Chapitre 2 Chapitre 2

La forêt s'étendait devant Aria comme une mer d'obscurité infinie, et ses pattes martelaient le sol avec une rapidité désespérée, ses muscles tendus sous l'effort. Elle n'avait pas le temps de réfléchir, seulement de courir. Derrière elle, les hurlements des guerriers de la meute se rapprochaient à une vitesse effrayante, leurs instincts de traqueurs aiguisés par des années de formation. Ils la connaissaient. Ils savaient qu'elle fuyait, et ils n'étaient pas prêts à la laisser partir aussi facilement.

Les arbres, complice silencieux de sa fuite, semblaient se refermer autour d'elle à chaque battement de ses pattes. Mais elle n'était pas stupide. Elle connaissait la forêt par cœur, chaque racine qui se dressait pour l'entraver, chaque buisson qui s'écartait pour lui offrir un chemin. Le vent soufflait en sa faveur, glissant sur sa fourrure et emportant avec lui le bruit de sa course. Elle sentait l'urgence dans ses veines, une brûlure presque physique. La distance se réduisait. Chaque seconde comptait.

Elle s'arrêta un instant, les sens en alerte. Les bruits étaient de plus en plus proches. Les guerriers étaient bons, bien entraînés. Mais ils ne connaissaient pas la rage qui l'habitait. Elle n'était pas simplement une louve en fuite. Elle était une femme brisée, une compagne trahie, un esprit furieux et blessé qui allait tout faire pour échapper à ceux qui avaient juré de la protéger, puis l'avaient abandonnée.

Son esprit vacilla un instant, la douleur de la trahison envahissant chaque fibre de son être. Liam... Ce nom, ce souvenir de ce qu'elle avait perdu, la fit presque vaciller sur ses pattes. Mais non. Elle repoussa cette faiblesse. Elle ne pouvait pas se permettre de faiblir maintenant. Elle se força à respirer profondément, son souffle saccadé, alors qu'elle bondissait en avant, traversant un ruisseau avec une rapidité étonnante. L'eau glacée la saisit un instant, mais ce contact rude fit renaître son esprit. Chaque seconde qui s'écoulait, elle gagnait en distance.

Les chasseurs avaient beau être aguerris, ils n'étaient pas encore capables de deviner ses intentions, ses stratégies. Chaque fois qu'elle sentait leur présence se rapprocher, elle changeait de direction, s'enfonçant plus profondément dans le sous-bois, où les racines se tordaient en pièges invisibles. Elle n'était plus qu'un esprit fuyant, une ombre dans l'obscurité.

Liam, elle ne l'avait pas vu de toute la soirée. Pas après... après ce qu'il lui avait fait. Mais il était là, quelque part dans la forêt, probablement en tête de la chasse. Il ne pouvait pas comprendre. Il n'avait pas conscience de la profondeur du déchirement qu'il lui avait infligé. Mais elle, elle savait. Il l'avait abandonnée pour une autre, la réduisant à rien de plus qu'un vestige de ses souvenirs. Et maintenant, sa meute, ses propres frères et sœurs, la pourchassaient comme une proie. Comme une traitresse.

Le vent souffla plus fort, emportant avec lui l'odeur de ses poursuivants. Elle n'avait pas le temps de se reposer. Le sol était dur sous ses pattes, et sa respiration devenait de plus en plus haletante, mais elle continuait. Chaque pas était un défi, chaque instant de plus sous cette lune impitoyable la rapprochait de la liberté, ou de la fin.

Elle tourna brusquement derrière un arbre massif, se plaçant dans l'ombre. Elle haletait, ses sens à l'affût, son corps vibrant d'une énergie prête à exploser. Elle attendait. Quelques instants passèrent, intenses, suspendus. Le silence était presque total, hormis les battements rapides de son cœur. Puis, elle entendit les bruits de pas. Lents, méthodiques, puissants. Les guerriers la cherchaient encore, mais ils ne savaient pas où elle se cachait. Elle pouvait sentir la pression monter, le danger qui se resserrait autour d'elle, mais elle ne bougea pas. Chaque souffle qu'elle prenait était mesuré, chaque mouvement précis. Elle était une ombre, une bête sauvage dissimulée dans l'obscurité de la forêt. Ils passèrent près d'elle sans la voir.

Elle ne bougea pas. Pas un muscle, pas un frémissement.

Leurs voix se faisaient entendre au loin, leurs murmures et ordres se croisant dans l'air lourd. Ils se dispersaient, trop confiants de la retrouver, sûrs qu'elle était quelque part à proximité. Ils la cherchaient, mais elle savait qu'ils ne la trouveraient pas. Pas comme ça.

Elle attendit encore quelques minutes, jusqu'à ce que le bruit de leur traque s'éloigne. Un soupir involontaire s'échappa de ses lèvres. Elle pouvait encore les entendre, mais ils s'éloignaient, leur chasse perdant de son intensité. Elle était encore en vie. Elle était encore libre.

Elle se remit en mouvement, plus silencieuse que jamais. Chaque décision, chaque mouvement était crucial. Elle devait sortir de cet endroit, quitter cette meute, tout effacer. Elle n'était plus une compagne, plus une protégée. Elle était Aria, la louve libre, l'âme écorchée mais vivante. Et tant qu'elle respirait, elle ne se soumettrait jamais.

