Le lendemain, mon corps n'était qu'une seule douleur.
Je me suis regardé dans le miroir. Mon visage était enflé, une coupure sur la lèvre, un bleu qui s'étendait sur ma joue.
Je ne pouvais plus continuer comme ça.
Je devais comprendre.
J'ai appelé ma tante maternelle, la sœur de ma mère décédée. Elle et mon oncle vivaient dans une autre région. Ils avaient toujours été gentils avec moi.
« Julien ? Mon chéri, comment vas-tu ? »
Sa voix était chaude, inquiète.
J'ai éclaté en sanglots. Je ne pouvais plus retenir.
« Tante Hélène... C'est encore arrivé. »
Je lui ai tout raconté. Chloé, la haine dans ses yeux, les coups de mon père.
Il y a eu un silence à l'autre bout du fil.
« C'est la troisième fois, Julien. Ce n'est pas normal. Ton père... il y a quelque chose qui ne va pas. »
« Je sais, » j'ai dit, ma voix brisée. « C'est ce caveau. Tout se passe là-dedans. Mais il ne me laisse pas y entrer. »
« C'est de la folie, » a dit mon oncle Marc, qui avait pris le téléphone. « On ne peut pas te laisser comme ça. On arrive. »
« Non, ne venez pas. C'est dangereux. Vous ne savez pas de quoi il est capable. »
« Et alors ? Tu es notre neveu. Le fils de notre sœur. On ne va pas t'abandonner. On sera là demain. »
Une lueur d'espoir est née en moi. Pour la première fois, quelqu'un me croyait. Quelqu'un allait me défendre.
J'ai passé le reste de la journée à travailler sur un violon, mes mains tremblantes. Le travail du bois me calmait, c'était la seule chose qui avait un sens dans ma vie.
Mon père est entré dans l'atelier. Il m'a regardé avec dégoût.
« J'ai appris que tu avais appelé ta tante. »
Comment le savait-il ? Il savait toujours tout.
« Tu penses qu'ils vont t'aider ? Tu penses qu'ils sont plus forts que moi ? »
Il a ri. Un rire sec, sans joie.
« Tu es tellement naïf, Julien. Tu es comme ta mère. »
Il a craché ces mots. Chaque fois qu'il parlait de ma mère, c'était avec ce même venin. Elle était morte dans un "accident de voiture" des années plus tôt. Un accident que j'avais toujours trouvé suspect.
« Laisse-les venir, » a-t-il dit en se tournant pour partir. « Ils verront par eux-mêmes. Tout le monde finit par voir la vérité à ton sujet. »