[Compte à rebours avant la mort de l'hôte : 5 jours.]
Quand je me suis réveillée, la douleur dans mon poignet était lancinante. Mais mon esprit était étrangement calme. Cinq jours. Bientôt, tout serait terminé.
Henri est entré dans la chambre plus tard dans la journée. Il a posé un plateau de nourriture sur la table.
"Le médecin dit que tu es faible," a-t-il dit, évitant mon regard. "Mange."
J'ai souri faiblement. "Pourquoi te donnes-tu cette peine, Henri ? Tu as entendu le médecin. Je vais mourir."
Il s'est figé et s'est finalement tourné vers moi. Son visage était un masque d'incrédulité et de colère.
"Arrête de dire ça. Tu ne vas pas mourir. Tu es juste en train de manipuler tout le monde pour attirer l'attention, comme d'habitude."
Son déni était si absurde que j'ai presque ri. Il croyait vraiment que j'étais capable de simuler une mort imminente juste pour qu'on me remarque. Il ne me connaissait pas du tout. Il ne m'avait jamais vue.
"Pense ce que tu veux," ai-je dit, fatiguée de me battre. "Cela n'a plus d'importance."
Il a secoué la tête avec dégoût et est sorti de la pièce en claquant la porte. "Si tu veux mourir de faim, c'est ton choix."
Une fois seule, j'ai murmuré au vide, ou peut-être au système. "Tu vois ? Même si je meurs, il pensera que c'est une ruse. C'est sans espoir."
[L'hôte a-t-il des regrets ?] a demandé la voix mécanique.
"Des regrets ? Non. Juste de la fatigue. Je veux juste que ça se termine."
De ma fenêtre, je pouvais entendre les acclamations dans la cour. Je me suis traînée jusqu'à la vitre et j'ai regardé. Sophie se tenait sur un balcon, à côté de mon père. Elle levait les mains vers le ciel, et une douce lumière dorée semblait émaner d'elle, apaisant la foule. Les gens criaient "Sainte Sophie ! Déesse Sophie !".
Cette lumière dorée... C'était l'un de mes pouvoirs. Un pouvoir de "Bénédiction" que j'utilisais pour calmer les tensions dans la capitale. Comme tout le reste, Sophie se l'était approprié.
Un flot de souvenirs amers m'a submergée. La fois où j'avais passé des nuits à étudier d'anciennes cartes pour trouver une nouvelle source d'eau pour la ville frappée par la sécheresse, et où Sophie avait simplement pointé un endroit au hasard sur la carte en disant "J'ai eu une vision", s'attribuant tout le mérite. La fois où j'avais utilisé ma connaissance des herbes pour créer un remède contre une épidémie, et où Sophie l'avait distribué comme si c'était sa propre création divine. Toute sa réputation de "Sainte" était bâtie sur mes efforts, mes sacrifices. Et personne ne l'avait jamais su. Personne ne s'en était jamais soucié.
Plus tard, une servante est venue me chercher.
"Son Altesse Sophie demande votre présence. C'est l'heure de la prière nocturne pour la bonne santé du royaume."
Encore une mascarade. J'ai été forcée de m'habiller et de me rendre à la chapelle privée. Sophie était assise sur un trône doré, l'air pieux. Ma famille et Henri étaient agenouillés devant elle. Mon rôle était de m'agenouiller dans un coin sombre et de prier avec eux. La prière n'était pas pour un dieu, mais pour Sophie elle-même.
On m'a ordonné de veiller toute la nuit dans la chapelle froide, pour "prier pour la purification de mon âme pécheresse". J'étais trop faible pour discuter. Je me suis assise sur le sol de pierre, mon corps entier endolori. Le froid, la faim, la perte de sang... tout se combinait en une agonie sourde. J'ai fermé les yeux, attendant que le temps passe. Chaque minute qui s'écoulait me rapprochait de la fin. Et pour la première fois, la fin me semblait être une libération.