Amour Défendu, Vengeance Inassouvie
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Chapitre 1

Le téléphone a sonné, strident, brisant le silence pesant de mon appartement. Je n'ai pas regardé le nom, je savais déjà. Depuis une semaine, c'était le même cauchemar qui se répétait.

Jeanne Dubois, architecte paysagiste de renom. C'était moi, avant. Maintenant, j'étais juste la sœur de Paul. La sœur d'un criminel, selon eux.

J'ai décroché.

« Mademoiselle Dubois. »

La voix était grave, posée, pleine d'une autorité qui ne tolérait aucune discussion. C'était le père d'Alexandre de Varenne. L'homme dont le fils avait détruit le mien.

« Je pense que nous avons assez joué. Cette mascarade a assez duré. Votre frère est jeune, il a fait une erreur. Mon fils aussi. »

Une erreur. Il appelait ça une erreur. Orchestrer une fraude financière, faire porter le chapeau à un jeune homme naïf de dix-neuf ans, le jeter en prison comme un déchet, c'était une erreur. Paul, mon petit frère, que j'avais élevé seule après la mort de notre père. Notre père, un médecin humanitaire qui avait passé sa vie à sauver des gens, pour que son fils finisse broyé par des enfants de riches pourris gâtés.

« Je veux être raisonnable, Mademoiselle Dubois. Retirez votre plainte. Faites en sorte que votre frère admette sa seule culpabilité. En échange, je pourrai user de mon influence pour que sa peine soit... clémente. C'est une offre généreuse. »

J'ai senti une vague de froid me parcourir. La générosité. Le mot sonnait faux, obscène dans sa bouche. Il ne proposait pas un accord, il dictait une sentence. Il me demandait de sacrifier Paul pour sauver l'honneur de sa famille corrompue. Il me demandait de le condamner moi-même.

« Vous me demandez de laisser mon frère en prison pour un crime qu'il n'a pas commis ? » ma voix était un souffle rauque.

« Je vous demande d'être pragmatique. Vous ne pouvez pas gagner. Vous le savez. Qui êtes-vous pour vous opposer à nous ? Une simple architecte. Vos plaintes sont déjà classées sans suite. Les témoins que vous avez trouvés ont soudainement perdu la mémoire. Vous avez reçu des menaces, n'est-ce pas ? Considérez cela comme un aperçu de ce qui vous attend si vous persistez. »

Il n'a pas élevé la voix, mais chaque mot était une pierre jetée contre le mur de mon impuissance. Il avait raison. J'avais crié, j'avais supplié, j'avais frappé à toutes les portes. La police m'avait écoutée avec une politesse glaciale. Les avocats que j'avais contactés s'étaient désistés les uns après les autres, invoquant des conflits d'intérêts imaginaires. J'avais été suivie, mon appartement avait été "visité". Ils m'avaient humiliée, isolée, poussée au bord du gouffre.

Un souvenir a refait surface, brutal. La dernière fois que j'avais vu Paul, au parloir. Son visage, si jeune, marqué par la peur et l'incompréhension. Ses yeux qui me demandaient pourquoi. "Jeanne, je n'ai rien fait. Je te le jure. C'est Alexandre... il m'a dit que c'était juste un jeu, un moyen de se faire un peu d'argent facile. Je ne savais pas..." Il avait pleuré, et j'avais dû rester forte, lui promettre que je le sortirais de là, que la justice triompherait.

Des promesses vides. Des mensonges. J'avais échoué. J'étais seule.

Puis, une autre image s'est imposée. Mon père. Le jour de son départ pour sa dernière mission. Il m'avait serrée dans ses bras. "Prends soin de Paul, Jeanne. Et n'oublie jamais, même dans la nuit la plus noire, une seule petite lumière peut tout changer. Il faut juste savoir où la chercher."

La lumière.

Mon regard a été attiré par une vieille malle en bois dans un coin du salon. La malle de mon père. Celle qu'il ramenait de ses missions, remplie de souvenirs et de son travail. Elle n'avait pas été ouverte depuis sa mort. Je n'en avais jamais eu la force.

« Mademoiselle Dubois ? J'attends votre réponse. » a insisté la voix au téléphone.

Une nouvelle force, froide et tranchante, a surgi en moi. Ce n'était plus du désespoir. C'était de la rage. Une rage pure. Ils avaient sous-estimé une chose. Ils avaient sous-estimé l'héritage de Jean-Pierre Dubois. Ils avaient sous-estimé l'amour d'une sœur.

« Allez au diable. »

J'ai raccroché avant qu'il ne puisse répondre.

Mon cœur battait à tout rompre. J'ai marché vers la malle, mes mains tremblaient. Je l'ai ouverte. Une odeur de vieux papier et de médicaments s'en est échappée. À l'intérieur, sous des vêtements et des souvenirs, il y avait ce que je cherchais. Un carnet de bord à la couverture de cuir usée, et un paquet de lettres.

J'ai ouvert le carnet. L'écriture de mon père était fine, précise. Ce n'était pas seulement un journal de mission. C'étaient des noms, des dates, des lieux. Des transactions financières illicites. Du trafic d'armes sous couvert d'aide humanitaire. Des détournements de fonds destinés à construire des hôpitaux. Et parmi les noms, un revenait souvent, lié à des entreprises pharmaceutiques véreuses et des politiciens corrompus en Afrique et en Europe.

Le nom de la famille de Varenne.

Alexandre n'était pas juste un jeune délinquant. Il était l'héritier d'un empire bâti sur la misère et la mort. Mon père n'était pas seulement un médecin. Il était un témoin. Il avait collecté des preuves pendant des années, des preuves capables de faire s'effondrer des gouvernements et des fortunes. Les dernières lettres qu'il m'avait écrites, que je n'avais jamais lues, expliquaient tout. Il avait peur. Il savait qu'il était en danger. Sa mort, officiellement un "accident" en mission, prenait soudain un sens terrible.

Ils ne l'avaient pas seulement tué. Ils avaient essayé de faire taire la vérité avec lui.

Mais ils avaient oublié une chose. Ils avaient oublié sa fille.

J'ai refermé le carnet. La rage avait laissé place à une détermination glaciale. Ils voulaient une guerre ? Ils allaient l'avoir. Mais pas sur leur terrain. Pas dans leurs tribunaux corrompus. J'allais porter cette guerre sur la scène internationale. Là où mon père avait travaillé. Là où son nom était encore respecté.

J'ai pris mon ordinateur portable. J'ai réservé un billet d'avion.

Destination : Genève. Siège de l'Organisation Mondiale de la Santé.

            
            

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