-je voulais vous dire que j'ai tout apprécié de vous...
-....
-euh je veux dire votre scène théâtrale, votre manière de chanter et même de danser c'était vraiment magnifique. J'ai juste trouve la chanson un peu triste bien que je n'ai rien compris car c'était en langue...
-.....
-mais ce qui est sûr est que vous dansez divinement et merveilleusement bien
-m...merci bien Monsieur dis-je le regard toujours dirige vers le sol
-pardon l'entendis-je dire à l' instant en cherchant mon regard
Il avait les sourcils fronces remarquais-je quand je l'ai guette
-je...je...pour...pourquoi...
Pourquoi avais-je du mal à parler alors même que je savais dans ma tête ce que je voulais dire ? Je l'entendis sourire, ce genre de sourire un peu sonore. Je levais tout doucement vers lui, le guettais à nouveau...et j'aperçu son sourire.
-vous êtes charmante me dit-il en me dévisageant...très belle...vraiment une vraie beauté Africaine, j'en suis bouche-bée
Trop de mots dans son français que je ne comprenais pas depuis un bout de temps...
-je ne savais pas que les femmes d'ici étaient si belles continua-t-il de dire sous mon silence...mais vous êtes la plus belle de toutes selon moi
Je souris. Un vrai sourire... j'en étais moi-même surprise. Moi qui ne m'attardais pas sur les compliments des gens de sexe oppose d'habitudes...
-merci répondis-je
-mais je vous en prie, ce n'est que la vérité... Orlane c'est ça ?
-oui répondis-je
-très joli comme prénom, moi c'est Dimitri Nick Nganga
-enchante dis-je poliment
-moi de même...seulement je ne comprends pas pourquoi tu me caches ton visage depuis qu'on parle...
-ah Orlane...
J'eus un sursaut quand j'entendis mon prénom puis retirais ma main de celle de Dimitri en me retournant. C'était Patricia une fille avec qui je m'entendais bien et qui était mon partenaire lors des spectacles ou cérémonies organises au village, elle était plus grande que moi de quatre ans.
-oui Ya Patricia dis-je en me tournant totalement vers elle
-je ne savais pas que tu étais occupé dit-elle en regardant Dimitri avant de se tourner vers moi
-non ne vous en faites pas, ce n'est rien.
-j'aimerai parler avec elle un moment s'il vous plait.
Je m'excusais poliment auprès de Dimitri puis allait avec Patricia qui m'avait prise par la main et des qu'on arrivait elle enchaina directement en langue
-mais qu'est-ce que tu fais Orlane
-...
-c'est un homme de la ville et visiblement plus grand que toi continua-t-elle de dire
-je n'ai rien fait Ya Patricia, il est lui-même venu vers moi pour me féliciter...
-hum féliciter dans le noir comme ça dans un coin éloigné main dans la main?
-mais non je partais me nettoyer parce que j'avais beaucoup transpire hors il me suivait derrière
-Orlane, Orlane, Orlane... fit-elle en tenant son oreille, je ne veux pas des problèmes ici oh tu m'entends?
-.....
-on nous a demandé de rester polie et courtoise avec les gens de la ville comme toujours, c'est tout. Mais si un homme te dérange il faut le dire à tantine
-je sais Ya Patricia
-oui j'espère que tu sais toujours aussi ce qui est arrivé à Félicie...
Je la regardais toute calme. Bien sûr que je me souvenais très bien de cela. Félicie, une fille du village qui s'était faite enceinter par un homme de la ville qu'elle voyait en cachette a l'époque et qui l'avait abandonné une fois qu'elle lui avait dit qu'elle était enceinte de lui.
Ceci fut un grand déshonore pour ses parents, sa famille et même le village car ici une femme se préserve et ne doit avoir des rapports qu'avec son époux.
Quand une femme se retrouve enceinte hors du mariage on convoque tout le village et expose les faits a tout le monde, avant qu'on l'expulse du village huit mois après par le chef du village, huit mois après car tout le monde doit la voir grosse et elle doit être remplie de honte supportant les injures et regards des gens du village.
