Enceinte de l'Alpha Interdit
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Chapitre 5 Chapitre 5

La voiture roulait dans la nuit comme une bête muette, avalant l'asphalte sans un bruit, ses vitres teintées isolant Lyra du monde extérieur. Assise à l'arrière, elle regardait défiler les lumières de la ville, chaque lampadaire semblant s'éloigner comme un rappel cruel de la liberté qu'elle venait de quitter. Raven, installé à ses côtés, restait d'un calme troublant. Son profil, sévère et sculpté dans la pénombre, paraissait fait pour inspirer l'obéissance.

Elle aurait voulu briser ce silence, mais ses mots s'étaient étouffés dans sa gorge dès l'instant où il avait prononcé la phrase qui ne laissait aucun choix : « Tu viens avec moi. »

Quand enfin les bâtiments s'espacèrent et que la route se fit plus étroite, Lyra comprit qu'ils approchaient d'un domaine à l'écart du monde. La grille de fer forgé, haute et menaçante, s'ouvrit dans un grincement qui résonna comme un avertissement. La voiture s'engagea dans une allée bordée de cyprès sombres qui semblaient former une haie de sentinelles. Chaque pas vers ce manoir lui donnait l'impression de plonger plus profondément dans un labyrinthe dont elle ne pourrait plus sortir.

Le manoir surgit enfin devant elle, imposant et austère, une bâtisse de pierres noircies qui portait la marque du temps mais aussi quelque chose de plus ancien, de plus inquiétant. Les fenêtres, hautes et étroites, diffusaient une lumière tamisée, presque irréelle, et la façade était gravée de symboles qu'elle ne comprit pas d'emblée.

Raven posa sa main sur le bas de son dos pour la guider lorsqu'elle descendit. Ce contact, bien qu'à peine perceptible, la fit frissonner. Elle aurait voulu se dégager, mais une force contradictoire la paralysait : la peur, oui, mais aussi cette chaleur sourde, cette attirance impossible qui la consumait malgré elle.

- Où sommes-nous ? demanda-t-elle enfin, sa voix tremblant légèrement.

Il la regarda avec cette intensité habituelle, comme si chaque syllabe qu'elle prononçait nourrissait un savoir secret.

- Chez moi. Là où tu seras en sécurité.

Elle éclata d'un rire bref, amer, qui se brisa dans l'air nocturne.

- Sécurité ? Avec vous ? Dans ce mausolée ?

Il ne répondit pas tout de suite. Ses yeux glissèrent sur elle, puis sur la bâtisse, comme s'il contemplait quelque chose qu'elle ne pouvait pas voir.

- Ce n'est pas qu'un simple manoir, dit-il enfin. C'est une forteresse contre ce qui rôde. Tu n'imagines pas encore ce qui te traque.

Lyra resserra son manteau autour d'elle. Elle n'aimait pas l'entendre parler ainsi, d'un ton si sûr, comme s'il détenait toutes les vérités. Mais en posant les yeux sur les murs, elle remarqua les gravures : des cercles, des runes étranges, des lignes entremêlées. Certaines brillaient faiblement, comme si elles pulsaient d'une lumière intérieure.

Un frisson la parcourut.

- Qu'est-ce que c'est ? murmura-t-elle.

Raven la fit entrer sans répondre. L'intérieur du manoir était vaste, décoré avec un raffinement presque irréel : tapisseries anciennes, chandeliers aux flammes vacillantes, meubles d'un autre âge. Mais partout, dans les recoins, sur les piliers, au-dessus des portes, les mêmes symboles revenaient, gravés, peints ou incrustés dans le bois.

Lyra s'arrêta net, ses yeux cherchant désespérément une explication rationnelle.

- Ce ne sont pas... de simples décorations.

Raven s'approcha d'elle, sa haute silhouette la dominant de toute sa présence.

