Mariée au PDG en Fauteuil Roulant
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Chapitre 3 3

Une dernière relecture de leurs notes, et elles quittèrent la rédaction en compagnie d'un photographe. Direction : le quartier financier. L'immeuble du Finnor Group, élancé et sobre, dominait les alentours. À la réception, elles s'annoncèrent, puis prirent l'ascenseur qui les hissa jusqu'au sommet du gratte-ciel.

À leur arrivée, une assistante, tirée à quatre épingles, les accueillit avec courtoisie :

- Vous êtes attendues. Monsieur Noël vous recevra immédiatement.

Vicky eut un léger sursaut en entendant ce nom. Noël ? Comme son mari... Hasard étrange ou coïncidence troublante ? Elle n'eut pas le temps d'y songer davantage.

Juste avant d'entrer, Sonia attrapa sa manche, visiblement nerveuse :

- Mes cheveux sont en place ? J'ai peur qu'ils soient ébouriffés...

Vicky, amusée, la rassura d'une voix douce :

- Détends-toi. Tu es parfaite. Rien ne dépasse.

Mais ses mots moururent sur ses lèvres alors qu'elle jetait un regard dans le bureau. La silhouette debout près des vitres capta aussitôt son attention. Elle se figea, muette, le souffle suspendu. Un sentiment d'irréalité la saisit.

Sonia suivit son regard et, à son tour, resta bouche bée. D'une voix à peine audible, elle souffla :

- C'est pas possible... Le président du Finnor Group... Il est en fauteuil roulant ?

Le fauteuil tourna lentement vers elles, révélant un visage d'une beauté presque irréelle. Sonia poussa un petit cri d'émerveillement.

- Il est magnifique... C'est une star de cinéma, ce mec !

Son regard brillait, captivé, oubliant en un instant la chaise roulante. Vicky, elle, n'entendit rien. Ses pensées étaient happées ailleurs, emportées par la tempête intérieure qui grondait.

La lumière filtrait par les vitres, sculptant des ombres tranchantes sur le visage de l'homme. Ses traits étaient empreints d'une froideur qu'elle connaissait trop bien. Son regard, dur et profond, l'atteignit en plein cœur.

Il n'y avait plus de doute possible.

Florian.

Le président de Finnor, c'était Florian.

La stupeur cloua Vicky sur place. Son souffle suspendu, elle ne put que contempler Florian, qui leur adressa un sourire à peine esquissé.

- Vous venez de Glamour, je me trompe ? Installez-vous.

La voix calme de Florian eut l'effet d'un déclic.

- Vicky, tu comptes rester debout toute la journée ? lança Sonia, l'extirpant de sa transe.

Vicky s'assit, un peu mécanique, à côté de ses collègues. Florian s'approcha, s'arrêta à bonne distance, le regard toujours aussi impassible. Sonia, elle, trépignait d'impatience.

- Monsieur Noël, pouvons-nous commencer ? demanda-t-elle, le ton enjoué.

- Je vous écoute.

Pas un mot, pas un regard pour Vicky. C'était comme si elle n'existait pas. Ou pire : comme si elle n'avait jamais croisé cet homme. Face à une telle indifférence, elle se mit à douter. Peut-être avait-elle confondu Florian avec un sosie parfait ? Et si cet inconnu n'était qu'un mirage, une coïncidence troublante ?

- Pour commencer, dit Sonia avec un sourire gêné, vous êtes très discret, ce qui ne fait qu'attiser la curiosité de nos lectrices... Pourriez-vous nous révéler votre nom complet ?

- Florian Noël, répondit-il simplement.

Ces deux mots, prononcés avec nonchalance, sonnèrent pour Vicky comme un couperet. Plus de place au doute. Il était bien son mari.

- Florian Noël... Quel prénom charmant ! intervint Jade, tout sourire. Nous avons préparé quelques questions pour vous.

Elle échangea un regard entendu avec Vicky, qui, toujours figée, contemplait Florian comme une apparition. Agacée, Jade lui pinça discrètement le bras.

