moi la femme de sa vie.
Deux gaillards arrivent et me prennent solidement par le bras, pour m'éloigner de la cérémonie. Ils me jettent carrément sur le sable en me disant :
- Il faut te faire soigner, toi ! Qu'est-ce qui ne va pas dans ta tête ?
Je reconnais Jerem, le petit frère d'Emery. Je lui dis alors :
- Qu'a-t-elle de plus que moi cette salope de Béa ?
Il ne prend pas la peine de me répondre, se contentant de repartir à la fête.
Mon téléphone sonne à ce moment. C'est Peter au bout du fil. Il me dit qu'il vient de virer cent mille francs sur mon compte bancaire pour que je m'achète un porte-jarretelle pour notre prochaine nuit ensemble.
Si seulement je pouvais lui dire d'aller se faire foutre !
Dans mon hôtel cette nuit-là, je vis en différé, le mariage d'Emery et Béa sur la page Facebook du prestataire qui a organisé le mariage.
J'ai déjà bu quatre whisky mais rien n'y fait. Quand Peter arrive de Libreville le lendemain à 13h, il est tout chaud bouillant. Je lui donne mon corps sans réfléchir. A chaque fois qu'il me demande si je le sens, je réponds positivement. Quand il me dit qu'il jouit, je lui dis que c'est pareil pour moi. Quand il me dit que mon cul est trop beau, je lui réponds qu'il fait des merveilles avec sa bite. Tout ça pour oublier que depuis qu'Emery est sorti de ma vie, rien ne va correctement.
********* Fin du retour dans le passé*********
3-
Peter est parti. La nuit est déjà bien installée dans le ciel de Libreville. Je décide de rester tranquillement dans ma chambre. Je vais sur Facebook. Je tombe sur le profil de l'amie d'une amie qui a partagé une publication.
Ce 14 février, l'amour s'invite à la table d'Iyona.
Venez diner en couple.
Vous aurez droit à une bouteille de vin gratuite et un dessert au choix.
C'est une formule à quarante mille francs par couple. Je vois que les affaires fonctionnent bien pour la connasse qui depuis un an est l'épouse d'Emery. Je décide de m'inviter à ce diner de St Valentin. Il ne me reste qu'à trouver un valentin pour cette soirée car je ne peux m'y rendre en compagnie de Peter. Il sera avec sa femme.
Je me prélasse pendant près de quarante-cinq minutes dans mon bain. Je sors de là et décide de me faire très belle pour me rendre à mon rendez-vous chez le concessionnaire à 10h. Je porte un tailleur robe très chic avec des escarpins à talons hauts de Jimmy Choo. Ces escarpins sont un héritage de ma relation avec Edgard Massala.
Je descends prendre mon petit-déjeuner tranquillement. Je suis à Libreville pour trois jours. Je n'ai pas pris la peine d'appeler mes parents pour les prévenir parce que je n'ai pas envie que mon père me fasse le bruit en me demandant d'aller chercher Mathis pour la journée. Je n'ai pas envie de prendre mon téléphone et d'appeler Emery pour lui demander de me laisser le petit. Je n'ai pas envie de passer la journée à entendre Mathis me demander « maman », comme si ce n'est pas moi qui l'ai mis au monde. C'est comme si je l'avais adopté et qu'il avait maintenant retrouvé sa mère biologique. Les enfants et l'ingratitude, ça fait un.
Bref ! Je me concentre sur le programme de ma journée. Je vais d'abord me faire faire les ongles. Ensuite, je fonce chez le concessionnaire. Si mes souvenirs sont bons, Peter m'a demandé de me pointer à 10h chez CFAO.
Je répète dix fois à haute voix : « A 10h à CFAO. »
J'arrive chez Charmaine, mon esthéticienne. Je viens là, rien que pour le kongossa, vu que toutes mes sœurs sont à l'étranger. Elle m'installe dans un fauteuil massant puis me dit :
- Laisse-moi m'occuper de toi.
Hum ! J'apprécie ce moment plein de cancans. Elle me parle de qui sort avec qui, qui a volé le mari de qui, qui a bastonné qui. Enfin, tous les trucs chauds des femmes de Libreville.
Quand je m'en vais de là, je me sens belle comme un bijou dans son écrin. Je décide de foncer chez le concessionnaire CFAO. Là, je m'y présente en disant :
- Bonjour. Je viens récupérer ma voiture. C'est mon époux qui m'envoie. Monsieur Peter Makaya Mabik !
Le vendeur me sourit et me dit :
- Oh, tout à fait, madame. Venez ! Votre mari nous a demandé de vous laisser choisir la voiture de vos rêves pour la St Valentin.
- D'accord.
