L'article me dépeint comme une femme instable, une menteuse, une profiteuse qui, face à la perspective d'un enfant "à problème", aurait perdu la raison. On y parle de mon "passé modeste", on insinue que j'ai épousé Luc pour son argent. On me salit.
L'opinion publique se retourne contre moi. Sur les réseaux sociaux, je suis traitée d'adultère, de folle, de monstre. Les menaces pleuvent.
Je suis seule, dévastée, mais pas anéantie.
Au milieu de ce déferlement de haine, une main se tend. Une journaliste, Sophie. C'est elle qui était présente à la clinique, qui a vu la gifle, la peur dans mes yeux et la haine dans les leurs. Elle ne croit pas à la version officielle.
Elle me contacte discrètement. Nous nous rencontrons dans un petit café anonyme.
« Je ne crois pas un mot de ce qui est écrit sur vous, Amélie, » me dit-elle. « J'étais là. J'ai vu leur violence. Racontez-moi votre version. »
Je suis méfiante au début. Mais son regard est sincère. Je lui raconte tout. Le rapport, la maladie génétique, Antoine, le viol présumé. Je lui montre une copie du rapport d'analyse que la gendarme m'a laissée.
Sophie m'écoute, horrifiée mais professionnelle. Elle prend des notes, pose des questions précises.
« C'est une histoire monstrueuse, » dit-elle à la fin. « Mais sans preuve du viol, sans l'aveu d'Antoine, ce sera votre parole contre la leur. Et ils ont l'opinion publique de leur côté. »
« Alors que faire ? » je demande, le désespoir me gagnant à nouveau.
Sophie réfléchit un instant. Ses yeux brillent d'une lueur combative.
« On ne peut pas les attaquer de front. Il faut les piéger. Les pousser à avouer. Ils sont arrogants, sûrs de leur impunité. C'est leur faiblesse. »
Elle me propose un plan. Un plan audacieux, risqué. Utiliser leur propre arrogance contre eux.
« Ils pensent que vous êtes brisée, isolée, » dit Sophie. « On va leur faire croire que vous êtes prête à tout accepter pour qu'ils vous pardonnent. Vous allez demander à les voir, pour vous "excuser". »
L'idée de leur faire face à nouveau me donne la nausée.
« Je porterai un micro, » continue Sophie. « Je serai à proximité, avec un enregistreur. Il faut les pousser à parler de l'enfant, du rapport, de la raison pour laquelle ils voulaient s'en "débarrasser". Il faut qu'ils avouent savoir que l'enfant n'est pas de Luc, et qu'ils ont couvert l'agression de leur autre fils. »
C'est ma seule chance. Je dois trouver la force de rejouer la victime, de me confronter à mes tortionnaires. Pour mon bébé. Pour la vérité.
J'accepte. Le piège est tendu.