Une fois que les huit mois passent on la chasse donc du village. Les parents se doivent de supporter et ne peuvent rien faire car c'est la loi. Si les parents s'entêtent à garder leur fille au village en la cachant quelque part, qu'elle accouche et qu'on s'aperçoive de ce qu'ils ont fait, on ôte la vie de l'enfant devant la mère avant de la vendre comme esclave dans un autre village d'une autre tribu. Félicie était donc esclave dans un autre village tandis que les parents avaient été sous une punition décidée par le peuple pendant cinq ans.
-non je n'ai pas oublié dis-je
-tant mieux...bon les gens de la ville ont demandé que tu viennes chanter et danser encore...c'est pourquoi je suis venue te chercher. On y va...
Elle me prit par la main, je me retournais vers Dimitri qui regardait vers notre direction. Quand elle me vit le faire elle soupira
-je ne veux pas qu'on aille dire qu'on a pas été gentille ou qu'on s'est mal comporte, faut aller lui dire au revoir...juste au revoir je t'attends ici.
Je me dirigeais donc vers Dimitri.
-je suis désolée de vous avoir fait attendre
-non ce n'est pas grave...ça va ? Vous avez l'air triste tout d'un coup
Je ne pouvais certes pas voir mon visage mais j'étais consciente que je n'avais plus trop bonne mine. Peut-être parce que je m'étais souvenu de l'histoire de Félicie.
-non tout va bien, mais je dois partir en fait...
-mais je voulais faire connaissance avec vous
Je me retournais vers Patricia qui me regardait déjà avec insistance
-ce n'est pas possible
-mais pourquoi ? Elle a quelque chose à avoir ?dit-il en regardant Patricia
Je baissais juste mon visage...
-okay ce n'est pas grave on pourra le faire après. J'ai appris qu'il y'aura un moment ou vous allez nous parler de votre village. J'aimerai que vous soyez celle qui me parlera de votre village
-ce n'est pas du tout possible...
-il n'y'a rien de possible ici dans ce village ou comment ?...qu'est-ce qui est possible ici en fait ?
-ce n'est pas ça, c'est juste qu'on nous désigne pour parler du village mais a un groupe de personne que vous allez former avec vos frères et sœurs de la ville et non à une seule personne. Comprenez-vous ?
A peine j'eus fini de parler que la voix de Patricia se fit entendre « Orlane on t'attend pour danser là-bas ooo... »
-je dois partir. Au revoir monsieur dis-je poliment avant de me retourner et aller vers Patricia qui craquait visiblement
Nous rejoignîmes donc le peuple... des que ces derniers m'avaient aperçu ils acclamaient déjà et des coups de tam-tam retentirent... Je me mis donc à chanter et danser avant que ne vienne tantine pour dire que c'était l'heure où l'on devait former des petits groupes afin qu'on leur parle de notre village ou ils pourront poser toutes les questions qu'ils voulaient sur le village.
Tout cela faisait partie de moi et j'aimais bien le faire. C'est dès le bas âge (sept ans) que j'avais commencé à danser et chanter lors des cérémonies ou spectacles et plus de deux ans que j'avais commencé à parler du village aux habitants de la ville.
Papa était si fier de moi car je faisais partie des rares gens qu'on prenait dès l'enfance à cause de leurs talents. On dit ici au village que c'est un don et qu'on nait avec. C'est d'ailleurs comme à l'école, les professeurs me trouvaient tellement brillante qu'ils m'avaient présenté au concours au CM 1.
-ah Orlane je te cherchais...tu vois cet homme là-bas
Je portais mon regard là où était dirigé son doigt...mon cœur se mit a battre a l'instant. Pourquoi me montrait-elle Dimitri ?
-c'est là-bas que tu vas... tu parles des coutumes, du village, juste comme tu fais d'habitudes ou même mieux en fait...
-mais tantine Yvette on ne fait jamais cela...une personne parle a tout un groupe...
