Joseph Larson m'a jetée sur le sol froid du couloir, juste devant la porte de sa chambre nuptiale. Mon corps a heurté le marbre avec un bruit sourd, la douleur se propageant instantanément dans tout mon être. Il s'est penché, son visage beau mais glacial se rapprochant du mien, son souffle sentant le vin rouge cher.
« Juliette, ce soir, tu dormiras ici. »
Sa voix était basse, mais chaque mot était chargé d'une haine profonde.
« Tu écouteras attentivement comment je fais l'amour à ma nouvelle épouse, Carole. C'est le premier cadeau de mariage que je t'offre. »
Je portais une robe de servante ridicule, fine et humiliante, que Carole avait choisie pour moi. J'étais la demoiselle d'honneur à leur mariage, mais mon rôle était celui d'une esclave. Servir les invités, nettoyer leurs dégâts, et maintenant, servir de paillasson humain devant leur porte.
Il y a deux ans, nous étions fiancés. Joseph et moi. Nous nous connaissions depuis huit ans, depuis nos jours à l'école d'art à Paris. Il était le soleil de ma vie, et j'étais sa muse. Puis, sa sœur Ann a disparu, présumée morte dans un accident. Et Joseph a cru que j'étais la responsable.
Carole, ma meilleure amie de l'époque, a alimenté sa haine avec des mensonges bien placés. Elle a pris ma place, est devenue sa femme, et m'a transformée en son jouet.
J'ai enduré tout cela pour une seule raison : mon frère jumeau, Luc. Il souffre d'une maladie cardiaque génétique rare, la même qui coule dans mes veines. Il a besoin d'une transplantation cardiaque, une opération qui coûte une fortune. Joseph a promis de payer, à une condition : que je devienne son amante, sa chose, et que je subisse toutes les humiliations qu'il jugerait bon de m'infliger.
Alors j'ai accepté. Pour Luc.
Je me suis recroquevillée sur le sol, le froid me transperçant jusqu'aux os. De l'autre côté de la porte, j'entendais les rires de Carole, puis les sons de leurs ébats. Chaque bruit était une torture. Je fermai les yeux, essayant de penser à Luc, à son sourire. C'était mon seul réconfort.
Le lendemain matin, une femme de chambre m'a réveillée en me donnant des coups de pied.
« Lève-toi, paresseuse. Madame Carole veut son petit-déjeuner. »
J'ai servi Carole au lit, son visage rayonnant de bonheur. Elle m'a regardée avec un mélange de pitié et de triomphe.
« Juliette, ma pauvre amie. Regarde-toi. C'est triste. Mais ne t'inquiète pas, Joseph prendra bien soin de toi. »
Ses mots étaient du venin enrobé de miel.
Plus tard dans la journée, j'ai reçu un appel de l'hôpital. C'était le jour de l'opération de Luc. Mon cœur battait à tout rompre. J'ai couru à l'hôpital, l'espoir me donnant des ailes.
Je suis arrivée juste à temps pour voir les médecins sortir de la salle d'opération, leurs visages sombres.
« Mademoiselle Fowler, nous sommes désolés. Le financement de l'opération a été annulé à la dernière minute. Nous n'avons pas pu procéder. »
Le monde s'est effondré autour de moi. J'ai vu Joseph au bout du couloir, me regardant avec un sourire cruel. J'ai couru vers lui, le secouant par le col.
« Pourquoi ? Joseph, pourquoi as-tu fait ça ? Tu avais promis ! »
Il a attrapé mes poignets, sa prise de fer me faisant mal.
« Promis ? Je t'ai promis de te faire souffrir, Juliette. Maintenant tu sais ce que ça fait de perdre la personne que tu aimes le plus. Exactement comme j'ai perdu Ann. »
Luc est mort dans mes bras quelques heures plus tard. Son dernier souffle était un murmure, mon nom.
Mon monde s'est éteint. La malédiction de notre famille venait de s'activer. Les jumeaux Fowler ne peuvent survivre l'un sans l'autre. Si l'un meurt, l'autre le suit en sept jours.
Il me restait sept jours à vivre.