Le sentier semblait se rétrécir au fur et à mesure qu'elle avançait, mais la nuit offrait sa couverture. La lueur de la lune filtrait à travers les arbres, éclairant vaguement le chemin qu'elle prenait. Elle savait qu'il lui faudrait quitter cette forêt, s'aventurer encore plus loin, là où même les guerriers ne la suivraient pas. Là où la meute de Liam perdrait sa trace. Un murmure intérieur lui disait que cette fuite ne se terminerait pas sans douleur, mais elle n'avait plus le choix. Elle n'avait plus d'autre alternative. Elle était devenue une fugitive, traquée, mais plus déterminée que jamais à retrouver sa liberté.

Elle s'éloigna de plus en plus des frontières de la meute, le sol sous ses pattes devenant plus boueux, plus instable. La forêt, bien qu'étrange et menaçante, semblait l'accepter à bras ouverts. Ce monde sauvage était désormais son allié. Elle l'avait toujours connu, mais jamais elle ne l'avait autant ressenti.

Elle s'arrêta enfin lorsqu'elle sentit un léger tremblement sous ses pieds. Un signe. Un danger imminent. Les guerriers n'étaient pas loin. Ils n'abandonneraient pas facilement. Mais elle avait gagné du terrain. Elle avait un temps d'avance. Le seul but désormais était de poursuivre sa fuite sans se faire rattraper, d'échapper à cette traque qui la rongeait de l'intérieur.

Elle ne reviendrait pas. Elle ne reviendrait jamais.

Aria n'avait plus la force de continuer. Le sol sous elle était dur, mais la douleur qui lui déchirait le corps et l'âme était plus forte. Chaque pas avait été un combat, et maintenant, épuisée et brisée, elle s'effondrait à la lisière du territoire d'une meute qu'elle ne connaissait pas. Ses pattes tremblaient, et la brûlure de ses blessures l'empêchait de bouger. La vision se brouillait autour d'elle, mais elle savait que si elle s'arrêtait maintenant, elle risquait de tout perdre. La traque n'était pas finie, mais elle n'avait plus la capacité de fuir.

Sa respiration devenait de plus en plus laborieuse, et les ténèbres semblaient se refermer sur elle, pourtant, une dernière lueur d'espoir persistait. Ce territoire appartenait à une autre meute, une meute étrangère, et elle n'avait aucune idée de la façon dont ils allaient la recevoir. Mais qu'importe, elle n'avait plus le choix. Elle attendait, tendue, chaque fibre de son être prête à réagir si elle devait se défendre. Le silence l'enveloppait, lourd et menaçant, et pourtant, il y avait quelque chose de presque apaisant dans cette solitude.

Les secondes passèrent, puis des bruits de pas perçaient l'air, suivis par un léger frémissement dans l'ombre. Une meute de patrouilleurs ennemis l'avait repérée. Ils approchaient avec la prudence caractéristique des loups habitués à traquer, mais dès qu'ils la virent, la surprise fit place à l'action. Il n'était pas habituel de trouver une louve, visiblement d'une autre meute, abandonnée et en si mauvais état. Ils se mirent en alerte, se divisant pour l'encercler avec prudence.

Aria tenta de se redresser, mais la douleur était trop intense. Elle se sentait faible, incapable de se défendre. Ces inconnus, ils pourraient être bien plus cruels que ceux de sa propre meute. Elle leva la tête vers eux, prête à faire face à son destin. Mais ses forces l'abandonnèrent enfin. Elle s'effondra sur le sol, sa tête heurtant le sol dur. Le dernier souffle qu'elle prit semblait celui de sa défaite.

Les patrouilleurs échangèrent quelques mots, mais aucun ne s'approcha immédiatement. Ils sentaient la dangerosité potentielle de cette inconnue. Elle n'avait pas l'air d'être un ennemi en quête de vengeance, mais elle était une inconnue, et cela suffisait à rendre chacun d'eux sur ses gardes. C'était un moment de grande tension, mais un seul d'entre eux, plus audacieux, s'avança. Il sentit son corps encore chaud, frémissant sous l'impact des blessures.

Il la souleva avec précaution, mais sans douceur, et la transporta dans la direction de leur Alpha. D'un signe de tête, il ordonna à ses compagnons de le suivre. Aria, bien qu'à peine consciente, sentit le mouvement, mais son esprit vagabondait, perdue entre le monde réel et la brume du semi-sommeil. Elle n'était plus qu'un fardeau pour eux, un poids qu'ils transportaient sans savoir ce qu'il deviendrait.

Une fois arrivée devant l'Alpha de la meute, la tension monta immédiatement. Ce leader n'était pas comme les autres. Il savait, instinctivement, qu'il ne devait pas sous-estimer cette louve. Il la regarda, étendue et brisée, mais il pouvait discerner en elle une certaine force, une volonté de ne pas se soumettre. Il attendait des réponses, mais la douleur et la fatigue l'empêchaient de lui en donner. Pourtant, une question flotta dans l'air : Pourquoi une telle louve se retrouvait dans cet état, sur le territoire d'une autre meute ?

            
            

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