Destin de femme
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Chapitre 5 Chapitre 05

Chap 5 : Nouveau régime

( <3 Likez avant de commencer et commentez après lecture ça me fait chaud au coeur et m'encourage <3 )

Quelques minutes plus tard, j'entends la porte s'ouvrir puis se refermer. Des pas se font entendre, je fais exprès de ne pas regarder dans sa direction lorsqu'il fait son entrée dans la cuisine.

Dans ma vision péripherique, je peux le voir debout à quelques pas avec ses mains dans ses poches, entrain de m'observer en silence. Je bois mon café à petites gorgées, continuant de faire celle qui ne l'a pas entendu entrer.

- Bonjour Kissi.

-...Bonjour, réponds-je, toujours sans le regarder

Il reduit en quelques enjambées la distance entre la table et lui, tire une chaise en face et s'asseoit. Il a la mine attachée et ne me semble pas avoir beaucoup dormi. De ses avant-bras, il prend appuie sur la table et me regarde froidement comme à son habitude. Je soutiens son regard deux sécondes avant de regarder vers la vitre. Je me suis toujours demandé ce que j'ai pu faire à cet homme pour m'attirer une si flagrante antipathie et ce depuis notre première rencontre.

Cela faisait sept mois que j'avais quitté mon Kimpese natal et m'étais m'installé chez Georges lorsque j'ai fait la connaissance d'Edouard, à l'époque étudiant à Bruxelles. À la demande de mon mari qui tenait à ce qu'il fasse enfin ma connaissance, Edouard devait venir passer une partie de ses vacances à Matadi. Je me souviens qu'avant son arrivée, comme toute belle-soeur, j'ai demandé à l'une des bonnes d'apprêter l'une des chambres d'amis et me suis moi-même mis aux fourneaux. Connaissant les caprices en matière de nourriture de Lucien et Gaëlle qui venaient régulièrement à la maison, je me suis dit que le fameux Edouard devait être pareil. Je me suis alors assuré de tout préparer avec le plus grand soin.

Lorsque Georges, Lucien et Gaëlle sont revenu de l'aéroport avec lui, je suis sorti sur la veranda les acceuillir. Ils ont désembarqué en discutant gaiement alors que les domestiques déchargaient la malle arrière. Je me souviens qu'il portait une chemise manches courtes légère sur un chinos et des slips-ons; ses yeux étaient cachés derrière des lunettes de soleil. Il dépassait ses deux grands frères d'une bonne tête et je me rappelle m'être dit in petto qu'il était plutôt bel homme. Tous ensemble, ils ont gravi les quelques marches et lorsqu'ils sont arrivé à mon niveau, Edouard a retiré ses lunettes et a pris la main que je lui tendais. Il m'a fait un petit sourire crispé et a rapidement retiré sa main de la mienne avant de détourner son regard du mien comme si me regarder trop longtemps lui était insupportable. C'est de là que sont partis regards hautains et attitudes froides que je subis encore à ce jour. Dieu seul sait ce que j'ai bien pu lui faire.

- Lève-toi et prépare-moi mon petit déjeuner, ordonne-t-il

Ah!

Je le regarde, interloquée.

-Pardon?

- Tu m'as entendu, dit-il

Je m'apprête à lui vomir quelque chose de vraiment acerbe qui lui causera des sérieux tournis pendant une bonne semaine, mais je me rappelle que c'est maintenant mon mari. Être en conflit avec lui ne me servira pas. Je me lève et me dirige vers le frigo.

- Et que dois-je faire pour sa majesté?

- Demande sans le sarcasme, merci.

Ce gars m'a vu entrain de le vampirer en rêve ou quoi? C'est quoi cette agressions matinale? Je prends une profonde inspiration avant de lui demander poliment ce qu'il veut.

- Du pain et du café noir.