-je sais mais il a largement paye pour ça, une chose qui m'a surpris mais bon on a parlé lui et moi donc vas-y tout en sachant que tu as une très grande récompense qui t'attend ici ma fille
On ne nous payait jamais pour raconter l'histoire du village ou parler de nos coutumes...la seule occasion ou on se faisait de l'argent était quand on dansait, chantait ou faisait un théâtre, mais la...
-re-bonsoir
-hein ? Fis-je ne comprenant pas alors que j'étais arrivée à sa limite
Il sourit juste puis me demanda de prendre place. J'essayais de me contrôler car mon cœur battait vite. Je ne voulais plus bégayer devant lui. Ce n'était pas la première fois que je me tenais devant un homme.
-vous avez paye afin que je puisse vous parler de mon village ?
-oui et j'espère que ça ne vous dérange pas... j'hésitais un peu en le faisant car je ne savais pas comment vous le prendriez
Comment ça va me déranger ? J'allais recevoir de l'argent... « Une très grande récompense m'attendait » m'avait dit tantine
-non rassurez-vous Monsieur ça ne me dérange pas répondis-je
-mais moi il y'a quelque chose qui me dérange, le fait que vous m'appeliez Monsieur...je ne suis pas du tout vieux...je n'ai que vingt ans
-mais c'est par respect lui dis-je...ici c'est comme ça...
-non non...je ne veux pas de ça. Monsieur ? Non... et euh, pouvons-nous nous tutoyer ? Car le vouvoiement entre nous ne me convient pas non plus
Je fis oui de la tête et après avoir pris un grand souffle je commençais donc à parler du village mais sans vraiment le regarder car c'était dur et ca me stressait, je n'étais qu'à deux minutes de mon récit qu'il m'arrêta...
-ce n'est pas que ton récit m'ennui mais j'aimerai que tu me parles de toi, ta famille, tout ce que tu veux mais te concernant
-je ne parle jamais de moi dis-je tout simplement
-comment ça dit-il surpris
-je ne sais pas c'est comme ça...
-allé s'il te plait. On va dire ce sera une exception cette nuit
-je ne peux pas, désolé, ça ne fait pas partie de mes habitudes
-Okay c'est quoi ton nom complet...au moins ça je peux savoir non ?
Je poussais un soupire
-okay mais juste ca
Il me fit un sourire, je détournais le regard gênée...
-Mélodie Orlane Nzeli...
-Mélodie ? C'est vraiment joli comme prénom... je le préfère a Orlane. Je peux t'appeler par Mélodie n'est-ce pas ? Tu n'y vois aucun inconvénient ?
-non tu peux répondis-je
-merci
-et quel âge as-tu ?
-on a dit juste ça « mon nom au complet »...rien de plus
-non c'est toi qui as dit cela Mélodie, pas moi
Je souris. Il prononçait si bien mon prénom...
-alors ?
-quel âge me donnes-tu demandais-je
-maintenant tu veux que je devine dit-il dans un sourire peu sonore
-oui... je sais déjà l'âge que tu me donnes mais je veux l'écouter
-waouh ! Fit-il... tu es sérieuse ? Tu veux que je devine ?
-je sais que dans ta tête tu as déjà un âge pour moi
-tu es dangereuse toi me dit-il...donne-moi une minute le temps que je puisse revoir si cet âge te convient
Il me regarda un moment dans les yeux. J'avais certes du mal a le regarder mais m'efforçait de ne pas baisser les yeux. Il baissa ses yeux sur ma poitrine. J'étais à l' instant embarrassée et voulut me couvrir les seins à l'aide de mes mains comme je le faisais toujours quand un homme me regardait ainsi mais il bassa son regard plus bas...avant de revenir sur mon visage.
-j'hésite entre quinze et seize...mais bon on va dire seize...
Je souris... j'en étais sur...c'est toujours cet âge qu'on me donnait surtout quand j'étais maquillée et vêtue de raphia...bien sur mes formes en étaient pour quelque chose...
-alors, c'est ça ou...
-non, j'ai... j'ai douze ans dis-je
-QUOI ?... non tu plaisantes dit-il en posant son regard sur mes formes avant de revenir vers mon visage
-j'aurai mes treize ans dans six mois, le 8...
