Un Mariage de Façade, un Amour Interdit
img img Un Mariage de Façade, un Amour Interdit img Chapitre 1
2
Chapitre 6 img
Chapitre 7 img
Chapitre 8 img
Chapitre 9 img
Chapitre 10 img
Chapitre 11 img
Chapitre 12 img
Chapitre 13 img
Chapitre 14 img
Chapitre 15 img
Chapitre 16 img
Chapitre 17 img
img
  /  1
img

Chapitre 1

Le mariage de Jeanne Dubois avec Antoine Lefevre était l'envie de toute la capitale. Il était le jeune maréchal le plus prometteur du royaume, respecté de tous, d'une beauté froide et distante qui fascinait. Elle était la princesse, certes d'une lignée moins prestigieuse, mais connue pour sa douceur et son talent pour les arts. Leur union semblait parfaite, une alliance de pouvoir et de grâce. Dans l'intimité de leur manoir, cependant, la perfection n'était qu'une façade.

Jeanne aimait Antoine. Elle l'aimait d'un amour patient et silencieux, un amour qui se contentait de la moindre miette d'attention. Depuis deux ans, elle s'efforçait d'être l'épouse idéale. Elle gérait la maison avec une efficacité discrète, l'attendait chaque soir, peu importait l'heure de son retour, et s'asseyait en silence à ses côtés pendant qu'il travaillait, juste pour sentir sa présence.

Lui restait distant, poli mais froid. Ses touchers étaient rares, ses paroles mesurées. Il ne la regardait jamais vraiment. Jeanne mettait cette froideur sur le compte de son caractère réservé et de ses lourdes responsabilités. Elle se disait qu'avec le temps, il finirait par voir la profondeur de son affection.

Ce jour-là, une pluie fine et persistante tombait sur la ville. Jeanne avait appris qu'Antoine s'était rendu au temple abandonné sur la montagne ouest, un lieu que personne ne fréquentait plus. Inquiète, elle avait pris une calèche pour le rejoindre. Elle voulait simplement s'assurer qu'il allait bien.

En arrivant, elle vit sa monture attachée à un vieil arbre. Elle entra dans le temple délabré en silence. L'air était humide et sentait la poussière et l'encens froid. C'est alors qu'elle entendit des voix provenant de derrière l'autel principal. La voix d'Antoine, tendue, et une autre, celle d'une femme en pleurs.

« Antoine, je ne peux plus supporter ça ! Chaque fois que je la vois te regarder avec cet air d'adoration, j'ai l'impression de mourir. »

Jeanne reconnut immédiatement la voix. C'était Sophie, la sœur adoptive d'Antoine, une jeune femme à l'apparence fragile que tout le monde plaignait pour sa santé délicate.

Le cœur de Jeanne se serra.

La voix d'Antoine, habituellement si calme, était chargée d'une angoisse qu'elle n'avait jamais entendue. « Sophie, calme-toi. Personne ne doit nous entendre. »

« Comment veux-tu que je me calme ? Elle est ta femme ! Elle porte ton nom ! Et moi, que suis-je ? Je suis ta sœur aux yeux du monde, mais dans l'ombre, je suis ton amante. C'est un péché, Antoine, un péché qui nous consumera tous les deux. »

Jeanne porta une main à sa bouche pour étouffer un cri. Le sol sembla se dérober sous ses pieds. Amante ? Sa femme... et sa sœur adoptive ? La réalité de ces mots la frappa avec une violence inouïe.

« Je n'ai jamais voulu l'épouser, tu le sais bien, » répondit Antoine, sa voix vibrante de passion contenue. « C'était pour te protéger. Pour nous protéger. Si je ne l'avais pas épousée, notre relation aurait été découverte. C'était le seul moyen. »

Un souvenir remonta à la surface, clair et douloureux. Le jour de leur mariage. Elle, sous son voile rouge, le cœur battant d'espoir et d'amour. On lui avait dit que c'était un décret royal, une alliance politique. Elle avait cru que c'était le destin. Maintenant, elle comprenait. Le décret n'avait été qu'un prétexte. La véritable raison, c'était Sophie. Il l'avait épousée pour dissimuler un amour interdit.

Toutes les pièces du puzzle s'assemblaient. Sa froideur, son indifférence, les regards furtifs qu'il échangeait avec Sophie lors des dîners de famille, la façon dont il se précipitait à son chevet au moindre de ses malaises. Ce n'était pas de l'affection fraternelle. C'était de l'amour. Un amour passionné et coupable.

Jeanne sentit une douleur si intense dans sa poitrine qu'elle eut du mal à respirer. Son amour, sa dévotion, ses deux années de patience, tout cela n'avait été qu'une vaste blague. Elle n'était qu'un bouclier, un paravent pour leur relation incestueuse. Son existence même était un mensonge destiné à les couvrir.

Elle se souvint de leur première rencontre, des années auparavant, lors d'une partie d'échecs au palais. Elle l'avait observé de loin, fascinée par son intelligence et son aura de commandement. Elle était tombée amoureuse instantanément. Plus tard, apprenant son mariage avec lui, elle avait cru que ses prières avaient été exaucées. Quelle idiote elle avait été.

Elle avait passé des nuits à apprendre ses plats préférés, avait appris à jouer de la cithare parce qu'elle l'avait entendu dire un jour qu'il aimait la musique. Tout pour lui plaire. Et lui ? Il n'avait jamais remarqué. Ou plutôt, il n'avait jamais voulu remarquer.

Elle se rappela comment il parlait à Sophie. Sa voix s'adoucissait, ses yeux s'illuminaient. Avec elle, Jeanne, il était toujours bref et formel. « J'ai compris », « C'est bien », « Vous pouvez vous retirer ». Avec Sophie, il riait. Il lui parlait de ses journées, de ses soucis. Il lui offrait une part de lui-même qu'il lui avait toujours refusée.

Humiliée, trahie, le cœur en miettes, Jeanne recula doucement, pas à pas. Elle ne pouvait plus rester là. Elle ne pouvait plus respirer le même air que ces deux personnes. Elle sortit du temple et se laissa glisser contre le mur extérieur, la pluie froide se mêlant à ses larmes silencieuses. Le monde parfait qu'elle s'était construit venait de s'effondrer en un instant.

            
            

COPYRIGHT(©) 2022