Je referme le frigo que j'avais déjà ouvert et vais faire ce qu'il a demandé. À chaque fois que je risque un coup d'oeil dans sa direction pendant que je m'active, je le vois entrain de me regarder fixement. Le frère-ci ne serait pas psychopathe par hasard? Cela expliquerait ses agissements bizarres envers moi depuis que je le connais. Trop consciente de son regard sur moi, mes gestes se font maladroits au point où je manque de m'ébouillanter la main quand je verse du café chaud dans la tasse. Je place la tasse fumante, du pain, du beurre et du sucre sur un plateau que je vais poser devant lui avant d'aller reprendre ma place et me remettre à manger tout en évitant de regarder dans sa direction.

- Après les 40 jours de deuil, les filles et toi deménagerez chez moi à Kinshasa, je mets cette maison en location. Previens déjà l'école des petites.

J'avais sécrètement espéré qu'il nous laisserait ici pour seulement revenir de temps en temps vu qu'il a quelqu'un à Kin. Ne vivent-ils pas déjà ensemble? Nous imposera-t-il à cette femme? Je n'ai aucune envie que mes filles et moi allions vivre des situations ambigües.

- Mais Edouard, il serait...

- Il n'y a pas de mais, me coupe-t-il

- Mais nous emmener...

- Nawuti koyebis'o nini? ( Qu'est-ce que je viens de te dire?) me coupe-t-il encore, mais cette fois très durement.

-...

- Kissi?

- Oui?

- À mon plus grand malheur, tu es maintenant ma femme.

Je ne peux m'empêcher de me sentir blessée dans mon amour propre à l'entente de cette phrase.

- Et ce fait à lui seul me donne déjà assez des maux de tête. Donc, merci de ne pas en rajouter en me brandissant des caprices de fillette, continue-t-il

-...

- Il y a une chose sur moi que tu dois retenir dès le tout début et, ma chère, ouvre grand tes oreilles parceque je ne me répéterai pas: Si mon grand-frère te permettait de questionner ses décisions, eh ben, tu es désormais sous un nouveau régime où l'opposition n'a pas sa place. Je décrète, tu obéis, et ce sans tergiverser, compris?

- Compris.

J'avale rapidement le reste de mon petit déjeuner et me lève avec mon plateau que je vais déposer dans l'évier. Le coeur lourd, j'ouvre le robinet et mets un peu du savon liquide sur le frotteur avant de me saisir de la tasse encore un peu chaude que j'entreprends de frotter avec entrain, faisant passer toute ma frustration sur la pauvre chose en céramique. Lorsque je finis de faire ma vaisselle, je quitte la pièce et vais prendre place à la paillotte. Il fait encore froid mais cela ne me dérange pas. Je me laisse aller en arrière et contemple le ciel qui se fait de plus en plus clair, me demandant quand je pourrai aller chercher mes filles. Elles me manquent tellement. J'ignore à quel moment le sommeil m'emporte, lorsque je me réveille, le jardin est déjà baigné de soleil et je vois Mam' Lupita entrain de se brosser les dents avec entrain à l'aide d'une longue tige pendant que de l'autre main elle tient un gros gobelet en plastique.

Et moi qui croyais qu'elle avait quitté les lieux. Je la regarde faire, me demandant pourquoi elle s'obstine à ne pas vouloir se procurer une vraie brosse à dents. La bonne dame porte son énorme gobelet à sa bouche, regarde vers le ciel et se gargarise bruyamment avant de crâcher son eau sur mes fleurs. Phouè phouè phoueeee!

Je détourne les yeux car continuer à la regarder faire ses villageoiseries sur mes pauvres fleurs me poussera à parler et je sais qu'une dispute s'en suivra. Mon téléphone sonne, je le tire de ma poche et découvre que c'est mon petit frère Daniel qui appelle. Il n'a pu assister à la veillée funeraire que très brèvement car le devoir l'appelait. De deux ans mon cadet, il est celui qui a pris les rennes des affaires familiales à la mort de notre père, survenu quelques années plus tôt. Mes deux autres petits frères (des jumeaux), tous les deux étudiants à l'étranger n'ont pas pu faire le déplacement pour me soutenir.

Daniel et moi parlons pendant une dizaine des minutes avant qu'il ne raccroche.

