Les visages arrogants se tordent de peur. Les passagers se tournent vers Alan, leur "sauveur".
"Faites quelque chose !"
"Vous aviez dit que vous alliez régler ça !"
Alan est blanc comme un linge. Il me regarde, la haine et la peur se mélangent dans ses yeux. Il comprend que j'avais raison.
Alors il crie, pour couvrir le bruit grandissant du pont qui cède.
"C'est lui ! C'est sa faute ! Il a provoqué l'incendie ! Il voulait kidnapper Juliette pour la fortune de sa famille !"
Il fouille dans ma veste abandonnée au sol et en sort une lettre. Une fausse lettre de créance qu'il a dû placer lui-même.
"Regardez ! La preuve de son complot !"
La foule, désespérée, veut y croire. C'est plus simple d'avoir un coupable.
Mais une voix claire s'élève.
"C'est faux. Vous mentez tous."
Une jeune femme s'avance. Cecilia Fowler. Je la reconnais. La fille d'un petit producteur de vin, indépendant et respecté, mais dont l'entreprise est au bord de la faillite. Elle est la seule à avoir eu un mot gentil pour moi avant le désastre.
"Je l'ai vu," dit-elle fermement. "C'est cet homme, Alan, qui rôdait près du wagon-restaurant juste avant l'incendie."
La fureur de Juliette se tourne vers elle.
"Comment oses-tu, misérable fille de paysan ! Tu le défends ?"
"Gardes ! Attachez-la avec lui !" hurle-t-elle. "Ils mourront ensemble dans le wagon que nous allons détacher !"
Les gardes obéissent. Ils traînent Cecilia et l'attachent à côté de moi. Elle ne tremble pas. Elle me regarde avec une étrange détermination.
Alors qu'ils s'apprêtent à nous abandonner à notre sort, Juliette se penche vers moi. Son souffle est froid sur mon visage.
Elle murmure, pour que moi seul entende :
"La dernière fois, ta mort a été trop simple. Cette fois, je veux que tu brûles."
Le choc me frappe.
La dernière fois.
Elle se souvient. Elle aussi, elle est réincarnée.
Ce n'est pas seulement de la haine. C'est une vengeance planifiée.
Je la regarde, et pour la première fois, je ne vois plus la femme que j'ai aimée. Je vois un monstre.