Je me réveille en sursaut. Le soleil filtre à travers les rideaux. C'est le matin. Le matin du jour fatidique.
L'horreur de ma première vie est gravée dans ma mémoire, chaque détail, chaque parole, chaque coup. Ce n'était pas un rêve. C'était un avertissement.
Cette fois, je ne serai pas la victime. Je découvrirai la vérité.
Je me prépare, le cœur battant à tout rompre. À la clinique, je récupère les deux mêmes enveloppes. Mon rapport de santé est parfait, comme la première fois. L'autre, le rapport d'analyse du vin, je le serre contre moi comme s'il contenait un poison mortel.
Luc est là, souriant. Le même sourire qu'avant. Un masque.
« Alors, ces résultats ? » demande-t-il, sa voix pleine d'une fausse chaleur.
« Tout va bien pour le bébé, » je réponds, ma voix tremblante.
« Et ton analyse ? Je suis impatient. »
Je serre l'enveloppe plus fort.
« Non. Pas maintenant. C'est un caprice, si tu veux. Je veux la lire seule d'abord. »
Son sourire se fane légèrement. De la méfiance apparaît dans ses yeux.
« Comme tu voudras, ma chérie. »
Je prétexte une envie pressante et me réfugie aux toilettes. Je m'enferme dans une cabine, les mains tremblantes. Je dois lire ce rapport. Je dois comprendre.
Mais l'enveloppe est vide.
Je fouille mon sac, paniquée. Rien. Il me l'a volée. Discrètement, habilement, quand il a fait semblant de m'embrasser.
La porte des toilettes s'ouvre avec fracas. C'est Luc. Il tient le rapport à la main, son visage tordu par la même haine que dans mon souvenir.
« Il faut avorter. »
La même phrase. Le même ton glacial. Le cauchemar recommence.
Mais cette fois, je ne suis plus la femme confuse et effrayée. Je suis une survivante.
Je ne réponds pas. Je me retourne et je cours. Je sors des toilettes et je crie de toutes mes forces en plein milieu du hall de la clinique.
« À L'AIDE ! MON MARI VEUT ME FORCER À AVORTER ! »
Ma voix résonne, aiguë de panique et de détermination.
« LE BÉBÉ EST EN PARFAITE SANTÉ, IL VEUT LE TUER ! »
Les gens s'arrêtent. Les conversations cessent. Une foule s'attroupe autour de nous. Des infirmières, des patients, des visiteurs. Tous les regards sont tournés vers nous.
Luc est pris au dépourvu. Son visage passe de la fureur à la panique.
« Elle est folle ! Elle ne sait pas ce qu'elle dit ! »
Une femme s'interpose. « Laissez-la tranquille ! Vous n'avez pas honte ? »
Un homme ajoute : « On devrait appeler la sécurité ! »
C'est à ce moment que mes beaux-parents arrivent, alertés par Luc. Ils voient la scène, la foule, mon visage en larmes.
Jean-Pierre se précipite vers Luc.
« Qu'est-ce qui se passe ici ? »
Luc, sans un mot, lui tend le rapport. La même scène. Le même déclencheur.
Le visage de Jean-Pierre se décompose. Ses yeux cherchent mon ventre. Il s'avance vers moi, la main levée.
« Sale garce ! »
Il me frappe. La gifle claque dans le silence du hall. La foule halète.
Cette fois, il n'y a pas d'Hélène pour l'arrêter. Elle est déjà en train de lire le rapport par-dessus son épaule. Son regard se glace.
Face à la réaction horrifiée de la foule, elle change de tactique.
« Elle est hystérique ! La grossesse lui monte à la tête ! Appelez une ambulance, elle doit être internée ! »
Mais il est trop tard. Quelqu'un a déjà appelé la gendarmerie. Les gyrophares bleus se reflètent sur les vitres de l'entrée.
Le piège s'est refermé sur eux.