Il resta calme et me regardait juste... le silence régna un bon petit moment. Je ne savais pas quoi dire ni quoi penser de ce silence...
-je euh...on peut continuer avec l'histoire de ton village me dit-il tout d'un coup ou euh écoute, je vais te libérer...va rejoindre un autre groupe un truc du genre
-mais pourquoi demandais-je triste...
-j'ai un truc à faire me dit-il en se levant tout en faisant mine de sourire avant de partir...
Tant de gens se trompaient souvent sur mon âge et étaient surpris quand je disais mon âge mais lui je ne sais pas pourquoi mais je regrettais à l' instant lui avoir donné mon âge. Je me sentais toute bizarre et j'avais mal a cause de sa réaction...
Tout le reste de la cérémonie, je n'étais plus vraiment moi. Je n'avais plus qu'une envie, rentrer chez moi et retrouver ma famille. Aux environs de vingt et une heures trente la cérémonie prit fin... on nous avait déjà remis les aliments qu'ils avaient apporté pour nous et qu'on était supposé partager entre nous.
Nous nous regroupâmes donc tous et voyaient les voitures partir une par une, la blanche que j'avais aimé était la deuxième à démarrer. J'avais voulu croiser le regard de Dimitri mais ne pus pas car sa vitre était montée et en plus noire...cette voiture était vraiment différente des autres.
-Orlane... dit tantine Yvette une fois qu'on avait partage les aliments a toute les familles présentes
Je m'approchais d'elle et elle nous conduit derrière un rideau. Je la vis mettre la main dans son soutien puis dans une calebasse.
-il se fait déjà assez tard et tantine Ernestine t'attend déjà dehors...faut prendre sa c'est ta récompense la...
Je regardais la main de tantine. Ce n'était que des billets de dix mille... ils étaient tous nouveaux en plus...
-y'en a dix ici, et cinq la...
Les yeux grandement écarquillés je regardais tantine qui me tendait l'argent...
-eh tu ne veux pas l'argent ou comment ?
-je...je...c'est...
-je comprends ton émotion fit-elle en m'ouvrant les mains pour déposer l'argent
Je regardais l'argent...il y'avait vraiment cent cinquante mille dans mes mains ? Dans mes mains a moi Melodie Orlane Nzeli ? Je me croyais vraiment rêver...même en un mois on ne gagnait pas ça...
-aussi il y'a une jeune demoiselle qui a donné ce sac la pour toi. Il y'a les aliments dedans mais je ne sais pas quoi exactement. Comme ça pèse trop tu pourras prendre ca petit à petit chaque fois que tu rentreras des cours. Tu commences bien les cours demain n'est-ce pas ?
-oui tantine mais tu ne prends pas un peu d'argent ?
Elle rit...
-quoi ?demandais-je
-tu es tellement gentille toi...j'ai aussi eu ma part dit-elle en mettant sa main dans la calebasse pour me montrer.
Je souris mais j'étais un peu triste. Il avait tant paye mais n'avait même pas jouit de cela. Je revoyais encore la manière dont il m'avait laisse toute seule à terre...
-bon maintenant vas-y dehors tantine Ernestine t'attend...pas un mot aux gens du village la qui parlent trop ooo ...attache bien l'argent dans ton pagne, faut pas ça va tomber.
-oui tantine...merci beaucoup tantine.
-allé, vas-y maintenant...tu dis bonjour a tout le monde pour moi là-bas. Je passerai demain
Je sortais donc de là ou on était et prenais mes affaires. Je ne cessais pas de sourire. J'étais si contente. Si contente de rentrer avec bien plus que ce que j'espérai. Tout cet argent que j'avais sans compter ce que j'avais pris à la hâte dans mon bol puis les aliments qu'on n'avait partagé entre nous et ce qui m'attendait dans le sac là-bas.
Jamais de toute ma vie, j'avais autant eu lors d'une cérémonie... j'imaginais la joie qu'aurait mon père cette nuit...