- Tu as raison. Ces symboles sont des sceaux. Ils tiennent les Ombres à distance. Sans eux, ce lieu serait déjà englouti.

Elle eut un mouvement de recul, son dos heurtant la froideur d'une colonne.

- Vous parlez de ces... Ombres comme si elles étaient réelles.

- Elles le sont, répliqua-t-il, son regard noir transperçant le sien. Tu les sens déjà, n'est-ce pas ? Le froid qui te suit, les murmures que tu crois entendre, les cauchemars qui s'accrochent à ta peau. Tu ne peux pas les fuir, Lyra. Pas tant que tu portes mon héritier.

Ces mots résonnèrent dans sa poitrine, à la fois comme une menace et une vérité qu'elle ne pouvait plus nier. Elle se souvenait trop bien de la marque sur son flanc, du battement qui vibrait en elle.

- Pourquoi moi ? demanda-t-elle, sa voix à peine audible.

Raven resta silencieux un instant, puis s'approcha encore, si près qu'elle pouvait sentir son souffle, chaud et troublant, effleurer sa joue.

- Parce que ton sang a répondu au mien. Parce que tu portes ce que je n'ai jamais pu obtenir jusqu'ici : une chance d'hériter, une clé pour ouvrir ce qui a été fermé à ma lignée depuis des siècles.

Son cœur bondit, une panique sourde la saisissant.

- Qu'est-ce que vous voulez dire ?

Ses yeux brillèrent d'un éclat fiévreux, presque dément.

- Je veux dire que cet enfant est plus qu'une naissance. Il est le sceau qui brisera la malédiction. Avec lui, je ne serai plus seulement un héritier condamné. Je deviendrai Roi des Ombres.

Lyra porta la main à sa bouche, comme pour retenir un cri. Roi des Ombres. Ces mots sonnaient comme un écho venu d'un monde qui n'aurait jamais dû croiser le sien.

- Vous êtes fou... souffla-t-elle.

Il sourit, mais ce n'était pas la folie qu'elle y vit, c'était une conviction glaciale, une ambition qui brûlait d'une intensité effrayante.

- Peut-être. Mais même la folie a ses raisons.

Elle recula, ses doigts tremblants glissant sur le dossier d'une chaise pour s'y accrocher. Tout en elle criait de fuir. Pourtant, il y avait cette autre force, cette attraction qu'elle ne parvenait pas à refouler. Chaque fois qu'il s'approchait, chaque fois que sa voix grave effleurait son âme, son corps la trahissait. Elle le haïssait pour ça, et plus encore, elle se haïssait elle-même.

Il tendit une main vers elle, sans la toucher, mais assez près pour que l'air entre eux crépite.

- Tu peux me repousser autant que tu veux, Lyra. Mais ce lien ne faiblira pas. Tu ressens déjà ce que je ressens.

Elle ferma les yeux, les larmes perlant malgré elle. Elle aurait voulu nier, hurler qu'il se trompait. Mais son cœur battait trop vite, ses lèvres tremblaient de mots qu'elle ne voulait pas prononcer.

- Je ne... je ne veux pas de ça, murmura-t-elle.

Raven la contempla longuement, puis, dans un geste inattendu, il recula. Son visage retrouva son masque impénétrable.

- Peu importe ce que tu veux. Le destin a parlé. Et plus tu lutteras, plus l'attirance sera dévorante.

Elle resta figée, le souffle court, alors qu'il s'éloignait dans les couloirs du manoir, son ombre se confondant avec celles qui dansaient sur les murs. Lyra sentit ses jambes fléchir. Elle s'assit, les mains sur son ventre, le cœur en feu.

La peur la consumait. Mais dans ses entrailles, une vérité plus troublante se réveillait : malgré tout ce qu'elle savait, malgré l'horreur qu'il représentait, elle ne pouvait nier l'irrésistible magnétisme de Raven Duskbane.

Et c'était peut-être cela, la véritable malédiction.

                         

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