« Monsieur, vous ne comprenez pas, » a balbutié l'employé. « Aucune compagnie ne prendra le risque. C'est une question de vie ou de mort. La gendarmerie a bouclé toute la zone. »
Le chaos a commencé à s'installer. Les téléphones ont été sortis, les voix se sont élevées. Chacun appelait ses contacts haut placés, ses assistants, ses avocats, exigeant l'impossible. Mais la nature ne répond pas aux ordres d'un PDG.
Au milieu de cette agitation, Alexandre a fait ce qu'il faisait de mieux : trouver un coupable. Son regard s'est tourné vers Chloé.
« C'est de ta faute ! » a-t-il craché, sa voix sifflante. « Si tu n'étais pas arrivée en retard pour ta stupide manucure, on serait déjà là-haut ! »
Chloé, surprise par l'attaque, a laissé échapper un petit cri. « Mais... Alexandre, ce n'est pas juste ! Comment pouvais-je savoir ? »
« Tais-toi ! » a-t-il aboyé, la faisant sursauter. Il s'est ensuite tourné vers moi, le doigt accusateur. « Non... c'est elle. C'est de sa faute ! C'est elle qui nous a fait perdre du temps avec son petit jeu de rébellion ! Elle savait ! Elle a fait ça exprès ! »
Les autres pères, désespérés de trouver un responsable à leur frustration, ont acquiescé. Leurs regards hostiles se sont tous concentrés sur moi.
« C'est vrai, » a dit l'un d'eux. « Elle nous a retenus ici, à discuter pour rien. »
Je suis restée silencieuse, les laissant s'enfoncer dans leur propre paranoïa. Je n'ai même pas eu besoin de me défendre. Ils se déchiraient déjà entre eux.
Alexandre, dans une tentative désespérée de reprendre le contrôle, a sorti son téléphone et a appelé son père. Il a mis le haut-parleur, sans doute pour nous impressionner tous avec la puissance de son nom de famille.
« Papa ? On est bloqués à l'aéroport de Genève. La météo. Il faut que tu fasses quelque chose. Envoie l'hélicoptère de la société, un hélico militaire, n'importe quoi ! »
La voix de son père, à l'autre bout du fil, était glaciale et furieuse.
« Tu es un imbécile, Alexandre ! Un parfait imbécile ! Je t'avais dit de régler cette affaire discrètement ! Pas de te pavaner dans les Alpes comme si tu étais en vacances ! Tu as attiré l'attention des médias avec cette histoire de "médiation" ! Et maintenant tu es piégé comme un rat ! »
Le visage d'Alexandre est devenu blême.
« Mais Papa... »
« Il n'y a pas de mais ! Personne ne peut rien faire ! Le président de la République lui-même ne peut pas arrêter une avalanche ! Tu m'as mis dans une situation impossible ! Débrouille-toi tout seul. C'est peut-être le moment pour toi d'apprendre ce qu'est la vraie vie. »
Et il a raccroché.
Le silence qui a suivi était assourdissant. Alexandre fixait son téléphone, l'humiliation se lisant sur son visage. Le roi était nu, et sa cour venait de le voir.
C'est le moment que j'ai choisi pour prendre la parole. Ma voix était calme, presque douce, contrastant avec la panique ambiante.
« Il y a peut-être une solution. »
Tous les regards se sont tournés vers moi.
« J'ai des contacts dans la région. Des gens qui travaillent dans des conditions extrêmes. J'ai anticipé que la situation pourrait devenir compliquée. J'ai pris mes dispositions. »
J'ai fait une pause, savourant leur attention suspendue.
« J'ai un hélicoptère privé qui est en attente dans une base voisine, de l'autre côté de la frontière. Il est équipé pour les vols en haute montagne et son pilote est l'un des meilleurs. Il ne décollera que sur mon ordre, quand il y aura une accalmie, même brève. Il ne peut pas prendre tout le monde, mais il peut faire plusieurs rotations. Si nous voulons sortir d'ici, c'est notre seule chance. »
L'espoir a remplacé le désespoir sur leurs visages. Ils me regardaient maintenant différemment. Non plus comme une victime, mais comme leur sauveuse potentielle.
Alexandre, essayant de sauver la face, a immédiatement tenté de s'approprier la situation. Il s'est approché de Chloé et lui a passé un bras autour des épaules, affichant un sourire confiant.
« Tu vois, mon amour ? Je t'avais dit que tout s'arrangerait. J'ai toujours un plan de secours. »
Chloé, rassurée, s'est blottie contre lui. « Oh, Alex, tu es merveilleux ! »
Ils se tenaient là, au milieu du chaos, rejouant leur petite comédie de couple parfait, persuadés qu'ils avaient, une fois de plus, échappé aux conséquences de leurs actes. Ils ne se doutaient pas que le vrai cauchemar ne faisait que commencer.