- Aïe !

Vicky sursauta. Leur accord initial était pourtant clair : c'était elle qui devait mener l'entretien, pendant que les autres prenaient des notes. Devant le regard sévère de Jade, elle rassembla ses esprits, enfila son masque professionnel.

- Êtes-vous originaire de cette ville, Monsieur Noël ? demanda-t-elle.

- Disons... à moitié.

Rien ne semblait troubler Florian. Il paraissait aussi froid qu'un lac en hiver.

- Je suis né ici, mais j'ai quitté le pays très jeune pour A Nation.

Vicky dut se mordre la lèvre pour ne pas éclater de rire. Cet homme - son mari ! - lui parlait comme à une parfaite inconnue. Et elle, elle ignorait tout de lui. Pourtant, elle réprima son trouble : l'entretien devait continuer. Elle enchaîna les questions soigneusement préparées. Florian se montra coopératif, sans chaleur excessive, mais bien éloigné de l'image hostile véhiculée par certains articles.

Petit à petit, Vicky oublia le lien étrange qui les unissait. Elle se laissa happer par le rythme de l'interview. Jusqu'à ce que ses yeux tombent sur la prochaine question. Un nœud se forma dans sa gorge, l'air sembla se raréfier. Un silence inconfortable s'installa.

- Vicky, tu fais quoi ? murmura Sonia en la poussant du coude.

Un sourire crispé étira les lèvres de Vicky.

- Excusez-moi... Cette prochaine question est un peu... intime. Mais je suis sûre qu'elle intéressera vivement nos lectrices.

Ignorant le malaise qui la saisissait, elle prit une inspiration et lança :

- Êtes-vous un cœur à prendre, Monsieur Noël ?

Aussitôt les mots prononcés, elle le regretta. Quelle question ridicule... et inutile ! Si Sonia et Jade n'étaient pas là, jamais elle n'aurait prononcé cette absurdité. Le rouge lui monta aux joues.

Elle leva les yeux vers lui, anxieuse. Et là, il lui sembla apercevoir, juste un instant, une lueur ironique dans le regard neutre de Florian. Un éclat moqueur, vite éteint.

- Dites-moi, mademoiselle... vous en pensez quoi ? répondit-il d'un ton traînant.

Vicky déglutit difficilement. Cette interview risquait d'être plus longue que prévu.

Le pouls de Vicky s'accéléra brusquement à cette déclaration. « Ce que j'en pense ? Je n'ai même pas besoin d'y réfléchir ! » s'écria-t-elle intérieurement, bien qu'elle se contentât d'un sourire discret.

- Laissez-moi deviner... Un homme de votre trempe ne peut être que déjà marié, n'est-ce pas, Monsieur Noël ?

Elle détourna aussitôt les yeux, envahie par une sensation amère. Une culpabilité étrange, irrationnelle, lui nouait l'estomac. Puis elle se reprit violemment. Pourquoi devrais-je éprouver la moindre honte ? C'est lui qui m'a menti sur toute la ligne ! Il jouait la comédie comme si j'étais une étrangère ! Si quelqu'un ici devrait rougir, c'est bien lui.

Florian, de l'autre côté de la table, perçut ces fluctuations dans l'attitude de la jeune femme. Ses traits demeuraient impassibles, mais il n'échappa pas aux micro-expressions qui trahissaient le tumulte intérieur de Vicky.

Il savait, bien avant de franchir la porte de cette salle d'entretien, que c'était elle qui conduirait l'interview. En vérité, il n'avait accepté cette entrevue qu'après avoir appris qu'elle collaborait avec le magazine Glamour. Vicky, elle, croyait encore assister à une rencontre fortuite. Elle ignorait que Florian l'avait observée trois jours auparavant, au cours d'un rendez-vous arrangé qui ne s'était pas déroulé comme prévu. Il l'avait vue, persuadé alors de ne l'avoir jamais croisée. Et pourtant, quelque chose chez elle l'avait troublé.

