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Elle se força à reculer davantage, ses pensées se bousculant dans sa tête comme un tourbillon. Il était trop proche, trop présent, et tout ce qu'elle faisait, tout ce qu'elle disait semblait alimenter ce feu qu'il avait allumé en elle. Elle se sentait à la fois prise au piège et en colère contre elle-même de céder à cette pression invisible. Pourquoi ne pouvait-elle pas simplement s'éloigner, partir de cette pièce, reprendre le contrôle ?
"Tu as une idée de ce que tu ressens, Elisa ?" La voix d'Adrian vibrait d'un ton plus bas, presque insistant, comme si chaque syllabe était un défi jeté dans sa direction. "Tu essaies de te convaincre que tu es plus forte que ça, mais tout ce que tu fais c'est repousser l'inévitable."
Elle serra les poings, ses ongles s'enfonçant dans la peau de ses paumes. Elle savait qu'il attendait sa réaction, qu'il cherchait à la pousser, à la forcer à briser cette façade de contrôle qu'elle s'efforçait de maintenir. Mais il y avait quelque chose dans sa manière de la regarder, dans son attitude détachée mais pleine de sous-entendus, qui réveillait en elle une sorte de rage sourde. Il avait réussi à la rendre vulnérable, et ça, elle ne pouvait pas le supporter.
"Tu te trompes," dit-elle d'une voix tremblante, mais ferme. "Je n'ai pas peur de toi. Je te trouve... dangereux, voilà tout. Et c'est ce que tu veux, n'est-ce pas ?"
Adrian la fixa un instant, ses yeux brillant d'une lueur qui ne laissait aucune place à l'hésitation. Il ne disait rien, mais il n'avait pas besoin de parler. Son regard était une promesse, une promesse qu'il pourrait, s'il le voulait, briser toutes ses défenses, anéantir tout ce qu'elle avait construit autour d'elle. Il était là, dans ce moment précis, l'incarnation du défi, et elle, elle n'était qu'une pièce dans un jeu dont elle ne connaissait pas encore les règles.
"Je n'ai rien à prouver, Elisa," répondit-il enfin, son ton plus doux, presque complice. "Je suis juste en train de m'amuser. Mais toi... toi, tu as une vraie lutte à mener. Pas avec moi. Pas encore. Non, tu luttres contre toi-même."
Elle se détourna brusquement, incapable de supporter une seconde de plus cette proximité accablante. Son esprit bouillonnait. Qu'est-ce qu'il voulait vraiment ? Pourquoi la poussait-il dans cette direction, où tout semblait se confondre entre l'attirance et la haine, entre le désir et la rébellion ? Chaque mot, chaque geste de sa part semblait la contraindre à se dévoiler un peu plus. Mais elle n'était pas prête. Pas encore.
Elle s'approcha de la fenêtre, ses mains se posant sur le bord du cadre, cherchant à se recentrer, à se concentrer sur quelque chose de concret. Les lumières de la ville au dehors clignotaient dans la nuit, insignifiantes face à la tempête qui faisait rage à l'intérieur d'elle. Elle avait besoin de réponses. Elle devait comprendre ce qui se passait entre eux, pourquoi cette alchimie existait, pourquoi elle avait l'impression d'être prise dans une toile d'araignée invisible qu'il tissait autour d'elle.
"Tu crois vraiment que je vais tomber dans ton piège ?" demanda-t-elle sans se tourner, la voix tremblante, mais emplie d'une détermination renouvelée. "Tu penses que je vais te laisser gagner si facilement ?"
Adrian la rejoignit à quelques pas, sa présence imposante, silencieuse. Il ne répondit pas immédiatement, mais ses yeux s'attardèrent sur elle, sur sa posture, sur la manière dont elle se battait contre l'évidence. Puis il s'avança lentement, s'arrêtant juste derrière elle. Leurs ombres se mêlaient à la lumière tamisée de la pièce.
"Je ne veux pas te faire tomber, Elisa," dit-il enfin, sa voix proche, intime. "Je veux juste te montrer que tu n'as pas autant de contrôle que tu crois. Et plus tu essaies de le conserver, plus tu te rends compte que tu me veux autant que je te veux. Le plus grand piège, Elisa, c'est celui que tu te poses à toi-même."
Elle se tendit, sentant la chaleur de son corps à proximité, presque palpable, brûlante contre la froideur de son propre corps. C'était trop. Trop proche. Elle se retourna brusquement pour le confronter, mais il était déjà en mouvement, sa main effleurant brièvement son bras comme un contact furtif, mais qui la fit frissonner jusqu'au fond de son âme.
"Je ne suis pas une proie, Adrian," murmura-t-elle, sa voix à peine audible. "Je n'ai pas besoin de ton contrôle pour savoir ce que je ressens. Et ça... c'est quelque chose que tu ne peux pas me voler."
Un silence lourd s'abattit sur eux, et elle se rendit compte qu'elle avait bien plus à perdre dans cette danse que ce qu'elle était prête à accepter. La vérité, aussi brûlante qu'elle soit, commençait à s'imposer d'elle-même. Ce jeu... ce jeu n'était pas que celui de la séduction. Il était bien plus complexe, bien plus dangereux que ce qu'elle avait imaginé.
