Le monde a explosé dans un éclair blanc, puis est devenu noir.
Je suis revenue à moi avec un sac en toile de jute rugueux sur la tête. Le crépitement sec et grésillant d'un taser fut le seul avertissement que j'eus avant que l'agonie n'éclate dans tout mon corps. Les coups pleuvaient sur moi. J'ai senti des côtes se briser, j'ai goûté le goût métallique du sang dans ma bouche.
À travers le brouillard de la douleur, j'ai entendu la voix de Damien, froide et dénuée de tout charme. « Ce n'est qu'un début. Il faut qu'elle apprenne ce qui arrive quand on se fiche de moi. »
Le sac sur ma tête a été légèrement ouvert, et quelque chose a été déversé à l'intérieur. Des dizaines de petites choses grouillantes ont rampé sur mon visage.
Des araignées. Des tarentules.
Un cri primal a monté dans ma gorge, mais aucun son n'est sorti. C'était ma peur la plus profonde, la plus irrationnelle. Damien le savait. Bien sûr qu'il le savait.
Le sac a été refermé d'un coup sec. J'ai senti qu'on me soulevait, puis qu'on me jetait dans les airs.
J'ai heurté une eau glaciale et trouble avec un bruit écœurant. Le poids du sac m'a entraînée vers le fond, l'eau remplissant mes poumons, les araignées une horreur frénétique et rampante contre ma peau.
Juste au moment où ma conscience s'évanouissait, on m'a sortie de l'eau et jetée sur un sol boueux. Le sac a été arraché de ma tête. J'ai toussé de l'eau et de la bile avant de m'évanouir à nouveau.
Je me suis réveillée dans un hôpital. Un service pour les indigents.
Une infirmière se tenait au-dessus de moi, son expression un mélange de pitié et d'impatience. « Votre facture est en retard. Si vous ne payez pas d'ici demain, nous devrons interrompre le traitement. »
Je me suis extirpée du lit, mon corps hurlant de protestation, et j'ai marché péniblement vers le bureau des admissions. Au détour d'un couloir, je leur suis rentrée dedans.
Adrien et Damien.
Ils se sont arrêtés net, leurs yeux s'écarquillant de surprise en voyant mon état pathétique – la blouse d'hôpital déchirée, les ecchymoses fraîches sur ma peau, le sang suintant à travers les bandages sur mon dos.
« Ava ? » dit Adrien, le front plissé. « Qu'est-ce que tu fais ici ? »
J'ai juste fixé Damien, mes yeux brûlant d'une haine si pure qu'elle était une force physique.
« Ava, je te présente mon frère, Damien, » dit Adrien, faisant un geste entre nous comme si nous étions des étrangers.
Damien a affiché un sourire charmant et enfantin. « Enchanté de faire ta connaissance, » dit-il en tendant la main.
Un rire a jailli de ma poitrine, un son sauvage et hystérique qui tenait plus du sanglot que de la joie. Des larmes coulaient sur mon visage pendant que je riais.
« Reprends-toi, » claqua Adrien. « Et reste loin d'Ambre. Tu as fait assez de dégâts. »
Juste à ce moment, une infirmière a passé la tête par la porte d'une chambre voisine. « Monsieur Hoffmann ? Mademoiselle Nunez vous demande. »
Ils ont disparu en un instant, se précipitant au chevet d'Ambre sans un regard en arrière.
Mon téléphone a vibré. C'était un appel du bureau de l'administration militaire, officialisant le transfert que mon père avait arrangé. « Dr Lefèvre, votre vol part de Roissy-Charles de Gaulle dans deux heures. Une voiture vous attend en bas. »
J'ai raccroché. Je ne suis pas retournée dans ma chambre. Je ne suis pas allée au bureau des admissions.
Je suis sortie de cet hôpital, je suis montée dans la voiture noire qui attendait, et je suis allée directement à l'aéroport. Alors que l'avion décollait, laissant les lumières de la ville scintiller derrière moi comme une poignée de joyaux dispersés et sans valeur, je n'ai pas regardé en arrière.
J'étais enfin libre.