La sensation persistante d'un visage familier l'avait poussé à demander une enquête à ses collaborateurs. Le hasard, ou peut-être le destin, l'avait replacée sur sa route au Bureau des Affaires Civiles. L'homme qu'elle devait épouser avait brillé par son absence, allant même jusqu'à l'humilier au téléphone. Fort de ces renseignements, Florian s'était avancé vers elle et lui avait proposé un mariage éclair. Ce matin, il l'avait taquinée, jetant l'hameçon sans attendre qu'elle morde. Ce qu'il n'avait pas prévu, c'était cette nervosité palpable, ce contraste frappant avec les informations recueillies sur elle.

D'une voix posée, sans la moindre émotion apparente, il lâcha :

- En effet, je suis marié. Cela remonte seulement à quelques jours.

Son regard s'attarda alors sur Vicky, dont le cœur rata un battement.

Avant qu'elle ne trouve quoi répondre, une exclamation théâtrale fendit l'air.

- Quoi ? Vous êtes marié, Monsieur Noël ? Toutes nos lectrices vont pleurer de désespoir ! lança Sonia, la collègue de Vicky.

Elle se redressa brusquement, feignant un air accablé.

- Dites-nous au moins... votre épouse, est-ce une héritière de grande lignée ? Une célébrité cachée ? Une femme de pouvoir ?

- Sonia ! réprimanda sèchement Vicky, en tirant sur la manche de son amie. Ce n'est absolument pas prévu dans notre trame d'entretien. Ce genre de questions est déplacé !

Florian, stoïque, ne laissa paraître aucune irritation. Il esquissa un sourire tranquille, choisissant de ne pas alimenter le sujet.

- Recentrons-nous sur les questions professionnelles, s'empressa de dire Vicky, souhaitant faire disparaître ce moment gênant dans le flot de l'interview.

Le reste de l'entretien fut méthodique, ciblé, professionnel. Chaque question touchait à ses fonctions, à sa vision, à la stratégie de son groupe. À la fin de la séance, Florian leur tendit la main, courtois :

- J'ai été ravi de cette entrevue avec Glamour Magazine.

Quand vint le tour de Vicky, il s'attarda une fraction de seconde. Son regard glissa vers la bague à son doigt. Un sourire en coin étira ses lèvres.

- Quel bijou ravissant, murmura-t-il.

Rougissante, elle retira précipitamment sa main, gênée, et s'empressa de quitter la pièce, escortée par ses collègues. Ce n'est qu'une fois dans le couloir que la tension la quitta peu à peu.

- J'y crois pas ! gazouilla Sonia. J'ai vraiment touché la main du PDG du groupe Finnor ! Je ne vais pas la laver de sitôt !

Vicky leva les yeux au ciel, prête à lui faire une remarque, mais s'arrêta en voyant s'approcher la secrétaire de Florian, les bras chargés de petites boîtes au design soigné.

- Bonjour. Monsieur Noël tenait à ce que chacun de vous reparte avec un petit présent. Merci de l'accepter.

Sonia, surexcitée, s'empara aussitôt de l'un des paquets.

- Non mais regardez-moi ça ! On a même des cadeaux ! Quel homme généreux, ce Monsieur Noël !

Elle souleva le couvercle, découvrant un élégant foulard en soie signé Chanel.

- La classe ! Je comprends pourquoi il est à la tête d'un empire ! En plus, on a toutes une couleur différente ! Allez, Vicky, ouvre le tien, je veux voir la tienne.

Vicky refusa d'un signe de tête, mal à l'aise. Mais Sonia insista, la harcela, la supplia avec un sourire enjôleur. Finalement, excédée, elle céda.

Elle ouvrit lentement le coffret. À peine eut-elle entrevu son contenu que son visage se figea. Un éclair de panique passa dans ses yeux. Elle referma la boîte d'un geste sec, précipité, empêchant quiconque de voir ce qui l'avait bouleversée.

            
            

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