Adrian la regarda un moment, un sourire en coin naissant sur ses lèvres, puis s'éloigna sans un mot. Mais Elisa savait qu'il n'avait pas dit son dernier mot.
Elle resta là, immobile, son esprit en ébullition. L'air semblait soudainement plus lourd, comme si chaque respiration qu'elle prenait était chargée de cette tension palpable qui venait d'être créée entre eux. Les mots qu'Adrian venait de prononcer résonnaient encore dans sa tête, comme un écho lointain qu'elle n'arrivait pas à chasser. Il avait raison sur un point : il avait su la déstabiliser d'une manière qu'elle n'aurait jamais cru possible. Mais elle refusait d'être réduite à un pion dans son jeu. Elle ne le laisserait pas. Pas aussi facilement.
Elle se tourna à nouveau vers la fenêtre, le froid de la nuit la mordant légèrement. Le vent soufflait, faisant danser les rideaux de la chambre, comme une invitation à se débarrasser des chaînes invisibles qu'il semblait vouloir lui imposer. Mais Elisa n'était pas prête à se soumettre. Pas maintenant. Pas encore.
La porte s'ouvrit soudainement derrière elle, et elle tourna la tête, prête à répondre à une nouvelle provocation d'Adrian, mais c'était un autre homme qui entra dans la pièce. Un homme qu'elle avait vu à plusieurs reprises au bureau, mais qu'elle n'avait jamais vraiment pris le temps de connaître : Thomas, un collègue de longue date d'Adrian, toujours souriant, un peu trop exubérant parfois, mais qui semblait toujours prendre une place discrète dans l'ombre de son patron. Il se tenait là, dans l'encadrement de la porte, avec un regard amusé.
"Je vois que je dérange," dit-il, sa voix légère, mais avec une pointe de moquerie. "Je peux revenir plus tard si vous avez... des affaires à régler."
Elisa fronça les sourcils, observant Thomas avec méfiance. Il avait l'air détendu, mais quelque chose dans ses yeux trahissait une forme d'inquiétude, ou peut-être d'intérêt. Elle n'était pas sûre. Mais une chose était certaine : Thomas n'était pas là par hasard. Il avait probablement été envoyé par Adrian, ou peut-être que c'était lui qui voulait tester la situation.
"Non, tu ne déranges pas," répondit-elle, un peu plus sèchement que prévu. Elle se redressa, cherchant à regagner une partie de son calme. "Je pensais justement à autre chose. Il faut que je me prépare pour demain. C'est un long voyage."
Thomas s'avança d'un pas, jetant un coup d'œil furtif à la direction où Adrian s'était dirigé. "Oui, un voyage crucial, je crois. J'espère que tu es prête pour ça. Pas de pression, bien sûr." Il la fixa intensément, comme s'il attendait une réaction spécifique.
Elle le scruta un instant, puis secoua la tête. "Il n'y a pas de pression," dit-elle, bien qu'elle sache qu'elle mentait à la fois à lui et à elle-même. "Je gère."
Thomas sourit, un sourire qui ne semblait pas tout à fait sincère, avant de se détourner pour quitter la pièce. "Bien, alors je vous laisse à vos affaires. À demain."
Le moment où il ferma la porte derrière lui, Elisa sentit une fois de plus cette étroite pression sur sa poitrine. Quelque chose n'allait pas. Elle ne savait pas exactement ce que c'était, mais l'arrivée de Thomas avait eu le même effet qu'une intrusion dans son esprit, un petit dérapage, un écart dans la réalité qu'elle avait tentée de construire. Elle n'était pas seule dans cette situation. Et plus elle y réfléchissait, plus elle se rendait compte qu'Adrian avait sûrement tout orchestré, de A à Z. Il avait joué avec elle, mais il n'était pas le seul à manipuler les pièces.
Elle s'approcha de la fenêtre, ses yeux se perdant dans la lumière froide qui baignait la ville endormie en dessous. Elle savait qu'elle était dans un jeu bien plus complexe que ce qu'elle avait imaginé. Adrian était un homme capable de tout, de manipuler et de séduire avec une facilité déconcertante. Mais elle aussi avait ses cartes à jouer. Elle n'était pas sans défense. Et même si ce jeu était risqué, elle n'était pas prête à se laisser faire.
Elle pensa à ce qu'il lui avait dit plus tôt. "Tu luttres contre toi-même." Peut-être avait-il raison, peut-être qu'elle luttait contre son propre désir, sa propre curiosité. Mais elle savait aussi que ce combat, elle devait le mener seule. Si elle cédait, elle perdait. Si elle résistait, elle pourrait peut-être encore avoir une chance de sortir de ce jeu indemne.
Mais plus elle réfléchissait, plus une pensée la hantait. Ce voyage... cet étrange mélange de professionnel et de personnel... Cela n'avait rien de simple. Ce n'était pas juste un test pour elle. Adrian avait toujours un autre objectif en tête. Elle en était convaincue.
Elle tourna sur elle-même, se dirigeant vers la porte. Si elle voulait comprendre ce qui se cachait vraiment derrière ce jeu de séduction, elle n'aurait pas d'autre choix que de suivre le mouvement. Mais cela ne signifiait pas qu'elle devait se laisser dominer par ses règles. Ce serait elle qui dicterait la suite.
Dans cette pièce, tout était un jeu. Et dans ce jeu, elle comptait bien rester la dernière à sourire.