- Donc dire bonjour aux gens c'est difficile? entends-je dire Mam'Lupita qui a fini de faire briller ses crocs.

- Bonjour Mam' Lupita.

- Garde ton bonjour! Hautaine un jour, hautaine toujours.

-...

- Chance, mes frères t'ont rapidement remis à ta place. N'est-ce pas tu allais déjà te serrer dans les kanga-daddy (pantalons slim) et te balader partout à Matadi?

Je roule les yeux et étudie éxagerement mes ongles pour lui signifier qu'elle peut prendre ses niaiseries et aller sauter du haut d'une falaise avec. Par la fenêtre de la cuisine, je vois ma mère assise autour de la table avec Mam' Liliane. Cela me rappelle combien je me suis montré désagréable avec elle hier soir. Je me lève et vais les rejoindre, ignorant Mam'Lupita qui continue de discourir sur comment on m'a bien remis à ma place.

- Bonjour, lancé-je en entrant dans la cuisine

- Bonjour, font ma mère et Mam' Liliane en levant les yeux de leurs bols de céréales.

Je tire une chaise sur laquelle je me laisse tomber.

- Mama?

- Oui ?

- Je suis vraiment désolée pour hier...mon language était déplacé.

- Ça va. C'est déjà oublié. Je rentre à Kimpese aujourd'hui. La femme de Daniel accouchera dans très peu, je dois être là pour l'aider. Je reviendrai pour la cérémonie du 40 ième jour.

J'ai un petit pincement au coeur, j'aurai voulu qu'elle reste encore une semaine ou plus. Peut-être que ce que je lui ai dit hier dans ma colère a influencé sa décision de vite s'en aller. Lorsque quelques minutes plus tard elle quitte la cuisine pour sa chambre où elle compte faire sa valise, je lui emboîte les pas. Silencieuse, elle plie soigneusement chacun de ses vêtements qu'elle place dans la valise ouverte posée sur le lit.

- Tu ne me dis rien sur ce qui va suivre? Ma nouvelle vie?

- Je te l'ai déjà dit hier. L'homme qui a herité de toi est quelqu'un de correct, les enfants et toi serez en sécurité, dit-elle tout doucement comme à son habitude.

Des fois, j'ai envie de la tenir par le col pour ensuite la sécouer comme un prunier juste pour la réveiller un peu de cette constante léthargie dans laquelle elle a nagé toute sa vie. Aussi loin que remontent mes souvenirs, elle a toujours été trop douce, trop molle, trop soumise et pas assez vocale. J'avoue que je me suis des fois surpris à souhaiter qu'elle ait été comme Mam' Lupita qui _même si je crois que c'est une sorcière_a un caractère bien trempé.

- Il veut qu'on aille vivre chez lui à Kin après le retrait de deuil.

- Hum.

- Mais je crains d'exposer les enfants aux éventuels clashes avec la femme qu'il a dans sa vie.

- Il sait ce qu'il fait. Il te faut juste connaître ta place. Demande-lui seulement de ne pas vous exposer à l'autre et tout ira bien.

J'abandonne. Je nourrissais sécrètement l'espoir qu'elle irait parler à Edouard histoire de le convaincre de nous laisser vivre ici.

- Il est dur avec moi, je doute qu'il m'écoutera.

- Il sera moins dur et plus gentil avec toi lorsque tu partageras sa couche. Ils sont tous comme ça. Il se fera plus souple, tu verras.

Ah!

L'idée que je vais devoir à un moment «cogner les choses laides» avec l'ice King ne m'avait pas traversé l'esprit jusques-là. Eh Dieu! Je frissone et chasse avec force les images qui commencent à prendre forme dans ma têtes.

- Tu dois lui être soumise comme tu l'étais avec Georges. Soumission, obeïssance, respect, savoir se taire quand il faut....

