Chapitre 5 Chapitre 5

Chapitre 5

Céleste sentait la tension dans l'air, une pression sourde, prête à exploser à tout instant. Adrien n'était pas un homme facile à duper, mais elle avait joué son rôle avec soin. Il croyait avoir gagné, comme tous ceux qui la prenaient pour une naïve héritière. Mais elle savait exactement ce qu'elle faisait.

Elle feignait l'acquiescement. Elle souriait, elle hochait la tête, signait des papiers sans trop d'hésitation, tout en cachant dans l'ombre un piège juridique savamment dissimulé. La clause, bien que banale en apparence, lierait Adrien à un accord qu'il ne pourrait jamais briser sans risquer de perdre bien plus que ce qu'il croyait être son gain.

Adrien pensait qu'il l'avait prise au piège, que la candeur qu'elle affichait suffisait à la rendre vulnérable. Mais elle ne se laissait plus avoir. Elle avait trop souffert dans son ancienne vie pour se laisser manipuler une nouvelle fois.

Le contrat était là, sur la table, un simple morceau de papier. Mais dans son esprit, Céleste voyait les fils invisibles qui l'entouraient, tendus, prêts à se resserrer au moment propice. Un sourire en coin s'échappa d'entre ses lèvres alors qu'elle signait son nom.

Adrien, trop content de sa victoire, ne remarqua même pas l'habileté avec laquelle elle avait discrètement inversé les termes. Pour lui, tout était simple. Il ne voyait pas la toile qui se tissait autour de lui.

- Voilà, dit-elle en posant le stylo, je crois que tout est en ordre.

Il se pencha en avant, un air satisfait sur le visage. Il pensait que c'était fini, que Céleste n'était plus qu'un pion dans son jeu. Mais elle savait que ce n'était que le début.

Elle se leva, un léger frisson parcourant son dos. Elle avait joué sa première carte. Mais il lui restait encore beaucoup à faire pour que le piège se referme complètement. Elle savait que le plus difficile était à venir.

Son esprit s'égara un instant, cherchant la prochaine étape, quand une voix familière la fit sursauter.

- Vous semblez pensive, Mademoiselle Verlay.

Céleste se retourna, trouvant Alexandre à quelques pas d'elle. Il avait toujours cette présence imposante, mais quelque chose en lui avait changé. Il n'était plus simplement le conseiller financier qu'elle avait connu. Il était devenu un allié potentiel.

- Alexandre, dit-elle en le regardant droit dans les yeux.

Il sourit, mais ce n'était pas un sourire que l'on voit souvent. C'était celui de quelqu'un qui savait que des choses s'étaient passées, des choses qui ne seraient pas dites à voix haute.

- Vous m'avez l'air préoccupée.

Elle soupira, s'asseyant de nouveau sur le canapé.

- Je dois sécuriser mon héritage, Alexandre.

Il hocha la tête lentement, prenant place en face d'elle.

- Vous n'avez pas choisi le chemin le plus facile.

Elle le fixa, un éclat froid dans les yeux.

- Je n'ai jamais voulu que ce soit facile. Je veux juste que ce soit juste.

Il la fixa à son tour, scrutant son visage comme si chaque mouvement, chaque mot, portait un poids qu'elle seule connaissait.

- Vous savez que je peux vous aider, n'est-ce pas ?

Un silence s'installa entre eux, lourd de significations non dites. Elle pouvait lire dans ses yeux la promesse implicite : Alexandre était prêt à tout pour l'aider, mais il voulait plus que de simples remerciements. Il voulait une alliance.

Céleste prit une profonde inspiration.

- Je sais. Et je vais avoir besoin de toute votre expertise, mais...

Un éclat de défi traversa ses yeux.

- Je ne veux pas que cela vous coûte trop.

Alexandre sourit légèrement, mais cette fois, il était difficile de dire s'il était amusé ou satisfait.

- Vous êtes une femme prudente, Mademoiselle Verlay. C'est ce qui vous rend intéressante.

Elle détourna les yeux, une bouffée de frustration la traversant. Elle savait que, comme Adrien, Alexandre n'était pas un homme qu'elle pouvait facilement manipuler. Mais dans ce monde où les jeux de pouvoir se jouaient à coups de contrats et de promesses, il fallait savoir qui étaient ses alliés. Alexandre en faisait partie. Elle avait besoin de lui.

Alors que ses pensées se bousculaient, la porte s'ouvrit à nouveau. C'était Gabriel. Il entra avec cette grâce tranquille qui faisait écho à sa stature imposante. Il l'observa un instant avant de s'adresser à elle.

- Céleste, il faut qu'on parle.

Elle haussait un sourcil, mais ne se leva pas.

- J'imagine que vous avez vu Adrien.

Il se contenta de la regarder.

- Oui, et il semble assez... confiant.

Elle l'observa, cherchant à comprendre l'intention derrière ses mots. Gabriel n'était jamais direct. Mais aujourd'hui, il semblait plus pressant, plus intense.

- Vous avez votre propre idée sur la question, n'est-ce pas ? demanda-t-elle, la voix froide.

Gabriel s'approcha lentement, s'appuyant contre la table, les yeux fixés sur elle.

- Je sais ce que vous faites, Céleste. Et je suis prêt à vous aider.

Un frisson d'hésitation traversa son corps. Il n'y avait aucune méfiance dans sa voix, juste cette assurance tranquille qu'il possédait toujours.

- Pourquoi m'aider ? murmura-t-elle.

Il se redressa légèrement, un sourire en coin.

- Parce que j'ai vu comment vous jouez. Et je pense que nous pouvons nous entendre.

Il y avait quelque chose de trop... mystérieux dans sa proposition. Quelque chose qui la poussait à hésiter. D'un côté, elle sentait qu'elle ne pouvait pas le repousser. De l'autre, il y avait cette petite voix dans sa tête qui lui disait de rester sur ses gardes. Gabriel n'était jamais qu'un autre joueur sur ce terrain, et elle savait qu'elle ne pouvait lui accorder sa confiance aussi facilement.

Mais il avait un pouvoir, une influence qu'elle ne pouvait ignorer. Et c'était exactement ce dont elle avait besoin.

Elle s'assit de nouveau, les bras croisés sur la poitrine.

- Alors, quel est votre prix ?

Gabriel se pencha un peu plus près. Il était clair qu'il n'était pas pressé de lui dévoiler ses intentions.

- Nous verrons bien, Céleste. Nous verrons bien.

                         

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