Le vendeur m'entraine dans le hall d'exposition où l'on trouve des voitures plus grandes, plus belles, les unes des autres. J'en ai le tournis. Je regarde à gauche, à droite, devant, derrière. C'est bien simple : ce lieu est magique. Peter a vraiment voulu me faire rêver en m'envoyant ici. Je regarde le prix des différentes voitures. Ça varie de 35 à 65 millions de francs CFA. Je me tourne pour regarder le commercial qui fait son speech. Je finis par pointer du doigt la voiture la plus chère. Il s'agit d'un 4x4 Mitsubishi Pajero Sport de 7 places.
- Très bon choix ! me fait le vendeur qui sent que sa commission sera élevée.
Il me conduit dans son bureau pour me faire signer différents papiers. Il fait la photocopie de mon permis. Il me tend ensuite les clés du véhicule ainsi que la carte grise provisoire.
- Vous devriez avoir la carte définitive sous vingt jours.
- Merci monsieur. Puis-je partir avec ma voiture ?
- Bien sûr, madame. Vu que vous avez votre permis de conduire sur vous, la voiture est à vous. Pensez à la faire assurer, cependant.
Je n'écoute plus son baratin et me dirige illico vers cette voiture rutilante dans laquelle je vais pouvoir rêver. Quand j'y monte, l'odeur du neuf m'accueille. J'ai l'impression d'être au paradis. Je me sens tellement bien que je me dis qu'il faut que je fasse un tour du côté des Charbonnages pour voir la tronche que feront les connasses du quartier quand elles me verront descendre de voiture. Oui, les kongosseuses envieuses, ont besoin de voir Diane Oveng aujourd'hui. Elles-mêmes elles savent qu'on a peut-être jouer à la corde à sauter ou aux « jeux de prépare » (dinette) ensemble, mais ce n'est pas pour autant qu'on est au même niveau. Je vais leur donner de quoi parler. C'est ainsi que je change d'avis et décide de rendre visite à mes parents. Direction Les Charbonnages. Tant pis pour les yeux des kongosseuses envieuses !
Quand j'arrive dans la cité, je m'amuse à éclabousser deux ou trois personnes qui attendent un taxi. Je continue ma route sans me soucier de leurs insultes que je peux aisément imaginer. J'arrive à la villa de mes parents. Je me gare devant le portail et descend du véhicule dont je verrouille les portières à distance. Je prends le temps d'épousseter mon tailleur de sorte que les voisins me remarquent. Ça ne rate pas. Maman Janine, la voisine d'en face, arrive comme une flèche. Elle me sourit et déjà traverse pour venir m'embrasser comme si j'étais une bonne nouvelle. Je suppose que ses deux bêtasses de Filles, Pauline et Natacha sont quelque part dans la maison en train de me zyeuter par la fenêtre de leur chambre. Je demande de leurs nouvelles. C'est d'une voix fluette sortie d'une bouche édentée, que maman Janine me répond :
- Oh, tes copines ne sont plus là, oooh ! Natacha a trouvé un mari du côté de Bikélé. Il est gendarme. Pauline se marie le mois prochain avec un chanteur. Il s'appelle Monzer ou Monzer. Pardon, ce sont vos choses des jeunes, non !
Elle semble ravie de m'apprendre cette nouvelle, alors j'ouvre mon sac, compte vingt billets de dix mille francs, que je lui remets en titre de participation au mariage de sa fille. Elle sourit et me remercie chaleureusement en me demandant si c'est Edgard Massala, le fils de monsieur le ministre, qui m'a acheté cette belle voiture.
Je sourie et réponds :
- Ma mère, je travaille, non ? J'ai acheté la voiture avec mon salaire !
Elle me félicite et lance sur moi une pluie de bénédictions.
J'ouvre le portail de la villa de mes parents et entre en laissant les clés de ma voiture se balancer dans ma main droite. Dès que mes neveux me voient arriver, ils crient mon nom. Je demande où se trouve mon père. On me dit qu'il a fait un tour sur son terrain à Kango.
Ma mère sort alors de la maison pour voir pourquoi il y a autant d'agitation. Elle est vêtue d'une robe kaba et a les cheveux en bataille sur la tête. Je ne prends même pas la peine de la saluer. Je lui dis simplement :
- Angela, tu ne connais plus la route du salon de coiffure ? C'est quoi cette tête !
Elle tape dans ses mains et me dit :
- Pardon, oooh ! Faut laisser ça comme ça. Ici, c'est compliqué. Dès que je mets un petit rouge à lèvres ou même un tissage sur la tête, ton père me fait la guerre. Il s'imagine qu'un vieux corps comme le mien peut encore plaire.
Je hausse les épaules et lui lance :
- Pardon, Angela, monte dans la voiture. Il faut qu'on t'arrange, là ! ça fait un an qu'on ne s'est pas vues ! Je reviens et tu ressembles maintenant à une nounou-ménagère d'Akébé.
Maman tape dans ses mains et me dit :
- Attends, ma fille. Je vais vite mettre mes chaussures. J'arrive.