Elle blablate et blablate, je l'écoute à peine. Je suis encore sonnée par l'idée d'être intime avec Edouard. Lorsqu'au bout d'une heure ma mère s'en va, je sens une profonde tristesse m'envahir. Pour m'occuper l'esprit, je vais aider la bonne qui lave les vitres. Alors que je me tue à la tâche, j'aperçois Mam' Liliane entrain de parle à Edouard dans le jardin. Monsieur est en T-shirt, culotte et sandales et fait rêveusement tourner l'anneau de son porte-clés autour de son index pendant qu'il écoute sa tante. À un moment, ils rient tous les deux, je détourne les yeux et continue de faire briller la vitre devant moi. Après les fenêtres de la cuisine, nous passons à celles de la buanderie, mes mains commencent à me faire un peu mal mais je tiens bon.

- Tu devrais te réposer, entends-je derrière moi.

Je me retourne et tombe sur Mam' Liliane.

- Ça m'aide à ne pas trop réfléchir, murmuré-je en pointant vers la vitre couverte de mousse.

- Viens là, dit-elle en me prenant dans ses bras. Je me laisse aller en faisant attention de ne pas salir sa robe.

- Je dois partir mais si tu as besoin de quelque chose, tu m'appelles, ok?

Je fais oui de la tête. Je l'accompagne dans la cour où Edouard attend dans la voiture pour aller la déposer.

- Je passerai au shop sur mon chemin de retour. Tu as besoin de quelque chose? me demande ice king pendant que Mam' Liliane monte à bord.

Ah bon? Monsieur a trebuché sur un peu de gentillesse?

- Non, merci. Au revoir Mam' Liliane, dis-je avant de remonter rapidement les marches et de rentrer dans la maison.

Deux autres tantes qui ont passé la nuit s'en vont une trentaine des minutes plus tard, mais Mam' Lupita alias «son odiosité» est toujours là et ne m'a pas du tout l'air de quelqu'un qui est pressé de partir.

- Maaatyyyy! appelle-t-elle l'une des bonnes depuis le tv lounge où elle regarde ses groupes d'animation dont les sons endiablés de tam-tam je peux entendre de ma chambre où j'essaie de faire une sieste.

- Matyyyy!

- Maman!

- Je dois t'appeller combien des fois? Han? Apporte-moi mon manioc et les safous (les prunes). Reste-t-il encore du poisson salé dans le fidikola?

- Oui mam' Lupita.

- Bien. Tu m'en apportes avec mon manioc et mes safous avec un peu de piment.

- Entendu Tanti

Elle appelle le frigo «Fidikola». Ne me demandez pas pourquoi. Seul Dieu connait la réponse. Je me mets sur le dos et promène paresseusement mon regard dans la pièce, me demandant ce qu'on fera des meubles et autres vu que ice King compte mettre la villa en location. Des coups discrets frappés contre la porte me tirent de mes pensées. Je descends du lit, vais ouvrir et découvre Edouard sur le pas de la porte.

- Change-toi, on va chercher les filles. J'attends dans la veranda, dit-il avant de s'en aller.

Enfin une bonne nouvelle. Je vais rapidement troquer mon boubou contre une robe noire plus présentable avant d'attacher mon foulard en turban. Je mets des boucles d'oreilles et me maquille légèrement pour ne pas que les filles me trouvent trop triste. Je sors rejoindre Edouard qui lorsqu'il me voit, se lève de son siège et regarde ma robe, l'air désapprobateur.

- Va te changer, dit-il

Je le regarde la bouche ouverte.

- Pourquoi?

- Je t'ai dit d'aller te changer.

Je tourne les talons et regagne ma chambre en fulminant. Je me débarrasse de ma robe et trouve rapidement une blouse ample que je porte avec un pagne. Lorsque je regagne la veranda, monsieur n'y est pas. Un klaxon me fait regarder vers l'allée, je le vois, déjà installé dans la voiture. La mine attachée, je dévale les marches et vais border le véhicule.

Le trajet vers chez Gaëlle se fait dans le silence. Lui, le regard rivé sur la route et moi le visage tourné vers la vitre. Les filles sont aux anges lorsqu'elles nous voient, je les serre très fort contre moi, me disant intérieurement que même si le prix à payer pour ne jamais être séparée d'elles est vraiment lourd, elles en valent largement la peine.

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