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Les jours suivants, tout était devenu flou. Comme un rêve dont on ne parvient pas à se souvenir clairement. Je retournais à ma routine, mais quelque chose avait changé. Une ombre m'accompagnait partout où j'allais, une présence invisible mais bien réelle. Ace. Et ses mots résonnaient constamment dans ma tête, comme un avertissement que je ne pouvais pas ignorer. Ce monde te rattrapera. Ce que j'avais ressenti cette nuit-là, son regard, ses paroles... Tout cela m'obsédait.
Mais, bizarrement, ce n'était pas la peur qui dominait. C'était l'envie. Une envie insatiable d'en savoir plus. De comprendre pourquoi il se tenait à distance, pourquoi il semblait vouloir me protéger de lui-même, et surtout pourquoi je ne pouvais pas m'empêcher de vouloir m'enfoncer toujours plus profondément dans son monde.
Ce matin-là, je me trouvais à un carrefour. Mon téléphone vibra dans ma poche, me tirant de mes pensées. C'était un message d'Ace.
"Je suis au coin de la rue. T'as cinq minutes ?"
Je m'immobilisai, déconcertée. Qu'est-ce qu'il voulait maintenant ? Après ce qu'il m'avait dit la dernière fois, je n'étais pas sûre de vouloir retourner dans ce monde de violence et de secrets. Mais en même temps, l'envie d'en savoir plus, de le comprendre, était plus forte que tout.
Je n'avais aucune réponse. Je me suis juste dirigée vers l'endroit où il m'avait dit de venir. Le coin de la rue. Un endroit banal pour tout le monde, mais pour moi, c'était devenu un lieu de confrontation avec mes propres désirs et mes peurs.
En arrivant, je l'aperçus. Il était là, dans l'ombre d'un grand immeuble, les bras croisés, son regard noir et intense tourné vers moi. Il semblait m'attendre depuis des heures, mais je savais qu'il était probablement resté là seulement quelques minutes.
"Tu m'as dit que tu avais cinq minutes. Je vais faire court." Sa voix était calme, presque distante. Ce n'était pas le ton qu'il avait eu la dernière fois, mais quelque chose dans ses yeux trahissait un fond d'énervement.
"Tu voulais quoi ?" demandai-je en me rapprochant. Je n'étais même pas sûre de ce que je voulais moi-même. Mais je le voulais.
Il haussait les épaules comme s'il n'avait pas vraiment de réponse à me donner. Puis il avança d'un pas, me frôlant presque. "Je t'ai vue hier soir. T'étais là. T'as pas compris ?"
Je savais de quoi il parlait. Je savais qu'il parlait de notre rencontre, de l'intensité de cet instant. Il voulait sûrement me dire que je n'étais pas faite pour ça. Qu'il n'était pas fait pour moi. Mais je n'avais pas envie d'entendre ça. Pas encore.
"Et toi, Ace ? Qu'est-ce que tu veux ?" Je le regardais droit dans les yeux, le défiant presque. Je savais que j'étais sur le point de franchir une limite, mais je n'avais pas peur.
Il sembla hésiter une fraction de seconde, puis soupira. "Ce que je veux... c'est te protéger. Mais je vois que tu n'en as rien à faire de ça."
Je plissai les yeux, ne comprenant pas tout à fait où il voulait en venir. "Je ne demande pas ta protection. Je veux savoir pourquoi tu me repousses constamment."
"Parce que tu n'es pas prête. C'est simple." Il secoua la tête, comme s'il parlait à un enfant. "Tu crois que tu veux ça, mais tu n'as aucune idée de ce que tu risques."
Je n'avais pas le temps de répondre, car il fit un pas en avant et se plaça juste devant moi. "Mais si tu insistes... Si tu veux vraiment savoir à quoi ça ressemble, à ce monde... Je peux te montrer."
Mon cœur s'emballa à l'idée de ce qu'il venait de proposer. C'était dangereux, c'était risqué, mais plus il m'en parlait, plus je sentais que c'était ce que je voulais, en dépit de tout ce qu'il m'avertissait. Une partie de moi savait que je n'étais pas prête, que ce monde n'était pas fait pour une personne comme moi, mais une autre partie de moi ne pouvait pas résister à l'appel de l'inconnu. De l'interdit.
"Je veux voir", soufflai-je.
Il observa mon visage pendant un instant, comme s'il cherchait à lire ce qui se cachait derrière mes yeux. Puis il détourna la tête, un léger sourire en coin. "D'accord. Mais ne dis pas que je ne t'ai pas prévenue."
Et là, pour la première fois depuis que je l'avais rencontré, il me prit par le bras avec une fermeté inattendue, m'entraînant dans la rue sombre qui se trouvait juste derrière lui. Je n'avais pas le choix que de le suivre, et pour la première fois, je ressentais une montée d'adrénaline dans mes veines. J'avais l'impression de m'engager dans quelque chose de plus grand que moi, quelque chose dont je ne pourrais pas revenir en arrière.
Il me guida à travers les ruelles étroites, ses pas rapides et sûrs. Tout autour de moi semblait s'assombrir. Nous nous arrêtâmes devant une porte en métal. Il la poussa d'un coup de pied et entra sans même vérifier si j'étais toujours derrière lui. Je le suivis à l'intérieur.
C'était une sorte de hangar. De vieilles machines, des tables de billard usées, des graffitis sur les murs, et une atmosphère lourde, presque électrique. Une musique assourdissante résonnait dans le fond, et je pouvais entendre des voix rauques qui parlaient fort.
Ace se tourna vers moi, son regard dur. "Bienvenue dans le vrai monde, Naya. Maintenant, tu comprends ce que je veux dire ?"
Je n'avais pas de mots. Ce n'était pas ce à quoi je m'attendais. C'était bien plus sombre. Bien plus réel. Mon cœur battait la chamade, mais une part de moi savait que je n'avais pas encore vu tout ce que ce monde avait à offrir. Et ça, je ne pouvais pas m'en détourner.