Le jeu d'amour ruineux de mon patron
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Chapitre 3

Point de vue de Chloé Dubois :

Grégoire a fixé la lettre de démission dans ma main, son visage habituellement gentil gravé d'incrédulité. Ses yeux, normalement doux, étaient écarquillés de choc.

« Chloé ? Qu'est-ce que c'est ? Tu es sérieuse ? » Il a parcouru le document, puis m'a regardée, le front plissé d'inquiétude. « Tu ne peux pas simplement démissionner. Pas après tout ce que tu as investi dans cet endroit. Tu es inestimable ici, Chloé. Tout le monde le sait. »

Ses mots, destinés à me rassurer, semblaient lointains, comme des échos d'une vie que je quittais déjà. Inestimable ? Pour qui ? Certainement pas pour Hugo, qui venait de me forcer à ramper devant son nouveau projet favori.

« Je suis sérieuse, Greg, » ai-je dit, ma voix plate. Mon regard a dérivé au-delà de lui, à travers la fenêtre, vers la ligne d'horizon lointaine de Paris. Elle semblait étrangère, détachée.

« Mais... pourquoi maintenant ? C'est à cause de la promotion ? Je sais que c'est dur, mais parfois ces choses prennent du temps. Hugo t'apprécie, Chloé. Vraiment. Il est juste... compliqué. » Grégoire essayait de lui trouver des excuses, tout comme je l'avais fait pendant si longtemps.

Hugo t'apprécie. La phrase était une pilule amère. Je me suis souvenue de ses promesses, de ses assurances murmurées lors de nos rendez-vous secrets au fil des ans. « Juste un peu plus longtemps, Chloé. Ensuite, on pourra être ouverts sur nous. Ensuite, tout changera. » Des mots vides. Tous.

Et maintenant, me voilà, presque 30 ans, avec rien à montrer pour mes années de dévotion qu'un cœur brisé, une carrière compromise, et une douleur constante dans le bas du dos. La voix de ma mère de la veille matin résonnait dans ma tête : « Un gentil architecte, une famille... » L'idée, autrefois anathème, ressemblait maintenant à un baume apaisant.

Grégoire a soupiré, un son lourd qui semblait porter le poids de sa propre impuissance au sein de cette machine corporative. Il connaissait les jeux d'Hugo, mais il était impuissant à les arrêter. Il a pris un stylo, sa main tremblant légèrement alors qu'il signait le formulaire.

« Écoute, Chloé, » a-t-il dit, sa voix baissant à un murmure bas, « je vais traiter ça immédiatement. Mais essaie de faire profil bas. Hugo... il ne va pas aimer ça. Fais juste tes deux semaines tranquillement. Évite-le si tu peux. »

Une légèreté étrange et vertigineuse m'a envahie. C'était fait. Les chaînes étaient brisées. Pour la première fois depuis des années, j'ai senti un souffle de liberté pure et sans mélange.

Mon téléphone a vibré. Un texto d'Hugo. « Chloé, ça va ? Tu avais l'air un peu bizarre tout à l'heure. On devrait peut-être reporter le dîner à ce soir ? Juste nous deux. »

Une lueur de sa manipulation habituelle. Il pensait probablement que j'étais encore blessée par la promotion et tendait la main pour me mener en bateau à nouveau. Mais le charme était rompu. Je voyais clair dans son jeu avec une clarté glaçante.

J'ai répondu : « J'apprécie l'offre, Hugo, mais je vais bien. Et non, merci. J'ai d'autres projets. » Les mots semblaient puissants, une frontière définitive tracée dans le sable.

Plus tard dans l'après-midi, alors que je rangeais quelques affaires personnelles de mon bureau, Camille s'est approchée, un sourire triomphant aux lèvres. « Devine quoi, Chloé ? Hugo vient de me dire qu'il organise un dîner de célébration pour ma promotion ce soir. Tu devrais venir ! Ce sera amusant. » Ses yeux brillaient d'une joie malveillante. Elle voulait remuer le couteau dans la plaie, parader sa victoire.

« Oh, je ne pense pas, Camille, » ai-je dit, ma voix calme, le dos tourné vers elle alors que je triais de vieux dossiers. « J'ai des projets. »

« N'importe quoi ! » La voix d'Hugo a retenti derrière moi. Il devait écouter. « C'est une célébration d'équipe, Chloé. Tu fais partie de l'équipe. Tu dois être là. » Son ton ne laissait aucune place à la discussion. C'était un ordre, pas une invitation.

Un goût amer a rempli ma bouche. Il n'essayait pas de m'inclure ; il affirmait son contrôle, s'assurant que je dépérisse sous le triomphe de Camille. L'ironie de tout ça. Il n'avait jamais célébré mes réussites, jamais une seule fois il ne s'était souvenu de mon anniversaire sans qu'on le lui rappelle. Je me suis souvenue de mon 27e anniversaire, il y a deux ans. J'avais laissé entendre une allusion subtile, espérant quelque chose, n'importe quoi. Il avait été trop occupé lors d'un voyage d'affaires « critique » avec le père de Camille. Il avait envoyé un texto laconique le lendemain : « Joyeux anniversaire en retard. J'espère que tu as passé une bonne journée. »

Maintenant, parce que Camille l'exigeait, il me forçait à endurer sa célébration. Mes sentiments étaient, comme toujours, sans importance. Tout comme il m'avait refusé le droit de faire le deuil de la promotion, il me refusait le droit à une sortie silencieuse et digne. Il essayait toujours de dicter mon état émotionnel, de contrôler mes réactions.

J'ai jeté un coup d'œil à Grégoire, qui observait l'échange avec une expression peinée. Il a subtilement secoué la tête, un plaidoyer silencieux pour que j'évite plus de conflits. J'ai expiré lentement. C'était mon dernier acte de soumission.

« Très bien, » ai-je dit, ma voix à peine audible. « Je serai là. »

Je le traiterais comme un adieu. Un dernier adieu amer à l'entreprise, à eux, et à la fille stupide que j'avais été.

Le dîner fut un tourbillon de sourires forcés et de verres qui tintent. Hugo et Camille étaient le centre de l'attention, riant, trinquant, leurs têtes rapprochées. Ils ressemblaient au couple de pouvoir parfait de l'entreprise. Et je me tenais en périphérie, observant, un étrange sentiment de calme s'installant en moi. Je voyais enfin la vérité. C'était son monde. C'était son genre de femme. Ambitieuse, impitoyable, et totalement dépourvue d'empathie sincère. Je n'avais pas ma place ici. Je ne l'avais jamais eue.

Quelques jeunes collègues, inconscients des courants sous-jacents, se sont penchés. « Wow, Hugo et Camille forment vraiment un duo de choc, n'est-ce pas ? » a chuchoté l'un d'eux, les yeux pétillants. « Ils sont si beaux ensemble. »

J'ai ressenti un étrange sentiment de détachement. Les mots ne m'ont pas piquée. Ils se sont simplement enregistrés comme un fait. « C'est vrai, » ai-je convenu, me surprenant de la facilité de ma voix. « Vraiment. »

Mon accord désinvolte les a fait marquer une pause, une lueur de confusion traversant leurs visages. Puis Camille, rouge de vin et de triomphe, a croisé mon regard. Son sourire s'est élargi, une lueur prédatrice dans ses yeux. « Alors, Chloé, » a-t-elle gazouillé, sa voix juste un peu trop forte, « des développements intéressants dans ta vie amoureuse ? Ou tu attends toujours le Prince Charmant ? »

            
            

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