Je reste là à discuter avec mes neveux Noël, Lucas et Taylor. Ce sont les trois fils de 17, 14 et 11 ans, de ma sœur Hermeline. En partant en expatriation au Maroc, elle les a laissés ici chez les parents. En fait, c'est papa qui n'a pas voulu signer les papiers nécessaires pour que les garçons aient leur passeport. Il a vu comme un affront, qu'Hermeline décide de lui enlever ses petit-fils. Bref, une longue histoire. C'est difficile quand on fait les enfants hors mariage, avec des géniteurs irresponsables qui se barrent avant la naissance des enfants. Ma sœur Hermeline a vécu cela trois fois. Les trois fois, c'est mon père qui a légalement reconnus ses petit-fils.
J'ouvre mon sac et sors de l'argent pour les garçons. Je leur remets cent mille francs à chacun en leur demandant de ne rien dire à mon père.
- Vous pourrez vous acheter les baskets que vous me demandez tout le temps.
Ils sont tellement contents, qu'ils se dépêchent d'aller cacher leur argent.
Maman arrive. Je remarque qu'elle s'est brossée les cheveux. Je la taquine en disant :
- Angela, comment tu fais pour ne pas vieillir ! Je te signale que tu as sorti six filles de ton corps.
Elle sourit et me dit :
- C'est à cause des réflexions comme ça que ton père pense que j'ai encore des dragueurs.
J'éclate de rire et lui dis :
- Bon, on y va ! Viens voir à quoi ressemble mon carrosse.
Quad elle se retrouve face à ma voiture, son visage s'émerveille. La voilà qui tremble de tous ses membres. Elle contourne la voiture en la touchant comme s'il s'agissait d'un mirage. Elle me demande alors :
- Diane, elle est à qui cette voiture ? Tu t'es remise avec Edgard Massala ?
- Pardon ! Je ne peux pas retourner chez le plus vilain des punus ! Seigneur, maman ! Je suis sortie de là. Je ne peux pas te dire qui m'a offert la voiture mais sache seulement, que je suis au sommet. Je demande l'argent et on me donne. La voiture que tu as sous les yeux, c'est mon cadeau de la St Valentin.
Ma mère fait le signe de croix puis lève les bras au ciel en disant :
- Donc Dieu veille sur toi, Diane ? Dieux veillent.
Je souris et réponds :
- Dieu veille ! Allez, monte !
Quand elle s'installe au côté passager à l'avant, elle me dit :
- J'ai même peur de péter dans cette voiture tellement elle est belle !
C'est comme ça que je décide d'emmener ma mère d'abord chez la coiffeuse, puis dans un prêt-à-porter pour lui offrir des robes et des bijoux. Quand elle se sent belle dans la robe qu'elle s'est choisie, elle demande qu'on emballe les cinq autres. Elle choisit trois paires de chaussures, puis me demande si elle peut avoir un sac. C'est comme cela que nous tombons dans une boutique à Mbolo. He lui offre un sac Valentino qui est soldé à 140.000 CFA.
J'emmène maman manger chez Paul aux trois quartiers. Là, elle me demande :
- Diane, c'est qui le monsieur qui t'a offert cette voiture ?
Je souris et lui réponds :
- Hum ! Je ne te dirai rien. A la façon dont tes filles et toi m'avez critiqué quand je me suis retrouver avec Edgard Massala ! Tu as oublié que vous l'appeliez le sanglier tellement vous le trouviez laid ? J'avais honte quand il venait diner à la maison avec papa et que tes filles et toi, vous alliez dans la cuisine pour rire de lui.
Ma mère éclate de rire et me dit :
- Il était laid mais son argent était bon. J'ai encore le sac Balenciaga qu'il m'a ramené de votre voyage en Corée du Sud. Je me sens jeune et fraîche quand je sors avec.
Nous parlons de tout et de rien. Elle me raconte comment il est pénible d'attendre le paiement de sa retraite de secrétaire. Elle parle de mon père qui es infernal à vivre depuis que ses filles sont parties de la maison avec ses petites-filles et petits-fils.
- Papa aussi ! Il n'était pas fatigué du bruit ? Il n'était pas fatigué d'aller tous les samedis faire le pleins de biscuits à Mbolo pour tous les enfants. Quoi, ça lui manque de se réveiller tous les jours à 5h du matin pour déposer tout ce beau monde à l'école ?
- Ah ! Il aime le bruit des enfants.
Je secoue la tête simplement. Je change de sujet en mentant à maman :
- Je suis de passage pour la journée. Je prends l'avion à 21h pour Douala. Je tenais à te voir car ça fait quand même un an que je ne suis pas venue à Libreville.
TU PARLES ! J'étais là en week-end le mois dernier. J'étais là pour une semaine, il y a trois mois. J'étais en mission ici il y a 6 mois, pour deux semaines pleines. Je me suis simplement cachée dans Libreville parce que je ne voulais rendre de compte à personne.